L’idylle parlementaire qui a fait les manchettes récemment n’est pas une grande affaire d’État, mais que la presse n’ait pas trouvé de précédents dans les parlements canadiens, voire occidentaux, est significatif. Pour le moment, les observateurs ont classé l’affaire « privée » : l’État n’a pas sa place dans les chambres à coucher, on ne peut pas empêcher un cœur d’aimer, et un homme « normal » regarde les belles femmes, comme l’a dit un député (sans préciser ce qui arrive des « anormaux »…), etc.
Dans notre parlement, même si les camaraderies transcendent souvent le partis, ces derniers se comportent comme des armées. On n’a qu’à regarder les mosaïques, qui ont bien changé depuis que cette coutume existe : elles ne représentent plus un groupe de collègues mais des structures pyramidales (avec chefs, sous-chefs et fantassins) dont le Parlement est le théâtre d’opérations et, comme à la guerre, il n’est pas régulier de fraterniser, encore moins de coucher, avec l’ennemi.
Ce n’est pas sans raison si madame la ministre a informé rapidement son chef de sa nouvelle situation tandis que monsieur l’oppositionniste s’en serait abstenu. Les deux parties ne sont pas du tout dans la même « position » et ce n’est pas exactement une reprise des conflits de clans de Roméo et Juliette ou des histoires de gangs de West Side Story. Le travail de la ministre n’est pas entravé par sa liaison: au pire, elle devra faire attention de ne pas trop choyer le comté de monsieur, surtout pas au détriment de ses collègues libéraux. Par contre, monsieur se retrouve avec un fil à la patte: son travail exige qu’il exerce la surveillance constante des activités gouvernementales et il vient de se clouer sur le banc pour certains débats à venir. Madame l’a neutralisé et on comprend que son chef du gouvernement se dise à l’aise avec ça. Heureusement, monsieur est le seul de son parti dans cette situation, mais, justement, il sera de plus en plus seul, surtout s’il devient indépendant, comme l’a suggéré un chroniqueur. Aussi bien lui faire porter le bonn…et d’âne!
Mais, on n’en est pas là. Pour le moment, le monde trouve ça « ben cute », du moins officiellement, mais ça peut difficilement durer. Un patron pourrait-il avoir une blonde permanente dans l’exécutif syndical de son entreprise? C’est personnel? Sûrement, mais pourquoi en a-t-on fait une affaire publique? Anodin et sans conséquence? Sûrement aussi, surtout si on considère les débats parlementaires comme du théâtre.