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Le fédéral en voie de disparition?

L’éditorialiste en chef de La Presse s’inquiétait récemment de la « disparition du fédéral ». Les partis provinciaux, écrivait-il le 22 octobre, « dénoncent la centralisation fédérale, mais c’est la tendance contraire qui prévaut. Les motions unanimes se succèdent, les concessions fédérales aussi, et les Québécois ont de moins en moins de contacts avec le gouvernement du Canada. Les indépendantistes, en particulier, cherchent à faire disparaître toute trace du fédéral en territoire québécois […] ». Et « les politiciens fédéralistes sont trop couards ou trop malhabiles pour s’interposer efficacement» .
Pourquoi tant d’alarme? Parce que le gouvernement Charest serait « devenu plus gourmand ». Il demande que le fédéral lui cède trois lots situés à l’est de l’Hôtel du Parlement, entre la Fontaine de Tourny et les fortifications, et Ottawa refuse, car ces lots « font partie du Lieu historique national des Fortifications-de-Québec, un site préservé par le gouvernement du Canada ».
L’éditorialiste en chef part sur le mauvais pied. La position du gouvernement du Québec respecte intégralement la motion unanime du 20 mai dernier qui lui demandait de poursuivre les « démarches auprès du gouvernement du Canada afin que l’ensemble des terrains formant la colline Parlementaire, que le gouvernement du Québec loue au gouvernement fédéral depuis 1881, lui soient cédés »; son porte-parole avait alors précisé que la motion concernait « trois lots qui sont de l’autre côté du boulevard Honoré-Mercier et […] un lot, 9 686 mètres carrés, qui se trouvent devant le Parlement ». Pas de surprise, donc, ni gourmandise.
Par ailleurs, l’éditorialiste en chef pourrait bien induire en erreur ses lecteurs qui ne sont pas familiers avec les lieux et qu’il n’aveugle pas de ses lumières. Québec ne réclame pas une partie des fortifications mais une pelouse qui longe ces dernières, une part infime dudit lieu historique et une part infinitésimale des terrains que le fédéral possède dans le Vieux-Québec et les environs. Mieux encore, c’est un terrain que Québec a aménagé à ses frais, dans les années 1880, en aplanissant les glacis, et c’est en vue de faire d’autres travaux d’embellissement qu’il a réclamé, dès 1888, la propriété de cet espace entre Dufferin (aujourd’hui Honoré-Mercier) et les fortifications, et non seulement « du lot se situant juste devant l’Hôtel du Parlement» , comme l’écrit encore erronément l’éditorialiste en chef.
Ce dernier nous sert ensuite le refrain de « l’excellent travail » des fonctionnaires fédéraux. Bien sûr. Les mêmes qui géraient le manège militaire qui a disparu dans un incendie dont les circonstances (gênantes?) semblent bien difficiles à expliquer dans un rapport? Ou ceux qui gèrent les immeubles militaires patrimoniaux de Québec dont on apprenait cette semaine qu’ils sont à près de 50% dans un état médiocre, onze d’entre eux représentant même une menace pour les piétons?
L’entretien des bâtiments que le fédéral tient absolument à garder pour assurer sa présence à Québec lui impose des responsabilités. De son côté, Québec devrait au moins être capable de tondre le gazon.

Et ce brave Henri IV? (2)

Le changement de nom qu’on a proposé pour l’autoroute Henri-IV suscite des réactions négatives. La Société historique de Charlesbourg s’est prononcée contre par la voix de son président René Cloutier, la Société historique de Québec aussi et d’autres devraient suivre.
Ci-dessous la lettre de monsieur Cloutier.
JOUR DE L’OUBLI
Une lettre circule dans la région de Québec pour demander d’appuyer le changement de nom de l’autoroute Henri-IV en autoroute de la Bravoure. En tant que président de la Société historique de Charlesbourg, j’ai refusé d’appuyer cette démarche en plus de la dénoncer. Il est également préférable d’ignorer le nom du promoteur de cette requête. Il reflète tout au plus l’ignorance qu’il a de notre histoire.
Pour les responsables de la démarche, voilà une malheureuse occasion de démontrer le peu de cas qu’ils font de l’histoire, du devoir qu’ils ont de la respecter, en plus d’abandonner à l’école seule, la responsabilité de l’enseigner. Évidemment c’est une façon facile de se donner des cotes d’écoute sur les ondes et de la popularité sur la scène politique : on est assuré du silence d’Henri IV, mort depuis 400 ans. Quelle bravoure! L’enseignement de l’histoire est l’affaire de tous, de l’école à la famille, des institutions aux médias d’information. Il faut éviter de succomber aux manchettes d’une actualité très passagère. Il doit bien exister des endroits de la région de Québec sans dénomination, que l’on pourrait baptiser comme on le veut, sans effacer une page de notre histoire! S’ils ne vous viennent pas à l’esprit, nous sommes prêts à collaborer pour vous en suggérer.
Par ailleurs qu’a fait Henri IV pour démériter de la sorte et devoir retourner aux limbes de notre mémoire collective? C’est lui qui a permis à Champlain de fonder Québec dont on vient tout juste de célébrer les 400 ans. Veut-on déjà l’oublier? C’est aussi ce roi, symbole de tolérance, qui a refait l’unité de son pays appauvri par des décennies de guerres de religions qui ont empêché la France de développer son territoire d’Amérique depuis le départ de Cartier jusqu’au retour de Champlain. Avec François Ier, Henri IV est probablement le seul monarque français à avoir eu l’intention d’implanter une communauté française viable en Amérique du Nord.
Comme on projette de proposer le nouveau nom de l’autoroute le Jour du Souvenir – ne devrait-on pas plutôt parler de Jour de l’oubli en l’occurrence? – il est urgent que les décideurs réfléchissent à l’erreur qu’ils sont en train de commettre.
Cessons de soumettre l’histoire au service des goûts du jour.
René Cloutier, président de la Société historique de Charlesbourg
20 octobre 2009

Légende banlieusarde

Travailleuse autonome, madame X utilise Internet depuis qu’il existe. Elle est en communication constante avec plusieurs entreprises et protège évidemment sa connexion sans fil avec un antivirus efficace.
Au printemps 2009, elle constate que son fournisseur de services Internet lui a facturé un supplément parce qu’elle a dépassé le maximum de téléchargement prévu à son contrat. Appel chez le fournisseur au début de mai. Dans une conversation enregistrée (d’après le message téléphonique de l’entreprise), un technicien l’informe sans se faire prier qu’il y a eu des téléchargements énormes dans sa connexion tel et tel jour, entre telle et telle heure. Quelqu’un a réussi à cracker son routeur, à partir de telle date et cette personne se trouvait à 40 ou 50 mètres de son ordinateur. Le technicien ne lui a pas donné l’adresse IP du pirate mais il n’aurait pas été nécessaire de le torturer longtemps pour la connaître.
Non seulement quelqu’un a-t-il utilisé sa connexion pour effectuer d’énormes téléchargements mais il a laissé des traces d’effraction sur son ordinateur sous forme de virus, chevaux de Troie et autres cochonneries, de telle sorte qu’elle doit faire reformater son appareil. Par mesure de précaution, elle s’abonne au service de sécurité du fournisseur et revient à la connexion avec fil. Madame X habite dans «un pavillon de banlieue» depuis une trentaine d’années. Vérification faite dans l’entourage, deux voisins ont été piratés quelques mois plus tôt. Le «problème» est vite cerné.
Plainte à la police en août. En allant aux nouvelles, deux mois plus tard, elle apprend que le dossier a été fermé en septembre. L’enquêteur s’est fait répondre par le fournisseur de services Internet que la plaignante ne se protégeait pas assez et que la présence de virus dans son ordi était la cause des téléchargements massifs!?! Bref, la version informatique de la jupe trop courte.
Si le pirate fait partie de ses abonnés, le fournisseur peut théoriquement mettre fin à ses comportements frauduleux. Si le pirate n’est pas son client, il pourrait porter plainte pour atteinte à son entreprise. En pratique, le fournisseur s’en lave les mains car la fraude touche SEULEMENT ses clients; lui, il encaisse sur tous les plans : facturation des surplus de consommation, abonnement à son service de sécurité, etc.
Moralité : aucune. Le fournisseur de services Internet est une sous-espèce du propriétaire de bordel. Ce qui se passe dans les chambres ne le concerne pas, tant que personne ne brise ses meubles.

À lire sans rire, sourire ou pleurer

«Du fait que l’accommodement offert est en fait exécuté par la personne en charge de la répartition des dossiers, les évaluateurs et évaluatrices ne sont pas confrontés à un refus de leurs services par le client demandeur d’accommodement.» (http://www.cdpdj.qc.ca/fr/publications/docs/accommodements_politique_SAAQ_commentaires_Commission.pdf)
• la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse au sujet de la politique que la Société de l’assurance automobile du Québec applique lorsqu’un candidat à l’examen de conduite requiert la présence d’un évaluateur et non d’une évaluatrice; autrement dit, «ce qu’on ne sait pas ne fait pas mal».
«Nous ne changeons pas notre position. Elle a simplement évolué.» (Soleil, 17 octobre 2009)
• un attaché de presse pour expliquer que le gouvernement du Québec voit d’un bon œil le financement intégral du futur Colisée par des fonds publics alors que le premier ministre, en campagne électorale, et son ministre, en août dernier, considéraient tous deux l’implication du secteur privé comme d’un élément incontournable.
«Les tuyaux n’appartiennent à personne.» (Soleil, 18 octobre 2009)
• un porte-parole de la Ville de Québec, au sujet d’un ancien réseau d’alimentation des réverbères dont les tuyaux ont laissé échapper des gaz toxiques dans le quartier Saint-Sauveur, forçant les citoyens à quitter leurs résidences pendant quelques jours. Probablement des tuyaux sauvages.
«Je pète une coche régulièrement et, si je n’ai pas de raison de la faire, j’en trouve une.» (Journal de Québec, 2 octobre 2009)
• le maire de Québec, sur un aspect de son entrevue dont l’interprétation n’a pas été contestée.

Dehors les vieux!

Non, ça ne s’adresse pas au président des séances du Conseil municipal, que notre maire a invité à libérer la place (Le Soleil, 30 septembre 2009) parce qu’il est là depuis 16 ans, sans réaliser qu’il en a recruté des plus «vieux» dans son équipe… Il s’agit plutôt du surnom légendaire «Vieille Capitale» que le maire ne trouve pas assez «sexy», et promet de remplacer «par une nouvelle marque de commerce pour mieux vendre la ville de Québec» (Le Soleil, 25 septembre 2009).
Le problème est que les surnoms collent à certaines villes depuis très longtemps sans que les pouvoirs publics en soient responsables (l’expression «Vieille Capitale» n’a jamais été utilisée par l’Office du tourisme et des congrès de la ville), alors que les slogans publicitaires créés de toutes pièces ne durent pas nécessairement. A Paris, on ne sait même pas avec certitude d’où vient le surnom «Ville-Lumière».
«Vieille Capitale» a le mérite de l’originalité, ce qui n’est pas le cas de toutes les «Venise de ci» et les «Perle de ça» qu’on trouve aux quatre coins du monde. Dans le répertoire des surnoms de Wikipedia (une fois n’est pas coutume…), on ne trouve que deux autres «vieilles» soit Toulon, la «vieille militaire», et Bordeaux, la «vieille endormie»! Rien sous «vieux», «old» ou «ancient».
Qui veut-on séduire : des touristes, des immigrants, des Québécois? Les touristes se dirigent naturellement vers le Vieux-Québec (les Vieux Canons et le Vieux-Duluth aussi!) et ce n’est pas l’ancienneté qui les dérange. Au contraire : ils se précipitent sur tous les «vieux quartiers» qu’ils peuvent trouver. Attirer les jeunes familles? Avec un nouveau surnom pour la ville ou un slogan publicitaire? Y a-t-il des exemples de cela quelque part? Ne sommes-nous pas déjà le «Berceau de l’Amérique française»?…
Pour inventer quelque chose de significatif, il faudrait trouver ce qui nous distingue, un produit, un trait de caractère, un aspect géographique… Québec est déjà connue comme le «Gibraltar d’Amérique», c’est quand même mieux que « le Gros village» ou «le Boutt’ de la 20»!
Qu’est-ce qui est distingue Québec depuis quelque temps, sinon son maire? C’est devenu un étalon pour mesurer la qualité des candidats à la mairie, comme dans «Montréal veut un Régis Labeaume». Tablons là-dessus et rebaptisons la ville! Dommage qu’une fin finaude fasse déjà des blagues sur Internet avec son «Monteregis» (http://traceyregina.blogspot.com/). C’eût été un sympathique pied-de-nez aux gens de «Mont-réal»… Mais peut-être un peu «vieux jeu» avec sa référence aux racines latines.
Mieux vaut de l’anglais, avec un accent américain de préférence. Il faut quelque chose qui colle à une ville qui connaît une croissance rapide et soudaine, qui bouge, qui saute et s’éclate.
La «Boom Town»?