Le presbytère de Saint-Michel, témoin de l’histoire

Le presbytère de Saint-Michel est le plus ancien de la Côte-du-Sud, mais il a été passablement modifié depuis sa construction en 1739. C’est un bâtiment d’un étage et demi dont les murs de pierre sont recouverts en bois. Sa toiture aux larmiers retroussés et ses dix lucarnes datent probablement du XIXe siècle. Comme c’était l’usage autrefois, le presbytère comprenait une « salle d’habitants ». Signe particulier : des volets « biculturels » portent la feuille d’érable et la fleur de lis.

Presbytère Saint-Michel GD
Le presbytère de Saint-Michel a été témoin d’événements dramatiques, parfois authentiques, parfois teintés de légendes.
Pendant le siège de Québec, en 1759, les soldats britanniques qui campent à Pointe-Lévy font des incursions du côté de Bellechasse. Dans la nuit du 25 au 26 juillet, près de Beaumont, un détachement vient aux prises avec des Canadiens : selon Knox, neuf d’entre eux auraient été tués et plusieurs autres blessés. Joseph Fortier, de Saint-Michel, est parmi les victimes. Le 26, le détachement loge à l’église de Saint-Michel où les soldats causent des dommages, mais on ne sait pas si le presbytère a aussi été touché. Le lendemain, le détachement repart avec quelques prisonniers (trois femmes et un homme, selon Malcom Fraser) et plus de deux cents têtes de bétail.
On a écrit qu’un autre détachement serait venu, en février 1760, sur les glaces, pour bombarder l’église de Saint-Michel et brûler les habitations, mais il s’agit d’une méprise : c’est le « village Saint-Michel », comme on désignait alors la partie de la seigneurie de Lauzon située entre les rivières Etchemin et Chaudière, qui est concerné, et non Saint-Michel-de-Bellechasse. Murray avait ordonné des représailles contre les Canadiens qui avaient abrité les hommes de Saint-Martin, lors d’une opération pour débusquer les Anglais retranchés dans l’église de Pointe-Lévy : le 26 février au matin, un détachement de 300 hommes traverse le fleuve et détruit toutes les maisons du village Saint-Michel.

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Le presbytère de Saint-Michel a été plus concrètement touché en 1775, quand les « Bostonnais » en révolte contre l’Angleterre ont essayé de chasser les Britanniques de Québec.
Au début de septembre 1775, le fermier du seigneur de Lauzon et le seigneur de Sainte-Marie-de-la-Nouvelle-Beauce essaient de recruter des hommes pour aller à Sartigan (auj. Saint-Georges-de-Beauce) et bloquer la route aux insurgés « américains ». L’assemblée du 11 septembre réunit environ 1500 habitants venus d’aussi loin que Berthier, mais tourne à la sédition. Caldwell et Taschereau sont reconduits chez eux : non seulement les participants ne veulent pas s’engager, mais ils conviennent de monter la garde pour empêcher les autorités britanniques d’intervenir sur la rive sud et surveiller l’approche de renforts britanniques.
De nombreux habitants de la Côte-du-Sud assistent à cette assemblée que le journal de Baby a qualifiée de « séditieuse ». De Saint-Michel, on dit « le plus grand nombre », ce qui signifie probablement la majorité des hommes en état de porter les armes.
À la suite de « l’assemblée séditieuse », on monte la garde, souvent en armes, dans toutes les paroisses de la Côte-du-Sud et un système de feux est mis en place pour signaler l’arrivée éventuelle de forces royalistes sur le fleuve.
À Saint-Michel, les habitants s’emparent du presbytère pour en faire un poste de surveillance. Le capitaine de milice Baptiste Roy et les sergents coordonnent l’opération. Le curé, comme la plupart ses collègues de la région, devra ronger son frein.