© Alice Guéricolas-Gagné

Lettre à M. Trudeau – La Politique du rire – 06

Québec, le 16 août 2023

À :
Le très honorable Justin Trudeau
Premier ministre
Député de Papineau
220-1100, Crémazie Est
Montréal, Québec
H2P 2X2

CC :
L’honorable François-Philippe Champagne
Député de Saint-Maurice—Champlain, Québec
Ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie
1-632, avenue de Grand-Mère
Shawinigan, Québec
G9T 2H5

Objet : La Politique du rire, de Jean-Simon Gagné et Pascale Guéricolas

« Les programmes des partis politiques, c’est comme une police d’assurance : personne ne les lit. » Daniel Johnson (p. 79)

Cher premier ministre,

Depuis maintenant quelques semaines, j’ai entrepris d’entretenir une correspondance avec votre ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, M. François-Philippe Champagne, afin de l’éclairer sur l’urgence de procéder à la révision de la Loi sur le droit d’auteur, entamée en 2015. Et j’en profite pour lui faire connaître chaque semaine un livre publié au Septentrion.

Dans la lettre de mandat que vous lui avez transmise le 16 décembre 2021, vous lui demandiez de « travailler avec le ministre du Patrimoine canadien pour modifier la Loi sur le droit d’auteur afin de protéger plus efficacement les artistes, les créateurs et les détenteurs d’un droit d’auteur, y compris permettre le droit de revente pour les artistes. »

Ce mandat avait réjoui le secteur du livre. Enfin, après six longues années à attendre un signal, la révision de la Loi sur le droit d’auteur allait se faire. Qui plus est, dans le budget de 2022, votre gouvernement faisait inscrire qu’il « est déterminé à faire en sorte que la Loi sur le droit d’auteur protège tous les créateurs et tous les titulaires de droits d’auteur. Par conséquent, le gouvernement s’efforcera également d’assurer la durabilité de l’industrie de l’édition de livres éducatifs, ce qui comprend une rémunération équitable pour les créateurs et les titulaires de droits d’auteur, ainsi qu’un marché moderne et novateur qui peut servir efficacement les utilisateurs de droits d’auteur. » L’affaire était entendue, nous pouvions plier bagage, le message était passé… sauf que.

Sauf que, en ce 16 août 2023, rien n’a été fait. Et quand je dis rien, ce n’est pas faute des auteurs, éditeurs et autres représentants des titulaires de droits qui ont pourtant multiplié les rencontres avec les employés de Patrimoine canadien et d’Innovation, Sciences et Industrie. Si tout ce beau monde s’est activé pendant des mois, je dois vous dire que je suis particulièrement indigné de savoir que M. Champagne n’a jamais eu une seule rencontre de travail avec son homologue du Patrimoine canadien, M. Rodriguez, pour discuter de cette question. Je répète : malgré le mandat que vous lui avez confié de s’occuper de cette question avec son collègue, il n’a jamais daigné en deux ans de le rencontrer pour discuter de ce sujet précis.

Cerise sur le gâteau, après des mois de travail avec les équipes de la colline parlementaire, le sous-ministre adjoint principal du Secteur des stratégies et politiques d’innovation nous gratifiait de ce message : « Bien que je reconnaisse que de nombreuses rumeurs ont circulé concernant un projet de loi à venir [… ] » Cette « rumeur » venait en fait du conseiller principal du ministère  sur cette question, qui nous avait formellement assuré que la voie législative avait été retenue. Le travail acharné de plusieurs équipes devenait donc subitement une rumeur, un bruit de couloir. Comment ne pas penser que nous nous faisons mener en bateau depuis le début ?

L97828944883621J’en viens donc à la lecture de la semaine : La Politique du rire, par les journalistes Jean-Simon Gagné et Pascale Guéricolas. Rien d’autre ne me vient en tête quand je pense à cette énorme farce à laquelle je participe bien malgré moi. Jean-Simon et Pascale (vous me permettrez cette familiarité d’éditeur) se paient une tranche de rire aux dépens de la classe politique, tout en nous informant sur les origines de ces blagues et du bienfait de la dérision.  Même les blagues ont une histoire !

Je terminerai donc sur cette courte plaisanterie (p. 51) :

Un jeune député demande à un vétéran ministre, lors d’une soirée bien arrosée : « Monsieur, est-ce qu’un politicien doit dire la vérité ? » Et le ministre répond: « Oui, mon fils. Dans le difficile métier qui est le nôtre, nous devons vraiment être prêts à tout. »

Bonne lecture,

Gilles Herman
Éditeur

© Alice Guéricolas-Gagné

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