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À Tempe, en Arizona, le mois où l’on célèbre la Francophonie s’est amorcé par un atelier organisé par Hélène Ossipov, professeure de français à Arizona State University. Trente-sept membres du chapitre local de l’Association of American French Teachers, venus des quatre coins de l’État, se pointèrent sur le campus d’ASU sur le coup de midi afin de partager un repas avant d’écouter les propos de leur invité venu de loin, moi en l’occurrence, et de visionner le récent film « Un rêve américain » ! (https://blogue.septentrion.qc.ca/dean-louder/2014/03/18/un-reve-americain-en-projection-a-quebec/)

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Il s’agissait d’enseignants de niveaux universitaire, collégial et secondaire, surtout de gent féminine.

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La raison de ma présence à l’atelier, telle que définie par Mme Ossipov, fut double : (1) mettre la table pour la projection du film qui explore la présence « francophone » dans le pays de l’Oncle Sam ; (2) en faire la critique.

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Illustrations graphiques à l’appui, je suis parti du principe que le français n’est pas une langue étrangère en Amérique du Nord et que la Franco-Amérique est un vaste archipel comprenant une immense île, le Québec, et plein d’îles et d’îlots un peu partout sur le territoire des deux pays, les États-Unis et le Canada, sans parler du vecteur haïtien qui réunit les créolophones dans l’axe Port-au-Prince-Miami-New York-Montréal.

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Une fois la table mise, nous avons passé 90 minutes à nous régaler cinématographiquement, après quoi je suis revenu critiquer le film et compléter le tableau. Je ne reprendrai pas ici la critique que l’on peut lire à l’URL mentionné ci-haut. Suffit de dire que Boulianne et Godbout, en raison d’un budget limité, et non par un manque d’intérêt, durent laisser tomber de grands pans de la francophonie états-unienne. Le « road trip » réalisé par Damien Robitaille, chansonnier franco-ontarien et vedette du film, reste néanmoins impressionnant (Maine, New York, Michigan, Pays des Illinois des deux côtés du Mississippi, Wyoming, Montana, Californie).

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Dimanche, c’était la quatrième fois que je visionnais le film, chaque fois dans un contexte différent : (1) à Québec, dans une petite salle au Centre de la Francophonie des Amériques, en compagnie d’une douzaine de « spécialistes » : chercheurs, fonctionnaires et gestionnaires de la francophonie ; (2) à Québec dans la chapelle bondée du Petit Séminaire ; (3) à San Francisco dans une salle trop grande devant une cinquantaine de membres du Conseil international d’études francophones ; (4) à Tempe.

La réception de « Rêve américain » varia énormément de visionnement en visionnement. La première fois, il fut reçu avec scepticisme, plusieurs « spécialistes » prétendant ne rien avoir appris et trouvant que le film dressait un bilan vieillot et pessimiste. La deuxième fois, tout le contraire, le public québécois, réuni dans une salle magnifique chargée d’histoire, fut gagné rapidement et ovationna à la fin à tout rompre. Très émus, plusieurs intervenants prenaient le micro pour avouer leur ignorance quant à l’existence d’une francophonie—la leur—si profondément enracinée en sol états-unien. La troisième fois, dans un contexte davantage international (professeurs de littérature française et francophone venus d’Amérique, d’Asie, d’Europe et d’Océanie), l’auditoire prenait acte d’un phénomène méconnu. Étant donné leurs intérêts pointus, l’approche large de Godbout et Boulianne ne semblait pas les impressionner outre mesure. Toutefois, les questions suscitées par le film furent nombreuses, mais souvent hors propos. Enfin, la quatrième fois ! Depuis dimanche, je demeure perplexe devant leur réaction ou plutôt devant leur manque de réaction. Aucune question, ni sur ma propre prestation, ni sur le film. Pourtant, ils avaient tous hâte de gagner les prix de présence : deux exemplaires de mon livre Voyages et rencontres en Franco-Amérique et cinq exemplaires du DVD, « Un rêve américain ».

Comme diraient les Américains : « Go figure ! »


Paris… le roman

L’œuvre de l’auteur britannique, Edward Rutherfurd, rappelle celle du regretté auteur américain, James Michener (1907-1997). Spécialiste chacun du « roman historique », ils choisissent un endroit—un lieu—et racontent sur 800 ou 900 pages son histoire à travers la vie de personnages, voire de familles, fictifs. On se souviendra, entre autres, des classiques de Michener : Pacific Sud, Hawaï, Chesapeake, Pologne, Texas, Alaska et, le plus important en ce qui concerne les francophones d’Amérique, Colorado Saga. Dans ce dernier roman, grâce au personnage de Pasquinel, Michener met en lumière les aventures héroïques et les mésaventures, à l’occasion débiles, des voyageurs et coureurs de bois qui ont tant marqué l’histoire du continent et l’imaginaire des Canadiens français.

Rutherfurd (nom de plume de Francis Edward Wintle), quant à lui, emploie la même recette. Ingrédients : un lieu, des familles, un cadre temporel. J’avais commencé à lire London, paru en 1997. Rendu au tiers du livre, page 325 environ, j’y ai renoncé. Trop long, trop lent, trop méconnu l’endroit ! J’aurais dû me reprendre avec New York, paru en 2009, mais l’épaisseur du livre et surtout la petite taille des caractères m’ont fait hésiter.

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À la fin de mon adolescence, j’ai passé deux ans à Paris, la sillonnant jour après jour en Lambretta. Mes amis m’appelaient « La Poche » parce que je connaissais la ville comme ma poche. J’habitais divers secteurs : Vincennes, Nanterre, le 14e, le 16e, le 18e, Châtillon, Colombes et Clichy. À partir de 1980, j’ai eu l’occasion de la visiter périodiquement, chaque fois renouant avec le connu et découvrant l’inconnu. J’adore Paris ! Par conséquent, en épiant Paris, the novel sur l’étagère chez Barnes & Noble, aux États-Unis, je ne pouvais ne pas l’acheter et le lire…malgré son épaisseur (809 pages) et ses petits caractères (font 10).

En 26 chapitres, Rutherfurd nous fait suivre six familles, du Moyen Âge (1275) jusqu’à la deuxième Guerre mondiale, avec, en plus, un épilogue que les situe au cœur des événements de 1968 : les de Cygne, membres de la noblesse, les Renard et Blanchard de la bourgeoisie, les Gascon de la classe ouvrière, les Le Sourd, prolétaires de gauche, et les Jacob, juifs. Avec eux, on vit l’époque des Lumières, la Guerre des religions, la Révolution française, la Terreur, la crise de la Commune, les deux Guerres mondiales, mais pas de manière chronologique. Rutherfurd nous fait de petits aller et retour entre les époques sans toutefois perdre le fil du récit global.

Deux cartes, l’une de « Paris ancienne » et l’autre de « Paris moderne », facilitent la poursuite de la saga et permettent de localiser l’action.

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Tout cela est bien intéressant ! L’auteur fait même un clin d’œil au Canada. Au XVIe siècle, un membre du clan de Cygne s’y serait installé. Son descendant fera irruption à la fin du récit.

Ce qui est moins intéressant pour qui cherche à comprendre la Paris d’aujourd’hui, c’est qu’aucune mention n’est faite de l’élaboration au cours du XIXe d’un vaste Empire français ni de la décolonisation de ces territoires qui s’en suit au cours des années 1950 et 1960. À vrai dire, malgré l’épilogue, l’histoire romancée de Paris racontée par Rutherfurd, s’arrête à la Libération. Le lecteur ou la lectrice reste sur sa faim, surtout à la suite des attentats de la semaine dernière dans les locaux de Charlie Hebdo et à la Porte de Vincennes.

Comment, en écrivant un roman historique sur la capitale de l’Hexagone, ne pas tenir compte de l’immigration des 70 dernières années et de l’arrivée massive en France, et à Paris en particulier, de dizaines de milliers de musulmans issus des anciennes colonies ? Pourquoi ne pas combler le trou béant du récit (1945-2010) en insérant dans la trame une famille ou deux supplémentaires, les Kouachi ou Coulibaly, venus respectivement du Maghreb et du Sahel. Celles-ci auraient permis au romancier de compléter le tableau d’une Paris, non pas « moderne », mais « contemporaine », une Paris absolument transformée depuis les cinquante dernières années, une Paris dont le 19e  arrondissement, par exemple, ressemble davantage à Alger, Bamako et Dakar qu’à la ville de Napoléon III, du Baron Hausmann et de Charles de Gaulle.

 


Kirby parmi les immortels

Si, au Québec, on s’enorgueillit de la sélection de l’un des nôtres comme membre de l’Académie française, Dany Laferrière en l’occurrence, imaginons la fierté  des Cadiens de Louisiane—et non Cajuns, mot anglais—de voir un des leurs recevoir le prix Henri de Régnier (soutien à la création littéraire), attribué par l’Académie en reconnaissance de son recueil Petites Communions : Poèmes, chansons et jonglements dont je vous sers ici un petit échantillon.

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dépêcher pour espérer

espère ‘oir

j’arrive, j’arrive

 

j’ai passé devant ta porte

j’ai crié « bye bye ma belle »

Il y a personne qui m’a répondu…

 

ça se fait je réponds à moi-même

 

j’aimerais oublier que j’sus obligé

de me garocher contre l’entourage de grands cailloux qui bloque le

chemin qui lève le pont entre moi et tout ce qu’il faut faire, faut bâtir,

faut créer, faut accomplir,  faut achever, faut amener, faut ramener, faut

assembler, faut arranger, faut nettoyer, faut soigner, faut pratiquer, faut

étudier, faut lire, faut écrire, faut apprendre, faut comprendre, faut

 enseigner, faut instruire, faut compléter, faut finir, faut être capable et

 responsable et même aimable, obéissant, des fois défiant, mais non pas

négligeant.

 

Oh yé-yaille mon cœur me fait mal

 

Et pour compléter, cet extrait  de « La patate j’ai pas pu lâcher » :

C’est la patate j’ai pas pu lâcher,

Et même si ça m’a fâché,

Et quand devant sa porte, j’ai passé,

Et j’ai vu les deux s’embrasser

 

Ce qui fait la force de Petites Communions, à mon sens, est le dernier chapitre, « La messe en solitude », organisé en 26 points de la Célébration : introït, salutation, kyrie, gloria, collecte, première lecture, graduel, seconde lecture, acclamation, proclamation, réclamation, homélie, credo, prière universelle, pénitentielle, charité fraternelle, offertoire, sanctus, institution-élévation-consécration, anamnèse, intercession et doxologie, Notre Père, fraction—Agnus Dei, communion, postcommunion-bénédiction-commission, envoi. Fiouf!

Depuis 30 ans, les enfants du sud de la Louisiane profitent de la présence de Kirby Jambon dans une salle de cours. Depuis 20 ans, ce natif de la paroisse Lafourche, au sud de la Nouvelle-Orléans, enseigne en immersion française à l’École Prairie, située à Lafayette. Cet été nos chemins se sont croisés deux fois. D’abord le 4 juillet à San Francisco, au Congrès du Conseil international d’études francophones où Kirby a fait un tabac, récitant ses vers devant des spécialistes de la grande littérature de la Francophonie .

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CIEF, San Francisco, Kirby à gauche

Ensuite, au Congrès mondial acadien. Un dimanche soir à Edmundston , Kirby et ses complices, Brenda Mounier, Zachary Richard et Barry Ancelet, aka Jean Arcenaux,  inspirèrent l’assistance tassée dans la salle de spectacle de la Vieille église par la richesse de l’œuvre littéraire de la Louisiane française contemporaine. Puis, à Grand Sault, comme animateur à la Journée de la Louisiane, il prêtait concours à de nombreuses séances d’information consacrées à sa région, à ses cultures et à ses langues.

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Kirby, Zachary, Brenda, Barry

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Nathan Rabalais et Kirby

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Clint Bruce, Barry Ancelet et Kirby

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Ancelet, Brenda Mounier, Earlene Broussard Rabalais, Kirby et Zachary Richard

En juillet 2008, j’écrivais ici sur un grand Cadien disparu

(https://blogue.septentrion.qc.ca/dean-louder/2008/07/28/la-louisiane-francaise-perd-une-partie-de-son-ame-je-perds-un-tres-grand-ami/).

Je pensais qu’il n’y en aurait jamais un autre comme lui. Je me suis trompé! Cet été, j’ai découvert un Kirby Jambon qui chausse admirablement bien les bottines de Richard Guidry… mais à sa manière!

Je souhaite que lors de son passage à Paris chercher ses 5 000€ que l’Académie lui accorde la tribune nécessaire pour épater tout à la fois les immortels, le grand public et le petit public! Il en est capable!


« Québec est comme une femme, désirée, mais pas possédée »

Ces paroles ne sont pas de moi! Elles aurait pu être de mon collègue et ami, Luc Bureau, qui a écrit plusieurs essais aux titres tout aussi évocateurs les uns que les autres : Le Rat des villes, Terra Erotica, Il faut me prendre aux maux, L’idiosphère, Pays et mensonges… , mais elles ne le sont pas non plus. Elles sont de Roger Lemelin, qui décrit sa ville natale. Je les ai apprises hier en réalisant ma troisième promenade littéraire de l’année, celle qui a conduit une vingtaine d’hommes et de femmes du Parc des Braves jusqu’ à la résidence des Franciscains, en descendant la Pente douce, en traversant une partie du quartier Saint-Sauveur et en remontant l’escalier des Franciscains. Autrement dit, nous avons arpenté l’ancienne paroisse Saint-Joseph, rendue célèbre par Lemelin dans ces trois romans Au pied de la pente douce, Les Plouffe et Le Crime d’Ovide Plouffe, le premier publié en 1944 et situé en1937, le deuxième en 1951 et 1948 et le dernier en 1982 et 1951.

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Départ du Parc des Braves, aux années 30 et 40, oasis des ouvriers de la Basse-Ville

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Au sommet de la Pente douce

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Le calvaire situé au pied de la Pente douce, érigé en année sainte 1950

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L’énorme presbytère de l’Église Saint-Joseph

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Le trou béant créé par la démolition il y a deux ans de l’église Saint-Joseph, laissée en décrépitude depuis des années, coin Franklin et Montmagny

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L’ancienne Caisse populaire en face de l’église

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La maison blanche « boîte à beurre » de la famille Lemelin

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L’escalier des Franciscains

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Vue sur la Basse-Ville à partir de l’escalier des Franciscains

Lorsque Au pied de la pente douce paraît en 1944, il fait fureur, vendant dans le temps de le lire 40 000 exemplaires. Du jamais vu! Il fut rapidement mis à l’index, ce qui a sûrement eu pour effet d’en accélérer la lecture! À l’âge de 24 ans, Roger Lemelin devient une figure littéraire de proue. Peut-être ce succès le doit-il à la maladie qui l’a  cloué à un fauteuil roulant pendant cinq ans, des années où, s’il avait été en santé, il aurait fort probablement entamé sa vie d’ouvrier comme les autres membres de la famille et les jeunes de son âge et de son entourage. De 16 à 21 ans donc, il eut l’occasion d’étudier, de scruter et d’analyser son milieu, et de rencontrer—parfois au Parc  des Braves—certains résidents de la Haute-Villé dont l’intellectuel Jean-Charles Bonenfant qui lui servit en quelque sorte de mentor.

En plus d’être un littéraire très doué, Lemelin possédait le sens des affaires et un réseau de contacts très élaborés qui lui ont permis, à la suite de la publication de son deuxième roman, de gravir les échelons de la société, de s’établir à la campagne (Cap-Rouge) et, plus tard, Montréal où il devint PDG du journal La Presse, frayant avec, entre autres, Paul Démarais et les Trois Colombes (Trudeau, Pelletier et Marchand). Lemelin réussit également à gravir la falaise, se portant, bien avant que le gouvernement du Québec ne le fasse, acquéreur de la maison située au 1080, Avenue des Braves, celle que l’on appellerait « L’Élysette », très brièvement résidence officielle, à la fin des années quatre-ving-dix, du Premier Ministre du Québec, Jacques Parizeau en l’occurrence.

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Compte tenu de son vécu, de son ascension fulgurante et de la place qu’il a atteinte dans le tissu social, culturel et politique du Québec avant de mourir en 1992, Il aurait été salutaire que Roger Lemelin  écrive au moins un quatrième roman faisant entrer la famille Plouffe, modelée sur la sienne, dans les tourments, trépidations et transformations de la Révolution tranquille.

Si Québec est comme une femme, Roger Lemelin, l’a rendue séduisante, moins par sa beauté que par sa personnalité attachante. Sylvain Lelièvre chantait « Quand on est d’la basse ville, on n’est pas d’la haute ville ». Roger Lemelin fit preuve du contraire!

* * *

À chaque promenade littéraire à Québec, je retrouve, sans avertissement et avec émoi, de mes anciens étudiants de l’Université Laval. Cette fois-ci, il s’agissait de Stève Dionne et Lucie Rochette.  Rencontrés au cours de leur formation en géographie à l’Université Laval il y a une vingtaine d’années, Ils se sont établis par la suite à Saint-Roch-des-Aulnaies, d’où ils étaient venus en cette belle matinée automnale rendre hommage à l’auteur dont l’œuvre fit découvrir à Stève la société urbaine québécoise de la génération avant lui. Heureux de renouer, Stève, Lucie et moi sommes fiers de partager ce moment avec Roger-Lemelin à sa Place (coin L’Aqueduc et Saint-Gemain).

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Une promenade avec Chrystine Brouillet

Le mois dernier, je vous ai fait part de l’avantage qu’avaient les gens de Québec à tirer profit des promenades littéraires offertes tout au long de l’été et de l’automne afin d’apprécier davantage leur patrimoine littéraire et de mieux connaître leur ville en constante évolution. (https://blogue.septentrion.qc.ca/dean-louder/2014/05/28/la-promenade-des-ecrivains-quelle-aubaine/). Samedi dernier, je me suis encore prévalu de cette offre extraordinaire en me promenant avec un groupe d’« amies  intimes » de Maud Graham, personnage principal de l’univers romanesque de Chrystine Brouillet. Oui, tout comme la dernière fois, c’était un groupe surtout féminin qui se rassemblait à 10h30 à la traverse de Lévis. P1000190 De toute évidence, ces dames semblaient avoir, pour la plupart, lu tous les treize romans de la série Maud Graham publiés depuis 1988, car chaque fois que la guide, Marie-Ève Sévigny, s’arrêtait momentanément pour chercher dans sa mémoire ou dans ses notes le nom d’un personnage, d’un incident ou d’un lieu, l’une d’elles—et souvent plusieurs à la fois—fournissaient en un éclair l’information manquante ! La promenade se limita à la Basse-Ville de Québec, nous conduisant de la traverse au Palais de justice en passant par certains des lieux de prédilection de la détective et de la gourmande devenue gourmet, Maud Graham. À chaque endroit, bien sûr, Marie-Ève faisait lecture des extraits de l’œuvre. P1000195 Hôtel Saint-Antoine et son restaurant Le Panache P1000199 L’Échaudé sur la rue Saint-Paul P1000200 Le Laurie-Raphaël sur Dalhousie P1000204 Marché du Vieux-Port P1000205 Gare du Palais

En raison de son travail de détective Maud Graham—« Biscuit » à ses intimes—parcourt la ville au complet. Par conséquent, une deuxième promenade est consacrée à la Haute-Ville. Un de ces jours, j’y participerai. Et ce serait formidable de pouvoir encore une fois me promener avec mes anciens étudiants de géographie de l’Université Laval (1973-1975), Michel Bisson, Béatrice Verge, et leur fille, Paméla, qui, contre toute attente, faisaient partie du groupe de promeneurs. P1000198 P1000202 Michel et Béatrice avec le vieux prof au milieu

Autre belle surprise, adressant ses remerciements aux participants, assis devant elle au  Palais de justice, de l’avoir accompagnée, Marie-Ève annonce la parution, la veille, d’un livre qu’elle a réalisé avec le concours de Chrystine Brouillet et du photographe Renaud Philippe : Sur la piste de Maud Graham : promenades et gourmandises. P1000207 Je me hâte à la librairie Pantoute sur la rue Saint-Joseph me le procurer.  Ce sera le cadeau d’anniversaire parfait pour mon fils et sa blonde, car ils habitent la Basse-Ville, aiment la littérature et sont tous les deux nés en juillet 1986! Déception! Le livre n’est pas dans les rayons. Soulagement! Après une recherche de plusieurs minutes dans ces nouveaux arrivages, le libraire revient avec une demi-douzaine d’exemplaires : SCAN0321 À la maison, je l’examine rapidement découvrant à la page 8 qu’il fut conçu, rédigé et publié pour souligner les 25 ans écoulés depuis la publication en 1988 de la mère du roman noir, Préférez-vous les icebergs?

Gourmande, bougonneuse, empathique, rêveuse, paranoïaque, maternelle, « féministe enragée », Maud Graham, Québécoise de sang irlandais, s’est illustrée sur la scène judiciaire et romanesque pour la première fois il y a vingt-cinq ans. Elle a ouvert la porte à la plupart des personnages de romans policiers qui sont apparus au cours des années. Le quart de siècle de Biscuit coïncide avec celui du polar québécois moderne.

Sur la piste de Maud Graham lève d’abord le voile sur celle qui a créé le personnage, Chrystine Brouillet, fille de Loretteville, études secondaires au Collège Notre-Dame-de-Bellevue, collégiales au Petit Séminaire et universitaires à Laval. Treize ans passés à Paris, résidente aujourd’hui de Montréal. Puis, l’ouvrage nous propose huit promenades, sept à Québec et une à Montréal, avec, au milieu, un bref détour vers Paris :

  1. Méfiez-vous des Plaines : de l’avenue Wilfrid-Laurier à la terrasse Dufferin.
  2. Le traversier de Maud et Grégoire : la traverse Québec-Lévis
  3. Meurtres à vélo : la promenade Samuel-de Champlain
  4. Les flâneries d’un légiste hédoniste (Montréal) : le plateau Mont-Royal
  5. Désirs d’exotisme : le Vieux-Port de Québec
  6. La nostalgie des vieux murs : le quartier latin
  7. Filatures : le faubourg Saint-Jean-Baptiste
  8. Brunch dans le quartier flambant : le faubourg Saint-Roch

Livre en main,  extraits de texte et photographies à l’appui, le promeneur en a pour des heures et des heures, sinon des jours et des jours, à arpenter la ville, à s’interroger sur son évolution récente, à explorer les venelles et les ruelles, à savourer les images objectives du photographe et subjectives de l’auteure. Et ce n’est pas tout! Sur la piste de Maud Graham est aussi un livre de cuisine, contenant 40 recettes et plus 50 bonnes adresses!

On se régale!