Le Devoir du 18 août nous a rappelé que la maison où résidait Louis-Hippolyte La Fontaine, premier ministre du Canada (1848-1851), était toujours debout, un des derniers témoins des événements dramatiques survenus en 1849, quand Montréal était la capitale du Canada-Uni.
En avril 1849, excédés par une série d’événements politiques qui tournent tous en faveur des « Canadiens français » (meilleur contrôle sur les dépenses publiques par la majorité parlementaire francophone, formation d’un gouvernement dirigé par un francophone, rétablissement des droits du français au Parlement, l’amnistie générale des insurgés de 1837-1838, indemnisation des personnes dont les biens ont été endommagés ou détruits durant les répressions de 1837 et 1838), des émeutiers anglophones excités par la Gazette et dirigés par un chef pompier (!) attaquent et incendient l’édifice qui servait de Parlement depuis 1844 (sur le site actuel de la place d’Youville).
L’agitation se poursuit pendant plusieurs jours. Les émeutiers s’en prennent notamment à la maison où le premier ministre s’apprêtait à emménager le 1er mai. L’intérieur de la maison est saccagé et les dépendances, totalement brûlées. Le 30 avril, les émeutiers s’attaquent au gouverneur devant le château Ramezay et le font retraiter vers sa résidence de Monklands d’où il ne sortira plus de l’été.
De mai à août, la ville ne connaît pas de repos. On attaque notamment un groupe de ministres à l’hôtel Têtu. Le 15 août, quand on arrête finalement les présumés responsables de l’incendie d’avril, les tories sont furieux. Environ 200 émeutiers attaquent la maison de La Fontaine dont la garde avait été confiée à quelques amis du premier ministre dirigés par le docteur Étienne-Paschal Taché, conseiller législatif et commissaire (ministre) des Travaux publics. Quelques coups de feu sont tirés par les assaillants qui retraitent à la première fusillade de la « garnison ». Un nommé Mason est blessé et meurt le lendemain. Des émeutiers incendient ensuite l’hôtel où se tient l’enquête du coroner. La Fontaine doit se réfugier dans le corps de garde où il passe le reste de la journée, sous la protection des militaires qui avaient fait preuve d’une discrétion « remarquable » depuis quatre mois….
Sauvée de la démolition en 1987, la maison est inhabitée depuis 15 ans et mal en point. Son propriétaire ne semble pas intéressé à en exploiter la valeur patrimoniale et le gouvernement fédéral fait preuve d’indifférence.
Il devrait s’en occuper, en faire un « lieu historique national », tiens : il y en aurait au moins un pour célébrer une bataille remportée par des Canadiens français.
(Pour plus de détails sur 1849, voir ci-contre Une capitale éphémère. Montréal et les événements tragiques de 1849 )