Le mois dernier à Montréal, le maire Tremblay annonça avec grande pompe la mise sur route en 2009 des Bixis (combinaison des mots bicyclette et taxi). Il s’agit d’un vaste parc de vélos génériques mis à la disposition de la population à divers points d’achalandage de la métropole. S’il est muni de la carte à puces, l’utilisateur pourra emprunter sa Bixi au centre-ville et la laisser au stade Olympique ou la prendre au marché Jean-Talon et la laisser au Centre Bell. Cette semaine à Paris, j’ai eu un avant goût de ce que ce sera, au moins pendant les mois de mai, juin, juillet, août, septembre, octobre et novembre. Je n’ose pas me prononcer sur les mois de décembre, janvier, février, mars et avril.
La population parisienne s’abonne.
Des stationnements de vélos, comme celui-ci près de la Sorbonne, se trouvent partout. Un service de remorquage de la ville redistribue les vélos au besoin et les transporte aux ateliers Velib’ pour l’entretien.
Et ça roule! Gars comme filles, ça roule dans les rues de Paris, ces vélos dorés munis chacun d’un panier et d’une cloche et équipés de lumières en avant et en arrière.
Autre nouveauté à Paris depuis ma dernière visite il y a deux ans : la ligne de tramway aménagée le long de la petite ceinture (PC), l’ancien boulevard périphérique, entre la porte d’Ivry dans le sud-est et le pont du Garigliano dans le sud-ouest. Si j’ai bien compris, ce tramway propre (sans graffiti pour le moment) et rapide fera éventuellement le tour complet de la PC. À noter qu’entre la porte de Versailles et la porte de Vanves, Georges Brassens a mérité « sa » station, tout comme le martyr de la résistance, Jean Moulin, a mérité la sienne entre la porte de Vanves et la porte d’Orléans.
Puisqu’il est question de transport et communications, mentionnons « wifi », le service d’internet sans fil qui dessert la France. Très efficace, mais aussi très dispendieux! Le voyageur nord-américain, habitué à ce service gratuit dans les motels bas de gamme comme dans les hôtels haut de gamme chez lui doit s’attendre ici à payer ce service.
Cinq euros (7,25$) pour deux heures, c’est du fric!
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Square Lamartine, Paris XVI
Inévitablement, à chaque passage à Paris, je suis attiré à cet immeuble au 3, rue de Lota où j’ai passé ma première nuit en France le 15 mars 1962. Pas loin de cet endroit, presque en face de la Mairie du XVIe, se trouve le tout petit Square Lamartine où, depuis au moins un demi-siècle, des bambins s’amusent sous l’œil vigilant de grandes
personnes. Comme ceux et celles qui connaissent Paris le savent, il y a mille et un parcours, tous aussi intéressants et intrigants les uns que les autres, pour se rendre d’un point à l’autre de la ville. Pour me rendre au Square Lamartine, je préfère marcher le long de l’Avenue Georges-Mandel à partir du Trocadéro, surtout à ce temps-ci de l’année quand les marronniers sont de couleur jaune vif et en train de perdre leurs fruits. D’aucuns conviendraient d’emblée que le XVIe arrondissement est le plus huppé des vingt.
L’immeuble où j’ai couché il y a 46 ans est aujourd’hui l’Ambassade des Émirats arabes unis. Sinon, la rue est restée résidentielle, reflétant peu de changement. La Place Victor-Hugo et l’avenue qui y mène et qui porte, elle aussi, le nom du grand poète, écrivain et homme politique—tel est indiqué en petites lettres blanches sur les panneaux de signalisation bleus—sont tout aussi grouillantes qu’elles ont toujours été. Toutefois de nos jours, elles subissent une certaine pollution visuelle : McDonald’s, Starbuck’s, American Apparel, The Phone Store….
Mais revenons au Square Lamartine et tirons la leçon de sociologie qui s’y impose en ce mardi après-midi à 16h30. Examinons les enfants qui jouent, qui s’assoient, qui sont en carrosse. Puis, jetons un regard vers celles qui les surveillent. On saisit rapidement une certaine répartition du travail dans les quartiers bourgeois de Paris et certainement dans toutes les grandes métropoles. Vers 19h, les parents rentreront du boulot et prendront peut-être le relais de ces nounous immigrées d’origine asiatique, maghrébine et africaine.
L’automne à Paris, un autre constant : la vente sur le trottoir à Place Victor-Hugo de marrons cuits sur place, 5 euros le gros sachet, 2 euros le petit. Ouf, en 1962, si ma mémoire est bonne, ils se vendaient respectivement 2 nouveaux francs et 1 nouveau franc et le vendeur était un petit vieux portant un béret basque!
Parler de la Franco-Amérique au Rendez-vous de l’histoire de Blois
Depuis 11 ans se tient à Blois, dans la vallée de la Loire, un Rendez-vous de l’histoire qui permet aux mondes savant et de l’édition, ainsi que qu’au grand public de se rassembler le temps d’une longue fin de semaine pour célébrer la discipline de l’histoire. À l’occasion du 40e anniversaire des
événements marquants de 1968, il est de mise que le Rendez-vous de cette année soit présidé par Daniel Cohn-Bendit—oui, le fameux « Danny le Rouge » d’une autre époque—qui fermera le Rendez-vous et ses quelques 360 tables rondes par une conférence intitulée « L’Europe, un fantasme, une nécessité ou une utopie? » prononcée à l’hémicycle de la Halle aux Grains, site de l’immense salon du livre et l’un des principaux points de repère du Rendez-vous.
Il est surprenant que dans le cadre de cette gigantesque manifestation culturelle française ayant pour thème « Les Européens » il y ait une place privilégiée pour le Québec. Québec 400 oblige! En fait, dans la programmation, on lit :
À l’occasion du 400e anniversaire de la ville de Québec, le Salon du livre met à l’honneur le Québec, ses éditeurs, écrivains, universitaires et autres médiateurs de l’histoire au travers d’une présentation multiforme.
Parmi les membres de la délégation québécoise, on compte :
Jean-Pierre Charland, historien de l’université de Montréal et écrivain.
Marcel Fournier, historien et généalogiste.
Martin Fournier, historien, Institut du patrimoine culturel de l’université Laval.
Nicole Fyfe-Martel, romancière.
Mylène Gilbert-Dumas, écrivaine.
Nadine Grelet, écrivaine.
Gilles Herman, directeur des Éditions du Septentrion.
Guy Lachappelle, politicologue de l’université Concordia.
Jacques Lacourcière, historien, journaliste, chroniqueur et animateur.
Raymonde Litalien, historienne et conservateur honoraire des Archive du Canada.
Dean Louder, géographe de l’université Laval.
Jacques Mathieu, historien de l’université Laval.
Christian Rioux, journaliste et chroniqueur au Devoir.
Jean-Philippe Warren, sociologue à l’université Concordia.
Nadine Grelet
A gauche, Raymonde Litalien; troisième et quatrième à droite, Guy Lachappelle et Christian Rioux
Leurs interventions au Rendez-vous se regroupent autour de huit tables rondes :
1) Le roman historique : son rôle, son utilité, ses lecteurs, la place de la fiction.
2) La Franco-Amérique : lieux d’histoire, de mémoire et de vie…
3) L’histoire de la Nouvelle-France : outil ou occultation en France
4) Le peuplement de la Nouvelle-France : émigration volontaire ou forcée?
5) Le Québec, terre d’accueil! Terre d’écueil! Quatre siècles dans l’histoire de la migration européenne vers l’Amérique
6) Les Québécois se sentent-ils plus européens qu’américains?
7) Les Français à la rencontre des Amérindiens : alliances et métissages
8) L’encyclopédie numérique du patrimoine culturel de l’Amérique française
Une neuvième table ronde « québécoise » sur le thème « Les femmes dans la société de la Nouvelle-France » fut l’œuvre de l’Association Loir et Cher-Québec qui, en plus d’offrir un cocktail fort couru, nous rappelle qu’un fils de Blois, Jean Ralluau, secrétaire de Pierre Dugua, sieur de Monts et compagnon de Samuel de Champlain, se retrouvait parmi les fondateurs de Québec.
L’achalandage aux séances à saveur québécoise et franco-amériquaine variait de moyen à bon. Évidemment, le vénérable Jacques Lacourcière attire partout où il passe (plus de 100 ici). Les géographes, moi-même et Christian Fleury, en parlant d’une idée méconnue—pour ne pas dire inconnue—en France, la Franco-Amérique, connûmes
Louder; Gilles Herman et Fleury
moins de succès, une trentaine de personnes, surtout des dames aux cheveux argentés! Parmi elles, se trouvait néanmoins une dame passionnée de la Franco-Amérique, Odile Rouet de Blois, qui, avec son mari, Roger, avait déjà visité la Louisiane et le Québec. Ils sont membres actifs de l’Association France-Louisiane-Franco-Américainie et lisent tout ce qui leur tombe entre les mains sur la Franco-Amérique. Heureuse comme Ulysse de pouvoir se procurer notre livre, Franco-Amérique, elle avait déjà, à ma grande surprise et satisfaction, un exemplaire de Vision et Visages de la Franco-Amérique. Par contre, elle a démontré beaucoup de mécontentement de pas avoir pu trouver en librairie en France, le troisième tome de la trilogie Ma chère Louisiane de l’écrivaine québécoise, Lili Maxime : Un dernier mardi gras. Je lui ai promis de faire en sorte qu’elle le reçoive!
Si nous avons mentionné ici, les intervenants québécois à la programmation au Salon du livre des Rendez-vous de Blois, il faut aussi faire connaître les maisons d’édition présentes : Boomerang Éditeur Jeunesse, Éditions d’art le Sabord, Éditions de l’homme, Éditions du Septentrion, Éditions Sylvain Harvey, Hurtubise HMH, Les Éditions du Boréal, Les Presses de l’université Laval, Presse de l’université du Québec, Triptyque et VLB Éditeur.
Le 14 octobre, journée d’élections au Canada! L’un des enjeux qui fera peut-être mal à M. Harper au Québec est celui des coupures dans le domaine de la culture. Je ne peux que reprendre ici quelques chiffres distribués par Québec Édition aux « coureurs de Blois », rassemblés à ce grand Rendez-vous littéraire et historique :
Le livre francophone au Québec, c’est :
-entre 4 000 et 5 000 titres édités annuellement;
-près de 2 000 entreprises entièrement vouées à l’édition;
-des ventes annuelles en librairies de près de 450 millions de dollars;
-une production diversifiée : des roman, des essais, des livres pour la jeunesse, des biographies, des ouvrages historiques, des livres savants, des dictionnaires, des ouvrages pratiques, des manuels scolaires, des bandes dessinées, et bien plus;
-une production florissante : même si l’on n’y compte que 7 millions d’habitants francophones, la production éditoriale au Québec se compare, toute proportion gardée, à celle de l’Allemagne, de la rance, de l’Italie ou des États-Unis.
Pas mal du tout!
Hommage aux amis de Villedieu-les-Poêles
Dans le train à 6h45, en route vers Blois, via Paris bien sûr, car « tout » déplacement dans l’Hexagone passe nécessairement par la capitale. Dehors, il fait noir, le soleil ne se lève pas tôt ici. En arrière de moi, un groupe de jeunes jouent au Uno. En face de moi, une dame dans la trentaine dort. J’ai envie de faire de même.
J’avais besoin de ces deux jours passés à Villedieu pour me remettre du décalage horaire. Christian et Michèle m’ont mis rapidement à l’aise. J’ai eu l’impression de faire partie de la famille. Ce sont des gens chaleureux, des
gens très cultivés qui apprécient l’art, l’histoire, la littérature, le cinéma et surtout le voyage. Michèle, enseignante, a hâte de prendre sa retraite à la fin de cette année afin de poursuivre ces intérêts et d’en développer d’autres. Leur maison a été bâtie selon leur propre dessein. De son bureau, Christian peut regarder des moutons paître dans un
.
pré verdoyant et contempler l’horizon sans obstruction. Mon lit a été fort confortable et les repas délicieux. Hier soir, par exemple, nous avons mangé un confit de canard. Et les fromages!!! Les petits déjeuners comme je les aime : jus, fruits frais, crêpes légères à la confiture maison ou au sirop d’érable du Québec et thé fumant.
En prévision de notre participation aux Rendez-vous de l’histoire de Blois, Christian et moi avons pris le temps d’agencer nos présentations de manière à faire ressortir la dimension continentale de la Franco-Amérique et à élucider dans ce contexte l’unique situation de Saint-Pierre-et-Miquelon, cet archipel nord-américain où habitent 6 500 Européens! Demain, nous saurons si nous avons réussi.
Une randonnée le long de la Vire
En France depuis trois jours, je m’ennuyais de mon vélo. Une chance que Christian Fleury, un ami de Villedieu-les-Poêles, m’a proposé une randonnée le long de la « plus belle rivière de la Manche », selon lui. Entre nous, pour
un gars de Québec, la Vire, comparée à la Chaudière, à la Batiscan, voire à la Montmorency n’est pas si impressionnante que cela! Alors que le brouillard couvrait encore la surface de cette rivière aux eaux languissantes de teinte brunâtre, nous sommes partis d’un petit carrefour rural du nom de Condol, à quatre kilomètres au sud de Saint-Lô, pour nous rendre aux Claies de Vire, dix-sept kilomètres plus loin. Il s’agissait d’un bout appréciable du chemin de halage entre Pont-Farcy et Carentan aménagé il y a une dizaine d’années dans le cadre d’un projet de développement régional cofinancé par l’Union européenne.
En traversant Saint-Lô, ville de 20 000 habitants, complètement anéantie en 1944 par les bombardements américains, je ne pouvais que penser à mon cousin, Lee Louder, soldat dans l’armée du Général George C. Patton, qui passa par ici dans la foulée du débarquement du 6 juin 1944, et qui mourut trente ans plus tard sans avoir pu refouler le sol français et voir cette nouvelle Saint-Lô et cette Normandie contemporaine que j’aime tant et que je fréquente régulièrement depuis 1963.
Le temps resplendissant d’un matin d’octobre se prêtait à la détente, à la balade à deux roues et à l’observation des vallons verdoyants et des bocages bruissants où broutaient moutons, vaches et chevaux.
Nous déplaçant de Villedieu-les-Poêles à Condol en voiture, Christian m’avait fait remarquer un insigne au bord du chemin : « Chapelle de Jean de Brébeuf »—un des saints Martyrs canadiens. J’habite la paroisse des Saints-Martyrs-Canadiens à Québec et j’ai visité en juillet dernier Sainte-Marie-aux-pays-des-Hurons, là où de Brébeuf et les autres avaient trouvé la mort en 1649. Quelle meilleure façon de terminer ma journée sur la Vire que de me recueillir à la chapelle érigée ici, selon la plaquette commémorative, en 1993 à l’occasion du quatrième Centenaire de
la naissance en ce lieu de Jean de Brébeuf, Saint et Martyr, Apôtre du Canada, et de faire le tour des vestiges de la maison familiale!
Il s’agit bel et bien d’un autre de ces nombreux lieux de mémoire qui relient le Canada, au sens original du terme, et la France. De par la qualité des aménagements et la beauté de son site, il mériterait une fréquentation plus soutenue, la chapelle n’étant ouverte que de juin en septembre de 15h à 19h.