S’il fallait illustrer à quel point les fêtes du 400e ont manqué de contenu sur l’histoire de Québec, on pourrait citer le « point de vue » publié dans Le Soleil du 22 juillet par trois étudiants en histoire sous le titre « Une ignorance stupéfiante ». J’exagère évidemment : la Société du 400e n’est pas responsable des lacunes de l’enseignement de l’histoire au Québec et surtout pas des conséquences d’un enseignement qui se préoccupe médiocrement des faits et des dates pour privilégier les « grandes interprétations ».
Trois éléments de cette lettre ouverte méritent une réaction.
D’après les auteurs, au moment où Champlain fonde un comptoir de traite à Québec, « des populations francophones s’enracinaient déjà en Amérique ». Ce serait une éminente contribution à nos connaissances s’ils pouvaient révéler le lieu de ces « enracinements ». En 1608, les essais brésilien et floridien sont de l’histoire ancienne; l’établissement acadien de Port-Royal est fermé; à part les pêcheurs qui jettent l’ancre (et non des racines) dans le golfe, les gens de Champlain sont les seuls à porter les couleurs françaises.
Ces auteurs reprennent aussi une légende urbaine au sujet de la population « majoritairement anglophone » à Québec au XIXe siècle. Ils lisent peut-être trop de chroniques d’Alain Dubuc, qui a écrit la même chose récemment. Les Québécois d’origine britannique ont représenté environ 40 % de la population de Québec au milieu du siècle, résultat de la grande vague d’immigration irlandaise des années 1840. Ce pourcentage a baissé ensuite très rapidement pour se situer aux environs de 15 % vers 1900.
Enfin, pour ces trois étudiants en histoire, 2008 est l’anniversaire de la ville de Québec, « n’en déplaise à ceux qui veulent y voir autre chose de moins banal ». Là, il était temps qu’ils interviennent. Est-on en train de dépenser près de 100 millions de dollars pour un anniversaire « banal » ? Tout ce que nous avons de dirigeants politiques, du maire de Québec à la gouverneure générale, se fend de grands discours depuis plusieurs mois pour nous dire que la fondation de Québec marque le début de l’Amérique française. Ces déclarations protocolaires ne se sont pas concrétisées souvent dans les fêtes mais on était plusieurs à y croire…