Ile Madame : petit coin méconnu de l’Acadie

Île Madame, à peine 15 km de long et 8 km de large (129 km2), située au large du coin sud-est de l’île Cap-Breton, abrite une population de 4 000 habitants dont la moitié est acadienne. L’été dernier, lors du Congrès mondial des Acadiens, l’île a accueilli 1 300 Boudreau, Boudrot, Boudreaux et Boudreault et presque autant de Samson, David et Fougère. Les symboles acadiens sautent aux yeux dans chacun des villages et hameaux aux noms colorés : Arichat, Arichat ouest, Petit de Grat, D’Escousse et Petite Anse Même les poubelles ne sont pas épargnées.
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Comme il se doit en Acadie, la cathédrale porte le nom de l’Assomption. Sur un mur sont écrites les paroles de l’hymne régional composé par Paul D. Gallant : « Mon chez-nous c’est l’Acadie, Ma famille, mon village, merveille d’héritage, Acadie que j’aime tant! »
Ici, on ne parle pas d’école française ou d’école francophone, mais plutôt d’école acadienne. Cela doit être comme ça partout en Nouvelle-Écosse où un système scolaire de langue française contrôlé par les francophones n’existe que depuis une dizaine d’années. L’École Beau-port est l’une des quatre écoles faisant partie du Conseil
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scolaire acadien provincial à se situer dans la partie nord de la province, les autres se trouvant à Chéticamp, Sydney et Pomquet. De l’extérieur, l’école Beau-port ressemble à un vaste hangar, ce qui m’a été confirmé par la suite. Avant de devenir l’école acadienne de la place, il était question que l’édifice soit condamné à cause de la désuétude et de la moisissure. Au pouvoir, les Libéraux avaient promis une nouvelle école acadienne à Petit de Grat. Celle-ci devait avoisiner le centre communautaire, La Picasse, inauguré en 1997. Les Conservateurs,
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vainqueurs aux élections et encore au pouvoir aujourd’hui, ont préféré construire une nouvelle école anglaise à Louisdale et « retaper » le « hangar » pour les francophones. Malgré la vétusté des lieux, Mme Fougère et ses confrères concierges les gardent impeccables. À la suite de trente-cinq années de service aux écoliers de la province, Mme Louise Boudreau-Marchand prendra sa retraite cette année,. Militante de la première heure et ardente défenseuse du français, elle enseigne l’anglais à l’école Beau-port.
En Ontario français, il est certain que les gens auraient offert une résistance tenace devant la décision du gouvernement de leur refiler une école usagée et usée. Du moins, c’est là l’opinion de la Franco-Ontarienne, Mme Lacroix-Samson, qui a succédé en 2000 à son conjoint, Yvon Samson, comme directrice de la Picasse. En Ontario français, comme en témoigne le refus de la population franco-ontarienne d’accepter la décision du gouvernement de fermer l’Hôpital Montfort, la tradition de résistance est bien ancrée dans les moeurs. Telle n’est pas le cas chez les Acadiens de la Nouvelle-Écosse pour qui le drame de la Déportation se joue encore de nos jours.
Un peu comme à Fredericton, la construction d’une nouvelle école aurait sûrement contribuer à assurer le succès du Centre culturel, construit il y a dix ans au coût de 3 500 000$. Aujourd’hui, il exige les déboursées de 80 000$ par année pour le chauffer et l’éclairer. Le Centre est beau, fonctionnel et bien administré. Les 2 000 Acadiens de l’île sont choyés et les anglophones jaloux! Mais sont-ils assez nombreux et suffisamment convaincus de la valeur de leur langue et de leur culture pour le faire marcher à long terme? Déjà le taux de vacance inquiète.
Qu’y a-t-il dans ce centre? Des bureaux bien sûr pour les sept personnes qui y travaillent, un centre de francisation pour accueillir des enfants du pré maternel, une grande salle de spectacle (avec estrade) et de banquet, une cuisine industrielle, la bibliothèque municipale et une boutique aménagée à la mémoire de Ronald Landry (dit Gonzague), artiste local décédé récemment dans la fleur de l’âge. La magnifique fresque qui orne le coin de la boutique est de lui.
Pubnico, la baie Sainte-Marie, Pointe de l’Église, Digby et Grand Pré, pour diverses raisons, tous des lieux « acadiens » jouissant d’une bonne côte de reconnaissance des Québécois qui voyagent dans le sud de la province. Au nord, Chéticamp, sur la Piste de Cabot, et la forteresse de Louisbourg sont relativement bien connus. Et Île Madame? À l’écart et méconnue, mais si jolie, si douce, si agréable.