Tous les articles par Gaston Deschênes

« …Long live our noble Queen… » (air connu)

Avant de pouvoir prendre siège à l’Assemblée nationale, l’automne dernier, les parlementaires se sont soumis de plus ou moins bonne grâce au rituel qui consiste à prêter serment à la souveraine. Certains l’ont fait en bougonnant, d’autres, « bravement », à huis clos. Dura lex sed lex, aurait dit monsieur Landry.

S’il faut les consoler en se disant que c’était pire autrefois, qu’on songe aussi à ce que l’avenir pourrait leur réserver.

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Jusqu’au début du XIXe siècle, la mort du souverain amène automatiquement la dissolution du parlement et de nouvelles élections.

Le premier cas se pose ici au décès de George III le 29 janvier 1820. La nouvelle arrive le 24 avril et l’administrateur Maitland (qui remplaçait de gouverneur Richmond décédé à l’automne) se rend au Conseil législatif pour en informer officiellement  les parlementaires. L’orateur du Conseil déclare alors que, le roi étant décédé,  « ce parlement provincial est, par son décès et par l’avis public et proclamation  qu’en donne ici Son Excellence, dissout».

En mars 1829, le Parlement du Bas-Canada adopte un projet de loi « pour continuer l’existence du Parlement provincial dans le cas du décès ou de la démission de Sa Majesté, de ses héritiers et successeurs », mais le bill est « réservé » par le gouverneur en attendant « la signification du plaisir de Sa Majesté ».

Quand George IV meurt le 26 juin 1830 (sans avoir manifesté son « plaisir »), le 13e Parlement vient de terminer sa troisième session.  Le 2 septembre, l’administrateur James Kempt émet une proclamation décrétant de nouvelles élections, « attendu que, par le décès de feu Notre Royal Frère de glorieuse mémoire, le Parlement Provincial du Bas-Canada a été et est dissous » .

Le 1er novembre suivant, Guillaume IV accorde finalement la sanction au projet de loi qui met fin à cette pratique d’une autre époque.

Si le Parlement n’est plus dissous à la mort du souverain, il faut quand même toujours prêter serment au nouveau monarque.

La situation se présente quand Victoria monte sur le trône le 22 juin 1837. Le Bas-Canada est alors en ébullition. Le 18 août, à l’ouverture de la 4e session du 15e Parlement, plusieurs députés patriotes arrivent à Québec habillés à la canadienne pour exprimer leur volonté de boycotter des produits anglaise. D’après le Canadien du 18 août 1837, plusieurs députés « doutaient qu’ils dussent prêter le serment d’allégeance » à la nouvelle souveraine, « mais cette prétention a été abandonnée, et tous ont rempli cette formalité d’usage ».

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Suivront 64 ans de règne victorien…

Quand Victoria décède le 22 janvier 1901, les députés élus le 7 décembre précédent n’ont pas encore siégé et ils prêtent serment à son fils Édouard VII, selon la procédure régulière, avant de prendre leur siège à la session qui s’ouvre le 14 février. Leurs signatures apparaissent au registre des serments entre le 12 février et (pour un retardataire) le 23 mars.

Édouard VII meurt 6 mai 1910, pendant la 2e session de la 12e législature, et les parlementaires (dûment assermentés deux ans plus tôt) prêtent un autre serment à George V (10 et 12 mai).

Celui-ci meurt le 20 janvier 1936. Comme en 1901, les députés élus le 25 novembre 1935 ne se sont pas encore réunis et ils expriment leur loyauté à Édouard VIII avant la session du 24 mars (signatures le 3 mars et les jours suivants).

Cette fois, ce n’est pas la loyauté des sujets qui est remise en question mais celle du souverain. Le 10 décembre 1936, Édouard VIII fait un choix entre le trône et sa chère Wallis : il abdique en faveur de son frère qui devient George VI. À Québec, la législature vient d’être prorogée au 24 février 1937. Les parlementaires prêtent serment au nouveau souverain (comme en 1910), avant le début de la deuxième session, entre le 23 et le 26 février 1937.

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Enfin, quand Elizabeth II accède au trône le 6 février 1952, la 23e législature vient d’être prorogée et des élections s’annoncent. Elles ont lieu 16 juillet 1952 et les nouveaux élus lui prêtent serment, entre le 15 octobre et le début de la session le 12 novembre. Exception : le député Lionel Ross s’était présenté au bureau du secrétaire général pour inscrire son serment au registre dès le 19 février 1952.

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Le serment de loyauté que prêtent les parlementaires est un serment personnel à un souverain mortel, et non au gouvernement, à l’État ou au peuple, qui sont pérennes. C’est le même serment  que prêtaient les vassaux à leurs suzerains au Moyen-âge. Pour les Québécois, cette relique d’ancien régime se double d’un rappel humiliant de la conquête de leur pays par la nation dont la reine est la souveraine.

Même si on ne veut pas lui souhaiter de malheur, il demeure qu’après 67 ans sur le trône l’heure de la fin du règne approche. Partira-t-elle comme Victoria, George V et George VI, dans des circonstances qui n’obligeront pas les parlementaires à un nouveau serment? Où comme Guillaume IV, Édouard VII et Édouard VIII, avec les conséquences qu’on peut imaginer? « Vous ne saurez ni le jour ni l’heure », disait un évangéliste. Les paris sont ouverts. D’après les statistiques, depuis Victoria, c’est 50/50.

Mais il y a « pire ». Jusqu’en 1982,  l’article 3 de la Loi de la Législature prévoyait ceci: « Aucune législature de la province n’est dissoute par le décès du souverain; mais elle continue, et peut se réunir, s’assembler et siéger, procéder et agir de la même manière que si ce décès n’avait pas eu lieu ». Or,  quand cette loi a été remplacée par  la Loi de l’Assemblée nationale en 1982, cette disposition n’a pas été conservée. Le Parlement serait donc dissous  si la reine meurt pendant la législature actuelle (ou la suivante), comme c’était le cas avant 1830?

« God save the Queen »!

«Sol canadien»: hymne national en deux versions

Le 1er janvier 1829, la Gazette de Québec publie une chanson écrite par Isidore Bédard et présentée comme « hymne national ». Il s’agit en fait de la version améliorée d’un premier jet (publié le 6 août 1827) qui ne comptait que deux strophes:

SOL CANADIEN

Sol canadien, terre chérie !
Par des braves tu fus peuplé ;
Ils cherchaient loin de leur patrie,
Une terre de liberté.
Nos pères sortis de la France
Étaient l’élite des guerriers,
Et leurs enfants, de leur vaillance,
Ne flétriront pas les lauriers.

Qu’elles sont belles nos campagnes l
En Canada qu’on vit content !
Salut, ô ! sublimes montagnes,
Bords du superbe St. Laurent.
Habitant de cette contrée,
Que nature sait embellir,
Tu peux marcher tête levée,
Ton pays doit t’enorgueillir.

Respecte la main protectrice
D’Albion, ton digne soutien ;
Mais fais échouer la malice
D’ennemis nourris dans ton sein.
Ne fléchis jamais dans l’orage,
Tu n’as pour maître que tes lois.
Tu n’es pas fait pour l’esclavage,
Albion veille sur tes droits.

Si d’Albion la main chérie
Cesse un jour de te protéger,
Soutiens-toi seule, ô ma patrie !
Méprise un secours étranger.
Nos pères sortis de la France
Étaient l’élite des guerriers,
Et leurs enfants de leur vaillance
Ne flétriront pas les lauriers.

Né à Québec le 9 janvier 1806, l’auteur est troisième fils de Pierre-Stanislas Bédard, autrefois chef du Parti canadien au Parlement du Bas-Canada, et de Luce Lajus. Il est étudiant en droit chez Georges-Barthélemi Faribault et sera admis au Barreau à la fin de 1829.

« La poésie de Bédard, écrit Jeanne d’Arc Lortie, atteste l’influence de la pensée politique de son père et, selon son auteur, elle résume bien les sentiments des Canadiens de l’époque qui, soupçonnés de manquer de loyauté, respectent le régime britannique et abhorrent l’idée de l’annexion aux États-Unis ». Par ailleurs, « cette protestation de fidélité à l’Angleterre va de pair avec une menace énergique à l’adresse de concitoyens ennemis des libertés ».

« L’hymne national » Sol canadien figurera dans de nombreux recueils de chansons et dans divers périodiques jusqu’au début du XXe siècle. On l’a chanté sur l’air de « Ah! quel tourment, quelle inquiétude » jusqu’à sa mise en musique par Théodore F. Molt qui l’a édité à deux reprises, notamment dans un encart distribué avec l’édition de décembre 1859 du Journal de l’Instruction publique, avec la mention « chant national ».

Sol canadien-Quebecensia

Quant à Bédard, il est élu député en 1830. En 1831, il accompagne Denis-Benjamin Viger, tout juste nommé agent de la Chambre à Londres. Le jeune député de Saguenay cohabite avec François-Xavier Garneau. À la fin de 1832, il est victime d’une hémorragie pulmonaire et il meurt à Paris le 14 avril 1833. Son corps repose au cimetière de Montmartre.

Le 1er janvier 1840, onze ans après la première publication et sept ans après la mort de son auteur, une nouvelle version de Sol Canadien parait dans Le Patriote canadien, un journal lancé au Vermont en 1839. Cette version est chantée sur un air différent, soit « Je vais boire l’onde glacée ». Les deux premières strophes sont maintenues, mais les deux dernières sont très différentes :

Renverse le pouvoir perfide
Qui ne cherche qu’à t’écraser.
La LIBERTÉ est ton égide,
Sous elle tu peux triompher.
Ne fléchis jamais dans l’orage,
Tu n’as pour maître que tes lois.
Tu n’es point fait pour l’esclavage,
Le destin veille sur tes droits.

Le sang de tes fils fume encore,
Ne sauras-tu pas le venger ?
LIBERTÉ, fais naître l’aurore
Du jour qui te verra régner !
Nos pères sortis de la France,
Étaient l’élite des guerriers,
Et leurs enfants de leur vaillance
Ne flétriront pas les lauriers.

La « main protectrice d’Albion » s’est changée en « pouvoir perfide » qui ne cherche qu’à écraser. La dernière strophe évoque la répression des rébellions.

Cette version témoigne de rapports difficiles avec l’Angleterre; il n’est plus question de fidélité et de loyauté. Le commentaire de Madame Lortie, qui ne semble pas avoir vu cette deuxième mouture, ne serait plus pertinent. Maurice Carrier et Monique Vachon, par contre, ne semblent avoir vu que la seconde version car la première ne figure pas dans le tome de Chansons politiques du Québec qui couvre les années 1765-1833. Ils ont pris la version de 1840 dans L’écrin lyrique, édité en 1901, et l’attribuent à Bédard sans préciser que quelqu’un l’a retouché après sa mort. Qui? Peut-être justement l’éditeur du Patriote canadien, Ludger Duvernay, alors réfugié à Burlington.

L’écrin lyrique où Carrier et Vachon auraient puisé la version de 1840 de Sol canadien serait l’un des rares ouvrages à l’avoir reproduite; le même éditeur, J.-G. Yon, marchand de musique, a aussi édité en 1903 le recueil Chants des Patriotes qui, lui, maintient la version originale.

Musique du québec

On ne trouve pas d’enregistrement de Sol canadien, mis à part celui qui se trouve sur le disque « Musiques du Québec, l’époque de Julie Papineau », produit par l’Ensemble Nouvelle-France sous la direction de madame Louise Courville. Robert Huard chante les trois premières strophes de la version de 1840.

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Sources :

Jeanne d’Arc Lortie, « Bédard, Joseph-Isidore », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, consulté le 30 déc. 2018,  http://www.biographi.ca/fr/bio/bedard_joseph_isidore_6F.html.

Maurice Carrier et Monique Vachon, Chansons politiques du Québec, t. 2, 1834-1858, Montréal, Leméac, 1979, p. 235-236.

Sur Le patriote canadien, voir https://chroniclingamerica.loc.gov/lccn/sn90000507/1840-01-01/ed-1/seq-1/

Merci à Gilles Gallichan pour ses conseils.

L’Université de Bras-d’Apic

(extrait de Curiosités de la Côte-du-Sud, Québec, GID, 2018)

Un dimanche de 1973, lors d’une messe à l’école-chapelle de Bras-Apic, le caricaturiste Raoul Hunter se présente pour lire l’épître avec un « T-shirt » portant l’inscription « Université de Bras-d’Apic ».

Bras d'Apic-enseigne université-coupée

L’expression n’est pas nouvelle dans la région. On dit avoir « étudié à l’Université de Bras-d’Apic » lorsqu’on n’a justement pas étudié. « Sur la Côte-du-Sud, écrivait Jean-Claude Rivard, l’Université de Bras-d’Apic, c’est l’Alma Mater des gens mal pris, de ceux qui n’ont jamais eu de chance dans la vie, des assistés sociaux et des chômeurs… C’est l’université de la vie, l’université de l’humour ».

Natif du coin et artiste bien connu, Hunter donne de la visibilité au canular. Il se désigne « vice-recteur » sur sa carte d’affaires et nomme recteur son cousin Marcel Pelletier qui pourrait avoir inventé l’expression dans les années 1960.

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L’ancienne école du rang est élevée au titre de « chapelle universitaire », un rocher porte l’inscription « campus des Heureux » et le « recteur magnifique », muni des pouvoirs qu’il s’est conférés en vertu de « la bulle In vino veritas », décerne des doctorats ès Bonne humeur en privilégiant les « floppeux », les marchands d’illusions et les concitoyens qui ont « beaucoup de voiles mais peu de gouvernail »…

Le seul magasin qui reste à Bras-d’Apic devient le « dépanneur de l’Université » et met en marché des produits dérivés fort recherchés (chandails, casquettes, coussins, fanions, drapeaux, etc.) qui propagent le nom de l’université de Bras d’Apic et ne manquent pas de susciter des interrogations, voire de provoquer des quiproquos. Faut-il prendre au second degré la mention de l’université imaginaire aux côtés de l’université du Québec à Chicoutimi dans une étude sur la Désintégration des régions publiée sur le site des « classiques de sciences sociales »… ?

Bras d'Apic-rue université Bras d'Apic-université de Bras d'Apic

L’Université de Bras d’Apic » a encore son nom sur une maisonnette à l’intersection de la route 285 et de la « rue Université ». Elle a aussi sa page Facebook.

 Sources :

Hunter, Denis, Le trait dans tous ses états. Sculptures et caricatures de Raoul Hunter, Boucherville, Presses de Bras-d’Apic, 2010, p. 19-20.

Rivard, Jean-Claude, « L’université de la vie et de l’humour », Le Soleil, 16 août 1986, p. E-8.

Le jour où Raoul Hunter m’a « caricaturé »

Le grand caricaturiste Raoul Hunter est mort. Né à Saint-Cyrille de Lessard, il faisait partie de nos gloires régionales, même si, dans ma famille, abonnée religieusement à L’Action catholique, nous n’avions pas accès à ses caricatures du Soleil dans les années 1950 et 1960.

Quand je suis né, il entamait sa deuxième philosophie ─ la dernière année du cours classique ─ au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière et comptait un de mes oncles parmi ses confrères.

Luc est aujourd’hui nonagénaire, et plutôt en forme pour cet âge, mais il avait alors une santé fragile. À l’automne 1948, il avait dû retourner dans sa famille, à Saint-Jean-Port-Joli, pour soigner je-ne-sais-plus quelle maladie; chose certaine, on faisait preuve de prudence à cette époque où sévissait la tuberculose.

Hunter-caricature2

Hunter se faisait alors la main dans le journal des étudiants du collège. Il en profita pour se moquer du convalescent. Une caricature publiée dans L’Union amicale montre son confrère Luc plongé dans un livre de philosophie, vêtu du « suisse » et agitant de son pied le ber où repose un neveu né le 23 octobre 1948.

Le combat pour le français en Ontario

ll y a un siècle, en Ontario, c’était la même chanson, sur un air un peu différent car le Règlement 17 visait les écoles des francophones de l’Ontario et non l’université. Adopté en 1912 par le gouvernement conservateur, le règlement interdisait l’usage du français comme langue d’enseignement  dans les écoles.

Les Québécois appuyaient fermement les Franco-ontariens; c’est dans ce contexte qu’est créée, à Montréal, la Ligue des droits du français qui deviendra la Ligue d’action nationale. Témoin de cette mobilisation, une chanson lancée en 1918.

L’Âme française

1.
Il est chez nous une province,
En amont du beau Saint-Laurent,
D’où sans scrupule l’on évince,
Des possesseurs de trois cents ans !
À l’enfant pur et sans reproche,
On s’adresse brutalement :
« Deviens Anglais ! vilain mioche,
Il le faut, c’est le Règlement ! »
Mais sur un ton de « Marseillaise »,
Fièrement clament nos p’tits gâs :
« Non ! non ! nous ne laisserons pas
Bâillonner l’âme française ! »

2.
Pour vaincre cette résistance,
On voulut enlever d’assaut
L’école, où le parler de France
Murmure, doux, comme un ruisseau !
Halte-là ! D’héroïques mères,
Se soulèvent de toutes parts.
Ces Madeleine de Verchères,
De leur corps, forment un rempart :
Et sur un ton de « Marseillaise » :
« Halte-là ! Vous ne pass’rez pas !
« Non ! non ! Malgré vous nos p’tits gâs
« Garderont l’âme française ! »

3.
Avec les fils de telles mères,
Courageux et fiers lurons,
Anglais, vos projets sont chimères;
Sans coup férir, ils vous auront!
Admirant leurs beaux sacrifices,
Reconnaissant enfin leur droit,
Vous leur rendrez bientôt justice
En abrogeant l’inique loi.
Et sur un ton de Marseillaise,
Vous crierez avec nos petit gâs :
« Oui! Oui! partout au Canada,
« Vive donc l’âme française! »

(http://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/1968957?docsearchtext=L%27%C3%82me%20fran%C3%A7aise)

Auteur et compositeur

Larrieu

Cette chanson a été écrite par Jean Beauchemin, un pseudonyme sous lequel « se cache l’un de nos meilleurs poètes », selon la présentation faite, en octobre 1918, par Le Passe-Temps. Le compositeur de la musique était pour sa part bien connu puis qu’il s’agissait d’Albert Larrieu, un Breton qui a séjourné au Québec pendant quelques années et nous a laissé plusieurs autres chansons « québécoises » dont La cabane à sucre, Les crêpes, La tire, La soupe aux pois, En traîneau, L’épluchette, La bénédiction (du jour de l’an), Le maringouin et, surtout, l’hymne de la Ligue d’impro,  La feuille d’érable.Larrieu-Feuille d'érable

Né à Perpignan en 1872, Larrieu serait devenu médecin, s’il avait suivi la volonté de son père, mais il a préféré monter à Paris pour faire carrière dans la chanson. Il y rencontre Jean Richepin et surtout le fameux Théodore Botrel qui lui fait connaître « sa Bretagne ».  À Concarneau, Larrieu forme le Trio Montmartrois, rebaptisé ensuite Trio Concarnois, et chante « la France des provinces et la vie des petites gens ».

Mobilisé en 1914, il est vite réformé pour raison de santé et, en 1916, il passe aux États-Unis. De là, il parvient au Québec, en mai 1917, où il découvre « un peuple vivant de nos traditions, parlant notre langue, ayant gardé nos habitudes, nos usages, notre manière de penser, nos vieux proverbes, nos jolies légendes, nos vieilles chansons ».  Jusqu’en 1922, Larrieu parcourt le Québec, le Canada et les États-Unis avec deux Françaises, France Ariel et Geneviève Lecomte, cette dernière étant remplacée par Armand Duprat après 1919.

En 1920, pour corriger l’ignorance de ses compatriotes à l’égard du Canada, Larrieu publie À propos du Canada Français : une poignée de vérité  (http://www.da-go.com/musique/larrieu-a/).

***

« Nous sommes certains que les belles strophes si vibrantes de L’Âme française deviendront bientôt la Marseillaise des Canadiens français du Québec et de l’Ontario », écrivait l’éditeur du Passe-Temps en octobre 1918.

Un siècle plus tard, au moment où la lutte recommence en Ontario, l’auteur de L’Âme française est toujours inconnu, son compositeur est mort à Paris en 1925, pratiquement oublié, même s’il avait été parmi les meilleurs chansonniers français de son époque, et celle qui l’a créée en 1918 a connu une fin tragique.

Geneviève Lecomte chantait l’opérette et l’opéra-comique. Infirmière volontaire et brièvement prisonnière durant la guerre, elle avait ensuite rejoint Larrieu et chantait à Sherbrooke , à la fin de février 1919,  lorsqu’elle est tombée malade. Pendant que le reste du trio continuait à New York, elle est restée au repos à Sherbrooke où elle mourut le 13 mars 1919.