On négocie à Québec sur la répartition des sièges dans les commissions parlementaires. Le PQ « craint d’être marginalisé ». Probablement aussi de s’être marginalisé.
Dans le Règlement réécrit sous la direction du président Richard Guay en 1984, l’article 122 était plein de sagesse et conforme à l’esprit du parlementarisme : « La composition des commissions doit refléter l’importance numérique des groupes parlementaires et tenir compte de la présence de députés indépendants à l’Assemblée ».
Cet article aurait peut-être requis quelques négociations, avant d’être appliqué en 2007, mais il aurait posé la base de la discussion : un parti ministériel minoritaire à l’Assemblée nationale est aussi minoritaire dans ses commissions. Dans le cas contraire, on verrait les commissions perdre leur temps à discuter et adopter des lois, des crédits et des résolutions qui auraient ensuite toutes les chances d’échouer en Chambre ; l’étude détaillée des projets de loi pourrait se dérouler en commission parlementaire, où les troupes ministérielles seraient majoritaires, ou à la commission plénière, où elles ne les seraient pas. Ces éventualités défient toute logique, tout comme il serait illogique que l’opposition n’ait pas la majorité des sièges à la Commission de l’Assemblée nationale (qui coordonne les travaux des autres commissions) et au Bureau de l’Assemblée nationale (qui supervise et oriente l’administration de l’Assemblée).
Avec le principe établi par l’article 122 du Règlement de 1984, et compte tenu de la répartition actuelle des sièges en pourcentage (38,4 % au PLQ, 32,8 % à l’ADQ et 28,8 % au PQ), on aurait convenu assez rapidement d’une composition 5-4-3 pour des commissions de 12 membres ou encore mieux, vu le nombre restreint des joueurs disponibles, d’une formation 4-3-2 pour des commissions de 9 membres. Au pire, pour le PQ, 5-4-2 dans des commissions de 11 membres, ce qui serait quand même mieux que ce que lui accordent les règles actuelles. En effet, pour des raisons qui échappent au bon sens, cet article sage et « tout usage » de 1984 a été supprimé en 1998 et remplacé par une disposition « jetable » qui prévoyait, dans le cas de la dernière législature, des commissions de 12 sièges dont 7 pour les députés ministériels, 4 pour l’Opposition officielle et UN pour les «autres» (députés d’un tiers parti ou indépendants). On comprend tous que cette disposition est inapplicable actuellement.
Dans les négociations qui s’amorcent, on plaide, pour étayer la position gouvernementale, que notre Règlement est différent de celui d’Ottawa. Bien sûr. Mais il ne faudrait pas s’en vanter.
4 réflexions au sujet de « Minoritaire un jour, minoritaire toujours »
Les commentaires sont fermés.
La situation est en effet burlesque. Ce n’est même plus une question de respect de la démocratie parlementaire, mais un respect du bon sens. Durant toutes mes années de pratique à l’Assemblée, je n’ai jamais observé une telle incongruité dans aucun parlement du monde. Je soupçonne que même la défunte République démocratique populaire d’Albanie aurait fait mieux, en autant qu’elle eût permis le multipartisme.
Toutefois le Parti québécois a contribué cette situation. Il est ironique de rappeler que la modification de l’article 122 a été faite en octobre 1998, quelques jours à peine avant la dissolution et le déclenchement des élections. Le PQ avait alors la majorité des sièges. La situation actuelle révèle bien l’esprit général du Règlement qui favorise nettement une Assemblée bipartisane, à l’image de notre mode de scrutin.
Par contre, ce même Règlement offre au PQ un outil de négociation non négligeable. Dans les quinze premiers jours d’une nouvelle Législature, la Commission de l’Assemblée nationale doit se réunir pour notamment déterminer la composition des commissions. Cette décision doit être prise à l’unanimité et le 2e groupe d’opposition, le PQ, y sera représenté par son leader parlementaire et son whip qui disposent ainsi d’un droit de veto. Nul doute que tout le monde aura ce fait bien en tête dans les négociations qui devraient s’amorcer cette semaine.
Christian A. Comeau, Québec
J’imagine que les trois partis vont trouver un terrain d’entente. Ce que j’aimerais bien savoir, c’est ce qui peut faire tomber ce gouvernement, outre le vote sur le budget évidemment. Un vote de non confiance ne doit pas pouvoir être introduit n’importe quand, non ?
L’art. 304 du Règlement permet à l’opposition de présenter 6 motions de censure par session en plus de celles qui peuvent être déposées lors des débats sur le discours d’ouverture et sur le budget. Le gouvernement peut perdre des votes en d’autres circonstances, sur un projet de loi par exemple, mais il n’est pas renversé et obligé d’aller en élections pour autant (même si on se sert de cette hypothèse pour nourrir la discipline de parti) à moins qu’il ne fasse lui-même de ce vote une question de confiance.
Toujours très intéressant à lire. Après l’impasse constitutionnelle, le Québec se trouverait-il dans une impasse institutionnelle ?