En 1835, trois commerçants ont construit sur une colline une petite maison en bois rond. Elle deviendrait magasin général et servirait d’ancre à la Place centrale autour de laquelle les résidences s’étaleraient. En hommage à la ville anglaise de grande renommée et à son université, la nouvelle ville a reçu leur nom. En la baptisant ainsi, les fondateurs espéraient que Oxford serait choisie comme site de la première université publique de l’État du Mississippi. Cela s’est réalisé onze ans plus tard. Aujourd’hui, cette Place, que l’on appelle Town Square est au centre de la vie de cette ville universitaire de 12 000 habitants. En dehors de l’université, l’institution la plus
vénérable est la librairie Square Books (située au coin, de couleur rougeâtre) qui offre, dans une ambiance littéraire stimulante, un vaste éventail de livres et une sélection de fiction régionale remarquable. Mais Square Books est plus qu’une simple librairie. C’est ici, m’a-t-on appris, que les Oxfordois se rencontrent pour partager discrètement, à voix basse, leurs joies et leurs peines. Les questions de l’heure à Oxford se ruminent ici. La ville n’a pas été épargnée par la guerre civile. Occupée dès 1862 par les armées du Nord dirigées par le Général Ulysses S. Grant, elle fut dévastée et brûlée deux ans plus tard par le Général A.J. « Whisky » Smith.
Oxford a produit l’un des plus grands écrivains états-uniens du siècle dernier, William Faulkner. Gagnant en 1949 du prix Nobel en littérature, cet auteur prolifique a immortalisé sa ville, son comté et ses voisins. Pour la modique somme de 6 000$, Faulkner s’est porté acquéreur en 1930 d’une maison construite en 1844. Il l’a rénovée, l’a
entourée de cornouiller et d’azalées et lui a donné un nom, Rowan Oak en hommage à la légende de l’arbre Rowan, perçu par les peuples celtiques comme ayant des pouvoirs magiques. Jamais bien accepté et toujours mal aimé et mal compris de son vivant, Faulkner vit sa gloire de manière posthume. Depuis 1962, il repose au magnifique cimetière d’Oxford où ses lecteurs et lectrices viennent nombreux, de près et de loin, se recueillir devant sa pierre tombale. Ils y jettent des pièces de monnaie pour permettre à l’auteur dont l’inspiration se trouvait souvent mêlée aux vapeurs de l’alcool de s’acheter un p‘tit « drink ».
Fondée en 1848, l’université du Mississippi a fait les manchettes aux États-Unis 112 ans plus tard lorsque James Meredith devint le premier Afro-Américain à y suivre des cours. À l’époque, pour lui faire entrer—pour « intégrer » cette institution du haut savoir réservée aux étudiants blancs—il a fallu l’intervention des forces fédérales. Aujourd’hui, de sa colonne, un soldat confédéré surveille attentivement l’entrée principale de ce magnifique campus qui porte affectueusement le nom d’ « Ole Miss ».