Pour compenser l’absence de Sudbury dans mon livre…

J’arrive à l’instant de Sudbury où la publication de mon livre Voyages et rencontres en Franco-Amérique m’avait valu une participation à la sixième édition du Salon du livre du Grand Sudbury. Je reviendrai un peu plus tard sur cet événement d’importance capitale, mais je me dépêche, à présent, de publier ici un court extrait d’un article intitulé « Sur les routes de l’Amérique française : l’expérience des géographes lavallois » , paru en 2002 dans la revue Québec Studies (p. 31), où je décrivais une soirée mouvementée vécue à Sudbury il y a 19 ans par moi-même et mes étudiants. Je le fais pour répondre à la « critique » de mon livre par un « chauvin » du Salon qui me taquinait sur les ondes de Radio Canada dans le cadre de l’émission Grands Lacs Café, animée par Éric Robitaille, du fait que je ne faisais pas de place pour Sudbury dans mon bouquin. Je ne voudrais pas que les gens de la ville du « Big Nickel » pensent que je ne les aime pas ou que je les oublie! Alors voici ce que je disais d’eux en 1995.

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De retour en Nouvel-Ontario, pour la première fois depuis 1983, nous avons passé la soirée du deuxième référendum québécois sur la question nationale, celui du 30 octobre 1995, dans les locaux des étudiants franco-ontariens de l’Université Laurentienne, à Sudbury. Que d’émotions! À quelques exceptions près, les étudiants de l’Université Laval, qui avaient déjà voté par anticipation, manifestaient une préférence pour l’option souverainiste soit pour le OUI, tandis que les Franco-Ontariens semblaient unanimement en faveur de l’option fédéraliste soit pour le NON. Inutile de dire qu’en début de soirée l’inquiétude régnait du côté franco-ontarien. Lorsqu’en fin de soirée, les résultats commençaient à rentrer de Montréal et que la flèche rouge (NON) se rapprochait petit à petit de la flèche bleue (OUI), les sourires revenaient. Et quand le résultat du vote de Westmount, riche ville anglophone, fut affiché (plus de 95% en faveur du NON), les Franco-Ontariens ne pouvaient plus contenir leur joie. Ils criaient et applaudissaient à tout rompre. Par le fait même, ils brisaient de manière non équivoque les liens de solidarité historique, culturelle, et linguistique entre eux et le Québec et se ralliaient autour du plus grand symbole de la domination anglaise au Québec.

Quoi qu’il en soit, le lendemain, le journal de langue anglaise de Sudbury publiait une photo de l’un de nos étudiants en pleurs à la suite de l’annonce des résultats et soulignait la douleur ressentie chez les « séparatistes ». Nous avons bien ri! Andrew était un anglophone bilingue de la Colombie-Britannique inscrit à Laval pour bonifier son français et un fédéraliste convaincu. Il pleurait sa joie! Le lendemain, une visite chez le Père Germain Lemieux, ethnologue de formation, qui nous fit connaître la richesse du patrimoine franco-ontarien, nous rapprocha de nos hôtes. Mais nous savions, à la suite des événements de la veille, que nous n’étions pas sur la même longueur d’onde. Le serions-nous un jour? Si l’histoire peut parfois nous rassembler, la géographie, elle, pèse de plus en plus dans nos façons de voir. Ainsi le présent est tout en défi étant donné la méconnaissance et la méfiance que nous avons les uns des autres.

Au moment de la parution de Voyages et rencontres, Paul-François Sylvestre de l’Express de Toronto m’en voulait légèrement de ne pas avoir fait paraître dans mon récit sa région d’origine, celle de Windsor. Par contre, les Franco-Ontariens de Penetangueshene et de Lafontaine semblent très fiers de se trouver dans mon bouquin. Comme de quoi, on ne peut faire plaisir à tous tout le temps!

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