(http://www.zacharyrichard.com/francais/home.html)
M’avouant, dans sa loge 15 minutes après la tombée du rideau, être crevé à la suite de deux spectacles en autant de soirs, au cœur du Vieux-Québec, c’est néanmoins avec brio que Zachary Richard, ce formidable troubadour de la Franco-Amérique, a épaté les amateurs et admirateurs qui faisaient salle comble hier soir au Petit-Champlain pour l’écouter.
Revenant d’un accident cardio-vasculaire qui l’avait foudroyé en octobre dernier, l’artiste a invité l’assistance—non, a incité—, dès la première chanson, à « pagayer ». Et c’est ce que nous avons fait : ramer fort avec lui, du sud au nord, avec crochet rapide et tragique en Afrique.
À Québec, en ce moment, les jonquilles et tulipes essaient de percer. Le printemps tarde! Le paysage est encore défiguré par des bancs de neige (congères, diraient les Français) sales, gris, glacés, durs et dégoutants! Par sa chanson « Au tour du lac Bijou », Zachary nous rappelait qu’il existait bel et bien un printemps…depuis longtemps…en Louisiane! Puis, arrêts en Acadie, au « Cap Enragé » et à la « Petite Codiac ».
Ensuite, clin d’œil à la littérature québécoise, à l’identité québécoise, au roman du terroir, Maria Chapdelaine, la « Balade de François Paradis ». Perdu dans la tempête son grand amour, François, Maria a dû rester son choix sur l’habitant, Eutrope Gagnon, mais pourquoi pas Lorenzo Surprenant qui lui offrait des attraits d’une nouvelle vie parmi les siens en Nouvelle-Angleterre. Le troubadour n’en fait pas mention ce soir. Faudrait chercher ailleurs dans son répertoire la complainte « Massachusetts ».
Moment fort du spectacle, l’apparition surprise sur scène de Florent Vollant. Ensemble, flanqués du guitariste, Sylvain Quesnel, le Cadien et l’Innu ont mis en émoi le public par leur interprétation passionnante et palpitante de la magnifique « Dans le Nord canadien ».
Troquant guitare contre piano, Zachary, par sa composition « Ô Jésus » rappelait la génocide rwandaise dont il avait saisi l’ampleur seul dans la nuit, devant un téléviseur, lors d’un passage à Paris en 1994. Cette chanson, cri du cœur, s’est alors écrite de manière spontanée! Toujours au piano, pour alléger l’atmosphère génocidaire, l’éternel « Travailler, c’est trop dur »!
Virtuose de la polyvalence, il opte ensuite pour l’accordéon cadien et invite les hommes à se décravater et à repousser les tables. Péché! Pas assez de place pour danser au son de Dancing at Double D’s….même si l’envie nous en dit!
En rappel, le poète ne pouvait ne pas chanter « La balade de Jean Batailleur » qui a pris, dans sa vie et dans celle de ses « fans », ces derniers mois, plus de signification. Et en deuxième rappel, le batailleur offre, comme seul lui puisse le faire « L’arbre est dans ses feuilles ».
Le printemps et l’été s’annoncent chargés pour Zachary Richard, mais moins qu’avant. Des concerts en plus petits nombres. Des honneurs l’attendent à Ottawa; il en cumule pas mal! Du 1er au 3 juillet 2011, à l’occasion de la Fête fransaskoise, Zachary rendra visite pour la première fois, à Batoche, là où les forces fédérales ont mis fin, une fois pour toute, au rêve métis. Il m’a fait part d’un secret : il voudrait trouver la cloche de Batoche!