Archives pour la catégorie Actualité

Le dessous du panier, la suite

La préparation de la troisième édition de L’Année des Anglais (sortie en août) et un certain nombre d’autres choses m’ayant pris beaucoup de temps, je dois me contenter d’expédier quelques « dossiers » en vitesse, avant qu’ils ne tombent dans l’oubli. Les réactions que j’ai reçues après le premier « dessous de panier » (disons, deux ou trois…) me portent à récidiver.
Bonne nouvelle!
L’architecte Pierre Thibault propose une véritable vision pour le secteur d’Estimauville : un parc, un quartier hautement densifié, un espace circonscrit pour les commerces. Il y a longtemps qu’on n’a pas lu quelque chose d’aussi prometteur pour cette partie de la ville.
Bonne nouvelle?
D’après l’Institut du Dominion, c’est le Québec qui a le meilleur programme d’histoire au Canada (Devoir, 15 juin 2009). Faut-il s’en réjouir? Oui et non.
Seuls le Québec, l’Ontario et le Manitoba exigent de leurs étudiants qu’ils obtiennent la note de passage à au moins un cours d’histoire du Canada au niveau secondaire. C’est étonnant.
Par ailleurs, quand on connaît l’Institut du Dominion, on comprend que la « dénationalisation » qui caractérise le nouveau programme d’enseignement de l’histoire lui soit agréable.
« Double dipping »?
Le Soleil et le Journal de Québec n’ont pas manqué de soulever la « grave » (!) question éthique qui aurait été soulevée si Paul Crête avait été élu et avait touché son indemnité de député québécois et sa pension de député fédéral. Le journaliste du Journal de Québec (30 mai 2009) a vite réglé l’affaire : « Les rentes de retraite payées par les taxes et les impôts de contribuables devraient être versées à ceux qui prennent véritablement leur retraite ».
Un peu court comme solution. Cette question a été étudiée et il n’en est pas sorti de conclusion. Lucien Bouchard est resté seul dans la catégorie « simplicité volontaire » en renonçant à la pension fédérale qu’il avait bien méritée. Le premier ministre actuel a contourné le problème en obtenant de son parti qu’il arrondisse ses fins de mois.
Il y a déjà quelques députés qui cumulent leur indemnité et une retraite du secteur public sans susciter de scandale Et ce n’est pas tout. Que fait-on de ceux qui cumulent une pension de député et un salaire de maire, de conseiller ou de fonctionnaire municipal? Pas besoin de chercher longtemps pour en trouver. On leur impose la simplicité involontaire?
Il faudra s’y faire car les « vieux » sont de plus en plus jeunes; plusieurs retraités seront capables de travailler encore après 35 ans de loyaux services dans la fonction publique ou ailleurs, et ils n’iront pas tous vendre des clous chez Rona pour continuer de toucher le produit de leurs économies.
« Les Hurons respectent de la loi »
La construction de camps par les Hurons dans la réserve faunique des Laurentides soulève une problème d’équité entre les citoyens. Le grand chef des Hurons répond que ses administrés agissent « en toute légalité » (JQ, 7 avril 2009) sur la base des « droits constitutionnels » protégés par le « traité » de Murray!
Ce document reconnu comme un « traité » par des juges (qui n’en ont vu qu’une version tronquée) n’a pourtant établi aucun droit territorial et, en 20 ans, il n’a fait gagner aucune cause devant les tribunaux. Et il aurait pour effet de légaliser la construction de camps dans un espace public?
Fausse publicité gouvernementale
Il y a plusieurs décennies, un hôtelier de Saint-Jean-Port-Joli avait fait éditer une carte postale où on pouvait voir, sur le fleuve, derrière son établissement, des bateaux de croisière dignes des mers du Sud et, plus loin, des montagnes visiblement « importées »… Il n’inventait cependant rien en matière de publicité touristique.
Dans l’Ouest canadien, on a franchi un autre pas récemment : c’est le gouvernement albertain lui-même qui a utilisé un plage d’Angleterre dans une campagne publicitaire provinciale. C’est plus « vendeur » qu’un champ de sables bitumineux.
Des statistiques intrigantes
Comme tous les organismes qui cherchent à tirer de l’argent de l’État en exhibant des chiffres sur les retombées économiques qu’ils génèrent, le Festival d’été de Québec a soutenu récemment qu’il attirait chaque année 1,5 million de festivaliers dont 5% du « reste du monde », i.e. venant d’ailleurs que du Canada, des USA et de la France (JQ, 9 mai 2009).
Le Festival attirerait donc 75000 étrangers par année ou 7500 par jour. À deux par chambre, ils occuperaient à peu près tout ce que le Québec a de lits à louer. Il y a des sceptiques dans la salle.
Et les septiques?
Les médias sont pleins de textes sur la pollution ici et ailleurs dans le monde. Il faudrait avoir vécu en réclusion pour ignorer le b-a-ba de certains problèmes comme le recyclage, le sur-emballage, le smog des poêles à bois, les algues bleues, etc. Comment imaginer alors, en 2009, que des gens achètent un chalet au bord d’un lac « urbain » comme le lac Saint-Charles (qui sert de réserve d’eau à Québec) sans s’inquiéter au préalable de l’état des égouts?
Contraints d’acquitter une facture importante pour rendre leurs fosses septiques conformes à la réglementation municipale, des citoyens sont venus exposer leurs malheurs devant le conseil municipal. « Pas de bon sens », aurait dit le maire, selon un texte du Soleil (16 juin 2009) qui ne précise pas si monsieur Labeaume parlait de la facture ou des citoyens.
« Bodies of nobodies »
À Québec, la controverse sur l’exposition Bodies semble avoir fait long feu. Il y a bien eu quelques lettres ouvertes et des entrevues avec quelques éthiciens, selon qui ne devrait pas exposer des corps sans avoir obtenu un consentement de leur « propriétaire ».
Daniel Gélinas profite des retombées du 400e en matière d’immunité : dans son esprit, si personne ne proteste, c’est qu’il n’y a pas de problème… (JQ, 4 juin 2009). La seule chronique un peu critique sur Bodies est venue de Montréal (Pétrowski). Ici, la presse locale n’a pas « embarqué » et n’a pas révélé son meilleur jour dans ce dossier (Il faut préciser que Le Soleil est partenaire de l’exposition). Ainsi, la porte-parole du Festival d’été a pu affirmer sans rougir que les corps présentés dans Bodies venaient tous de l’Université chinoise de Dalian, en s’appuyant sur les « garanties » de Premier Exhibitions (une entreprise « cotée en Bourse », imaginez!), alors qu’on pouvait lire dans la colonne d’à côté que cette même entreprise avait été contrainte, par le procureur général de New York, de reconnaître que ses corps venaient du Bureau chinois de la police (Soleil, 2 juin 2009)…
En fait, l’entreprise n’en connaît pas vraiment l’origine. Des consentements? On peut parier que les fœtus exposés n’en ont pas donné.

Nationaliser la fête nationale?

Sans le savoir, peut-être, Alain Dubuc a exposé le problème fondamental de la fête nationale («Les ayatollahs de la québécitude », La Presse, 17 juin 2009) : « Le 24 juin n’est plus la fête du saint patron des Canadiens-français, mais la Fête nationale des Québécois. Pour un nombre croissant de gens, cela signifie que c’est la fête de tout le monde, y compris des allophones, y compris de la minorité anglophone. Le fait de les associer à la fête, même dans leur langue, est une mesure des progrès accomplis. »
Un progrès? Pour qui? Le 24 juin était autrefois une fête nationale au sens ethnique du terme, comme il en existe légitimement pour de nombreuses autres ethnies. Ce n’était pas une fête d’obligation pour les francophones et les anglophones s’en fichaient royalement tout en bénéficiant d’un congé. Une semaine plus tard, il y avait une fête civique pour les Canadiens avec un autre congé pour tous. Arrive le gouvernement Lévesque qui, en 1977, transforme la Saint-Jean en fête dite « nationale », tout heureux de rompre avec saint Jean-Baptiste et le Canada français.
Le 24 juin est ainsi devenu une fête civique, toujours organisée par les sociétés Saint-Jean-Baptiste ou sociétés nationales, mais désormais largement subventionnée afin de permettre la tenue des grands spectacles qui la caractérisent. On peut se demander d’ailleurs avec quel recul bon nombre de personnes sont intervenues dans le débat qui nous occupe depuis quelques jours : pour un nombre considérable de Québécois, le 24 juin a toujours été une fête civique.
Ceux qui n’avaient pas saisi la conséquence de la décision de 1977 ne peuvent la rater maintenant. Par une curieuse évolution des choses, ce qui était la fête des Canadiens français échappe maintenant aux francophones qui ne sont plus maîtres de leurs propres institutions nationales. On a « fait du chemin », selon Dubuc, qui souhaite aller plus loin et surtout pas s’obliger à culpabiliser les organisateurs de la fête chaque année pour les infléchir vers le multiculturalisme. Il demande au gouvernement Charest de retirer au Mouvement national des Québécois l’organisation de la fête nationale, sous prétexte qu’il s’y trouve trop de « militants » portés sur les « dérapages », la « pensée unique » et le « dogmatisme »? Quelle idée, en effet, de confier une fête nationale à des nationalistes?
Ainsi la boucle serait fermée : après avoir dépouillé la Saint-Jean de son sens fondamental, on en expulserait ceux qui l’organisent depuis 175 ans. Après le 400e anniversaire exproprié de 2008 (monsieur Dubuc s’en souvient-il?), c’est le 24 juin nationalisé.

Le dessous du panier

Commenter l’actualité en dilettante est essoufflant. Les coupures de presse s’empilent dans la boite marquée « entrée » et ne voient pas l’heure de passer dans l’autre. Certaines questions soulèvent vite la polémique : à quoi bon ajouter une note sur un modeste blogue? D’autres tombent dans le vide, comment dire, impunément. Elles « mériteraient » pourtant leurs cinq lignes de gloire. Alors, à défaut d’une plus longue analyse, avant de passer au « classeur rond »…
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Peu de journaux ont évoqué la crise qui secoue le Parlement britannique. Il est question des parlementaires qui ont, écrit Le Devoir, « consommé jusqu’à plus soif les possibilités que leur offre, et non leur permet, le mécanisme inhérent au remboursement des dépenses ». Ce n’est pas ici que ça arriverait : la Loi d’accès [sic] à l’information et la Cour suprême ont mis un couvercle étanche sur ces « matières ».
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Interdire le voile dans les institutions relevant de l’État serait, aux yeux de la ministre responsable de la Condition féminine, faire montre d’intolérance. « On ne peut pas forcer une personne à faire quelque chose qu’elle ne veut pas faire », a-t-elle confié à la Presse canadienne. Les cadres de son ministère doivent espérer qu’elle a été mal citée.
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L’exposition Bodies, qui présente des corps ou de parties de corps humains, viendrait à Québec. Les médias salivent. Dans Le Devoir des méchants Montréalais « qui-sont-évidemment-jaloux-de-Québec », Christian Rioux rappelle que les expositions de ce genre ont suscité la polémique en Europe au point où les musées publics français ont refusé d’en présenter. Un tribunal parisien en a interdit une pour « manque de décence ». En Allemagne, le porte-parole du parti de la chancelière Merkel a déclaré que c’était « le summum du mauvais goût ». L’écrivaine féministe Germaine Greer estime qu’elle n’a pas plus de raison d’aller voir une exposition de cadavres que de pratiquer le cannibalisme. Même Fort Lauderdale a refusé de présenter une exposition de cadavres humains dans un endroit public. Ils ne semblent pas avoir peur de perdre des touristes en Floride.
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Michael Ignatieff a publié Terre de nos aïeux, quatre générations à la recherche du Canada. Il avait précédemment écrit sur son côté russe; c’est au tour de la branche maternelle, les Grant.
Je n’ai lu que la première phrase : « Aimer un pays est un acte d’imagination ». On lui en souhaite (de l’imagination). S’il n’a pas encore trouvé le Canada après quatre générations….
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Ma lointaine parente et concitoyenne auteure-compositeur-interprète Monique Miville-Deschênes a lancé son premier roman, Chavire. Je ne suis pas assez versé en critique littéraire (et on m’accuserait de chauvinisme de toute manière) pour commenter mais on peut lire les très bons commentaires publiés dans Le Soleil (Voisard) et La Presse (Martel, dont la mère est de Saint-Jean-Port-Joli, pour tout avouer). Curieuse coïncidence dans les deux journaux de Gesca : les critiques auraient souhaité que l’auteure évite les commentaires nationalistes. C’était peut-être nécessaire pour aider les lecteurs qui manqueraient d’imagination.
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L’élection partielle n’est pas encore annoncée dans Rivière-du-Loup qu’un lecteur du Bas-Saint-Laurent dénonce l’éventuel cumul de revenus (indemnité et retraite) dont bénéficierait un certain candidat s’il était éventuellement élu. Ce lecteur a probablement lu une chronique du Soleil sur ce sujet mais ignoré les bémols discrets apportés quelques jours plus tard dans les mêmes colonnes: le cumul appréhendé ne serait pas exceptionnel, ni scandaleux, manifestement, car au moins deux députés ministériels touchent une retraite du secteur public et leur indemnité de député.
En cherchant un peu, on en trouverait d’autres et il faudra s’y habituer avec la croissance du nombre des « retraités actifs ».
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Dans le Journal de Québec, Jean-Jacques Samson s’en est bien tiré avec sa chronique où il évoque la discrimination positive pratiquée par le premier ministre qui pourrait « être forcé de faire monter une députée de moindre calibre alors que des collègues masculins de premier niveau continueront de sécher ». Aucune réaction significative à ce propos ni d’ailleurs au fait qu’on se trouve depuis un bon moment en situation de « non-parité » au Conseil exécutif. En réalité, on est « moins 2 » (14 hommes, incluant le premier ministre, et 12 femmes) et bien loin de l’égalité qui n’est encore qu’un stunt publicitaire.

Roméo et Juliette

L’idylle parlementaire qui a fait les manchettes récemment n’est pas une grande affaire d’État, mais que la presse n’ait pas trouvé de précédents dans les parlements canadiens, voire occidentaux, est significatif. Pour le moment, les observateurs ont classé l’affaire « privée » : l’État n’a pas sa place dans les chambres à coucher, on ne peut pas empêcher un cœur d’aimer, et un homme « normal » regarde les belles femmes, comme l’a dit un député (sans préciser ce qui arrive des « anormaux »…), etc.
Dans notre parlement, même si les camaraderies transcendent souvent le partis, ces derniers se comportent comme des armées. On n’a qu’à regarder les mosaïques, qui ont bien changé depuis que cette coutume existe : elles ne représentent plus un groupe de collègues mais des structures pyramidales (avec chefs, sous-chefs et fantassins) dont le Parlement est le théâtre d’opérations et, comme à la guerre, il n’est pas régulier de fraterniser, encore moins de coucher, avec l’ennemi.
Ce n’est pas sans raison si madame la ministre a informé rapidement son chef de sa nouvelle situation tandis que monsieur l’oppositionniste s’en serait abstenu. Les deux parties ne sont pas du tout dans la même « position » et ce n’est pas exactement une reprise des conflits de clans de Roméo et Juliette ou des histoires de gangs de West Side Story. Le travail de la ministre n’est pas entravé par sa liaison: au pire, elle devra faire attention de ne pas trop choyer le comté de monsieur, surtout pas au détriment de ses collègues libéraux. Par contre, monsieur se retrouve avec un fil à la patte: son travail exige qu’il exerce la surveillance constante des activités gouvernementales et il vient de se clouer sur le banc pour certains débats à venir. Madame l’a neutralisé et on comprend que son chef du gouvernement se dise à l’aise avec ça. Heureusement, monsieur est le seul de son parti dans cette situation, mais, justement, il sera de plus en plus seul, surtout s’il devient indépendant, comme l’a suggéré un chroniqueur. Aussi bien lui faire porter le bonn…et d’âne!
Mais, on n’en est pas là. Pour le moment, le monde trouve ça « ben cute », du moins officiellement, mais ça peut difficilement durer. Un patron pourrait-il avoir une blonde permanente dans l’exécutif syndical de son entreprise? C’est personnel? Sûrement, mais pourquoi en a-t-on fait une affaire publique? Anodin et sans conséquence? Sûrement aussi, surtout si on considère les débats parlementaires comme du théâtre.

L’émeute du 25 avril 1849 et The Gazette

L’incendie de l’édifice du Parlement, le 25 avril 1849, n’est pas un simple fait divers. Il figure en tête d’une liste d’événements survenus à Montréal en 1849, «l’année de la terreur», selon le mot d’Édouard-Zotique Massicotte, «terreur jaune», précisait Joseph Royal, en référence aux Orangistes: le 25 avril, assaut contre le cortège du gouverneur par des extrémistes anglo-montréalais, saccage de l’Hôtel du Parlement, agressions contre les élus, incendie de l’édifice du Parlement et de sa bibliothèque, sabotage du matériel du service des incendies; dans les jours suivants, saccage de plusieurs résidences dont celle du premier ministre La Fontaine; le 30 avril, nouvelles agressions contre le cortège du gouverneur; le 10 mai, agression contre les convives de l’hôtel Cyrus; le 15 août, nouvelle attaque armée contre la résidence du premier ministre; le 20 août, incendie de l’hôtel Cyrus (où se déroulait l’enquête du coroner en présence du premier ministre), sans compter plusieurs autres incendies criminels, des agressions et combien d’autres méfaits tout au long de l’année.
Que s’est-il passé pour qu’un segment important de la communauté anglo-montréalaise s’attaque subitement aux institutions les plus fondamentales du pays, le gouverneur, le premier ministre, le Parlement et sa bibliothèque?
La nouvelle politique coloniale de la Grande-Bretagne constitue l’arrière-plan. Porté au pouvoir en 1846, le gouvernement whig prône le libre-échange, une décision qui bouleverse l’économie canadienne. Les vraies causes de cette violence sont cependant politiques et ethniques. Dans les 20 mois qui ont précédé l’émeute d’avril 1849, une série d’événements provoque une irritation croissante chez les tories qui croyaient bien l’avenir réglé par l’Acte d’Union:
· – le 10 août 1847, la reine sanctionne une loi qui établit une liste civile permanente et marque la fin de la «querelle des subsides» qui avait opposé le gouverneur à la majorité parlementaire du Bas-Canada pendant des décennies;
· – le 3 mars 1848, l’Assemblée retire sa confiance aux ministres nommés par le gouverneur et le gouverneur Elgin invite les chefs de la majorité réformiste, La Fontaine et Baldwin, à former un gouvernement, ce qu’ils font le 11. Un francophone, La Fontaine, devient premier ministre et Baldwin lui-même le reconnaît comme son chef;
· – le 14 août 1848, une loi du Parlement britannique révoque la clause de l’Acte d’Union qui proscrivait l’usage de la langue française dans les documents du Parlement;
· – le 18 janvier 1849, dans un discours du trône prononcé en partie en français, le gouverneur Elgin annonce l’amnistie générale des insurgés de 1837-1838 et une loi en ce sens est sanctionnée le 1er février 1849;
· – et, goutte d’eau ultime, le 13 février 1849, l’Assemblée législative entreprend l’étude d’une proposition de La Fontaine qui vise à indemniser les personnes dont les biens ont été endommagés ou détruits durant les répressions de 1837 et 1838 au Bas-Canada. Une mesure semblable avait été précédemment adoptée pour le Haut-Canada, à l’initiative d’Allan MacNab qui sera néanmoins le leader des opposants au bill de 1849! «L’Union, disait-il, d’après un reportage du Journal de Québec (8 février 1849), a complètement manqué son but. Elle fut créée pour l’unique motif d’assujettir les Canadiens français à la domination anglaise. Le contraire en est résulté».
En somme, en quelques mois, dans un esprit de démocratie, de justice et d’équité, le gouvernement britannique avait satisfait certaines revendications des Patriotes, reconnu leur langue, amnistié leurs chefs: fallait-il en plus, disaient les tories, dans une interprétation très particulière de la loi, «récompenser les rebelles»? Le 25 avril, quand le gouverneur Elgin sanctionne le bill des indemnités, on voit sauter la marmite que les médias anglophones de Montréal (The Gazette en tête) chauffaient depuis quelques mois.
Il y a dix ans, le 150e anniversaire de ces événements a failli passer inaperçu. Seul Le Devoir y a consacré un article substantiel le mercredi 21 avril. La Presse, qui avait régulièrement des articles de fond sur des sujets historiques, a choisi le 25 avril pour publier un texte sur les cinquante ans de l’Institut de réhabilitation de Montréal (ironie?), dont les lettres patentes datent de novembre 1949. Quant aux éditeurs de la Gazette, ils se sont probablement bien amusés en décidant de publier, dans leur édition du 25 avril 1999, un long texte sur une émeute survenue… le 10 mai 1849… à New York!
C’est pour réagir à cette amnésie, quelques mois plus tard, que Septentrion a édité Une capitale éphémère, une compilation d’études et de témoignages sur ces événements dramatiques qui attendent quand même toujours leur historien.