Le 9 septembre 1759, des troupes dirigées par George Scott et Joseph Goreham débarquent simultanément à Kamouraska et à la rivière du Sud (Montmagny) dans le but de ravager les fermes de la Côte-du-Sud qui, depuis juin, avaient été laissées à la charge des femmes, des enfants et des vieillards, les hommes en état de porter les armes ayant été rassemblés à Québec pour défendre la capitale.
L’armée britannique assiégeait alors Québec depuis plus de deux mois. De Pointe-Lévy, Monckton bombardait inlassablement la ville. Campé sur la rive est de la rivière Montmorency, Wolfe avait cherché tout l’été le moyen de faire bouger Montcalm, résolument retranché à Beauport. Le 31 juillet, il avait vainement tenté de traverser la rivière. Indécis, malade, contesté par ses adjoints, il voyait le temps passer et appréhendait le moment où il faudrait lever le siège.
En juin, sachant que les postes qu’il installerait autour de Québec seraient vulnérables, Wolfe avait fait afficher un placard invitant les civils à demeurer à l’écart du conflit, mais cet avertissement n’avait pas eu l’effet souhaité. Comme il l’écrivait lui-même, « des vieillards de soixante-dix ans et des garçons de quinze ans postés à la lisière de la forêt font feu sur nos détachements, et tuent ou blessent nos hommes ». À la mi-juillet, il avait sommé les habitants de rentrer tranquillement chez eux avant le 10 août, sinon, « s’ils persistent à prendre les armes », il fera ravager leurs propriétés. C’est d’ailleurs ce qu’il avait prévu, dès le mois de mars, en cas d’échec de son expédition : détruire les fermes, les récoltes et le bétail, « expédier en Europe le plus grand nombre possible de Canadiens en ne laissant derrière [lui] que famine et désolation », comme en Acadie.
Sans attendre cette date-butoir, dès le début d’août, Wolfe fait incendier Baie-Saint-Paul et La Malbaie par Goreham qui mène aussi un raid du côté de la Grande-Anse (Sainte-Anne et Saint-Roch). Quelques paroisses de Lotbinière et toute la côte de Beaupré, de la rivière Montmorency jusqu’au cap Tourmente, subissent le même sort. Au début de septembre, dans la région sous contrôle britannique, il ne reste que la Côte-du-Sud à brûler.
Scott est donc chargé de ravager des paroisses qui se trouvent à plus de 100 kilomètres du théâtre des opérations et ne menacent pas directement l’armée britannique : Kamouraska, Rivière-Ouelle, Sainte-Anne, Saint-Roch, Saint-Jean, L’Islet et une partie de Cap-Saint-Ignace où il se rembarque pour retourner à Québec le 17 septembre. Sur ce territoire, qui comptait environ 600 foyers, Scott déclare avoir brûlé « 998 bons bâtiments, deux sloops, deux goélettes, dix chaloupes, plusieurs bateaux et petites embarcations ». De son côté, du 9 au 15 septembre, Goreham s’occupe de la région de la rivière du Sud, probablement jusqu’à Berthier, sans négliger l’île aux Grues.
Pendant cette semaine tragique, les Sud-côtois ont résisté dans la mesure de leurs moyens, multipliant les embuscades sur le chemin des incendiaires. L’Histoire retiendra le nom de Charlotte Ouellet qui a pris les armes avec d’autres femmes à Sainte-Anne. Dans la région de L’Islet, les hommes de Scott ont fait six prisonnières qui sont probablement aussi des résistantes. À Montmagny, le 13 septembre prochain, on dévoilera un monument à la mémoire du seigneur Jean-Baptiste Couillard qui a été tué par les Anglais le 14 septembre avec trois autres combattants.
(pour plus de détails, voir L’Année des Anglais ; la Côte-du-Sud à l’heure de la Conquête, Septentrion, 2009, http://www.septentrion.qc.ca/)