Tombstone et Bisbee, AZ, de la bisbille…

Dans le coin sud-est de l’Arizona se trouve le comté de Cochise, nom de l’un des grands chefs des Apaches, l’autre étant Géronimo. Il a connu une rivalité de taille, celle de deux petites villes minières, l’une basait sur l’exploitation des métaux précieux, or et argent, et l’autre sur un métal davantage utilitaire, le cuivre. Il s’agit bien sûr de Tombstone et de Bisbee.
Annonçant ses intentions de se rendre dans le territoire des Apaches, Edward Schieffelin s’est fait traiter de fou. « Tout ce que tu vas trouver là bas, disaient ses associés, c’est ta pierre tombale (tombstone) ». Schieffelin y a découvert un abondant gisement d’argent. En peu de temps, des milliers de prospecteurs se sont mis à sa poursuite. Se rappelant les commentaires des copains, il n’avait d’autre choix que de donner au campement le nom de Tombstone. L’un des édifices les plus imposants de Tombstone porterait son nom, Schieffelin Hall. Deux autres bâtisses marqueraient de façon indélébile le tissu urbain, le palais de justice du comté de Cochise et le théâtre Birdcage.
Les gens de Tombstone croyaient assurer l’avenir de leur ville comme chef lieu du comté de Cochise, mais c’était sans compter sur les événements qui se produiraient chez eux et plus au sud dans les montagnes du mulet (Mule Mountains). À Tombstone, l’exploitation des métaux précieux et la possibilité de s’enrichir rapidement ont attiré une nouvelle classe d’habitants : citadins, entrepreneurs, aubergistes, prostituées (des colombes souillées/soiled doves), etc. tous du genre sédentaire. Pour protéger leurs intérêts et apporter « un peu de civilisation » à Tombstone, des entrepreneurs ont fait venir des « hommes de la loi ». Il s’agissait de Wyatt Earp, arrivé de Dodge City, au Kansas, de ses deux frères, Virgil et Morgan, et de son ami, Doc Holliday. Pour leur faire la vie dure, il y avait le clan des Clanton, nomades, cowboys, voleurs de bétail. La confrontation a eu lieu le 26 octobre 1881 au corral OK. Elle a été violente. Billy Clanton, 19 ans, mort; Frank McLaury, mort; Thomas McLaury, mort; tous les trois enterrés au cimetière Boot Hill. Virgil Earp, une balle dans la jambe, et Morgan Earp, assassiné le 16 mars suivant par l’embuscade alors qu’il était en train de jouer aux billards chez Campbell et Hatch, sur la rue Allen à Tombstone. En toute probabilité, ce meurtre fut perpétré par un membre des Clanton.
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Cet échange de coups de feu au corral OK a marqué l’histoire du Old West et a mis Tombstone sur la carte. L’exploitation des métaux précieux ne s’y fait plus depuis cent ans. Tombstone devait mourir. En 1929, elle a perdu à son grand rival, Bisbee, son statut de chef lieu, mais il vit encore ce bourg dont la devise est « town too tough to die ». Il vit grâce à son histoire violente. Les bons coups, comme les mauvais coups sont encore évidents au cimetière Boot Hill, à l’entrée du village. Les cowboys et leurs dames se promènent à tous les jours sur la rue Allen à interpréter et à mettre en valeur l’histoire de Tombstone.
À Bisbee, il s’agissait d’une exploitation minière d’un tout autre genre. La compagnie Phelps Dodge creuse depuis un siècle un trou massif—une exploitation à ciel ouvert. Bisbee est située à 5 200 pieds d’altitude, repliée dans les montagnes du Mulet. La rue principale de Bisbee et son grand hôtel, le Copper Queen, sont pittoresques, mais moins que les maisons des gens odinaires, mineurs pour la plupart, situées sur les hauteurs à peu près n’importe comment et n’importe où. Pour les atteindre, l’escalier peut être de rigueur.
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Avec le déclin des profits des vingt dernières années, Phelps Dodge transfère ses opérations vers l’étranger, surtout vers l’Amérique latine. Bisbee, au lieu de connaître un déclin connaît un renouveau basé sur l’art et le tourisme. Le filet de hippies arrivés aux années 60 est devenu aux années 90 un torrent d’artistes et de bohèmes. La preuve est partout dans les nombreuses librairies, boutiques et cafés, mais non seulement là. Le mur de la paix n’a pas été érigé par des mineurs de cuivre!
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Parmi les nomades nouveau genre qui parcourent l’Amérique l’hiver en véhicule récréatif, arrêtant ça et là, en attendant la fonte des neiges dans les contrées nordiques, des Québécois de la région du Lac Saint-Jean et de Chibougamau, s’amusent sur la Main à Bisbee. En nous quittant, je leur ai lancé un petit avertissement : « Hé, les amis, pas de bisbille à Bisbee! » Ils ont ri de bon cœur.
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Accueillir la nouvelle année à St. George, UT

Comment fêter la nouvelle année dans le désert, sans famille, sans amis, sans connaître personne et sans boisson? Facile! Se rendre à St. George, ville de 40 000 habitants en plein essor, située dans le coin sud-ouest de l’État de l’Utah, où s’organise depuis cinq ans la Fête de la première nuit (St. George First Night 2004). Le centre de
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la petite ville s’y prête si bien, car dans la tradition de toutes les villes et tous villages aménagés dans l’Ouest sous l’égide de l’Église de Jésus-Christ des Saint des Derniers Jours, les rues sont excessivement larges et les édifices historiques abritant des institutions culturelles particulièrement bien préservés.
Tout comme au Festival d’été de Québec, le fêtard achète son macaron pour avoir accès aux diverses venues qui regroupent une pléthore d’activités. À titre d’exemples :
À l’Opéra (3), une danse retro avec musiciens en smoking.
À l’échoppe du barbier du boulevard (6), un festival de film.
Dans l’ancienne salle de cinéma, le Théâtre électrique (12), une prestation rock du groupe Rok Dox, composé de quatre « docteurs » (un dentiste, un podologue, un gynécologue et un chiropraticien), tous de St. George.
Dans l’ancien gymnase de l’école Woodward (14), aujourd’hui transformé en théâtre musical, des extraits de pièces musicales dont « Chicago » et « Mamma Mia ».
À l’intérieur de l’historique tabernacle (15), de la musique classique jouée par le trio The Classic ¾ et des mélodies préférées des « baby boomers » chantées par la chorale féminine, Friends.
Sur la scène du bas du Main (20), un concert country avec les frères Hiatt.
Sur la grande scène (8), des spectacles de musique à casser les oreilles et le compte à rebours, suivis d’un feu d’artifice à minuit.
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Des kiosques (18) pour vendre un grand éventail de mets, servis toujours avec le sourire. Ce voyageur a particulièrement aimé l’assiette d’agneau à 6,50$, achetée au kiosque des Navajo, comprenant agneau, pain navajo (fry bread), pomme de terre cuite au four et épis de blé d’Inde.
Les enfants et ados trouvaient agréable de glisser sur la glissade gonflable installée sur le Main. En payant quatre piastres, les plus braves pouvaient essayer de gagner un prix en escaladant une tour de sept mêtres.
Les tout petits se sont raffolés des clowns et des amuseurs publics.
Distribués à tous les cinquante mètres, au milieu des rues réservées aux piétons, des barils contenant un feu de bois permettaient aux fêtards frileux de se réchauffer.


Les lieux de la polygamie

En ce vingt-et-unième siècle, la polygamie, ce vestige des mœurs mormones du dix-neuvième, continue à titiller l’imaginaire nord-américain. Que ce soit la variante pratiquée à Bountiful, près de Creston, en Colombie-britannique, ou celle de Colorado City ou de Big Water, située sur la frontière entre l’Utah et l’Arizona, le phénomène se vend bien. En 2003, deux livres à succès, le premier, un essai (Jon Krakauer, Under the Banner of Heaven), et le deuxième, un roman (Judith Freeman, Red Water), y ont été consacrés. Dans un cas, comme dans l’autre, l’action se passe principalement dans un territoire restreint du vaste Plateau du Colorado, partagé aujourd’hui par les États d’Arizona et de l’Utah.
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Se basant sur des entrevues réalisés avec hommes et femmes polygames et sur une collaboration considérable avec le meurtrier, Dan Lafferty, condamné à la prison à perpétuité pour son geste posé en 1984 à l’endroit de sa belle-sœur et de son enfant, Krakauer examine le côté sordide du phénomène. Brenda Lafferty a perdu la vie aux mains de son beau-frère en raison de son refus de se soumettre à l’idée de partager son mari. Krakauer documente le nécessaire lien existant entre les polygames du Canada et ceux des Etats-Unis. Ce lien rend possible un plus vaste éventail de choix en mariage et sert, par le fait même, à réduire la probabilité de mariages consanguins.
Colorado City est située au pied d’un massif imposant de roc rouge, le même qui figure sur la page couverture du livre de Krakauer. Fondée officiellement et rebaptisée en 1985, la communauté existe depuis bien plus longtemps.
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En 1955, la police de l’État d’Arizona a conduit un raid contre les familles polygames de l’endroit qui s’appelait à l’époque Short Creek. La descente n’a pas connu le succès voulu et la communauté s’est reconstituée de part et d’autre de la frontière. Les énormes résidences requises pour loger des familles plus que nombreuses se trouvent surtout à Colorado City, en Arizona, tandis que les raisons sociales s’affichent davantage à Hildale, en Utah.
Red Water de Judith Freeman explore le phénomène de la polygamie au dix-neuvième siècle, telle que perçue et vécue par trois des femmes de John D. Lee, l’un des plus importants bâtisseurs de colonies dans le sud-ouest de ce qui deviendrait en 1896, une fois la pratique de la polygamie officiellement abandonnée par l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, l’État de l’Utah. En septembre 1857, dans les circonstances plutôt nébuleuses, Lee et ses acolytes ont perpétré une odieuse attaque contre des émigrants d’Arkansas qui traversaient le territoire de l’Utah en route vers la Californie. Cent vingt hommes, femmes et enfants voyageant sous la direction des capitaines Alexander Fancher et John Baker ont perdu la vie lors du massacre.
Soupçonné par les autorités civiles d’avoir été à la tête des agresseurs, Lee a dû prendre la fuite, s’établissant dans l’une des régions les plus rudes de l’Amérique. Ici, le Colorado coupe à travers le plateau Paria avant de pénétrer dans le Grand Canyon. À ce lieu perdu qu’il appelait Lonely Dell, John et ses familles ont aménagé un service de traversier sur le Colorado. Dans ce paysage désertique, coupé et entrecoupé de gorges et de canyons,
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nul autre endroit ne s’y prêtait. Pour briser l’isolement, le pont Navajo enjambant le Colorado à huit kilomètres de Lonely Dell a été parachevé en 1993. Aujourd’hui, Lee’s Ferry est bien connu des cascadeurs du Colorado. C’est ici qu’ils doivent prendre l’ultime décision, soit de sortir du fleuve, sains et saufs, soit de poursuivre la course dans les eaux turbulentes et dangereuses du Colorado alors qu’il se lance dans le Grand Canyon ?
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Freeman raconte la triste fin de John D. Lee. Abandonné par ses frères en religion, par certaines de ses femmes et plusieurs de ses enfants, il est enfin capturé en 1874, traduit en justice à deux reprises et exécuté en 1877 sur les lieux mêmes du massacre de Mountain Meadows. Justice et rétribution ? Possiblement, quoique certains prétendent que Lee n’était qu’un bouc émissaire, sacrifié dans le but d’étouffer une affaire téléguidée de Salt Lake City.
Fascinante par sa géographie, son histoire et ses mœurs, cette stérile, aride région à très faible densité marque indélébilement le voyageur. Impossible d’y rester indifférent !


La route 66 à Williams, AZ

La route 66 (3701), longue de 3 000 km, reliant Chicago à Los Angeles, et rendue célèbre par le roman, Les raisins de la colère, de John Steinbeck n’est presque plus, sauf à Williams, en Arizona, dernière ville de la 66 à avoir été contournée par un tronçon du système autoroutier, le I-40 en l’occurrence. Cela s’est passé en 1984.
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Tout au long des années de la grande Crise, la 66 facilitait la fuite vers la Californie—vers l’El Dorado—des cultivateurs chassés de leurs terres par des conditions économiques et de sécheresse. D’autres résidents du Midwest suivaient le conseil bien connu et souvent évoqué de Horace Greely : « Go west young man! ». Ou bien, ils répondaient tout simplement au mythe de la Californie. La route 66 était longtemps l’« avenue du Grand Canyon », permettant aux millions d’automobilistes de se rendre aux abords méridionaux de l’immense abîme.
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Visiter Williams aujourd’hui, c’est remonter aux années 1950. J’y ai vu la première voiture dont j’étais devenu propriétaire à 17 ans : une Ford, modèle 1953, de couleur bleue foncée, pneus au flanc blanc. En 1960, je l’avais
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payée 350$ chez Halstrom Motors à American Fork, UT. James Dean, dont la persona fut rendue célèbre au Québec et en France par Luc Plamondon (« La légende de Jimmy »), surveille du haut d’un tableau mural un véritable PT Cruiser blanc et une Ford Thunderbird rouge aux lignes pures. Les nombreux motels qui parsèment la rue principale—au moins une quinzaine—rendent désolant témoignage d’une époque révolue qui a marqué les mœurs d’un peuple. Pour la modique somme de 22$, j’ai pu avoir une chambre au Grand Motel qui figure dans la liste des lieux historiques des Etats-Unis (US Historical Registry)
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Aller au cinéma? Plus question. Aujourd’hui, l’impressionnant salle de cinéma Sultana reçoit, le jour du Seigneur, à 10h30, Ses disciples!
La route 66! Sa renommée s’est répandue jusqu’à Québec. Au coin du boulevard Hamel et la rue de Marie de l’Incarnation, une surprise attend l’observateur averti !


Troisième temps d’arrêt

Pour la première fois depuis longtemps, un Noël sans neige. Quelques membres du clan Louder quittent Montréal afin de se joindre au voyageur pour passer Noël à Las Vegas. Xavier, Mathieu et Mary-Soleil contemplent leurs pertes au Casino Stratosphère.
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Plus heureux, chez Circus Circus, ils montrent leurs trophées.
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En sautant dans le vide d’une tour de 55 mètres de haut, Mary-Soleil suit dans les traces de ses grandes sœurs qui l’ont déjà fait avant elle.
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