Peut-on être député à temps partiel?

(Commentaire sur la chronique de Gilbert Lavoie, « La triple assiettée d’Arthur », Le Soleil, 30 août)
En cumulant ses fonctions de député et celles de journaliste, de conducteur d’autobus et d’annonceur, le député indépendant de Portneuf-Jacques-Cartier à la Chambre des communes n’est évidemment pas dans l’illégalité, juste en rupture d’éthique.
Pendant 30 ans, au Parlement, j’ai entendu les députés justifier les hausses de traitement en invoquant une surcharge de travail: un tue-monde, une machine à divorces, l’éducation des enfants au téléphone, deux ou trois douzaines de municipalités à materner, autant de clubs de l’âge d’or à visiter et quoi encore! Que certains d’entre eux aient de la disponibilité pour continuer l’exercice d’une profession en parallèle m’a toujours étonné : que dire lorsqu’il y en a trois!
Bien sûr, la charge de travail est inégale. D’après ce que j’en ai retenu, les boîtes à lettres ne débordaient pas dans certaines circonscriptions montréalaises et le tapis ne devait pas user vite dans le « bureau de comté » de Jean-Talon. Si on examinait attentivement les exemples de cumul que monsieur Lavoie cite, on verrait probablement qu’il s’agit de « petites » circonscriptions pas très exigeantes pour leur représentant. Les députés-médecins qu’il mentionne n’avaient peut-être pas beaucoup de patients.
Comment le député indépendant de Portneuf-Jacques-Cartier peut-il desservir adéquatement les 70000 électeurs d’une grande circonscription rurale qui comprend une trentaine de municipalités en travaillant à temps partiel? La charge est moins exigeante pour les députés fédéraux? Pourquoi alors sont-ils mieux payés qu’à Québec?
Le député peut faire ce qu’il veut de ses loisirs mais, s’il a autant du temps libre, n’est-ce pas parce qu’il se désintéresse de son rôle de surveillant de l’administration publique, lui qui était pourtant si critique au sujet de la bureaucratie autrefois? La tâche du député-contrôleur est infinie. C’est un peu comme celle d’un journaliste qui se consacre vraiment à sa profession, le genre Vastel, par exemple, qui n’aurait pas pu faire du taxi les fins de semaines. Le député de Portneuf dispose de ressources (budget de recherche, services professionnels de la bibliothèque du Parlement, etc.) pour fouiller n’importe quel recoin de l’administration publique et, en tant que député indépendant (ce qu’il est théoriquement), il a beaucoup plus de latitude que les autres, surtout les ministériels, pour « brasser la cage », comme il l’avait d’ailleurs promis.
S’il n’aime pas la période des questions, rien ne l’empêche de prendre les bouchées doubles en commission. Pourquoi préfère-t-il consacrer ses énergies ailleurs, sinon pour l’appât du gain ou en signe de désintérêt pour le mandat qui lui a été confié?

2 réflexions au sujet de « Peut-on être député à temps partiel? »

  1. Bonjour, Gaston, merci pour tes chroniques. Ton sens critique est encore aigu et idoïne. Pour en revenir à ton article, bien que pertinent, il néglige le crédit de ce futur indépendant, qui a au moins le mérite de prétendre ne représenter que ses commettants. Tu as sans doute remarqué que bien des députés se disant futurs représentants en campagne électorale, une fois élus, surtout après l’obtention d’un poste quelconque, se prétendent tout-à-coup de  »BONS GESTIONNAIRES ». En quoi une élection améliore-t-elle les qualités de gestion d’un(e)individu et, s’il connait bien son rôle, change-t-il sa raison d’avoir été élu, i.e. REPRÉSENTER ? Les sondages et les médias ayant tendance à nous faire basculer de la démocratie à l’ochlocratie, cela ne justifie en rien le devoir de représentation. Meilleures salutations.

  2. Votre billet jette un éclairage fort pertinent sur un fait d’actualité, ce qui est une des forces des meilleurs blogues. Merci de vous être inscrit à l’initiative qui va permettre à des blogueurs de Québec de dire à leur façon ce qu’a été l’année exceptionnelle que Québec connait. J’oserais pasticher Gilles Vignault et souhaiter que le 31 décembre prochain on puisse chanter «Je vous entends bloguer». Qui sait si on ne publiera pas, du moins dans un format électronique, un certain nombre des textes qui seront alors semés sur le Web.

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