Commentaire sur le Forum des jeunes ambassadeurs de la francophonie des Amériques

Le Forum des jeunes ambassadeurs, organisé pour la deuxième année de suite par le Centre de la francophonie des Amériques, avec le concours de l’Institut du Nouveau Monde, se poursuit à Moncton. J’ai eu l’occasion d’y participer en faisant partie d’une table ronde avec mes collègues Réjean Beaulieu, Hanetha Vété-Congolo, et Jean-Claude Redonnet et en observant le déroulement des activités tout aussi intéressantes les unes que les autres.

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Le F minuscule dans le nom du Centre est significatif. Il n’est pas, dans les mots de son directeur et président, Michel Robitaille (deuxième de la gauche), une institution comme les autres. Non, il s’agit plutôt d’un centre axé sur les gens du peuple—au service de ceux-ci. Le forum, dont la présidence d’honneur revient cette année à Marie-Jo Thério, chanteuse populaire d’origine acadienne (au centre de la photo), est une tentative d’aller chercher la jeunesse francophone des Amériques dans le but de briser l’isolement qui caractérise les populations habitant les îles et îlots de l’archipel franco d’Amérique. N’était-ce pas Zachary Richard qui avait dit lors du lancement de son album « Cœur fidèle », en faisant allusion aux Franco d’Amérique : « Notre isolement est plus fort que notre fraternité »?

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Or, la fraternité est de mise à Moncton cette semaine. Une soixantaine de participants de diverses provenances (voir liste à la fin). Organisés en six familles « monoparentales », car chaque famille a un chef qui est un jeune ayant participé l’an dernier au premier Forum, ils travaillent, débattent, jouent, mangent, dorment et se détendent ensemble. Demain, le tout se transportera sur la péninsule acadienne, d’abord à Shippagan, puis à Caraquet, afin de célébrer dimanche la fête nationale des Acadiens et de participer au Grand Tintamarre. Le Forum se terminera le 16 août par une cérémonie d’engagement et une soirée dansante.

Dans le grand dessein du Centre de la francophonie des Amériques, ces jeunes, comme ceux de l’an dernier, rentreront dans leur milieu, riche de leur expérience, et deviendront des catalyseurs pour amorcer une nouvelle compréhension du contexte du français en Amérique et une meilleure appréciation des enjeux.

Les Latino-Américains en présence s’étonnent de découvrir une francophonie hors France. Les Martiniquais et Guadeloupéens éblouissent par leur éloquence. Les Haïtiens inspirent par leur détermination et leur espérance. Les Cubains parlent un français très châtié. Les États-Uniens rêvent de faire une plus grande place pour le français dans leur pays et les Canadiens s’interrogent sans cesse sur l’éternelle question de leur place dans ce pays bilingue.

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Jusqu’ici le fait saillant du Forum a sans doute été la conférence prononcée par Antonine Maillet sur le thème « Les chemins imaginaires des Amériques». Généreuse de son temps et de sa personne, la plus grande des littéraires acadiens nous a fait rire et pleurer par ses propos. En quittant le campus dans sa Volkwagen Cabriolet, elle m’a fait personnellement éclater de rire. Comme j’aurais aimé avoir mon appareil de photo à la main! Le petit bout de femme, octogénaire de surcroît, cheveux au vent, au volant d’une voiture décapotable!

Autre moment fort, la soirée de rock francophone, au bar The Old Cosmo. Le rocker du bayou Terrebonne, en Louisiane, Rocky McKeon, ambassadeur de la première cuvée, et son groupe Isle dernière, démontraient leur savoir faire dans une salle surchauffée de la rue Main, devant un public composé à la fois d’ambassadeurs et de citoyens de la région de Moncton.


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La couverture de l’événement par la presse acadienne et par Radio-Canada Atlantique est généreuse. Ceux et celles qui s’y intéressent vraiment peuvent aussi suivre les activités sur une base quotidienne au site du Centre de la francophonie des Amériques (www.francophoniedesameriques.com).

Provenance des participants :

Canada : Alberta (4); Colombie-britannique (1); Manitoba (2); Nouveau-Brunswick (4); Nouvelle-Écosse (2); Ontario (5); Québec (4); Saskatchewan (3)

États-Unis : Alabama (1), Caroline du Nord (1); Colorado (1); Floride (1); Louisiane (3); Minnesota (1); Texas (2); Utah/Oregon (1)

Amérique du Sud : Argentine (2), Brésil (2); Chili (1); Colombie (1); Guyane française (1); Mexique (2); Pérou (1); Salvador (1)

Caraïbes : Cuba (2); Guadeloupe (2); Haïti (9), Martinique (1)


À ne pas manquer le 1er août à Zénon Parc, SK

Dans Vision et visages de la Franco-Amérique, Michel Marchildon, chanteur et écrivain de Zénon Parc, petit bled situé à 230 km au nord-est de Saskatoon, témoignait de la vivacité de ce lieu et de la véracité des gens qui l’habitent:

Le fait que je suis né dans le petit village fransaskois de Zénon Parc, au sein des immenses plaines de la Saskatchewan, n’est qu’un détail, un heureux hasard. Par contre, si j’ai réussi à conserver ma langue et ma culture, je crois qu’une partie du mérite revient aux gens qui m’ont entouré tout au cours de ma vie, tout comme ceux qui sont passés avant moi.

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Dans un mois exactement, Michel, résident aujourd’hui du Mile-End à Montréal, sera de retour en Saskatchewan pour fêter avec les siens le centenaire de son village, fondé en 1910 par des Franco-Américains du Massachusetts, exilés auparavant du Québec, auxquels se sont ajoutés, par la suite, des Franco-Ontariens et des Français. Dans le nord de la province, au milieu de vastes et de riches terres agricoles, Zénon se distingue par son acharnement à préserver son identité, son ingéniosité économique et sa passion pour les arts.

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Utilisant l’unique silo à grain du village comme écran géant, Michel et les artistes Véronique Poulin, Zoé Fortier, Renée Sigouin, Jean-Sébastien Gauthier et Stephan Fuch s’inspireront du Moulin à images de Québec pour rappeler le patrimoine franco de Zénon Parc. Seront abordés, lors du spectacle intitulé « Silo à souvenirs » des thèmes tels que la famille, l’histoire, la religion, l’identité et la communauté.

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Ce n’est pas tout! Deux autres événements notoires marqueront les festivités du centenaire : (1) la célébration des 60 ans de mariage des parents de Michel, Léon et Hélène; (2) le lancement de la biographie de l’Abbé Arthur Marchildon (1920-1996), écrit par son neveu, Michel.

Rendons-nous tous nombreux à Zénon Parc!!


Le drapeau acadien flotte au-dessus du Témiscouata

Le 15 juin dernier, on lisait sur le site du Centre de la francophonie des Amériques (http://www.francophoniedesameriques.com) ce qui suit :

Cette semaine marquait l’arrivée officielle du drapeau acadien dans la région du Témiscouata, dans l’attente du Congrès mondial acadien 2014. Le lundi 14 juin, le comité organisateur du CMA 2014 a remis un drapeau acadien aux vingt maires des municipalités de la MRC de Témiscouata. Ces muninicipalités du Québec seront associées au CMA 2014.

Je me suis donc hâté au lac Témiscouata faire du vélo sur la magnifique piste du Petit Témis, ancienne voie ferrée reliant Edmundston à Rivière-du-Loup, et vérifier la présence du drapeau acadien en territoire québécois.

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Satisfaction débordante en ce qui concerne la piste et le vélo. Succès mitigé en ce qui a trait aux drapeaux. Sur les trois plus gros centres du Témiscouta, Cabano, Dégelis et Notre-Dame-du-Lac, les deux premiers arborent fièrement l’étendard bleu-blanc-rouge à l’étoile jaune.

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Cabano

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Dégelis

Par contre, le plus beau village des trois (à mon humble avis !) n’a pas de mâts devant son complexe municipal ultra moderne manquant énormément sur le plan esthétique!


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Ce n’est qu’une question de temps s’est-t-on fait dire.

D’ici la fin de l’été, je reviendrai voir !


« L’Affaire Corrigan » et une balade du côté du « Pays des mines et des lacs »

La Literary and Historical Society of Québec, fondée en 1824, constitua la première société savante au Canada. Sa magnifique bibliothèque est située au cœur du Vieux-Québec dans l’édifice du Centre Morrin (44, Chaussée des Écossais, en arrière de l’église presbytérienne St. Andrew’s).


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Le lundi 17 mai dernier y fut prononcée par Steve Cameron, de Sainte-Agathe-de-Lotbinière, une conférence percutante sur « l’affaire Corrigan », ce meurtre commis entre Irlandais catholiques et protestants implantés, au cours des années 1820, par les Britanniques, dans le cadre de leur politique d’encerclement des Canadiens français, sur le flanc des Appalaches et sur la frange méridionale des seigneuries. Le crime se produit le 17 octobre 1855. La quête du meurtrier et le procès qui s’ensuivit secouèrent la bonne société de Québec et répercutèrent jusqu’à Ottawa, John A. Macdonald sachant en tirer profit pour hausser sa cote.

Aujourd’hui, compte tenu de l’importance de l’amiante à proximité, la région où ces événements eurent lieu s’affiche, à des fins touristiques, comme le « pays des mines et des lacs ». Plusieurs de ses villages longent l’ancien chemin Craig (route 269) : Saint-Patrice-de-Beaurivage, Saint-Sylvestre, Saint-Jacques-de-Leeds, Kinnear’s Mills et Saint-Jean-de-Brébeuf. La présence des premiers habitants est à peine perceptible de nos jours, sauf dans les cimetières anglo-protestants, comme le Parkhurst, à Saint Patrice ou celui des Méthodistes à Leeds ou celui de Bullard Brook à Saint-Jean-de-Brébeuf.


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Centre patrimonial, Saint-Jacques-de-Leeds


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Centre patrimonial, Saint-Jacques-de-Leeds


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Cimetière protestant de Bullard Brook

À Kinnear’s Mills, la diversité confessionnelle de la petite population d’origine se manifeste encore par ses temples, situés côte à côte le long de la rue des églises, artère principale de ce hameau comptant 360 âmes. Ces bâtiments témoignent de l’importance autrefois de Kinnear’s Mills comme centre institutionnel et religieux, en plus d’être un centre industriel à cause de son moulin.


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Église anglicane


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Église catholique


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Église unie, de loin et de près


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Église méthodiste.

Des quatre églises, seules celle des Catholiques et celle de l’Église unie, anciennement l’église presbytérienne et aujourd’hui une amalgame de plusieurs traditions protestantes, sont actives.


Satori à Québec

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Soirée magique le 19 mai au Théâtre Petit Champlain. Après 13 ans d’absence, l’homme invisible était en ville! Évidemment, je fais allusion à Patrice Desbiens, revenu une fois de plus dans la ville qui, pour lui, équivaut Paris. Je l’entends encore, s’adressant à mes étudiants à l’université Laval, en 1988, inscrits au cours « Le Québec et l’Amérique française », dire : « Quand tu viens de Sudbury, Québec, c’est Paris! »

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Dès sa parution en 1981, L’homme invisible / The invisible man consacre Desbiens comme l’une des voix majeures de l’Ontario français, et L’homme invisible comme métaphore du « minoritaire francophone dans la réalité canadienne » : d’un côté, il est Franco-Ontarien, tandis que, de l’autre, he is French-Canadian. Vingt-neuf ans, après sa parution, cette œuvre magistrale de Patrice fut sortie des boules à mites pour « combattre » à l’émission de Christiane Charrette, contre Le Survenant (Germaine Guèvremont), Cantique des Plaines (Nancy Huston), Comment devenir un ange (Jean Barbu) et—hélas—L’énigme du retour (Dany Laferrière) ? Comment espérer en sortir gagnant en cette année marquée par la tragédie du séisme à Port-au-Prince et par les succès littéraires qui se multiplient chez le principal porte-parole d’Haïti au Québec ?

Dans l’un de ses derniers romans, Sartori à Paris, avant d’être emporté par les démons qui le possédaient, Jack Kerouac raconte la quête de son héritage en France, d’où le titre choisi par les organisateurs du spectacle qui ramènerait dans la ville de Champlain un de ses fils spirituels : « Satori à Québec : les mots de Patrice Desbiens ». Dans un premier temps, « les mots » furent lus avec brio par un triumvirat de personnalités étiquetées « ses cascadeurs de l’amour » : Isabelle Blais, Nathalie Lessard et Alix Renaud, accompagnées d’un quartette de jazz de haut calibre comprenant Normand Guilbeault à la contrebasse, Vincent Gagnon au piano, Jean Derome aux flûtes et saxophones et Claude Lavergne aux percussions. Après l’entracte, Blais revint dans une véritable tempête de textes, les uns exprimés avec autant d’émotion que les autres, toujours sur un fond sonore provenant du quartette.

Enfin, le moment tant attendu, l’imprésario, Simon Couillard présente l’invité d’honneur qui monte modestement sur les planches. En lisant ses poèmes—des anciens comme des plus récents—et en badinant à la franco-ontarienne, tantôt en français, tantôt en anglais, avec les membres du quartette et avec ses « fans » dans la salle, Patrice garde l’auditoire dans le creux de sa main pendant une trentaine de minutes.

À la fin, la foule en délire demande l’homme invisible en rappel. L’homme fragile revient ! Autre moment magique avant de quitter la maison de la chanson et de réemprunter la rue illuminée du Petit Champlain, plus vieille rue en Amérique, dit-on !

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