Willow Bunch : haut lieu de la Fransaskoisie (Métis et Canayen)

Hart Rouge, le géant Beaupré, Carmen Campagne? En avez-vous entendu parler? Que partagent-ils? Une seule et même provenance. Le village de Willow Bunch, en Saskatchewan, fondé en 1880 par Jean-Louis Légaré, originaire de Saint-Jacques de l’Achigan. Commerçant, charretier et aventurier, Légaré est passé par Saint-Paul, au Minnesota, et Pembina au Dakota avant de s’établir à Willow Bunch. De 1876 jusqu’à la date de fondation du village, il a joué un rôle de négociateur auprès des Métis et Amérindiens de la région. Parmi ces derniers se trouvait le grand chef des Sioux, Taureau Assis (Sitting Bull), qui, avec sa bande, s’était réfugié ici à la suite de leur victoire sur l’armée de George Custer à Little Big Horn afin de se protéger des attaques hargneuses de l’armée américaine. Légaré, en tant que « diplomate » et la gendarmerie à cheval du Nord-Ouest ont participé directement à ces événements marquants portés récemment au grand écran par Yves Simoneau dans son film Bury My Heart at Wounded Knee, basé sur le livre du même nom de Dee Brown.
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Évidemment, Willow Bunch est un haut lieu de la Fransaskoisie et de la francophonie canadienne de l’Ouest. J’avais honte de n’y avoir jamais mis les pieds. L’occasion s’est enfin présentée le 1er mai 2008. Après avoir parcouru des centaines de kilomètres sur les Prairies plutôt plates et relativement monotones—surtout à ce temps-là de l’année— quelle ne me fut pas surprise de me retrouver subitement devant une oasis semi verdoyante au fond d’une de ces coulées creusées profondément dans ce paysage autrement aride. Ce qui m’a surpris en tout premier lieu était la petitesse et la banalité de l’église, comparée à celles de Gravelbourg et de Ponteix où les institutions catholiques dominent visiblement. Par contre, l’ancien couvent, aujourd’hui musée, qui héberge aussi le Centre culturel de Talle de Saules, surveille l’entrée du village.
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Dans le grand jardin du presbytère, encore gris et aux arbres dénudés, Mme Lorraine Bouvier, originaire de Sainte-Thérèse, à quelques kilomètres de là, travaillait à quatre pattes à nettoyer les dégâts du long hiver et à racler et à enlever les feuilles mortes en vue de la belle saison. Elle me présente son mari, Henri. Sur le coup, je ne les avais pas reconnus, pourtant…
Au fil de la conversation, j’apprends que ce couple fransaskois avait fait carrière dans l’enseignement au Manitoba et qu’à leur retraite ils avaient décidé de quitter le village de Saint-Léon, au Manitoba, et de réintégrer leur Saskatchewan natale. Willow Bunch n’ayant plus de curé résident, il se portèrent acquéreurs du presbytère.
Saint-Léon! J’y étais allé en 1982 accompagné d’une vingtaine d’étudiants de l’université Laval. En apprenant cela, Lorraine exclama, « Mais vous êtes le prof de Laval. Nous avons accueilli vos étudiants chez nous à Saint-Léon! Ils y étaient couchés ‘mur à mur’ ».
Et voilà, tout me revenait! Je les connaissais ces braves gens qui nous avaient rendus de si grands services 26 ans auparavant. Des retrouvailles amusantes et émouvantes! En nous quittant, une invitation à revenir plus tard…n’importe quand!
Donc, en route vers l’Ouest deux mois et demi plus tard, j’ai de nouveau dirigé mes pas vers Talle de Saules dans le but de revoir les Bouvier et d’évaluer la floraison de leur parterre. Frustré par l’absence de mes amis, mais conscient du fait que j’arrivasse quand même à leur insu, j’ai pu néanmoins me promener dans ce petit Éden et admirer les fruits du dur labeur dont j’avais été témoin quelques semaines auparavant.
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Ces jours-ci, les Bouvier collaborent avec l’Institut français de l’université de Régina à l’organisation de la 2e Table ronde itinérante des Francophones et des Métis de l’Ouest canadien qui aura lieu à Talle de Saules du 19 au 21 septembre 2008. Cette rencontre communautaire, où se conjugueront partage, apprentissage et célébration, vise à rétablir un dialogue constructif entre deux groupes qui se sont éloignés l’un de l’autre au cours du dernier siècle. Ce beau logo intégrant des symboles des deux cultures, métisse et canadienne-française, en dit long sur la possibilité de projets d’avenir.logo.jpg