Franco-Amérique, sujet de conversation à Grand Sault.

Aujourd’hui à Grand Sault, au Nouveau-Brunswick, eut lieu le Café littéraire du mois de novembre organisé par la directrice de la bibliothèque municipale, Émilie Lefrançois. Six personnes, toutes des femmes, se faisaient des comptes rendus de leurs dernières lectures. Laura Beaulieu, du village avoisinant de Drummond, a profité de
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l’occasion pour parler à ses concitoyennes du livre Franco-Amérique, avec des clins d’œil sur Vision et visages de la Franco-Amérique, ainsi que sur le contenu de ce carnet. Étant donné le contexte régional de son intervention, elle a insisté surtout, mais pas exclusivement, sur le chapitre de Franco-Amérique consacré à l’Acadie (« Acadie 101 ») et sur l’encart intitulé « Drummond, NB, pas Drummondville, QC ».
Son propos fut reçu avec émerveillement et enthousiasme par le petit groupe qui découvrait pour la première fois l’étalement des Franco à travers le continent et se rendait compte des ponts à bâtir entre les nombreux îlots de l’Archipel franco en Amérique du Nord.


La Franco-Amérique sous le soleil de l’Arizona

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Brian Friedman, directeur du département de développement économique de Glendale, là où sont situés le nouveau stade de football des Cardinaux de la Ligue nationale de football et le nouvel aréna des Coyotes de la Ligue nationale de hockey, et époux de Catherine Dubrueil du chemin Royal à Beauport, me le disait clairement hier. L’Arizona, c’est tout à fait l’opposé du Québec : chaud/froid, sable/neige, aride/humide, désert/forêt, cactus/conifère, brun/vert, fusils/fleurs, conservateur/progressiste, Hummer/VW…! Je le savais. En 1985-86, j’avais passé un an comme professeur invité à Arizona State University. C’était donc avec plaisir que je me retrouvais de nouveau sur le campus pour faire connaître notre nouveau livre Franco-Amérique en m’adressant aux étudiants de premier cycle inscrits aux cours de français et aux membres de l’Alliance française. Deux conférences, l’une le mercredi, l’autre le vendredi, chacune suivie de la projection d’un film de Denys Arcand, d’abord L’âge des ténèbres, ensuite Invasions barbares. Donc, deux soirées québécoises sous les palmiers!
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Par mes deux conférences intitulées : La Franco-Amérique : lieux d’histoire, de mémoire et de vie et La Franco-Amérique : perspectives autobiographiques, je pense avoir réussi à créer un certain engouement pour le Québec, Québec et le fait franco en Amérique. Les deux longs métrages, s’ils ont été bien compris par l’auditoire, ont tempéré mon propos plutôt ensoleillé, lui jetant une certaine ombre et le teintant de pessimisme ou de réalisme.
Après San Diego et Los Angeles, c’est Phoenix la grande ville états-unienne la plus loin de Montréal. De toute évidence, la distance amenuise le niveau de connaissance que les jeunes peuvent avoir sur le Québec, voire sur le Canada. À titre d’exemple, en ce 22 octobre, personne dans la salle n’était au courant des élections fédérales tenues au Canada huit jours auparavant. Personne non plus ne pouvait nommer le Premier ministre du Canada. Évidemment, je les ai châtiés ou taquinés, selon la perspective, en leur disant qu’ils devraient avoir honte de leur ignorance, car au Québec et au Canada, nous savons « tout » sur leur course à la présidence qui tire heureusement à sa fin. Chose étonnante : la solidité des appuis au candidat Obama ici en Arizona, État que représente à Washington depuis un quart de siècle le candidat McCain.


Essoyes : une journée en présence d’un Pharisien

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C’est par un concours de circonstances que j’ai eu la bonne fortune de connaître Bernard Pharisien (voir sur ce blogue le texte sur Victor Charigot) et de me faire inviter à visiter le 15 octobre Essoyes, modeste village bâti au bord de l’Ource (affluent de la Seine), aux confins de la Champagne et de la Bourgogne. Il s’agit non seulement du
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Vallée de l’Ource à partir du plateau de Blu, 357 mètres
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L’Ource au coeur du village d’Essoyes
village natal de Bernard., mais aussi de celui du richissime Auguste Hériot, fondateur des Grands Magasins et du Grand Hôtel du Louvre, et de son frère, Olympe, héritier de la fortune d’Auguste, ce dernier décédé prématurément en 1879. Cependant, aujourd’hui, Essoyes est davantage connu comme le village d’adoption du grand peintre, Pierre-Auguste Renoir qui y séjourna et y peignit de 1888 à 1919.
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À ce propos, son fils Jean, bien connu pour son œuvre cinématographique à la fois en France et aux États-Unis dit :
Essoyes, le pays natal de ma mère et de Gabrielle (modèle préféré de son père qui figurerait sur plusieurs centaines d’oeuvres) est un village resté pur. Pour moi, il n’existe pas de village comparable dans le monde entier. J’y ai vécu les plus belles années de mon enfance.
C’est réputé—et la bible le confirme—que les pharisiens constituent une classe à part. Le mien ne fait pas exception. Bernard m’a tout simplement ébloui par ses connaissances, ses perceptions, ses intuitions… son énergie. Un véritable tourbillon sur le terrain, connu de tous les villageois, grands et petits, même s’il n’y a pas vécu en permanence depuis un demi-siècle, Bernard Pharisien ne lésine point pour découvrir, comprendre et mettre en valeur le patrimoine de ce petit coin du département de l’Aube.
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La visite commence devant le château d’Essoyes érigé à sa propre gloire, entre 1890 et 1892, par Olympe Hériot, frère cadet de l’autre, qui se vit brusquement propulsé d’une carrière médiocre de militaire à la tête d’une fortune colossale. Ce château, son troisième si on compte la Villa Hériot au Vésinet, en banlieue ouest de Paris, et le magnifique Château de la Boissière, situé près de Rambouillet auxquels il convient d’ajouter un somptueux hôtel particulier parisien dans le quartier des Champs-Elysées, renvoie une image intéressante de son bâtisseur. Son monogramme (OH) orne chaque fenêtre, chaque porte, chaque grille en fer forgé et se trouve même au sommet du bâtiment principal sur le support du paratonnerre. Dans son livre, L’exceptionnelle famille Hériot, Bernard Pharisien décrit des cuirasses, sabres et d’autres attributs militaires, rappelant l’ancienne carrière d’Olympe, sculptés sur les façades latérales du bâtiment principal. Il identifie également la symbolique des Grands Magasins du Louvre, notamment les têtes de lion qui décorent chacune des cheminées extérieures. Selon Pharisien, le plus intéressant est la décoration en marbre blanc ornant l’entrée principale, mêlant le logo de l’entreprise (le lion et la lettre L), la Fortune (divinité romaine du Hasard) et sa roue (attribut de la déesse Fortune et allégorie de vicissitudes humaines). Aussi, un clin d’œil à la publicité, un ballon de baudruche, au-dessus des têtes de chérubins, portant l’inscription « Louvre ».
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En se dirigeant vers le cimetière où sont réservées de nombreuses surprises, on traverse le bas du village, quartier des commerçants et de la classe libérale, et le haut du village occupé par des vignerons. À divers points d’observation, la reproduction d’une œuvre de Renoir, comme celle-ci de La danseuse, modelée sur sa femme, Aline Charigot, fait son apparition.
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Plus intéressant encore, deux exemples de l’ancien patrimoine bâti : (1) les portes de grange préservées dans leur état original, l’une externe et donc plus usée et l’autre encastrée pour la protéger des éléments. On y remarque des poutres posées dans le sens contraire et qui dépassent légèrement au-dessus des portes. Elles sont protégées de la pourriture par des pierres plates qui, elles aussi, dépassent et les couvrent. (2) La maison traditionnelle avec son œil de bœuf qui exemptait le propriétaire de l’imposition de la « taxe sur les portes et fenêtres » et la « goulotte » qui facilitait le passage vers la rue des eaux usées.
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Au cimetière, la sépulture d’Auguste Hériot domine. Ce n’est pas un surprise! Ce qui surprend, c’est la sculpture de
la femme nue, réalisée en 1914 par Louis Morel – également natif d’Essoyes – qui semble surveiller la sépulture
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des Renoir. Évidemment, sa présence fit scandale! Autre surprise, la présence à une cinquante de mètres des Renoir et de la femme nue, la pierre tombale de C.F. Anderson de la Royal Canadian Air Force descendu au-dessus d’Essoyes par le feu allemand un mois après le Débarquement de 1944.
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Dernière surprise, le buste signé Guino qui couronne le monument érigé à la mémoire de Pierre-Auguste, de ses fils aînés Pierre et Jean, ce dernier venu rejoindre son père en 1979, et de la seconde épouse de Jean, Dido, dont les cendres furent apportés de la Californie en 1994. Guino – comme d’ailleurs Morel – a prêté ses mains au maître Renoir dans la réalisation de plusieurs sculptures que celui-ci a signées.
Comme si ma journée n’avait pas encore assez rapporté, Bernard me propose une visite à Colombey-les-deux-Églises, à 30 km de là. Mon Dieu, comment savait-il que depuis 40 ans je voulais visiter le village que le Général De Gaulle avait choisi pour élire domicile, aux années 30, La Boisserie, et où il est enterrée avec sa femme, Yvonne, et leur fille trisomique, Anne. Bien qu’enterré en toute simplicité, selon sa volonté, dans le cimetière paroissial, le bon peuple continue, 40 ans après, à lui rendre hommage par l’envoi au petit cimetière de tonnes et de tonnes de stèles et de gravures qui proclament leurs reconnaissance, respect, admiration et fierté.
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Pas plus tard que la semaine dernière, le président Sarkozy et la chancelière Merkel d’Allemagne ont inauguré ici, sur les hauteurs de Colombey, le nouveau Mémorial Charles de Gaulle dont j’ai eu le plaisir et l’« honneur » d’être le premier Québécois à y avoir franchi les portes!
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Quelle belle façon d’avoir terminé ma journée en présence d’un Pharisien!


Bixi, Velib’ et Wifi

Le mois dernier à Montréal, le maire Tremblay annonça avec grande pompe la mise sur route en 2009 des Bixis (combinaison des mots bicyclette et taxi). Il s’agit d’un vaste parc de vélos génériques mis à la disposition de la population à divers points d’achalandage de la métropole. S’il est muni de la carte à puces, l’utilisateur pourra emprunter sa Bixi au centre-ville et la laisser au stade Olympique ou la prendre au marché Jean-Talon et la laisser au Centre Bell. Cette semaine à Paris, j’ai eu un avant goût de ce que ce sera, au moins pendant les mois de mai, juin, juillet, août, septembre, octobre et novembre. Je n’ose pas me prononcer sur les mois de décembre, janvier, février, mars et avril.
La population parisienne s’abonne.
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Des stationnements de vélos, comme celui-ci près de la Sorbonne, se trouvent partout. Un service de remorquage de la ville redistribue les vélos au besoin et les transporte aux ateliers Velib’ pour l’entretien.
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Et ça roule! Gars comme filles, ça roule dans les rues de Paris, ces vélos dorés munis chacun d’un panier et d’une cloche et équipés de lumières en avant et en arrière.
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Autre nouveauté à Paris depuis ma dernière visite il y a deux ans : la ligne de tramway aménagée le long de la petite ceinture (PC), l’ancien boulevard périphérique, entre la porte d’Ivry dans le sud-est et le pont du Garigliano dans le sud-ouest. Si j’ai bien compris, ce tramway propre (sans graffiti pour le moment) et rapide fera éventuellement le tour complet de la PC. À noter qu’entre la porte de Versailles et la porte de Vanves, Georges Brassens a mérité « sa » station, tout comme le martyr de la résistance, Jean Moulin, a mérité la sienne entre la porte de Vanves et la porte d’Orléans.
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Puisqu’il est question de transport et communications, mentionnons « wifi », le service d’internet sans fil qui dessert la France. Très efficace, mais aussi très dispendieux! Le voyageur nord-américain, habitué à ce service gratuit dans les motels bas de gamme comme dans les hôtels haut de gamme chez lui doit s’attendre ici à payer ce service.
Cinq euros (7,25$) pour deux heures, c’est du fric!


Square Lamartine, Paris XVI

Inévitablement, à chaque passage à Paris, je suis attiré à cet immeuble au 3, rue de Lota où j’ai passé ma première nuit en France le 15 mars 1962. Pas loin de cet endroit, presque en face de la Mairie du XVIe, se trouve le tout petit Square Lamartine où, depuis au moins un demi-siècle, des bambins s’amusent sous l’œil vigilant de grandes
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personnes. Comme ceux et celles qui connaissent Paris le savent, il y a mille et un parcours, tous aussi intéressants et intrigants les uns que les autres, pour se rendre d’un point à l’autre de la ville. Pour me rendre au Square Lamartine, je préfère marcher le long de l’Avenue Georges-Mandel à partir du Trocadéro, surtout à ce temps-ci de l’année quand les marronniers sont de couleur jaune vif et en train de perdre leurs fruits. D’aucuns conviendraient d’emblée que le XVIe arrondissement est le plus huppé des vingt.
L’immeuble où j’ai couché il y a 46 ans est aujourd’hui l’Ambassade des Émirats arabes unis. Sinon, la rue est restée résidentielle, reflétant peu de changement. La Place Victor-Hugo et l’avenue qui y mène et qui porte, elle aussi, le nom du grand poète, écrivain et homme politique—tel est indiqué en petites lettres blanches sur les panneaux de signalisation bleus—sont tout aussi grouillantes qu’elles ont toujours été. Toutefois de nos jours, elles subissent une certaine pollution visuelle : McDonald’s, Starbuck’s, American Apparel, The Phone Store….
Mais revenons au Square Lamartine et tirons la leçon de sociologie qui s’y impose en ce mardi après-midi à 16h30. Examinons les enfants qui jouent, qui s’assoient, qui sont en carrosse. Puis, jetons un regard vers celles qui les surveillent. On saisit rapidement une certaine répartition du travail dans les quartiers bourgeois de Paris et certainement dans toutes les grandes métropoles. Vers 19h, les parents rentreront du boulot et prendront peut-être le relais de ces nounous immigrées d’origine asiatique, maghrébine et africaine.
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L’automne à Paris, un autre constant : la vente sur le trottoir à Place Victor-Hugo de marrons cuits sur place, 5 euros le gros sachet, 2 euros le petit. Ouf, en 1962, si ma mémoire est bonne, ils se vendaient respectivement 2 nouveaux francs et 1 nouveau franc et le vendeur était un petit vieux portant un béret basque!
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