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Idiots et « chiqueux de guenilles »

Alain Dubuc est un peu à côté de la coche ce matin au sujet de la rémunération des députés (http://plus.lapresse.ca/screens/976da720-9d63-4342-94c8-029856ef9028%7C_0.html).

Il écrit : « À l’heure actuelle, un député touche un salaire de 98 850 $ [en réalité, 90 850 $] auquel s’ajoute une indemnité non imposable de 16 465 $. Le projet consiste à transformer ces indemnités en salaire, donc à les rendre imposables, et à augmenter la contribution des députés à leur régime de pension de 21 % à 43 %. Le salaire devient plus élevé, à 140 117 $, mais comme les députés devront payer de l’impôt sur leurs indemnités et qu’ils verseront plus dans leur fonds de pension, ils n’auront pas un sou de plus dans leurs poches. » Michel David semble faire le même calcul dans Le Devoir (http://www.ledevoir.com/politique/quebec/455244/les-chiqueux-de-guenille)

Voyons ce que dit le comité L’Heureux dans son rapport.

Recommandation 1 : « Le Comité recommande que l’allocation annuelle de dépenses non imposable (16 027 $) soit intégrée à l’indemnité de base (88 186 $). Le montant de l’allocation annuelle de dépenses non imposable a été révisé (30 500 $) pour équivaloir, après impôt, à l’allocation actuellement versée. En appliquant cette intégration, l’indemnité de base du député aurait été de 118 686 $ en 2013. »

Jusque là, ce serait effectivement changer« quatre trente sous pour une piasse ». Mais il faut lire la recommandation 2 : « Le Comité recommande que l’indemnité de base du député soit fixée au maximum de l’échelle de traitement du niveau 4 de la catégorie des dirigeants et des membres d’un organisme ou d’une entreprise du gouvernement. En 2013, la rémunération aurait été de 136 010 $ ».

L’indemnité de base serait donc augmentée de 17 324$, soit une hausse de 14% par rapport à 118 686$. Bien sûr, il faudra payer de l’impôt, mais il ne devrait pas dépasser 50%. Bien sûr, il faudra payer davantage pour le régime de retraite, ce qui représenterait environ 4000$ de plus, déductibles d’impôt, quand même, et en fin de compte de l’épargne.

Il devrait donc rester quelques sous, sans compter que les indemnités additionnelles touchées par de nombreux parlementaires seront désormais calculées en fonction d’une indemnité de base nettement plus élevée, même si le Comité propose de réduire les pourcentages. Ainsi, le leader du gouvernement qui reçoit actuellement 154 326$ (88 186$ + 75%) aurait désormais 217 616$ (136 000$ + 60%), soit 63 290$ de plus, dont 30 500$ qui représentent l’ancienne allocation de dépenses non imposable et 32 790$ d’augmentation réelle.

Ce n’est pas en comparant les indemnités, l’ancienne et la nouvelle, qu’il faut chercher s’il y aura « coût nul », mais plutôt en considérant la rémunération globale, incluant l’allocation de transition et la retraite.

À ce chapitre, une première distinction s’impose : les indemnités sont de l’acquis (tous les députés vont les toucher) tandis que la « rémunération différée » est incertaine. Combien de députés touchent ou vont toucher l’allocation et/ou la pension? Le rapport L’Heureux est moins clair sur cette question; ce n’est pas là qu’on trouve l’expression « coût nul », ni l’économie de 400 000$ dont il a été question ces derniers jours. Chose certaine, mais rarement mentionnée dans le débat, les allocations et les pensions seront calculées sur des indemnités beaucoup plus élevées, ce qui n’est pas négligeable, mais hypothétique.

Y aura-t-il une économie réelle pour l’État tout compte fait? Un « coût nul »? C’est ce qu’on prétendait en 1982 : personne n’en a fait la démonstration claire et on s’est quand même retrouvé avec une « Ferrari » trente ans plus tard. Le rapport L’Heureux évoque les « recettes fiscales additionnelles » comme compensation; les syndiqués accepteront tout aussi aisément de payer plus d’impôt si on leur offre de meilleures conditions salariales.

La Ferrari

« Depuis de très nombreuses années, beaucoup de gens nous ont dit qu’il fallait effectivement apporter des modifications à ce régime de retraite tellement ses avantages étaient considérés comme exorbitants, tellement on considérait que les avantages qu’il procurait aux députés étaient abusifs. Tout le monde s’accordait à dire que c’était un régime de retraite trop généreux. Je crois que, là-dessus au moins, on a fait l’unanimité. »

On se croirait en 2015, mais c’est plutôt dans le Journal des débats du 18 décembre 1982 qu’on trouve ces propos de Jean-F. Bertrand.

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Le leader du gouvernement parrainait alors une réforme du régime de retraite, dont les avantages « abusifs » devaient disparaître en échange d’une hausse de salaire, le tout à coût nul, disait-on.

Un tiers de siècle plus tard, ce régime est qualifié de « Ferrari » par un comité indépendant (http://www.lapresse.ca/debats/editoriaux/paul-journet/201407/21/01-4785658-la-ferrari-des-elus.php). Aurions-nous été trompés?

On propose donc maintenant la disparition de l’abus qui serait compensée par une hausse de salaire. Ce n’est pas tout à fait le lot des nombreux employés de l’État qui ont vu ou vont voir leur régime de retraite modifié, sans compensation.

 

Comment célébrer un anniversaire de mariage en l’absence d’un des conjoints ?

Les fonctionnaires fédéraux qui conseillent Patrimoine-Canada en vue du 150e anniversaire du Canada auraient de la difficulté à trouver des événements qui illustreraient « des contributions marquantes du Canada français à la fédération » (http://journalmetro.com/actualites/national/864431/le-canada-francais-un-peu-trop-absent-du-150e/). Ils ont bien envisagé « les contributions des Premières Nations, le centième anniversaire, en 2018, du droit de vote des femmes au fédéral, l’abolition de l’esclavage au Canada (il y a près de 200 ans) ou le 75e anniversaire des camps où avaient été internés les Canadiens d’origine japonaise pendant la Deuxième Guerre mondiale » mais leur imagination pourtant fertile quand il est question de multiculturalisme semble tourner court en ce qui concerne les Canadiens français.

Il est assez étrange de constater leur prédilection pour les Autochtones, qui n’ont joué aucun rôle (comme communauté) dans la conception et la mise en place du régime fédéral, alors qu’ils oublient que la Confédération a été construite sur la base de grands compromis entre les leaders des deux communautés qu’on qualifiait encore, il n’y a pas si longtemps, de « peuples fondateurs » ? L’interprétation est aujourd’hui contestée mais on y a vu longtemps (et plusieurs le croient encore) un véritable « pacte » entre les deux communautés linguistiques ?

Macdonald-Cartier

De fait, il est difficile de célébrer le 150e anniversaire d’une institution qui vous tourne le dos depuis le « renouement conjugal » raté de 1982. Ce serait un peu comme célébrer un anniversaire de mariage en l’absence d’un des conjoints.

Conseils stratégiques pour le scrutin

 Si …Trudeaux


… tu n’as pas fait le lien entre l’arrivée de Pierre-E. Trudeau à la tête du Parti libéral, la mise au rancart des travaux de la commission sur le bilinguisme et le biculturalisme et le début de la banalisation de la communauté canadienne-française dans le « multi-culti »,
… tu n’as pas vécu la crise d’Octobre ni vu l’arrestation arbitraire de centaines de citoyens sous « les ordres » du gouvernement libéral,
… tu n’as pas eu connaissance des expropriations abusives de Forillon et de Mirabel, pour un parc aux ambitions démesurées et un aéroport aujourd’hui fermé;
… tu n’étais pas parmi ceux qui se sont fait promettre par le premier ministre libéral du temps qu’un NON au référendum de 1980 serait un OUI au changement,
… tu ne te souviens pas que ce changement a pris la forme d’une nouvelle loi constitutionnelle mijotée par le gouvernement Trudeau et adoptée sans le consentement du Québec, qui en est toujours exclus, un tiers de siècle plus tard,
… tu n’as pas encore réalisé que l’enchâssement d’une Charte des droits dans cette constitution (tricotée si serrée qu’on ne peut pratiquement plus en sortir) a mis la table pour un « gouvernement des juges » qui joue contre le Québec et nos droits collectifs,
… tu ne te rappelles pas que les efforts du gouvernement Mulroney pour corriger cette situation ont été contrés au Canada anglais avec l’appui actif et la bénédiction de l’ex-premier ministre libéral et de son âme damnée Jean Chrétien, qui deviendra chef du même parti,
… tu as digéré les moyens illégaux mis en œuvre par gouvernement libéral de Jean Chrétien pour obtenir un NON au référendum de 1995,
… tu as oublié le scandale des commandites, sous ce même gouvernement libéral qui a laissé des sous-fifres encaisser les coups,

et si, enfin, tu n’as pas remarqué que le directeur de la campagne de Justin (qui vient de démissionner) était l’homme de son père à Londres lors du coup de force constitutionnel de 1981-1982,

tu peux voter libéral, « mon fils » (comme disait Kipling).

Le «blues» du «backbencher»

Après la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne, voilà le député de Fabre qui quitte son siège quinze mois après avoir été réélu.

Au journaliste de La Presse, il a reconnu que le refus du premier ministre de le nommer au cabinet avait pesé lourd dans sa décision.

Mais, dans la lettre de démission qu’il a envoyée au président de l’Assemblée nationale, il dit avoir consulté le commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale, qui lui a confirmé que sa démission, compte tenu de sa situation familiale (il a cinq enfants), s’appuyait sur un motif légitime et n’était pas contraire aux valeurs de l’Assemblée nationale.

Ouimet

Prenons ici une pause pour relire ce qui précède.

Ce monsieur invoque les classiques raisons familiales pour laisser un mandat de « simple député » ministériel, et se justifier de toucher son « allocation de transition » (difficile de dire au commissaire qu’il méprise son job de député…), mais il aurait pu envisager de rester en politique si le « défi professionnel » avait été plus important. Ministre, genre.

En bref, s’il avait eu beaucoup PLUS de travail, il aurait pu plus facilement le concilier avec la famille.

Aussi bien le laisser retourner au droit.