Le Anglais et les Français ne se sont pas affrontés dans la guerre de la Conquête pour une question de territoire mais bien pour avoir l’exclusivité du commerce avec les Sept nations qui contrôlaient alors les routes maritimes entre Gaspé et le lac Érié. En septembre 1759, le général Amherst est allé à Kahnawake pour obtenir de l’aide afin de se rendre à Québec en sécurité et appuyer Wolfe dans sa bataille contre les Français. En route vers Québec, le convoi rassembla d’autres Amérindiens et, arrivés à destination, les Mohawks conseillèrent à Amherst de mener un raid nocturne pour surprendre l’ennemi. Ce qui fut fait, avec succès, et les Français se rendirent au grand dam de Montcalm, furieux de voir Wolfe triompher sous la direction des Mohawks et avec des tactiques déshonorantes pour l’armée britannique. Montcalm défia alors Wolfe et ils moururent tous deux au terme d’un duel. Le conflit se régla finalement par le traité d’Oswegatchie.
Voilà comment les événements de 1759 étaient racontés par les anciens de Kahnawake dans le jeune temps de Billy Two Rivers qui les a relatés à son tour au journal communautaire mohawk Eastern Door (« The Plains of Abraham story », 27 février 2009, p. 1 et 4).
Le duel entre Wolfe et Montcalm sera sûrement l’élément le plus insolite de cette nouvelle version de la bataille des plaines d’Abraham… mais ce n’est pas le seul qui détonne.
Avec plusieurs références sûres à l’appui, Peter Macleod rapporte qu’un millier d’Amérindiens ont effectivement participé à la campagne de Québec dont quelques centaines de guerriers des Sept nations : Mohawks de Kahnawake et d’Akwesasne, Mohawks, Algonquins et Nipissings de Kanesatake, Onontagés d’Oswegatchie, Abénaquis d’Odanak, et de Bécancour, Hurons de Lorette… Mais ils étaient du côté des Français! Quelques années plutôt, lors d’une réunion à New York, des représentants de Kahnawake avaient refusé de rester neutres dans le conflit : « Les Français et nous sommes un seul et même sang, ont-ils répondu, et où ils mourront, nous mourrons aussi. Nous sommes comme les deux doigts de la main; là où iront les Français, nous irons aussi » (La vérité sur les Plaines d’Abraham, Montréal, l’Homme, 2008, p. 106-108).
Pour sa part, le général Amherst n’est jamais venu à Québec en 1759; il est resté dans le haut Saint-Laurent et n’aurait pu atteindre Québec sans prendre d’abord Montréal qui n’a capitulé qu’en septembre 1760, un mois après le présumé « traité » d’Oswegatchie dont il ne reste aucune trace écrite… Le « contrôle » de la voie maritime par les Amérindiens en 1759 tient aussi de la légende.
Le chef Billy Two Rivers a senti le besoin de partager cette tradition orale pour le bénéfice de sa communauté et « to correct some misinformation he read about the 1759 battle in Québec City »…
L’année sera longue.
Une réflexion au sujet de « Un conte amérindien »
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La relation que fait Billy Two Rivers de la bataille des Plaines d’Abraham comporte un avantage majeur : André Juneau pourrait finalement reconstituer la bataille avec seulement deux figurants.
Peu de gens, de passage sur la Grande-Allée à cette heure-là, remarqueraient cet accrochage, moins visible qu’une bagarre à la sortie d’un bar.