La tonnelle du livre à Hurricane

En 1869, les fondateurs de cette ville qui compte aujourd’hui 14 000 habitants, Erastus Snow, David Cannon et Nephi Johnson, descendaient la côte sur une ancienne piste amérindienne lorsqu’un tourbillon soulevait le toit de leur boghei tiré par des mulets.

—Oups, dit Snow, ça, c’était un ouragan, on va baptiser cet endroit Hurricane.

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Ici, depuis 11 ans, Margaret Sorensen tient le Book Arbor. Elle est originaire de Vancouver, en Colombie-Britannique.

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« Qui prend mari, prend pays », n’est-ce pas ? Le couple a vécu et élevé leur famille en Californie du sud. Au moment de la retraite, Monsieur désire retourner en Utah, son pays d’origine. Comme tant d’autres ces dernières années, au cours desquelles Hurricane est passée une bourgade à une véritable petite ville, ils l’ont choisie en raison de son climat clément et de sa proximité de la ville de St. George et des villages ancestraux du mari. Madame a néanmoins imposé une condition : qu’elle puisse ouvrir une librairie pour occuper ses heures dans cette région désertique.

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Margaret a un lien étroit avec la Franco-Amérique. Sa mère était une Bellerose dont la famille métisse venait de la région de Lac La Biche, en Alberta. Émue, elle m’a raconté son voyage d’il y a quelques années au cimetière de Kikino (40 km au sud de Lac La Biche) où elle a pu se recueillir devant les sépultures de ses grands-parents.

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Tous et toutes les libraires que je connais sont d’une gentillesse, d’une politesse et d’une serviabilité exemplaires. Margaret « Bellerose » (cela lui fait sourire !) ne fait pas exception. Elle montre fièrement sa collection de signets. C’est que tous ses livres sont des livres d’occasion à l’intérieur desquels les lecteurs et lectrices, en se débarrassant du livre, ont eu tendance à oublier le signet. En dépoussiérant et rangeant les bouquins dans les rayons bien catégorisées, Margaret enlève le signet et l’ajoute à sa collection collée sur une porte qui en déborde.

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*                                             *                                             *

Si la visite à Hurricane m’a permis de découvrir la Tonnelle du livre et sa gentille propriétaire descendant des Franco-Métis, mon principal but fut tout autre. Je devais y rencontrer Beverley que je n’avais pas vue depuis 1950, à l’époque où nous avions chacun 7 ans et étions tous deux élèves de Mme Irène Carlson, en deuxième année, à Park City (Utah).

Avant

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2e Année, École Marsac, Park City, Utah : Beverley Cook (deuxième rangée, quatrième de la gauche) ; moi-même (deuxième rangée, neuvième de la gauche)

Après

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Se perdre pendant 50 ans et refaire surface

Au moment des retrouvailles du mois dernier en Utah, alors que je rencontrais de nombreux amis et de nombreuses amies d’autrefois que je n’avais pas vus depuis 20, 30, 40 ou parfois 50 ans, une question était sur le bout de toutes les lèvres : « Comment, batinse, se fait-il que tu sois rendu au Québec ? » [traduction libre]. Hummmmm, comme si un homme n’avait pas le droit de changer de pays, de langue et de culture!

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Ma réponse ne tarda jamais à venir : « Ce serait un peu long à expliquer; lis la bio qui se trouve sur le CD que tu viens de recevoir. La mienne est là avec les 124 autres! »

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Peut-être y a-t-il d’autres qui se posent cette même question à mon sujet, mais qui n’ont pas accès au CD. Pour eux, voici le court texte soumis à l’occasion du conventum des 50 ans de la promotion de 1961.

What ever became of Dean Louder?

In Mr. Dean Rigby’s eighth grade English class at Lincoln Junior High School, somethinghappened which changed my life. A seed of passion was sown which, when germinated, would lead me away from my roots, my homeland, and on a life-long journey among the French speaking peoples of the world, in general, and of the North American continent, in particular. I was deeply touched by Henry Wadsworth Longfellow’s epic poem, Évangeline, which Mr. Rigby made us read aloud in class. This classic from American literature celebrates the mythical Acadian lovers, Gabriel and Évangeline, separated by the vicissitudes of war and the cruelty of the British who inflicted upon their people in 1755 an overt form of ethnic cleansing by scattering them to the four winds, like slaves, aboard vessels hired for that purpose. Two and one-half years spent in France (1962-1964) provided me with the opportunity to master the language of Molière, which eventually led me to that spoken by Gilles Vigneault (Québec’s poet laureate)—which is in reality the same language sung with a different accent—to that spoken by Herménégilde Chiasson (Acadian film maker, cultural broker and heir to Acadie ’s Évangeline)—which is also the same idiom spoken differently—to those of Zachary Richard (Louisiana troubadour) and Clifton Chenier (king of zydeco) whose Cajun and Creole sounds have enriched the North American music scene for generations.

After schooling at Brigham Young University and University of Washington, I accepted, in 1971, a position as professor of geography* at Université Laval, located on the banks of the St. Lawrence in far away Quebec City (150 miles downriver from Montréal). This is where we reared eight children (four boys/four girls), usually speaking English at home but nearly always French everywhere else. Today, these children and their children are spread across Canada, with a couple of daughters residing in the United States—in the capital city of Idaho which bears the lovely French name “boisé” meaning forest, wood or grove.

I feel a profound respect for my origins and harbor in my heart and head the fondest ofmemories of you all, but after forty years in la belle province, Québec is my home!

*You may ask, “what is a geographer?” I reply, “a wonderful profession which allowed me to earn a decent living doing what I love.” Here is how it happened. As a tiny tot, I loved geography. When I was 6 or 7, my parents gave me an atlas and gazetteer. I wore it out turning the pages, fingering the plates, rubbing the maps, memorizing the place names. On the other hand, I have never been a fan of National Geographic Magazine which skews the study of geography.

Until I returned from France, however, I didn’t know you could major in geography and become a geographer. I happened on to it quite by accident. Arriving home from France in September 1964, I entered BYU that fall a couple of weeks late and needed courses to start filling general education requirements. I wanted a history course being offered in the Heber J. Grant building. When I arrived, the course was closed. Frustrated, I stuck my nose in the room next door where there were plenty of seats available. Asking what it was, one of the students said « geography ». That was enough for me! I sat down, enjoyed the first lecture, the rest of the course and the rest of my life as a geographer. After the B.A. at BYU (1967), I attended University of Washington for the M.A. and Ph.D. (1967-1971), then headed for Québec.

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En tant que géographe, je m’intéresse à la question de la mobilité géographique des êtres humains. Voyons voir ce phénomène tel que vécu par les hommes et les femmes de ma cohorte.

Distribution géographique en 2011 des membres de la promotion de 1961

Orem High School (n=267)

Monde

États-Unis                        265

Canada/Québec                  1

Australie                        1

États-Unis

Alabama (1), Alaska (1), Arizona (9), Californie (15), Colorado (9), Illinois (1), Indiana (1), Kansas (1), Kentucky (1), Maryland (1), Massachusetts (1), Missouri (4), Montana (1), Nevada (4), New Mexico (1), Caroline du Nord (2), Orégon (5), Pennsylvanie (2), Caroline du Sud (1), Tennessee (1), Utah (194), Washington (5), Virginie occidentale (1), Wyoming (3).

Sommaire : 73% des finissants de 1961 habitent l’Utah, 89% les onze 11 États de l’Ouest.

Utah

Comtés : Box Elder (1), Cache (3), Davis (6), Emery (1), Iron (1), Juab (2), Millard (1), Salt Lake (38), Sanpete (7), Sevier (1), Summit (1), Tooele (1), Uintah (1), Utah (115), Wasatch (1), Washington (6), Weber (8).

Sommaire : 43% des finissants de 1961 habitent le comté d’Utah; 59% de ceux qui habitent l’État de l’Utah habitent le comté d’ Utah.

Comté d’Utah

Villes : American Fork (5), Benjamin (2), Eagle Mountain (1), Elberta (1), Genola (1), Highland (2), Lehi (4), Lindon (7), Mapleton (2), Orem (52), Payson (5), Pleasant Grove (8(, Provo (11), Salem (2), Springville (7), Spanish Fork (5).

Sommaire : Un finissant sur 5 de 1961 habite encore Orem, 50 ans plus tard. 45% de ceux qui habitent le comté d’Utah habitent Orem.


De multiples retrouvailles dominicales à Salt Lake City

À trois reprises déjà, les 13 et 31 décembre 2003 et le 13 décembre 2010, dans cette chronique, je suis revenu sur un lieu magique, Temple Square à Salt Lake City. Aujourd’hui, j’y reviens à nouveau, car c’est vraiment l’endroit en Utah où se trouver le jour du Seigneur!

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Tabernacle mormon, Temple Square

J’avais donné rendez-vous au pied du Monument aux mouettes (Seagull Monument), au cœur du Temple Square, à une amie californienne, de passage à Salt Lake, que j’avais connue à Québec en 1983 et que je n’avais pas revue depuis. À l’époque, Tracy Sears, devenue à son mariage, selon la tradition, Tracy McDermid, remplissait son devoir de missionnaire mormone. Vingt-huit ans plus tard, mère de famille, elle vint à ma rencontre accompagnée de sa fille Katie, de son fils, Seth, et de la petite amie de ce dernier, Kaylie.

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Tracy et Katie

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Nous cinq

Évidemment, nous avons assisté à l’émission hebdomadaire « Music and the Spoken Word » à laquelle chante le Mormon Tabernacle Choir accompagné de l’Orchestre du Temple Square, les deux dirigés simultanément par M. Mack Wilberg. Il s’agissait ce matin de la 4277e semaine consécutive que America’s Choir, comme le président Ronald Reagan l’a déjà appelé, se produisait devant un public en émoi et des auditeurs fidèles éparpillés à travers le continent. Suit le programme du jour :

« How Great Thou Art », paroles de Stuart K. Hine, musique de Nathan Hofheins

« Awake the Harp », musique de Franz Joseph Haydn, paroles des écritures saintes

« Norwegian Rustic March », d’Edvard Grieg

« I Feel My Savior’s Love », musique de K. Newell Dayley, paroles de Ralph Rodgers, K. Newell Dayley et Laurie Huffman

« Oh What a Beautiful Morning », musique de Richard Rodgers, paroles d’Oscar Hammerstein

« High on the Mountain Top », musique d’Ebeneezer Beesely, paroles de Joel H. Johnson

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Donc, première retrouvaille, avec Tracy et sa famille, mais ce n’est pas tout! À mon arrivée à ce rendez-vous dominical descendaient d’un autocar de la compagnie canadienne Bell Horizon une quarantaine de Québécois en tournée. Avec, comme guide, Jean-Yves Bergeron de Groupe Voyage Québec et comme chauffeur l’excellent, Martin Daigle, ils étaient partis de Québec le 30 août dernier pour visiter en 25 jours l’Ouest américain. Après Salt Lake, des arrêts sont prévus, entre autres, à San Francisco, Los Angeles et Las Vegas, ainsi qu’au Grand Canyon.

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Pris en main, dès leur arrivée, par une jeune Belge, ces touristes, surtout, mais pas exclusivement, de Charlesbourg, ont pu visiter, tour à tour, dans leur langue, les principaux attraits du Temple Square avant de se régaler musicalement au mini concert offert par le Choeur…et sans que cela ne leur coûte une cenne! Tout au Temple Square est gratuit : musée, expositions, édifices historiques, centre de recherche en histoire familiale et généalogie, archives, musique…

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Lorqu’ils remontaient dans leur car, le bonheur se lisait sur le visage des Québécois.


Retrouvailles à Oswego, NY

Depuis bientôt deux mois, de concert avec une amie d’adolescence, Ruth Lynne, je travaille à l’organisation d’un conventum. Les 9 et 10 septembre prochains, à Orem, en Utah, nous célébrerons les 50 ans de la promotion de 1961! En fin de semaine dernière, à Oswego, dans l’État de New York, j’ai eu un avant goût de ce que sera cette activité qui baignera dans la nostalgie et la bonne humeur. Ayant appris que deux des filles de la classe, Irene Parry et Kitty Orton, ne pourraient participer au conventum en raison d’engagements les liant, ainsi que leur maris, tous de l’Utah, à une œuvre missionnaire dans la région de Rochester, j’ai proposé une brève rencontre sur les rives du lac Ontario, à Oswego. Comme je leur ai dit : « If you can’t come to the class reunion, the reunion will come to you! ». Ceux et celles qui me connaissent savent que je ne manque jamais une occasion pour faire un petit voyage!

Site autrefois très important pour la traite de fourrure et scène d’une bataille marquant la reddition le 14 août 1756 des forces anglaises devant celles dirigées par le Marquis de Montcalm à la suite d’une bataille de trois jours, Oswego compte aujourd’hui 18 000 habitants.

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Au dix-neuvième siècle, grâce au creusage d’un canal et à la construction d’écluses facilitant le passage de bateaux du Canal Érié au lac Ontario, Oswego devint la principale ville portuaire de la région.

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Pendant les années 1840 et 1850, Oswego fut un bastion abolitionniste, un terminus de l’Underground Railway, ce réseau clandestin qui permettait aux esclaves en fuite de passer au Canada et qui contribua à l’éclatement en 1861 de la Guerre de sécession.

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En 1854, l’un des plus ardents abolitionnistes, le richissime Gerrit Smith fit un don de 25 000$ pour la construction d’une bibliothèque municipale à Oswego. Aujourd’hui, elle est l’une des plus vieilles encore en usage aux États-Unis. En face se trouve le palais de justice du comté d’Oswego et à deux pas un nouveau passage piétonnier, aménagé sur une ancienne voie ferrée, enjambant le canal et la rivière.

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Au parc Breitbeck, sur les berges du lac Ontario, en compagnie des filles que je n’avais pas vues depuis 50 ans et leurs époux, nous nous sommes régalés : lasagne, salade, petits pains, brownies…!!

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Assis sur un banc, ordi sur les genoux, filles en arrière, j’ai pu partager certains des préparatifs en vue du conventum, dont plusieurs photos d’époque.

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Le lendemain matin, pour rentrer au Canada, on a opté pour la voie d’eau. Peu connu, un tout petit traversier permet de quitter l’État de New York, à Cap Vincent pour se rendre à l’île Wolf, au Canada. Un deuxième traversier, plus grand celui-ci et dont le quai d’embarcation se trouve du côté nord d’île, transporte résidents et touristes de l’île au cœur de Kingston.

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En partance des États-Unis

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Traversier à 9 voitures

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Arrivée au Canada, poste de douanes, île Wolf

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Centre ville de Kingston