Leavenworth, WA: village « bavarois » en sol états-unien

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À deux heures de Seattle, sur la route 2, à peine descendus du col Stevens (élévation 1 400 mètres), on entre en Allemagne. Du moins, c’est ce que le bureau de tourisme voudrait nous faire croire.

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La découverte de l’or en 1860 a attiré des mineurs de plusieurs nationalités dans la région, mais ce ne fut que 32 ans plus tard, lors du parachèvement, par le Great Northern Railway Company (GNRC), du chemin de fer vers l’estuaire Puget. à travers les montagnes Cascades, en provenance de Saint-Louis, que le village de Leavenworth vit le jour. L’exploitation de la forêt et la mise en place d’une scierie vinrent rentabiliser le chemin de fer, faisant en sorte qu’en 1915, la population atteignit le seuil de 2 500 âmes, huit fois que celle de l’an 1900, et autant qu’aujourd’hui. C’était l’âge d’or de Leavenworth!

Les années 20, 30, et 40 ont été dures pour le village. La GNRC décida de relocaliser à Wenatchee son siège social et à déplacer les voies ferrées et à éliminer la plaque tournante qui, jusque là, faisaient la fierté de Leavenworth. Pendant trois décennies, l’économie périclitait, le nombre d’habitants chutait. Une tentative aux années 50 de mettre les sports d’hiver au cœur de l’économie n’a pas donné les résultats escomptés. La mort de Leavenworth s’annonçait.

Déterminés à ne pas laisser mourir leur village, un groupe de résidents créèrent le Projet LIFE (Leavenworth Improvement for Everyone) et, pour s’inspirer, se tournèrent vers leurs montagnes et décidèrent de jouer la « carte alpine ».

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En 1960, un premier motel fut construit en style « suisse », ce qui a incité, avant la fin de la décennie, à la construction ou à la rénovation d’une quinzaine d’édifices du genre . Depuis, avec l’accord des résidents, des développeurs et des politiciens, toute nouvelle construction ou tout réaménagement doit respecter la norme « bavaroise ».

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Motel Evergreen

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Bureau de poste

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Banque

Même les toilettes publiques portent ce cachet, les cabinets étant réservés à « Damen » et « Herren »

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De toute évidence, le pari a été gagné. Leavenworth se porte bien. Des milliers de visiteurs s’y rendent, en toutes saisons, afin de profiter de l’ambiance s’inspiration bavaroise, de la musique allemande, des expositions d’art et d’artisanat, d’une cuisine spécialisée et des 13 festivals qui s’étalent sur neuf mois, d’avril à janvier.

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Kiosque de musique

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Art et artisan

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Hôpital


Sainte-Anne-des-Ondes, enfin la visite

Depuis des années, je roule ma bosse dans la région du Bas-du-Fleuve. En empruntant le traversier entre Rivière-du-Loup et Saint-Siméon, sur la côte nord du Saint-Laurent, aux confins de Charlevoix, le voyageur passe chaque fois devant une chapelle tout en bois, fermée la plupart du temps. Il s’agit de la chapelle de Sainte-Anne-des-Ondes, fondé en 1895 et érigée à la mémoire de Marie Hayward, épouse de Louis V. Filteau, décédée le 3 mai 1909 à l’âge de 46 ans.

Enfin, aujourd’hui, le 8 juillet, elle est ouverte. Le publique s’y rend. Moi itou!

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La messe sera chantée à 11h30.

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Oh, non, elle ne sera pas chantée, du moins, pas comme d’habitude. Aujourd’hui, il n’y pas de chorale, pas d’organiste, pas de pianiste, pas guitariste…rien. Une messe sans accompagnement, sauf que le curé travaille fiévreusement dans les minutes qui précèdent le service à placer les meilleurs chanteurs qu’il semble connaître là où il le faut, les uns à droite, les autres à gauche, plusieurs dans la section du milieu.

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La messe se déroule sans anicroche. En 35 minutes, c’est fini—comme il se doit en période de vacances—mais j’ai quand même le temps de me tremper dans l’ambiance du moment, d’admirer les beautés du lieu et d’échanger des paroles et des vœux de paix avec des gens surtout de mon âge!

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Monsieur le curé quitte rapidement. Il a peut-être d’autres messes « à faire chanter », car les curés itinérants sont monnaie courante de nos jours. Les fidèles, eux, villégiaturistes pour la plupart, mais quelques Louperivois aussi, tardent à partir, faisant de nouvelles connaissances et renouant des amitiés sur le perron de cette chapelle active en temps estival.


Grande-Digue, NB, mais où est la digue?

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Quiconque lira la présente : salut !

Sachez que la paroisse de Grande-Digue, autrefois appelée Gédaïque, tire son nom d’origine d’un petit groupe d’exilés acadiens qui ayant enfin l’assurance d’obtenir des terres à leur nom propre, érigèrent près d’ici une chapelle chrétienne en 1788.

Cette inscription sur une plaquette à proximité de l’église actuelle n’explique cependant ni le choix ni la signification du toponyme, car aujourd’hui il n’y a pas de digue, ni grande ni petite !

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Toujours sur la plaquette :

Voici les noms qui paraissent sur la première concession de terres émise en 1791—

Michel Haché             Martin Haché             Isaac Haché

Louis Bonnevie           John Downing            Pierre Caissie

Joseph Caissie            Joseph Poirier            Pierre Poirier

Sylvestre Haché         Pierre Arseneau         Raphaël Poirier

Jean Arseneau            Joseph Arseneau

Quel ne fut pas notre plaisir de retrouver chez eux à Grande-Digue la fin de semaine des 8 et 9 juin le descendant de Joseph et Raphaël Poirier, Bernard, et son épouse, Cécile LeBlanc, originaire de la baie Sainte-Marie, en Nouvelle-Écosse. Nous les avons connus à Sainte-Foy, grâce au hockey, car nos fils, Marc-André et Mathieu, ont été respectivement, en 1996-97, gardien de but et joueur d’attaque, au sein d’une équipe dirigée par Alain Gagnon, qui a connu une saison de tonnerre. Depuis, nous nous étions perdus de vue, eux partis en Ontario avant de rentrer en Acadie au moment où Bernard prenait sa retraite de la banque de Nouvelle-Écosse, et nous souvent en péripétie à travers le continent.

En nous montrant les divers visages de son pays natal, la fierté de Bernard se lisait sur le sien.

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À Cocagne nous avons acheté des crabes « frais du jour » et nous sommes régalés le soir.

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Depuis son retour chez lui, Bernard plonge dans la vie sociale et culturelle de Grande-Digue. Avec Cécile, sa sœur, Lucille, son mari, Gilles Thibault, et beaucoup de paroissiens dynamiques, ils travaillent fort à rendre le 225e anniversaire de la fondation de Grande-Digue mémorable (www.grande-digue1788-2013.org/ )

L’une des activités est de déterminer si une « digue » a déjà existé à Grande-Digue, ce qui serait logique. Celui qui mène ce projet est Samuel Arseneault, ancien professeur de géographie à l’université de Moncton. J’ai rencontré « Sam » pour la première fois en 1971, alors que j’étais nouveau professeur à l’Université Laval et lui étudiant à la maîtrise. Nous nous sommes rarement vus depuis.

Dimanche après-midi, donc, il y eut chez les Poirier, des retrouvailles formidables :

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De g. à d.: Sam, Marie-Hélène (nièce à Bernard), Gilles, Lucille, Bernard, Anne-Marie, Dean, Billie

Entre autres choses, nous avons discuté de la fameuse « digue ». Y en a-t-il eu ? Possiblement un grand aboiteau ayant disparu avec le temps et au cours des intempéries. La réponse définitive est à venir. En attendant, Sam continue à marcher et à arpenter les grèves et marais du coin et à scruter des vieilles cartes et vieux documents. Un jour, il n’y aura plus de mystère !


Baie Sainte-Anne, NB: hommage à Yvon Durelle

Jeune, je passais mes vendredis soir devant le petit écran en noir et blanc à regarder la boxe. C’était l’époque des Friday Night Fights, commandités par la compagnie Gillette, fabricant des rasoirs du même nom. C’était aussi l’époque des grands champions dans toutes les catégories : Rocky Marciano (poids lourds), Archie Moore (poids mi-lourds), Sugar Ray Robinson (poids moyens) et Kid Gavilan (poids mi-moyens). Bien sûr celui que nous affectionnions particulièrement, mon père et moi, était un pugiliste de notre propre coin (West Jordan, Utah), Gene Fullmer, qui, le 2 janvier 1957, réussit à battre Sugar Ray et, ainsi, devenir champion du monde des poids moyens.

En 1958, un boxeur acadien s’est fait parler de lui. Certains le considéraient parmi les dix meilleurs boxeurs au monde. Déjà, en 1953, il avait gagné le titre du champion canadien des mi-lourds. Or, c’est en décembre 1958, au Forum de Montréal, qu’Yvon Durelle prit le monde de la boxe par surprise en envoyant au tapis trois fois le légendaire Archie Moore, avant d’enfin perdre ce combat épique au 11e round. Le « fighting fisherman », car c’est comme cela que les journalistes sportifs l’appelaient. Un homme issu du petit village de Baie Sainte-Anne, au Nouveau-Brunswick, pêchait le jour et se battait sur le ring le soir.

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Six mois plus tard, Durelle a perdu un deuxième combat contre le champion, Moore. Les experts sont divisés sur les raisons de cette contre performance. Évidemment, Archie Moore était un grand boxeur, un fin renard, mais le « fighting fisherman » n’était pas le même homme le soir de la reprise des hostilités. Il venait de perdre 35 amis pécheurs lors du désastre d’Escuminac qui eut lieu dans la nuit du 19 au 20 juin 1959. Vingt-deux des cinquante navires partis d’Escuminac (village voisin de Baie Sainte-Anne) pour la pêche au maquereau et au saumon ont sombré lors d’une tempête violente et imprévue. Durelle dont le courage ne manquait jamais devait, néanmoins, ce soir-là face à Archie Moore avoir le cœur pas mal lourd.

En route vers l’Île-du-Prince-Édouard, je ne pouvais m’empêcher de me rendre à ces villages tant éprouvés et de visiter le village centenaire qui a produit Yvon Durelle que les citoyens tiennent encore en haute estime, autant pour sa générosité et sa bonté que pour ses prouesses sportives.

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En face de l’église, l’histoire des familles de Baie Sainte-Anne se lit sur les pierres tombales. Des Durelle, il y en a beaucoup—plus que j’en aurais pensé car ce n’est pas un des noms acadiens les plus courants—mais nous avons trouvé assez facilement la pierre tombale du boxeur et de sa dame.

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Sur le devant, on voit une image du couple taillée dans la pierre. Celle-ci est ornée des symboles d’amour et d’une paire de gants de boxe. Toutes les inscriptions sont en anglais, y compris la « prière du boxeur » gravée à l’endos du monument.

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En 2003, un documentaire tourné à l’Office national du film intitulé « Durelle » et signé par Ginette Pellerin fut consacré au « fighting fisherman ». En ce moment, Christian Larouche qui s’apprête à nous donner ces jours-ci au grand écran Louis Cyr, prévoit un nouveau long métrage sur Yvon Durelle.

La visite au cimetière de Baie Sainte-Anne m’a incité à afficher sur Facebook, la photo de la pierre tombale d’Yvon Durelle, avec la question « qui s’en souvient ? ». Quelques uns de mes « amis FB » ont réagi.

J-P G : Archie Moore n’est plus là pour en témoigner, mais d’autres s’en souviennent. J

RT : C’était pas un boxeur? Je pense même qu’il a eu des combats pour le championnat du monde (tous perdus)….

J-P G : Cherchez, Rémy « Yvon Durelle vs. Archie Moore » sur Google, et vous verrez bien.

P-L G : Un pionnier de la boxe au Canada francophone. Il a déjà été classé dans les 10 premiers boxeurs au monde Pound for Pound.

RT : J-P, mais ils les a tous perdus (ses championnats du monde). La raison, selon les experts : il changeait trop souvent de catégorie : moyen, mi-lourd, lourd, etc. Mais c’était vraiment un « tough » (incouchable).

J-P G : Il y a eu un très beau documentaire sur lui, que je ne retrouve pas pour l’instant. C’était un talent brut. Il n’a jamais eu la chance d’être entrainé et préparé par de vrais professionnels, comme les boxeurs de classe mondiale qu’il affrontait. Dieu sait les sommets qu’il aurait atteints si son talent avait été mieux encadré.

RT : Je crois que le documentaire était de l’ONF; pour le reste, je suis d’accord avec vous.

Dans notre salon dans le lointain Utah, mon père et moi n’en revenions pas de voir Archie Moore sur le dos à trois reprises, victime des puissants coups de ce « French Canadian », comme on disait à la télévision. Sauf que ce n’était pas un Canadien français. Durelle était acadien. Ce n’est pas pareil!


Apprendre le français à Trois-Pistoles

Impossible de passer par Trois-Pistoles sans arrêter contempler son temple magistral, Notre-Dame-des-Neiges, érigé en 1887. Avec son immense coupole entourée de plus petites, elle est unique au Québec.

(photo manquante, église Notre-Dame-des-Neige, extérieur)

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Mais à Trois-Pistoles il y a plus intéressant encore et ce n’est pas Victor-Lévy Beaulieu ni les nombreuses légendes qui hantent les lieux (Légende du quêteux, Légende de Trois-Pistoles, Légende de la neige, Légende du diable et du tenant du chemin, Légende du cheval noir, Légende du gobelet d’argent) ! Non, il s’agit plutôt de l’École de langue française de Trois-Pistoles, la plus vieille école de langue au Canada qui poursuit cet été son 81e année d’enseignement. Sur une période de douze semaines, de mai en août, environ 600 élèves s’y rendent, notamment de l’Ontario et de l’Ouest canadien, mais également des États-Unis et de l’Amérique latine. L’école est administrée par l’Université de Western Ontario qui la considère son campus au Québec. Drôle de campus, car les cours se donnent à la polyvalente! Les élèves, sans exception, sont logés dans des familles, ce qui permet une immersion complète et facilite l’apprentissage du français. Pour les familles d’accueil,quelle belle façon de créer des liens tout en augmentant leurs revenus. C’est sûrement un apport économique appréciable dans ce petit milieu dont les effectifs diminuent et l’économie stagne.

Le programme est dirigé localement par André Beaudin, anciennement professeur à l’Université Laval, retraité depuis peu. C’est au Café Grains de folie que je l’ai rencontré, entouré de plusieurs des étudiants. D’autres arrivaient sur le coup de midi. Le Grain de folie, situé en face de l’église, au cœur du village, semble être le lieu privilégié pour prendre un café, se brancher, participer aux échanges, faire ses devoirs et nouer des liens.

(photo manquante, M. Beaudin et des étudiants)

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S’il est vrai, tel que révélé cette semaine par Statistique Canada, que le taux de bilinguisme au Canada est à la baisse pour la première fois depuis 50 ans, il y aurait peut-être lieu de s’interroger sur la mission des institutions telles que l’École de langue française de Trois-Pistoles

N.B. Par inadvertance deux photos de cette publication ont été égarées.