Pour souligner la Saint-Valentin

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Homme de musique aux multiples talents, François Dompierre anime une émission musicale à la radio de Radio-Canada depuis l’an 2000. Dimanche, grâce à un texte sollicité lors de son émission du 5 février qui m’a valu d’être sélectionné, j’ai pu assister, avec une vingtaine d’autres « gagnants » à son édition spéciale de la Saint-Valentin. Réunis dans la salle Raymond-David de la Maison de Radio-Canada à Montréal, nous avons pu partager pendant trois heures avec François et ses deux invitées, Catherine Major (sa nièce, la première fille de sa soeur, Jacinthe) et Bïa (dynamique artiste québécoise d’origine brésilienne) les instants exquis d’amour et d’amitié tels que rendus par certains des plus grands artisans de la chanson d’amour, en commençant par Piaf et suivie de Barbara. De plus, Daniel Lavoie, Léo Ferré, Brel, Marie Laforest, Pauline Julien, Juliette Greco et Monique Leyrac. Clin d’œil aussi du côté de la musique de langue anglaise : Joan Baez, Ella Fitzgerald et Louis Armstrong. Il manquait toutefois la « I Will Always Love You » de Whitney Houston, décédée la veille. Deux moments forts : Catherine Major qui interprète « Tu ne reviendras pas », chanson d’amour composée par son oncle François, d’après un poème écrit par sa mère, « Mamouche » comme elle aimait se faire appeler ; Bïa qui, à son tour, interprète l’une de ses propres compostions amoureuses, « Mures sauvages », suivie de la séduisante « Besame mucho ».

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Je vous invite à fêter la Saint-Valentin en écoutant, en différé, où que vous soyez, comme j’ai pu le faire dimanche, accompagné de ma bru, Marie-Lou, « Les détours de la Saint-Valentin de François Dompierre » (www.radiocanada.ca/espace_musique/animateurs.asp?an=3640). Bonne écoute!

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Respectant le thème imposé par l’animateur la semaine précédente, voici le texte qui m’a valu une invitation à son émission spéciale du 12 février :

Depuis 40 ans, je demeure au Québec. En septembre dernier, je suis retourné dans mon pays d’origine (USA) pour le conventum des 50 ans de notre promotion (Orem High School, Utah). Ce retour m’a fourni l’occasion de renouer avec beaucoup d’amis et d’amies d’enfance que je n’avais pas revus depuis 20, 30, 40 et parfois 50 ans. À la suite de ces merveilleuses retrouvailles, j’ai publié sur le site internet OHS-61 le texte qui suit concernant mon premier amour. Malheureusement pour vous et pour les auditeurs, il est écrit dans la seule langue que je parlais à l’époque et la seule langue comprise par tous mes amis et amies d’autrefois.

Sophomore Bigshot

January 1959. I was the only sophomore on the starting five of Orem High’s Junior Varsity basketball squad and, as I recall, the highest scorer. The other four starters were juniors Glenn Bullock, Paul Kennedy, Dave Thompson, and Gary Shumway. The sixth man was Derrell Reeves, also a junior. Lee Bunnell, a junior and better known for his football prowess, was a starting forward for the varsity squad along with seniors Kirby McMaster, Bruce Watts, Rex Wright, and Jimmy Wilkinson.

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I had just gone through that sacred rite of passage for all American teens, the procurement of a Utah state driver’s licence and Dad had just bought a new 1959 white Pontiac Star Chief with a bright red interior. When I wasn’t driving his 1955 red Ford pick-up, Dad would let me, on special occasions, drive the new Pontiac.

The most special of occasions came along on Saturday night, January 16, the day after my sixteenth birthday. The Harlem Globetrotters were making their annual visit to the George Albert Smith field house on the campus of Brigham Young University and I had tickets. What girl would like to accompany me? Possibly quite a few, but I had only one in mind. However, I harboured serious doubts about her willingness to accept the invitation of a sophomore boy, two years younger than she.

From the beginning of school that year, I had had my eye on one of the five Tiger cheerleaders, Shauna A. Blond, graceful, always smiling, full of energy, she captured by heart early on. Would she, an apparently very popular senior girl—a cheerleader moreover—lower herself to go out with a sophomore boy even if he was the high scorer on the JV team and had access to this dad’s shiny new Pontiac? It was a gamble, but gathering my courage in both hands, I cornered her near her locker the first day back from Christmas vacation and popped the question. To my amazement, she accepted without hesitation. We had a date! I literally floated down the hall to my own locker and into Mr Mangum’s English class!

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OHS cheerleaders, 1959: Sandra, Toni, Shauna, Sheron, et Becky

The Globetrotter game turned out to be an afterthought. We spent the entire evening in deep conversation, discovering each other’s hobbies, preferences and histories. We discovered that we had spent the entire preceding summer working at neighbouring fruit stands in north Orem, I at Verd’s, she at Walker’s. Fewer than 100 yards had separated us every day for three months, yet we had never met!

Shortly after this first date, there was a second, the Rose Prom, organized by one of the LDS stakes. She danced like a dream and I guess I didn’t do badly myself. This lead to a third date and a fourth and a fifth … One date ran into another. We were together every Friday and Saturday evening and often all day on Sundays.

When dad’s pickup or shiny Pontiac weren’t available, we frequently doubled with Bob T. and Beth H. in Bob’s 1958 Chevy Impala.

I was very proud to accompany Shauna on her graduation night. I may have been imbued with my own importance. Our intense relationship continued throughout the summer and into the fall, but then the inevitable unfolded. Reality set in. She was two years older, a student at BYU and on her way to becoming a Cougarette and a flag twirler! I was but an ordinary high school junior…no longer the Sophomore Bigshot I once had been. Our destinies were at a crossroads.

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On Monday evening following the 50th anniversary of the Class of 1961, 10 hours before I was to climb on the airplane to return to Québec, I had the opportunity of visiting Shauna in her Kaysville home. Although so much of that proverbial water has flowed under the proverbial bridge and although our encounters and conversations have been very sporadic, to say the least, there remains, a half-century later, a mighty bond of friendship that links the hearts of the people we have become.

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Shauna and Dean, 2011, 50 ans plus tard


Le hockey dans le désert

À Québec, pour accueillir de nouveau une équipe de hockey de la Ligue Nationale (LNH), après une absence de 17 ans, il est question de construire avant 2015 un nouvel amphithéâtre au coût de 400 000 000$. En agonisant, les gens d’ici se rappelleront qu’à leur première année à Denver, au Colorado, leurs Nordiques ont gagné la Coupe Stanley, trophée emblématique de la suprématie au hockey professionnel en Amérique du Nord. Quelle équipe de la LNH viendra combler le vide laissé par les Nordiques et répondra aux attentes de Pierre Péladeau, Régis Labaume et tous les amateurs de hockey emportés par la « vague bleue »?

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De toute évidence, il s’agira des Coyotes de Phoenix qui, depuis leur arrivée dans le désert en provenance de Winnipeg en 1996, jouent devant les gradins peu garnis et perdent des millions de dollars chaque année, au point où la LNH elle-même a dû prendre le club en tutelle.

Voilà ce que savent les Québécois bien avertis du hockey dans le désert. J’en ai une toute autre idée, car mon engagement comme parent de hockeyeurs et de « fan » inconditionnel de ce sport vit le jour en Arizona.

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En juillet 1985, la famille s’est transportée de Québec à Phoenix où, pendant neuf mois, j’ai assumé une tâche de professeur invité à l’Arizona State University. À 22h le soir de notre arrivée, il faisait 48º C. Le temps de se loger, de s’orienter, d’inscrire les enfants à l’école, nous sommes en septembre et en train de jouir de la piscine tous les jours! Au début d’octobre, Zachary et Mathieu, 7 ans et 5 ans respectivement, rapportent de l’École Bustoz une feuille volante annonçant la tenue d’un camp de hockey qui commencera dans deux semaines à l’aréna Oceanside!

En quinze ans au Québec, je n’avais, pour ainsi dire, jamais mis les pieds à l’intérieur d’un aréna de quartier. Oceanside Arena! Cela m’intriguait! À Phoenix, l’océan est bien loin! En discutant, ma conjointe et moi avons décidé que c’était important pour les enfants de ne pas oublier d’où ils venaient—d’un pays froid, enneigé, glacé. Quelle meilleure façon, dans les circonstances, que d’inscrire les deux gars au hockey, eux qui n’avaient jamais chaussé les patins?

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En patins pour la première fois« chez nous » en Arizona

En arrivant à l’aréna à Tempe, nous avons vite compris le choix du nom Oceanside. Il se trouvait à côté d’une vaste piscine à vagues et des glissades d’eau! En traversant le seuil de l’aréna, nous changions de pays. La température a chuté de 22º, l’humidité a monté de 35%, les gens auxquels nous avions affaire venaient d’ailleurs, les responsables du camp et de la formation des équipes étaient des nordiques—du Minnesota, du Dakota du Nord et de Saskatchewan. Très dévoués à leur sport favori, ces transfuges du Nord sont nombreux en Arizona—pas assez cependant pour remplir un amphithéâtre de 18 000 places à Glendale et pour assurer la survie d’un club de hockey de la LNH.

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L’équipe des Slapshots

En Arizona, Zac et Matt eurent la piqure. Une fois de retour à la maison, ne comptait dans la vie que le hockey. Pendant des années, nous courions les arénas de la région et à travers la province : Montréal, Magog, Saint-Jean-Port-Joli, Shawinigan, Windsor, Baie-Saint-Paul, Sainte-Anne-de-la-Pérade, Sainte-Marie-de-Beauce, Lac-Etchemin et bien sûr le très réputé et recherché tournoi international de hockey pee-wee de Québec.

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Plus tard, un autre fils, Xavier, s’est ajouté au duo. Avec trois joueurs dans la famille, il y avait du hockey tous les jours de la semaine. Seuls, les parents de hockeyeur puissent connaître le plaisir (!) de telles obligations! La pratique du hockey, amorcée en Arizona, devint le moteur du foyer, la principale source d’activité sociale solidifiant des liens avec d’autres parents et le sujet de maintes et maintes conversations autour de la table.

Aujourd’hui, dans la trentaine, Zac et Matt continuent à jouer, l’un en espadrilles à Québec (dekhockey), l’autre dans une ligue de garage à l’Aréna des 4 Glaces de Brossard, là où, il y a 20 ans, il jouait en compagnie, entre autres, de Simon Gagné (Kings de Los Angeles) et contre François Beauchemin (Ducks d’Anaheim) et Vincent LeCavalier (Lightning de Tampa Bay). Au lendemain de Noël, son fils, William, deux ans, portant aux pieds son cadeau apporté par le Père Noël, donna ses premiers coups de patin!

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Le hockey dans le désert ne peut être rentable sur le plan professionnel, mais sur le plan personnel et familial, c’est une toute autre histoire. N’eut été de la Desert Hockey Association de Phoenix, notre vie à Québec aurait été tout autre!


Le dilemme du blogueur! Des étudiants me permettent de sauver la mise!

Suis-je lu? Voilà la question qui tracasse le blogueur! Surtout qu’un très infime pourcentage de lecteurs d’un blogue se donne la peine de réagir à ce qu’ils y lisent. Lorsque l’on est ancien professeur d’université ayant forgé des liens avec des milliers d’étudiants à travers les années, la question se pose peut-être moins, car certains d’entre eux avec lesquels le vieux prof a perdu contact sont plus que heureux de reprendre le fil et de lui exprimer leur reconnaissance, d’une part, et de l’enrichir de leur propre expérience, d’autre part. Voilà ce qui a été mon lot. C’est par ce billet que je les remercie de leur amitié, de leur intérêt et de leur appui fidèle.

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Étudiants inscrits au cours Le Québec et l’Amérique française, en excursion, Edmundston, NB, octobre 2001

Sébastien Lefrançois et Dominic Henry ont fait leur baccalauréat en géographie à l’Université Laval à la fin des années 1990. Au cours de leur programme, ils se sont organisés pour passer un trimestre à l’Université de Caen, en France. La capitale du Calvados est une ville que j’ai bien connue en 1963, lors d’un séjour de sept mois, y laissant un tas d’amis et y amassant une multitude de souvenirs. Les plages du débarquement (Utah, Omaha, Sword, Juno et Gold), je les connais par cœur. Heureux nous avons été de partager nos vécus respectifs. À plusieurs reprises depuis trois ans, Sébastien et Dominic me sont arrivés via le cyberespace pour témoigner de leur appréciation de ce modeste blogue. À titre d’exemples :

Quelle belle histoire! Je n’ai vu que récemment le film, et ça fait toujours plaisir de voir la Franco-Amérique sous différents angles (Dominic Henry, mars 2011, faisant allusion à mon billet consacré au long métrage hollywoodien, Secrétariat).

Hockey, famille, soleil et bière froide. Quelle belle façon de passer du bon temps! (Sébastien Lefrançois, juillet 2011, commentant le billet consacré au dekhockey à Québec).

Merci Dean pour vos aventures, pour vos decouvertes! J’aime quand les histoires se terminent… se terminent bien! (Sébastien Lefrançois, février 2011, commentant le saga de Jessie Crosby).

Simpliste, ce livre semble l’être. Dommage, je voulais me le procurer. J’ai de bons souvenirs de Volkswagen Blues (Sébastien Lefrançois, novembre 2011, face à mon évaluation du nouveau livre de Jacques Poulin).

Vu la masse de gens que je croise dans ce coin parfois les fins de semaine de beau temps, le Cap-Blanc me semble pas si méconnu que ça…du moins parfois! Et avec la jonction qui se construit avec la plage Jacques-Cartier, ils seront encore plus nombreux à voir les chevaux de M. Fafard (Sébastien Lefrançois, juillet 2011, commentant le billet consacré au cadeau que la ville de Calgary a offert à Québec).

Je suis toujours à me poser la question lorsque je vois un nom franco dans le monde du sport. D’ou vient-il ? D’ou lui vient ce nom ? Si ce n’est pas un urbain (immigration), j’arrive toujours à trouver/expliquer une origine francophone de sa région d’origine (Louisiane, Orégon, Nouvelle-Angleterre, etc.) et ce peu importe la couleur de sa peau … j’arrive même à trouver des noms franco « déformés » parfois (Bégin devenu Baigent par exemple). Merci Dean! Je vois que le sport fait toujours partie, de vos voyages, de votre vie! (Dominic Henry, février 2011, commentant le billet consacré à Jimmer Fredette, vedette du basket universitaire américain).

En 1977, le jeune Jean Guilbert, originaire de Saint-Maurice, s’est expatrié en Louisiane pour sauver le français. J’exagère à peine! Jean était de toutes les batailles et de toutes les activités qui favorisaient la sauvegarde et la promotion du français là-bas. Quelle ne fut pas ma surprise en 1979 de le retrouver, inscrit en géographie à l’Université Laval. Aujourd’hui, il est professeur au cégep de Trois-Rivières, tout en s’occupant de la ferme familiale à Saint-Maurice. Son ardeur pour la culture et pour la langue n’a pas diminué. À l’occasion de la mort d’un « monument » de la culture et de la langue françaises en Louisiane, en juillet 2008, Jean a commenté mon billet consacré au défunt Richard Guidry :

Je peux aujourd’hui dire que deux personnes ont joué un rôle déterminant dans mon intérêt pour l’Amérique française, D’abord, Richard Guidry que j’ai connu à mon arrivée à Lafayette à l’hiver 1977 et avec qui j’ai partagé la roulotte au Pont Breaux. C’était aussi mon acolyte avec qui je partageais la direction du théâtre cadjin. Cette dernière année 2008, nos échanges par courriel étaient presque quotidiens.

Il représente pour moi, l’âme de la culture cadjine, une source intarissable de connaissances. Puis Dean Louder, qui, à mon retour de la Louisiane a contribué à me faire découvrir l’ensemble de l’Amérique française, à faire le lien entre toutes ces communautés, à me faire aussi découvrir ma propre culture. C’est peut être grâce à lui si aujourd’hui, j’ai un pied à terre chez les Broussard de Kaplan en Louisiane, chez les Lavoie de Saint-Isidore, en Aberta, et chez les Gallant de l’Ile du Prince Édouard.

Avant qu’André Lord ne me fasse signe de vie en août 2011, j’avais eu le temps de l’oublier. Mais son petit mot a fait un déclic dans ma tête : j’avais dirigé il y a 35 ans le mémoire de recherche réalisé par lui et Clément Lessard. Grâce au blogue, nous avons repris contact :

Quel bonheur de refaire votre connaissance ici, grâce à l’émission « Les chemins de travers » du 24 juillet dernier. Maintenant je peux vous lire, apprendre, grâce à votre site.

Puis, il y a eu Nathalie Lerot, Normande, venue une première fois au Québec au début des années 90. Une fois de retour dans patelin, près de Coutances, et un premier diplôme obtenu de l’Université de Caen (oui, encore cette ville avec laquelle j’ai tant affinités !), elle décida de s’inscrire au doctorat et de poursuivre ses recherches sous co-tutelle (moi de l’Université Laval et Robert Herrin de l’Université de Caen). Voilà un programme d’études ambitieux qui nécessitait un retour au Québec avec séjour prolongé. Nous avons eu le plaisir de nous côtoyer intensément au point de découvrir que nous partagions le même anniversaire de naissance. La soutenance de sa thèse a eu lieu à Caen. J’y étais, puis, nous avons perdu contact. Ce blogue a facilité la reprise :

J’aime beaucoup ce blogue. Cela me permet de suivre régulièrement tes péripéties francophones (courriel, 23 février 2011).

Aujourd’hui, Nathalie occupe une fonction importante à l’École de la Deuxième Chance en Yvelines, à dix kilomètres de Versailles. Le concept d’École de la Deuxième Chance émane des objectifs définis par le Livre Blanc enseigner et apprendre : vers la société cognitive, proposé par Édith Cresson et adopté par la Commission Européenne en 1995. L’École de la Deuxième Chance s’inscrit dans le dispositif d’insertion et de formation pour des jeunes adultes âgés de 18 à 25 ans, sortis du système scolaire depuis plus d’un an sans diplôme ni qualification. L’objectif de l’école est de permettre aux stagiaires d’accéder à un métier choisi, soit en intégrant une formation qualifiante soit en entrant directement en emploi.

Ces jours-ci, elle a partagé avec moi une belle aventure et une belle rencontre lui rappelant ses années à Québec que je partage avec les lecteurs de ce billet :

Le Bel Espoir, cette goélette de la flotte du père Jaouen glisse vers moi en cette fin de journée du mois de janvier. Ce prêtre met ses deux vieux gréements à disposition des jeunes en difficulté pour de long périple vers les Antilles. Depuis le pont, j’entends mon nom : Nathalie. Je l’entends notamment d’une voix féminine alors que seuls des hommes de l’école sont montés à bord.

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Cette année, le Bel Espoir a été loué par Thalassa pour caboter le long du littoral français. L’émission de France 3 est diffusée en direct le vendredi soir. Entre chaque vendredi l’AJD, l’association du jeudi et du dimanche du père Jaouen, offre aux écoles d’insertion un court séjour d’une semaine sur le trois mâts. Il ne s’agit pas d’une croisière, nous partageons tous les tâches : les quarts de jour et de nuit, le service, les calculs de localisation, la tenue de la barre, hisser et affaler les différentes voiles, sans oublier les corvées de ravitaillement et de patates!!!

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Nathalie (au milieu) et deux collègues de travail

Quelle fut ma surprise, en montant à bord sur le ponton des chantiers à Nantes d’entendre cet accent familier : l’accent québécois de Val. Val, j’identifie enfin la voix féminine qui me halait du bateau. Val arrivait de son Abitibi natale pour travailler sur le chantier naval du père Jaouen sur l’Aber Wrac’h. Installée depuis un mois, l’AJD lui propose d’embarquer un mois comme cuisinière sur le Bel Espoir II. Ainsi démarra l’aventure atlantique de cette jeune abitibienne de 20 ans.

bon vent à tous

Nathalie

Choyé par la vie, ayant pu occuper ce que je considère être le plus bel emploi au monde, pendant plus de trois décennies, je remercie les étudiants qui m’ont comblé par leur esprit vif et leur valeur sûre et qui continuent à m’épater par leurs réalisations et par leurs mots gentils et généreux.


Tim Tebow, un Franco ?

Par ses prouesses sur un terrain de football conjuguées à sa foi religieuse, le quart-arrière des Broncos de Denver, Tim Tebow, garde en haleine, depuis le mois d’octobre, les amateurs de football professionnel aux États-Unis. À l’époque où il jouait pour l’université de la Floride (2006-2009), il s’était fait une réputation de meilleur joueur de football universitaire au pays.

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Tim en prière en milieu de travail
Depuis ses plus récents succès, couronnés le 7 janvier, par une victoire au tournoi de fin de saison de la Ligue nationale de football (LNF) contre les Steelers de Pittsburgh—avant le fiasco du 14 janvier contre les Patriotes de la Nouvelle-Angleterre—la Droite chrétienne du Parti républicain (largement dominé par des « Tea Partistes ») l’a pris comme fétiche et les média ne cessent d’en parler.
Évidemment, la question qui me tracasse depuis que Tim Tebow a commencé à faire les manchettes en tant que quart-arrière des Gators de l’université de la Floride est la suivante : Est-ce que Tim Tebow est Franco? Est-il descendant de Canadien français ou d’Acadien? Son nom, est-ce une déformation de Thibeault, Thibeau, Thibeaux, Tiebout ou Thibaud?
Le peu de recherche effectué à ce jour m’incite à dire non, mais j’aimerais beaucoup que quelqu’un me corrige en me montrant le contraire! Mais d’abord, un petit mot sur cet athlète aux scrupules irréprochables.
Timothy Richard Tebow est né le 14 août 1987 à Manille, capitale des Philippines, dernier de cinq enfants de Robert Ramsey Tebow II et Pamela Elaine Pemberton, missionnaires évangéliques. La légende veut que Mme Pemberton ait connu, avec Tim, une grossesse particulièrement difficile. Monsieur Tebow aurait, à ce moment-là, promis à Dieu que si les deux parties (mère et bébé) pouvaient avoir la vie sauve, il ferait de cet enfant un prédicateur, un ambassadeur en son nom. Trois ans plus tard, la famille Tebow réintègre l’État de la Floride où sera fondée l’Association évangélique Bob Tebow (http://www.btea.org/) et où s’épanouira un jeune footballeur qui, tout au long de son illustre carrière de quatre ans à l’université de la Floride, prêcherait la Bonne Nouvelle par des gestes publics posés sur le terrain de football. Par exemple, à chaque match, Tim inscrivait au visage, à la vue des opposants et des millions de téléspectateurs, une référence biblique.
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Pour illustrer l’impact du jeune homme sur l’imaginaire américain, je prends le propos de ma nièce—jeune mère de deux enfants habitant l’Ohio—affiché la semaine dernière sur Facebook :
Tim Tebow I love you with all my heart.
Ce à quoi j’ai répliqué :
Pourquoi donc ?
Sa réponse est venue tout de suite :
Haha, Uncle Dean I was just watching something on TV about how, before each game, he singles out a fan with an illness (and their family) and meets and talks to them before and after the games. These are fans of his that usually have terminal illnesses I think, and so he’s providing this fun and exciting opportunity for them. But it doesn’t seem like he’s showy or braggy about it. He just seems like a great guy! Not your typical famous football player!

Donc, bon prince, un gars qui aime son public et qui s’en soucie et qui, selon elle, ne fait pas cela pour mousser son image ni pour vendre des produits…même s’il possède de nombreux contrats signés avec des compagnies d’équipement sportif !
Retournons à ses origines ancestrales, sont-elles canayenne ou acadienne ? Suivons la lignée des Tebow :
Timothy Richard Tebow, né le 14 août 1987 à Manille.
Père : Robert Ramsey Tebow II, né le 27 janvier 1948 en Floride.
Grand-père : Robert Ramsey Tebow, né le 21 mai 1921 en Ohio ; décédé le 4 avril 1977 en Orégon.
Arrière-grand-père : Lee Robert Tebow, né le 27 mai 1895 en Ohio ; décédé en décembre 1979 en Ohio.
Arrière-arrière-grand-père : James Ora Tebow, né le 13 février 1873 en Ohio ; décédé le 28 février 1952 en Ohio.
Arrière-arrière-arrière-grand-père : James O. Tebow, né le 29 janvier 1841 en Ohio ; décédé le 13 décembre 1891 en Ohio.
Arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père ; Peter Tebow, né circa 1803 au New Jersey ; décédé le 20 novembre 1868 en Ohio.
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père : Ryer (Uriah) Tebow né le 9 mai 1784 au New Jersey ; décédé le 14 avril 1820 en Ohio.
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père : Pieter Tebow, né le 3 août 1755, au New Jersey.
Donc, en remontant à l’année de la Déportation des Acadiens (neuf générations), quatre ans avant la Conquête de la Nouvelle-France, aucune trace des ancêtres de Tim Tebow en dehors du territoire des États-Unis d’Amérique n’est apparente. Et on remarque qu’au baptême de Pieter, en 1755, les deux témoins s’appelaient Pieter et Margargriet Debouw, nom à consonance néerlandophone. Donc, petit indice quant aux origines familiales !
En remontant la filière encore plus loin, mon ami historien, Gaston Deschênes, lui aussi blogueur chez Septentrion (septentrion-blogue.dev.ixmedia.com/wp-content/uploads/archives/gastondeschenes/), réussit possiblement à résoudre l’énigme.
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père : Ryer Tibout, né en 1723/24 au New Jersey.
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père : Peter Tebow, né au New Jersey, marié en 1716 au New Jersey.
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père : Andries Tebow (écrit aussi Thybaut, Tiebaut, Tibout, Thibout, Tebou, Thibou et Tiebout ), date de naissance incomplète ; décédé avant 1705.
Enfin, premier ancêtre de Tim Tebow à frôler le sol américain, son arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père Jan Tiebout (parfois signé Jean Thybaut), né en 1638 à Bruges, en Flandre (Belgique) ; décédé en 1700 à Brooklyn, New Harlem (New York). Pasteur de la religion néerlandaise reformée (Dutch reformed), Jan descendait sans doute des Huguenots réfugiés en Flandre.
Alors, Tom Tebow est-il Franco d’Amérique ? Certainement pas selon la définition conventionnelle du terme élaboré dans les ouvrages publiés au Québec, dont le nôtre, Franco-Amérique. Toutefois, la généalogie de ce méga star américain ouvre sur une réalité historique et culturelle méconnue qui mériterait d’être approfondie et qui en dit long sur la complexité de l’ethnicité française (French ethnicity) aux États-Unis.

Parole aux aînés de l’AARQ

L’un des défis auquel fait face l’Association acadienne de la région de Québec—et sans doute la plupart des organismes acadiens au Québec—c’est celui de la continuité, autrement dit celui de la relève. L’ensemble des membres est vieillissant. Un coup d’œil sur la photo des cinquante personnes ayant participé au dîner de la fête des rois révèle la pénurie de membres de moins 65 ans (voir billet précédent). Pourquoi cette absence de jeunesse?

Les membres de l’AARQ se divisent en quatre groupes : (1) les gens de souche acadienne nés dans une des « petites cadies » québécoises, comme Maria, Bonaventure, Havre Saint-Pierre, Natashquan, Saint-Grégoire-de-Nicolet, Saint-Jacques-de-l’Achigan, venus en ville depuis le début de la Révolution tranquille (donc des produits de l’exode rural québécois); (2) les immigrants des Provinces maritimes, surtout du Nouveau-Brunswick (ceux de fraiche date sont peu nombreux au sein de l’AARQ, la plupart d’entre eux étant arrivés aux années 60 ou 70); (3) les Québécois de souche, surtout urbain, ayant découvert leur acadienété sur le tard; (4) les époux ou épouses québécois des gens de la première catégorie. Peu importe la catégorie, les enfants de ces gens, nés et élevés pour la plupart au Québec, semblent avoir rompu avec l’identité ancestrale, se considérant avant tout « québécois ». Comme un Lévisien de catégorie 1, qui a fait sa vie d’enseignant à Amqui (autre petite cadie) pendant plus 40 ans avant de se rapprocher, à la retraite, de ses enfants et petits-enfants et des services médicaux de première ligne, me l’a avoué dimanche dernier à ce sujet : « J’ai parlé à mes enfants de l’Association et de nos activités, mais cela ne leur dit rien »!

À la suite du dîner de la fête des rois, la parole fut donnée aux 13 personnes présentes de plus de 80 ans pour qu’elles partagent avec les plus jeunes leur vécu et leur sagesse. Ici, retenons les expériences de six intervenants, un de la catégorie 1, trois de la catégorie 2, un de la catégorie 3 et une de la catégorie 4.

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Jean-Yves Landry est l’ancien président de la Société d’histoire de Sainte-Foy et vice-président de l’AARQ. Originaire de Matane, il est le dernier survivant de sa grande famille. Il vient tout juste de céder sa place au cimetière Belmont à sa sœur. Il se demande maintenant où il se retrouvera au moment du grand départ. La vocation et la passion de cet homme de 81 ans? C’est bien simple : l’histoire des Acadiens…surtout celle de ceux qui sont arrivés au Québec en 1756 à la suite du Grand Dérangement. Jean-Yves faisait remarquer aux convives qu’ils poursuivaient leurs activités de la journée, au 3200, rue d’Amours, sur les terres appartenant autrefois à leurs ancêtres acadiens venus en réfugiés. « Les Acadiens ont pris leur place au Québec », c’est là le témoignage émouvant de Jean-Yves Landry.

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La Reine du jour, Lorraine Arsenault, quitta son île à 14 ans pour étudier à l’École ménagère de Plessisville (EMP). Elle venait de terminer sa neuvième année d’études. À cette époque, à Abraham-Village (I-P-É), les études se terminaient à cet âge-là. Si on voulait poursuivre, il fallait partir, mais comment partir quand on est fille d’une femme devenue veuve à 39 ans? Heureusement, dans sa vie, il y a eu le patriote acadien Henri Blanchard (1881-1968), professeur à l’université de l’Ile-du-Prince-Édouard et président-fondateur de la Société Saint-Thomas d’Aquin, qui se rendait régulièrement au Québec y quêter des places dans les écoles et collèges pour des Acadiens de l’île. Grâce à lui, Lorraine a obtenu une bourse pour étudier à l’ÉMP. À la blague, Lorraine chuchote que cela voulait dire « enfants mal pris ». Pour payer son billet de train de Moncton à Québec, les Sœurs du sanctuaire ont organisé un Bingo. « Ces trois années à Plessisville ont changé ma vie »! conclut Lorraine Arsenault.

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Né à Saint-Quentin, au Nouveau-Brunswick, Albert Gagnon a déménage en Abitibi à l’âge de deux ans et demi. C’est l’époque de la colonisation. C’est l’époque de la Crise économique! Ils seront 16 enfants, 10 garçons et 6 filles. Au début des années 50, en quête d’une meilleure vie, Albert et son frère s’enrôlent. Le Canada est en guerre en Corée. « Cela ne pourrait pas être pire là-bas qu’ici » se sont-ils dit les garçons. Ils se rendent d’abord à Grand-Mère, puis à Montréal où ils apprennent que le pont de Trois-Rivières vient de s’effondrer. De Montréal à Wainwright, en Alberta, pour un peu d’entraînement. Ensuite, Seattle et, enfin, la Corée. Son frère y trouvera la mort et y sera enterré.

Le 7 novembre dernier, Albert faisait partie d’un contingent de huit Canadiens à se rendre en Corée commémorer le soixantième anniversaire de la Guerre de Corée. Il était le seul représentant du Québec et le seul véritable soldat, un petit caporal, accompagné de cinq généraux et de deux majors—tous du Canada anglais.

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Les Allain, c’est une grande famille de Négouac, au Nouveau-Brunswick. Elvine en fait partie. À 16 ans, elle est venue à Québec comme dame de compagnie. Trois ans plus tard, en 1942, elle lie son destin à celui d’un homme avec lequel elle passera les 69 prochaines années de sa vie, surtout à Valleyfield, au bord de l’eau dans une maison de leur propre fabrication, mais plus tard, pour se rapprocher de leur fils, notaire à Québec, à Sainte-Foy, en arrière du Château Bonne Entente. Son mari l’a quittée le mois dernier à la suite d’une vilaine chute dans leur cuisine en rénovation. Ils n’ont donc pas réalisé leur rêve le plus cher, celui de fêter ensemble en 2012 leur 70e anniversaire de mariage.

« J’ai dû lutter pour devenir ce que je suis, une décoratrice », relate Elvine. Heureusement qu’elle s’est toujours trouvée bien entourée. Dans les moments de découragement, les amis et ses patrons lui disaient « Tu peux réussir, tout ce que tu touches, tu as de la facilité… » À 89 ans, après toutes ses années au Québec, et malgré ses nombreuses réalisations, Elvine, comme plusieurs de son pays natal, souffre de ce qu’ils considèrent une inadéquation linguistique : « Je ne me sens pas l’aise en français, je suis bien meilleur en anglais »!

Cela ne paraît pas!

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Ce n’est qu’il y a sept ans, en rencontrant Rita Cormier de la Garde, présidente de l’AARQ, lors des activités paroissiales, que Fernand ait pris véritablement connaissance de ses racines acadiennes. Fils de Francis Boudreau, député Unioniste de Saint-Sauveur de 1944 à 1970, Fernand a grandi avec Duplessis et l’Union nationale. Qu’y avait-t-il de plus Québécois pur que cela?

Marié à Thérèse Benoît depuis 62 ans, ils ont quatre enfants et 13 petits-enfants. « Plus on s’endure, plus on s’aime » dit-il. Fernand Boudreau termine par rendre hommage à ses vaillants ancêtres acadiens des Ïles-de-la-Madeleine et de la Côte-Nord.

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Doyenne de l’AARQ à 92 ans, Renée Falardeau a connu les Acadiens grâce à son mari. Fille de Québec, secrétaire pendant 25 ans et veuve à 45 ans, elle se marie en 1981, en deuxième noces, à Benoît Babin, Acadien né à Maria, en Gaspésie, et décédé à Québec en 2007. « Pendant 26 ans, j’en ai entendu parler de la Gaspésie…et des Acadiens », raconte-t-elle sur un ton résigné.

Insistant sur le fait qu’elle n’ait rien d’Acadien en elle, Renée leur consentit néanmoins beaucoup d’affection et toute son admiration et avoue se sentir bien avec eux.

Tout comme moi d’ailleurs!