La ligue des Cactus

Comptant environ 3 500 000 habitants la région métropolitaine de Phoenix s’étend de plus en plus dans le désert du Sud-Ouest américain. Parmi ses attraits et celui qui m’a amené ici passer la semaine avec quelques copains d’école secondaire, le baseball. En fait, la région accueille, pour leurs camps d’entraînement, 15 des 30 équipes du MLB (Major League Baseball). Elles s’entraînent dans 10 stades éparpillés au quatre coins de la vaste ville.

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Les Dodgers de Los Angeles et les White Sox de Chicago partagent  Camelback Ranch- Glendale Complex; les Reds de Cincinnati et les Indians de Cleveland le Goodyear Ballpark; les Diamondbacks d’Arizona et les Rockies du Colorado le Salt River Fields; les Padres de San Diego et les Mariners de Seattle le Peoria Sports Complex, les Royaux de Kansas City et les Rangers du Texas le Surprise Stadium. Cinq autres équipes s’entraînent en solitaire à divers endroits : les Cubs de Chicago à Mesa au Cubs Park, Les Angels de Los Angeles à Tempe au Diablo Stadium, les Brewers de Milwaukee au Maryvale Baseball Park, les A’s d’Oakland au stade municipal de Phoenix et les Giants de San Francisco au stade de Scottsdale.

Ces équipes constituent la ligue des Cactus et se livrent une trentaine de matches préparatoires, tout au long du mois de mars. Les quinze autres formations du baseball majeur s’entraînent en Floride et s’affrontent dans le cadre des activités de la ligue des Pamplemousses.

Hier, j’ai assisté au premier match de la pré saison entre les Giants et les A’s, remporté par ces derniers par le compte de 10 à 5. C’était un match remarquable compte tenu des deux « catches » du voltigeur de droite, Reddick, qui a deux fois volé un circuit d’un frappeur des Giants en allant chercher la balle par dessus de la clôture!  Aujourd’hui, mes copains se rendront à Glendale voir les Dodgers affronter les Diamondbacks. Malheureusement, je dois quitter!

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Ce phénomène a commencé en 1947 lorsque les premières équipes, les Giants et Indians, se sont aventurés en Arizona, sous la direction de leurs patrons et propriétaire respectifs, Horace Stoneham et Bill Veeck, préparer leur saison, les autres clubs s’entraînant tous depuis toujours en Floride. C’était l’époque de 16 équipes du baseball majeur. St-Louis, au Missouri, était, à la fois, la ville la plus à l’Ouest et la plus au Sud des seize à faire partie du MLB. À partir de 1958, au fur et à mesure que le baseball professionnel  prenait de l’expansion (numérique et géographique), d’autres sites furent recherchés et Phoenix a pris son air d’aller.

Les organisations et les joueurs apprécient le climat désertique qui permet de s’entraîner quotidiennement dans les conditions quasi parfaites. En trente ans, seulement trois matches préparatoires ont été annulés à cause de la pluie. Les gens d’affaires de la région adorent la ligue des Cactus parce qu’elle attire des milliers d’amateurs de baseball dans la région pour dépenser leur argent et les amateurs—surtout ceux du nord que l’on appelle « snowbirds »—se réjouissent de la chaleur d’un soleil qui leur plombe sur la tête. L’atmosphère est à la détente; le rythme de vie est lent. Les billets ne sont pas donnés. Si cela peut vous intéresser, un billet pour voir évoluer les Giants dans leur stade à Scottsdale coûte 30$. Hier, nous y étions 6 398 spectateurs et il y avait de la place pour 2 000 de plus.


Felipe & moi

Pendant plus de 30 ans, les Montréalais pouvaient agrémenter leurs soirées d’été en assistant aux matches de baseball des Expos qu’on appelait affectueusement nos Z’Amours, d’abord, de 1960 à 1977, au petit Parc Jarry, si convivial, puis dans l’immense frigo portant le nom de stade Olympique. En 2005, les Expos ont déménagé leurs pénates à Washington D.C., devenant ainsi le National de la capitale américaine.

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Tout au long des années 1990, l’un des grands favoris de la foule était le gérant du club, Felipe Alou, qui avait connu une magnifique carrière de joueur, surtout au sein de la formation de Géants de San Francisco. En 1992, à Montréal, Monsieur Alou devint le premier gérant du baseball majeur originaire de la République dominicaine. Pendant une décennie, il a dirigé les destins du club. Alou s’est attaché au Québec et aux Québécois, se mariant même, pendant son séjour à Montréal, avec une Lavalloise.

Comme la tradition du baseball majeur le veut, avant le début de la nouvelle saison, des anciens joueurs vedette reviennent chaque printemps partager leur savoir et leur expérience avec les jeunes espoirs de leurs clubs respectifs. Cette année je réalise un autre de mes rêves d’enfance, celui d’assister, sous le ciel bleu et le soleil chaud de l’Arizona, au spring training de quelques équipes du baseball majeur. Sur les 30 formations des Ligues américaine et nationale, 15 s’entraînent ici. Moi et cinq copains d’école secondaire avons décidé de fréquenter les camps des Géants de San Francisco et des Royaux de Kansas City. Pourquoi? Parce que les premiers sont l’équipe préférée de quatre de mes amis et que les deuxièmes comptent un lanceur, Jeremy Guthrie, ami, de mon copain, Kent.

Quelle ne fut pas ma joie de voir arriver dans le magasin des souvenirs des Géants à Scottsdale Felipe Alou, de lui parler, de me faire poser avec lui et d’échanger pendant quelques instants en français avec son épouse.

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Il m’a parlé de ses frères, Matty, décédé, et de Jesus, rendu gros et dirigeant une école de baseball dans son pays. Les trois avaient atteint le plus haut niveau du baseball et avaient même évolué ensemble comme voltigeurs chez les Géants. J’ai oublie de lui demander ce que faisait aujourd’hui son fils, Moises, qui avait évolué sous ses ordres à Montréal. Une rencontre fortuite et combien agréable!

Ensuite, deux heures passées à regarder s’entraîner les joueurs de San Francisco.

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Bruce Bochy, gérant

Le lendemain matin, nous nous sommes rendus à Surprise comparer le camp des Royaux à celui des Géants et de faire connaissance avec le jeune lanceur, Guthrie. Quel contraste! Une organisation riche,  les Géants ne se formalisaient pas pour hausser leur profil tandis que les Royaux, plus humbles, se soucient peu de leur image et offrent une ambiance plus chaleureuse.

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Kent et Jeremy Guthrie, lanceur

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Demain, nous assisterons au premier match de la Ligue des cactus entre les Géants et les A’s d’Oakland.

 

 


Les Français sont bien servis à St. George

L’image que l’on se fait des Mormons est celle de jeunes Américains, mâles et femelles, habillés toujours de manière conservatrice, les hommes en complet foncé avec chemise blanche et cravate, les femmes en robe ou jupe longue, les deux portant sur le cœur un macaron identitaire ou porte nom, en train de faire du porte à porte ou de la sollicitation dans les autobus ou centres d’achats comme des Témoins de Jéhovah.

Il est donc étonnant d’arriver au Centre d’interprétation de l’Église de Jésus-Christ des Saints Jours à St. George, au cœur du pays des Mormons,  et de se faire accueillir par deux Québécoises, engagées à leurs frais, pour rendre témoignage de leur foi aux passants.

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En fait, ce sont deux jeunes filles de Laval, Sarah Anthian, qui terminera son service missionnaire en juillet prochain, et Alexandra Garcia-Quinteros, ayant amorcé le sien le moi dernier, qui se feront un plaisir de passer du temps avec tout visiteur de langue française.

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« Mais des visiteurs francophones, il n’y en a sûrement pas beaucoup! » me direz-vous.

Au contraire, il y en a entre 2 000 et 3 000 par année. Oui, bien sûr, le touriste québécois arrête à l’occasion entre décembre et mars dans sa voiture ou son motorisé, mais les francophones de passage sont surtout des Français qui passent en autocar en raison de deux ou trois ou quatre par semaine pendant les mois d’été. L’an dernier il y en a eu une soixantaine. Soixante fois 45, le nombre moyen de sièges dans un tel car, égal 2 700 visiteurs, de loin le groupe national le plus important qui rend visite chaque année au St. George Temple Visitors’ Center. Non, ils ne sont pas venus de Paris, Lille, Nancy, Bordeaux et Aix-en-Provence en pèlerinage. Ce sont des touristes qui ont acheté un forfait—un voyage organisé comme on dit par ici—pour vivre en 15 jours ou moins l’Amérique, pour observer les paysages éblouissants de l’Ouest américain et voir des Indiens. Ils peuvent descendre de l’avion à Los Angeles sauter dans un autocar qui les conduit à Universal Studios et Disneyland, et peut-être Sea World à San Diego. Ensuite, les merveilles de la nature, le Grand Canyon, le lac Powell, les parcs nationaux Zion et Bryce. En route, une halte ou deux le long des chemins en plein désert pour acheter des bijoux en turquoise des Navajos. Au retour vers la Ville des anges pour reprendre l’avion, une brève aventure à Las Vegas! Or, entre les parcs nationaux et Las Vegas, se trouve une jolie oasis couchée au pied des formations géologiques de roc rouge, St. George, avec mon majestueux temple mormon. Un court arrêt ici pour boire de l’eau fraiche, faire pipi et jaser avec du monde qui parle leur langue, quelle joie! ….même si c’est pour se faire parler de religion!

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Et les jeunes filles sont contentes! Elles savent parfaitement bien qu’elles ne réussiront pas à convaincre les visiteurs du bien-fondé de leur foi, mais elles sont certaines de pouvoir semer une petite graine qui pourrait un jour germer.

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Deux aspects à noter :

  1. Comme aux Jeux Olympiques, les Québécoises doivent s’afficher comme Canadiennes. Remarquez le macaron (porte nom) de Sœur Alexandra. Le drapeau du Québec n’est nullement présent. Ce n’est pas un pays…
  2. Des missionnaires d’au moins quinze autres pays sont également sur les lieux tous les jours dont une jeune fille de Lyon qui porte fièrement l’insigne de France sur son macaron. Malheureusement, lors de la prise de photos, Sœur Brendle fut absente.

« Frenchness » à St. George, UT : Si seulement tous ceux qui raffolent de la francité parlaient français…

Malgré l’histoire récente des relations douces amères entre la France et les États-Unis, l’image du patrimoine du camembert se vend toujours bien au pays de l’Oncle Sam, même dans les coins les plus reculés. Nous en avons deux preuves à St. George. Le 2 décembre 2012, dans une chronique intitulée « Un soupçon de France à Santa Clara, UT », J’en avais déjà commenté la première (https://blogue.septentrion.qc.ca/dean-louder/2012/12/02/un-soupcon-de-france-a-santa-clara/). Aujourd’hui, je reviens là-dessus en plus de faire la lumière sur un nouveau commerce s’affichant « français ».

Au moment du premier billet, la crêperie Tifiny venait d’ouvrir ses portes dans le pittoresque village de Santa Clara, à 5 km, à l’ouest du centre-ville de St. George. Logée dans des locaux historiques remontant aux années 1860, mais plutôt vétustes, la crêperie n’a pas fait long feu. À mon retour à Santa Clara en décembre 2013, elle n’était plus là. Mon chagrin fut considérable! Décontenancé, je cherchais les raisons de la disparition de cette petite crêperie si charmante qui m’avait fait tant plaisir. J’en découvre au moins quatre : (1) les affaires ayant été trop bonnes, les espaces disponibles ne suffisaient plus; (2) une cuisine peu fonctionnelle pour la préparation des gourmandises; (3) un malentendu entre propriétaire et locataire; (4) la disponibilité de locaux plus grands et plus fonctionnels dans un mini mail situé en marge du centre-ville.

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C’est donc à la nouvelle Crêperie Breakfast at Tifiny’s que j’ai choisi d’accueillir le 15 janvier quelques  amis d’enfance et leurs époux pour souffler mes 71 bougies.

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Vingt-quatre petits gâteaux! Trois bougies par gâteau! Cela fait 72 bougies, une pour chaque année de ma vie et « one to grow on », comme nous disions quand j’étais gamin. Les allumer était une tâche ardue. David et Diane m’ont donné un coup de main.

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Par contre, je n’ai pas eu besoin d’eux pour les éteindre. Trois gros souffles rapides et la boucane des bougies éteintes montait au plafond!

La semaine de mon arrivée en décembre, Leslie dont le sourire fend son visage a pendu la crémaillère à son nouveau café portant le nom si original  « Le Café », situé au coin de Main et Tabernacle.

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C’est ici, plus que partout ailleurs à St. George, que je peux m’asseoir prendre une consommation, fermer les yeux et faire semblant d’être assis chez Picardie, sur l’avenue Cartier, à Québec, par un bel après-midi d’été. En dépit du fait qu’elle opte pour une œuvre du peintre colombien, Botero, pour orner un mur au lieu d’une des nombreuses productions de Toulouse Lautrec, Leslie mise néanmoins sur la francité, invoquant des odonymes et toponymes parisiens.

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Son présentoir déborde de croissants, de pâtisserie, de quiches et de friandises. L’ameublement porte également un cachet rappelant la France.

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Portant mon béret basque, je donne toujours ma commande en français, mais, hélas, non, Leslie ne parle pas française, mais elle se prête bien au jeu.

Ce serait trop beau! Comme tant d’autres, elle aimerait bien… « but you know » (mais vous savez).

Dans cette contrée désertique, deux petits exemples de l’exploitation de la francité à des fins commerciales!

 

 


PAX: rencontre à St. George avec deux écolières françaises

Dans le coin sud-ouest de l’État de l’Utah se trouve le comté de Washington dont St. George est le chef lieu. En 2012, le comté comptait 145 000 âmes dont la moitié dans la ville principale. Cinq écoles secondaires publiques desservent les écoliers: Dixie, Pine View, Desert Hills et Snow Canyon à St. George et Enterprise High, situé dans un petit village du même nom situé à 40 km plus au nord-ouest. Ensemble, ces cinq écoles accueillent dix étudiantes et un étudiant participant à un échange scolaire organisé sous l’égide du PAX, Program of Academic Exchange (www.PAX.org) dont la mission est de mousser le respect qu’ont les peuples de la planète les uns envers les autres, de favoriser une appréciation aiguë des différences et similitudes qui nous caractérisent et d’élargir les voies de communication entre êtres humains. Pour le PAX, dont le siège social se trouve à New York et qui place environ 1 000 jeunes étrangers par année dans les écoles secondaires des États-Unis, cette mission passe par un séjour de 10 mois—une année scolaire—dans une famille américaine.

Hier, dans le vieux tabernacle de St. George, érigé en 1863 par les premiers pionniers mormons de la région, les 11 adolescents de diverses provenances se sont réunis pour offrir au public un récital. Ils étaient accompagnés de 17 petits chanteurs de l’École primaire Horizon dont le programme d’études comporte un volet international.

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Ces derniers ont entamé le mini concert par le chant « Children Are Children all over the World » et sont revenus vers la fin du programme pour entonner avec Jade J., étudiante chinoise, un chant folklorique intitulé « Lianghu » qui raconte l’histoire de deux amoureux qui se transforment en papillons.

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Après avoir eu l’occasion d’écouter Warisara S. de Thaïlande  jouer du piano et de la flute thaïlandaise, Fabienne M. d’Allemagne, Tatiana M. de Kirghizistan et Mahaut F. de France chanter respectivement des airs de leur pays, le public eut droit à deux prestations de Jade J. sur le pipa, instrument de musique à cordes pincées chinois ressemblant au luth occidental.

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Au piano et à la flute, Warisara S.

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Fabienne M.

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Tatiana M.

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Mahaut F.

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Jade J.

Comme il se devait dans les circonstances, je me suis rapproché de Mahaut et de l’autre Française, Morgane, pour me renseigner sur elles et pour leur faire savoir qu’il y avait eu justement des francophones dans la salle.

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Les deux filles viennent des deux extrémités de l’Hexagone, Lille et Marseille, et vivent en Utah des expériences américaines très différentes l’une de l’autre. Mahaut est inscrite à Pine View High School qui compte 900 élèves et offre une pléthore d’options quant à la formation scolaire. Sa situation est urbaine, sa « famille » habite à proximité du Wal-Mart et du plus grand centre commercial de la région, tandis que Morgane habite Enterprise (1 710 habitants) et fréquente une école dix fois plus petite que l’autre. Cette fille du Midi de la France avoue s’ennuyer un peu, mais essaie quand même d’en tirer profit le plus possible. À Enterprise, ces cours comptent peu d’élèves et ses enseignants sont très accessibles et serviables.

Le récital a pris fin sur les airs bien connus de la chanson conçue en 1971 pour publiciser aux États-Unis et au Royaume-Unis le Coca-Cola, mais qui se prête si bien aux objectifs du PAF. : « I’d Like to Teach the World To Sing in Perfect Harmony ».

N.B. À la demande de Mme Laurel Paul, coordonnatrice communautaire du PAX, ne sont indiqués ici que les prénoms.