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Lettre à M. Champagne – Forêt et société en Mauricie – 07

Québec, le 23 août 2023

À :
L’honorable François-Philippe Champagne
Député de Saint-Maurice—Champlain, Québec
Ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie
1-632, avenue de Grand-Mère
Shawinigan, Québec
G9T 2H5

CC :
L’honorable Steven Guilbeault
Député de Laurier—Sainte-Marie
Ministre de l’Environnement et du Changement climatique
1010-800 boul. de Maisonneuve E
Montréal, Québec
H2L 4L8

Objet : Forêt et société en Mauricie de René Hardy et Normand Séguin

M. Champagne,

La forêt est indissociable de notre histoire. Elle a d’abord été un refuge et une mère nourricière pour les premiers peuples qui occupaient nos régions. Lorsque les Européens se sont installés le long du fleuve Saint-Laurent, ils ont rapidement exploité le bois pour bâtir leurs habtitations, pour se chauffer et pour se nourrir. Les terres défrichées ont donné naissance au territoire que nous connaissons aujourd’hui. Lorsque les britanniques ont eu besoin de bois pour construire des bateaux, c’est ici qu’ils sont venu le chercher. Et enfin, l’industrie forestière s’est modernisée et à donner du travail à bien des habitants. Tout un pan de notre culture est directement associé au bois, pensons aux draveurs, aux bûcherons et à tout le folklore qui y est associé.

Votre région (et celle de votre collègue Steven Guilbeault, natif de La Tuque) est directement associée à l’industrie forestière, je ne vous apprends rien. Dans leur ouvrage Forêt et société en Mauricie, référence en la matière, René Hary et Normand Séguin reviennent sur l’essor de l’industrie forestière, particulièrement sur celle de l’avènement des usines de pâte à papier. C’est une lecture essentielle pour celles et ceux qui tiennent à bien comprendre ce secteur économique.

En parlant de papier, la pandémie a fortement chamboulé les papetières. La forte croissance des ventes en lignes a créé une grosse demande pour les boîtes de carton et les enveloppes, avec pour conséquence une hausse importante des produits issus des pâtes… dont le papier. Dans les deux dernières années, il ne se passait pas une semaine sans que les éditeurs reçoivent une lettre d’un imprimeur ou d’un fabricant de papier expliquant que tel papier n’était plus disponible ou que tel autre voyait son prix majoré de 8 % ou 12 %… Un rapide exercice me mène à constater que les coûts d’impression, fortement tributaires du coût du papier, ont connu une hausse jusqu’à 50% dans les trois dernières années !

Vous remarquerez cependant que le prix des livres n’a pas augmenté dans les mêmes proportions. Une chance pour les lectrices et les lecteurs,  mais la situation économique des éditeurs ne s’améliore pas. La vente des livres étant de facto moins rentables, les maison d’édition doivent compter sur d’autres sources de revenus , comme par exemple les revenus tirés des licences de reproduction gérées par Copibec. Or, en l’absence d’une législation protégant ces droits, les revenus sont à la baisse eux-aussi depuis plusieurs années. C’est la quadrature du cercle : hausse des coûts, baisse des revenus, et le merveilleux secteur économique qu’on a mis un demi-siècle à bâtir s’éffondre sur lui-même, faute d’action politique.

Il n’est pourtant pas trop tard. Dans une chronique d’opinion publiée le 2 août dans le Globe and Mail, la chroniqueuse Kate Taylor s’adressait la nouvelle ministre du Patrimoine canadien, votre collègue Mme Pascale St-Onge, en lui disant que sa prochaine tâche serait de vous convaincre que les créateurs canadiens ont assez soufferts. Saurez-vous l’entendre ?

Bonne lecture,

Gilles Herman
Éditeur

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