Québec, le 12 juillet 2023
À :
L’honorable François-Philippe Champagne
Député de Saint-Maurice—Champlain, Québec
Ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie
1-632, avenue de Grand-Mère
Shawinigan, Québec
G9T 2H5
CC :
L’honorable Jean-Yves Duclos
Député de Québec
Ministre de la Santé
600, Boulevard Charest E #201
Québec, Québec
G1K 3J4
Monsieur le ministre,
Poursuivant ma mission de partager avec vous à la fois une part d’histoire du Québec, mais surtout ma frustration d’entrepreneur de voir votre gouvernement faire preuve de négligence dans le dossier de la révision de la Loi sur le droit d’auteur, je vous fais parvenir aujourd’hui un exemplaire de Brève histoire des épidémies au Québec, de Denis Goulet.
Plusieurs raisons me poussent à vous en recommander la lecture. Tout d’abord, Denis Goulet passe une bonne partie de son année dans sa résidence située non loin de Shawinigan. Votre désintérêt pour les revenus des écrivaines et des écrivains va avoir un impact direct sur les citoyennes et les citoyens que vous représentez. M. Goulet est un spécialiste de l’histoire de la médecine, lui-même enseigne d’ailleurs cette matière à l’Université de Montréal. Ses ouvrages sont régulièrement reproduits par les établissements d’enseignement pour documenter des notes de cours. Et pourtant, ses revenus d’auteur liés à cette pratique sont en baisse au Québec et se sont tout simplement volatilisés dans le reste du Canada.
Une lecture de l’histoire des épidémies au Québec permet aussi de réfléchir à la crise récente que nous avons traversée. Ce fut un moment de grande solidarité de la part du peuple canadien qui, par son civisme, a permis au personnel soignant de tenir le coup et au système de santé tout entier de rester debout. On apprend par cette lecture que nombre de problématiques liées à la santé avaient déjà été identifiées dans le passé. Mais l’humain étant ce qu’il est, le manque de vigilance et l’action politique à court terme n’a pas permis la pérennité des bonnes pratiques et c’est donc démunis de toute expérience que nous avons dû faire face à la pandémie de COVID-19.
Il y a un autre parallèle intéressant à tracer. Savez-vous comment est appelée à l’étranger la modernisation de la Loi du droit d’auteur canadienne de 2012 ? The Canadian Flu – la grippe canadienne. Porter Anderson, rédacteur en chef du magazine Pubishing Perspectives, nous l’expliquait en décembre 2021 ainsi :
« Non seulement la crise du droit d’auteur au Canada est maintenant appelée ‘’la grippe canadienne’’ dans les cercles internationaux de l’édition de livres, mais – pour ceux qui aiment les bons côtés – on pense qu’elle fonctionne comme une vaccination par l’exemple pour aider à conjurer une législation tout aussi désastreuse sur les marchés éloignés des côtes canadiennes. Par exemple, certains observateurs supposent que lorsque Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du Sud, a renvoyé sans signature un projet de loi de ‘’réforme’’ du droit d’auteur au parlement en juillet 2020, il a probablement été influencé par les effets catastrophiques de la loi canadienne de 2012 sur la modernisation du droit d’auteur. » (https://publishingperspectives.com/2021/12/the-canadian-copyright-crisis-at-years-end-a-decades-struggle-covid19)
Le Canada n’est plus seulement un cancre du droit d’auteur sur le plan international, il devient aussi un pestiféré, un acteur dont il faut se méfier et se tenir loin. Faut-il craindre une mise en quarantaine de nos autrices et auteurs et de leurs œuvres ? Espérons ne pas nous rendre jusque-là. Le vaccin est pourtant sur votre bureau depuis mai 2019. La recommandation 18 du rapport du Comité permanent du patrimoine canadien intitulé Paradigmes changeants permettrait de réinstaurer un équilibre dans le secteur : « Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur le droit d’auteur pour préciser que les dispositions relatives à l’utilisation équitable ne s’appliquent pas aux établissements d’enseignement si l’œuvre est accessible sur le marché. »
Monsieur le ministre, toute la preuve a été faite que cette révision est nécessaire si vous voulez éviter le décès prématuré du secteur du livre, qu’attendez-vous pour administrer le remède ?
Sincères salutations,
Gilles Herman
Éditeur