Un troisième crucifix au musée?

Dans le débat sur le crucifix de l’Assemblée nationale, le patrimoine a le dos large. Nul doute que l’Hôtel du Parlement constitue un trésor avec tous ses éléments architecturaux et les œuvres d’art qui se sont ajoutées par la suite conformément au plan que l’architecte avait imaginé. Taché avait notamment prévu des niches qui ont été pourvues de bronzes à l’extérieur, mais sont restées vides à l’intérieur. Il avait planifié l’installation de peintures dans de grands cadres construits à même le mur dans les deux salles de séances. C’est lui qui a conçu la décoration intérieure et extérieure, les emblèmes floraux et autres, les armoiries, les monogrammes, etc. Il a dessiné personnellement le « trône » qui comprend des gradins et le dais, cette structure verticale derrière le fauteuil du président de l’Assemblée.

Au sommet de cette structure, Taché a fait sculpter les armoiries du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande, symbole de la monarchie qui règne toujours sans vraiment gouverner et de son représentant à Québec, le lieutenant-gouverneur, le « sommet » de nos institutions politiques à cette époque et, théoriquement, encore aujourd’hui. Taché y a aussi fait sculpter des armoiries du Québec, mais pas d’armoiries canadiennes, d’abord parce qu’il n’y en avait pas officiellement encore (telles qu’on les connaît depuis 1921) et aussi parce que la couronne symbolisée par les armories du Royaume-Uni était « québécoise » en ce sens que le lieutenant-gouverneur représente directement la reine (ou le roi), et non le gouvernement fédéral, et que le Parlement québécois légifère de façon souveraine dans ses champs de compétences. Les références au Canada (des « C » au-dessus des portes latérales) sont bien discrètes.

Taché agissait au nom de l’État et devait en respecter les institutions. On voit mal comment il aurait pu insérer un symbole religieux aussi porteur de sens et détonnant qu’un crucifix, entre la tête du président de l’Assemblée et les armoiries royales. Le Québec sortait alors d’un grand débat sur le rôle de l’Église en politique et la Cour suprême venait de condamner l’influence « indue » des évêques dans les élections.

Comment en est-on arrivé, en 1936, à faire ce que personne n’avait imaginé encore et que personne n’oserait faire aujourd’hui? L’introduction d’un crucifix dans la salle des séances de l’Assemblée a été expliquée plusieurs fois[1], mais de nombreux participants au débat surréaliste qu’on vit actuellement croient encore que cet objet fait partie de notre tradition parlementaire bicentenaire. Il faut redire qu’il est apparu avec le premier gouvernement Duplessis (sans qu’on puisse à 100% lui en attribuer la « paternité »). On ignore d’ailleurs généralement que le gouvernement Taschereau avait mis des crucifix dans les palais de justice, ce qui relativise passablement le rôle de Duplessis dans la construction de l’alliance Église-État.

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S’il était resté au pouvoir, Taschereau aurait-il franchi le pas, lui, le fils d’un des juges qui avaient prononcé le fameux jugement de 1877? Avec un T.-D. Bouchard anticlérical à ses côtés? Douteux! Duplessis était dans un autre monde avec des collègues comme Albiny Paquette, qui allait bientôt recueillir les fruits de son militantisme catholique sous forme de multiples décorations (membre de l’Œuvre de Terre Sainte, décoration de l’Ordre latin, croix de Jérusalem, grand-croix de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre, croix d’or de Saint-Jean-de-Latran, officier de l’Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem …). Paquette s’est attribué le mérite d’avoir fait poser le crucifix en 1936 ; on ne voit pas à quel titre il a pu agir (https://blogue.septentrion.qc.ca/gaston-deschenes/2007/04/03/duplessis-le-crucifix-et-le-garagiste-de-rouyn/) mais il n’ignorait sûrement pas que Mussolini avait donné l’exemple en Italie treize ans plus tôt.

Le crucifix de 1936 a survécu à la Révolution tranquille et au « ménage » qui a suivi l’abolition du Conseil législatif à la fin de 1968. Bien des « accessoires » du parlementarisme (dont les trois T : toges, tricornes et tabatières) ont été relégués aux oubliettes. Le crucifix du « Salon rouge » (la deuxième chambre ayant suivi l’exemple de la première) a été enlevé, même si des travaux parlementaires (très importants, se plaît-on à dire) se sont poursuivis dans cette salle. Où est-il passé? Je crois l’avoir vu traîner dans un cagibi attenant à la salle des toilettes, près de mon bureau, vers 1976. Triste sort pour un objet « patrimonial ». Qui s’en souciait?

Celui de l’Assemblée a survécu à la Révolution tranquille et au PQ. En 1976, le président a cessé de lire la prière traditionnelle et plutôt invité les députés à observer un « moment de recueillement » (suivant en cela la lettre du règlement adopté en 1973), ce qui a soulevé une petite tempête : le dernier membre de la phalange créditiste de 1970 a demandé le rétablissement de la prière mais sa motion a été défaite. Le président Richard n’a pas osé retirer le crucifix. Sa justification aurait pu être la même : « C’est par respect pour les membres de cette Assemblée, qui ne sont pas nécessairement tous de la même dénomination religieuse, et c’est par respect pour l’Assemblée que j’ai choisi un mode de prière que je laisse à la liberté de chacun. Chacun aura le loisir, au moment de la période de recueillement, de faire la prière qu’il entend […]. »

Sous la présidence de son successeur, à la suite d’on-ne-sait-quelle démarche, pression ou réflexion, le crucifix de 1936 a été remplacé. Un article publié dans Le Soleil du 8 avril 1986 nous apprend que, « depuis 1982, une pièce nouvelle a remplacé l’ancienne ». Un « certificat d’enregistrement » fourni au président de l’Assemblée le 4 février 1986 le confirme et précise que ce crucifix a été « offert gracieusement à l’Assemblée nationale le 4 mars 1982 » par l’artisan Romuald Dion qui l’a « remodelé en août 1984 & juillet 1985 », soucieux d’inscrire son œuvre dans le « courant archéologique par la tenue du corps sur la croix et par la figure plus divine que paysanne ».

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L’objet original qu’on avait hissé à la place d’honneur en 1936 était-il démodé? Le Soleil du 8 avril 1986 nous informe qu’il est devenu « objet de musée au parlement ». Or, il n’a pas été exposé dans le musée créé en 1976, musée qui errait alors (après avoir été délogé par le studio de la télévision des débats en 1978 ou 1979), ni dans les vitrines qui lui ont succédé vers 1984. Au mieux, il aurait rejoint celui du Conseil dans un quelconque débarras.

Si l’Assemblée nationale a bien géré son patrimoine, elle aurait donc déjà deux crucifix « patrimoniaux » dans ses réserves : pourquoi pas un troisième?

Les élus québécois éviteraient que le crucifix devienne un enjeu politique ou électoral surréaliste et adopteraient une attitude responsable s’ils prenaient l’initiative d’un mouvement de réflexion qui aurait pour but de faire comprendre aux citoyens, souvent peu familiers avec leurs institutions politiques, que le « Salon bleu » n’est pas le sous-sol qu’on décore à son gré et qu’un symbole religieux comme le crucifix ne peut pas « présider aux délibérations » (comme on disait en octobre 1936) de la plus importante institution démocratique du Québec.

On répondra qu’il n’est pas facile de faire de l’éducation citoyenne quand le débat est mal engagé et que les partis entretiennent eux-mêmes la confusion, comme on l’a vu dans le cas de l’unifolié au Salon rouge: le PLQ et la CAQ y défendent la présence du drapeau du Canada au mépris du concept de partage des compétences dans le régime fédéral et des usages protocolaires élémentaires. Dans le cas du crucifix, le PLQ adopte une position étonnante, lui, l’héritier des Patriotes et des Rouges, des membres de l’Institut canadien, de Laurier, qui a dû défendre son parti face à l’Église, de plusieurs autres chefs en butte avec les évêques, des nombreux pères de la Révolution tranquille, etc. Pas facile à suivre, comme le constatait l’ex-juge L’Heureux-Dubé la semaine dernière, et elle ne savait pas encore que son parti serait appuyé dans sa croisade par les Bérets blancs qu’on croyait morts depuis longtemps!


[1] Jean-Guy Pelletier, « Le crucifix à l’Assemblée nationale », BBAN, 17, 3-4 (novembre 1988), p. 7-8; Gaston Deschênes, « Duplessis, le crucifix et le taxi de Rouyn », BAAPQ, 8, 1 (printemps 2007), p. 5-7; Martin Rochefort, « L’introduction de la prière et du crucifix à l’Assemblée nationale du Québec », BBAN, 37, 2 (automne 2008), p. 18-23.

De l’importance de la lecture

Des chercheurs français ont étudié l’impact des loisirs sur les performances scolaires de 27 000 adolescents français de 14 ans et demi en classe de 3e.

Quelques passages tirés d’un résumé de cette étude (http://www.cahiers-pedagogiques.com/L-impact-des-loisirs-des-adolescents-sur-les-performances-scolaires) :

« Voici le Top 10 des loisirs préférés des ados, c’est à dire le classement des loisirs les plus fréquentes (en %), c’est à dire correspondant à la réponse « 1- tous les jours ou presque » (fig.1). Les deux activités les plus fréquemment pratiqués par les adolescents de 14 ans (et demi) sont l’écoute des musiques actuelles, rock, hip-hop, etc. (79%) et de téléphoner ou d’envoyer des SMS (78%). Vient ensuite la communication par internet avec ses ami(e)s (73%), par exemple avec Facebook. La quatrième activité au dessus de 50% est la navigation sur internet (61%). Les autres loisirs concernent la téléréalité (42%), la recherche d’infos people sur internet, les chansons et les films d’action/policier/fantastiques.

[…] Le premier loisir d’une activité réelle et non virtuelle, les activités physiques ou sportives n’apparaissent qu’à une fréquence de 26%

[…] La lecture n’apparaît pas comme une activité préférée, et c’est le journal ou magazine d’actualités qui sont préférés (34%) ; viennent ensuite les bandes dessinées (et/ou mangas, comics, 31%) qui sont lus plus fréquemment que les revues sur l’histoire ou les sciences (22%) ou les œuvres littéraires de grands auteurs français ou étrangers (16%). Enfin d’autres activités sont très rares comme de participer à des associations de jeunes ou aller au théâtre (2%).

[…] Les résultats montrent clairement les loisirs positifs ou négatifs pour les performances cognitives scolaires. La lecture est la plus bénéfique, puisque les changements liés à une pratique fréquente sont favorables à tous les tests, notamment à la compréhension (+10%) et surtout à l’acquisition de connaissances (+20%). Les jeux vidéo n’ont pas d’influence, et notamment, on remarque qu’il n’y a aucune amélioration pour le raisonnement, ce qui infirme l’hypothèse de transfert de la pratique des jeux vidéo sur l’intelligence fluide, comme l’ont supposés certains chercheurs. À l’inverse, jouer aux jeux vidéo (action, combat, plateforme) n’a pas non plus d’incidence négative. Téléphoner très souvent a une incidence mais faible, sauf pour l’acquisition des connaissances de ceux qui téléphonent (ou envoient des SMS) (-10%). Mais c’est le visionnage très fréquent des programmes de téléréalité (et également les séries romantiques) qui a l’impact le plus négatif sur les performances cognitives et scolaires, de -11% pour les maths à -16% pour les connaissances.

[…] la pratique trop fréquente de la télé (ou vidéo sur ordinateur) est associée à de moindres performances. A l’inverse, la lecture est bénéfique. Pourquoi ? La raison principale en est la richesse de vocabulaire. Hayes et Ahrens (1988) ; Cunningham et Stanovich (1998) ont montré un nombre de 1 000 mots différents en moyenne dans des livres mais jusqu’à 4 000 mots différents dans des magazines scientifiques. Même le vocabulaire de bandes dessinées (867) est plus riche que celui d’émissions populaires en prime time pour les adultes (598 mots). Ces chiffres sont mêmes faibles par rapport aux manuels scolaires qui comptent jusqu’à 6 000 mots en plus du vocabulaire courant en 6e et jusqu’à 24 000 en 3e, niveau scolaire des élèves de notre étude (Lieury, 2012). En conclusion, oui aux loisirs numériques à dose raisonnable, mais l’école reste la vraie source de stimulation du cerveau. »

« Appelez-moi Dewhrist, Gaston Dewhrist ».

Les recensements constituent une mine précieuse de données pour les historiens et les généalogistes. Ces derniers attendent donc toujours avec fébrilité le moment où ils seront rendus publics.

Sacrosainte protection de la vie privée oblige, le gouvernement fédéral les laisse généralement patienter une centaine d’années mais il s’est « ouvert » l’an dernier en rendant public le recensement de 1921. « Public » est un grand mot, car, fidèle à ses politiques de privatisation, il a confié à une firme américaine, Ancestry, le soin d’indexer et de donner accès à ces inestimables données.

Avec le formulaire de recherche du site Ancestry (http://search.ancestry.ca/search/db.aspx?dbid=8991&o_iid=56136&o_lid=56136&o_sch=Web+Property), j’ai donc cherché mon père, prénommé Antonio, né en 1917.

Le premier essai n’a pas donné de résultat. Le nom « Deschênes » peut évidemment poser des difficultés. Essayons donc « Deschesne », « Deschesnes », « Dechene », etc., avec ou sans accent. Niet. Nouvel essai avec son père Albert ou son grand-père Salluste. Non plus. Pour contourner le problème, voyons si on peut trouver son grand-père maternel dont le nom est plus simple : Dubé.

Ça marche. Aubert Dubé et sa famille apparaissent; on peut ensuite fouiller dans le voisinage des Dubé car les Deschênes sont nombreux dans le deuxième rang. Quelques maisons à l’ouest, on devrait trouver Salluste… Il est là mais l’index indique « Ballutre Deschina ». Bon…, le prénom n’est pas courant mais le nom est bien lisible (C’est justement Salluste qui était recenseur!) pour quiconque est le moindrement familier avec les patronymes du Québec. Pas loin de chez Salluste, il y a un « Albert Denkmer », autre Deschênes mal déchiffré, mais célibataire. En revenant vers l’est, passé le pont de la rivière Trois-Saumons, on devrait trouver quelques autres Deschênes, dont le bon Albert. Voyons…, après les Anctil, il y a bien Émile Deschênes, qui  est transcrit « Dumènes », et, plus loin, « Gustave Desshenes ». On y est presque pour l’orthographe mais c’est trop à l’est. Deux maisons avant, on trouve… « Elbert Dewhirst » qui a un fils prénommé « Antonis »!

Pour trouver mon père avec le formulaire de recherche Ancestry, il suffisait de demander « Antonis Dewhrist »! Facile…

UNE regrettable maladresse sur quelques millions de noms? Un abonné de Planète Généalogie et Histoire a noté des erreurs étonnantes : « […] il faudra beaucoup d’imagination aux 1) Laverdière, 2) Lemelin, 3) Courtemanche, 4) Leclerc et 5) Chalifoux pour retracer leurs ancêtres respectifs dans Ancestry, soit respectivement: 1) Hampshire, 2) Kamstra, 3) Construnarodel,4) Earbre et 5) Mélipane. Et il y en a tellement plus… ».

« C’est tout simplement pathétique pour les patronymes francophones, déplore ce généalogiste. Il est bien facile de constater qu’il n’y a eu aucun contrôle de qualité des transcriptions ».

Ancestry a sous-traité l’indexation à des Chinois qui n’ont visiblement même pas pris la peine de travailler en consultant parallèlement le recensement de 1911 où ils auraient trouvé, dans paroisses rurales, une bonne partie des familles vivant dans les mêmes maisons!

Blues du blogueur

 « Qu’heureux est le mortel qui, du monde ignoré,

Vit content de soi même en un coin retiré,

Que l’amour de ce rien qu’on nomme renommée

N’a jamais enivré d’une vaine fumée,

Qui de sa liberté forme tout son plaisir

Et ne rend qu’à lui seul compte de son loisir.

Il n’a point à souffrir d’affronts ni d’injustices

Et du peuple inconstant il brave les caprices.

Mais, nous autres, faiseurs de livres et d’écrits,

Sur les bords du Permesse[1] aux louanges nourris,

Nous ne saurions briser nos fers et nos entraves,

Du lecteur dédaigneux honorables esclaves.

Du rang où notre esprit une fois s’est fait voir,

Sans un fâcheux éclat, nous ne saurions déchoir.

Le public enrichi du tribut de nos veilles

Croit qu’on doit ajouter merveilles sur merveilles.

Au comble parvenus, il veut que nous croissions,

Il veut en vieillissant que nous rajeunissions. »

Boileau, Épitre VI, 1667

 


[1] Rivière qui arrose la demeure des Muses.

Les impôts, au gouvernement; les profits sur les logiciels, à l’étranger

Un bulletin récent de Desjardins (http://www.desjardins.com/fr/a_propos/etudes_economiques/previsions/en_perspective/per1013.pdf) décrivait comment notre commerce de détail est en train de changer de mains, ce qu’on pouvait déjà constater à l’œil nu.

Selon cette étude, les détaillants étrangers n’accaparent qu’environ 15 % du total des ventes au détail au Canada mais, si on exclut les secteurs de l’alimentation, de l’automobile (véhicules et essence) et de la pharmacie, cette part passe à environ 41 % et elle appartient à 60 % à quatre grands détaillants : Walmart, Costco, Home Depot et Best Buy. La situation ne serait pas très différente au Québec et elle évolue rapidement. L’étude signée Joëlle Noreau cite un douzaine de nouvelles bannières établies en sol québécois entre juillet 2011 et octobre 2013 (dont Target et Marshalls) et huit d’entre elles étaient déjà présentes ailleurs au Canada avant de faire leur entrée au Québec.

À l’approche de la saison des impôts, il est intéressant d’observer ce qui se passe dans un secteur très particulier, celui des logiciels qui permettent aux citoyens de préparer leurs déclarations de revenus.

Au début des années 1990, 21 d’entreprises, la plupart québécoises, offraient leur produit aux contribuables. Aujourd’hui, il en  reste huit autorisées par Revenu Québec (selon la liste émise en 2013) et le champ est occupé à plus de 90% par quatre logiciels : H&R Block, ImpôtExpert, Impôt Rapide et et TaxPrep.

- H&R Block

Pour les Québécois, H&R Block évoque naturellement l’impôt. H&R Block Canada Inc. est une des nombreuses filiales de H&R Block Inc. (http://www.hrblock.com), entreprise fondée aux États-Unis en 1955 et toujours basée à Kansas City, Missouri.

- ImpôtExpert

Le logiciel ImpôtExpert a été développé à Montréal par Logiciel Dr Tax. Les mots «canadiens» ou «Canada» apparaissent souvent dans la présentation du logiciel, mais Dr Tax, depuis janvier 2012, fait partie de l’empire Thomson Reuters, une multinationale établie à New York.

- Impôt Rapide

Le logiciel Impôt Rapide est exploité par les Entreprises Intuit Canada (qui offrent également ProFileMD et ont déjà eu Impôtmatique), une des filiales de Intuit Inc., entreprise inscrite au Nasdaq (INTU) et basée à Mountain View, Californie (http://www.intuit.com).

- TaxPrep

Le logiciel TaxPrep est passé entre plusieurs mains canadiennes ou américaines avant de se retrouver en 1998 chez Wolters Kluwer, une multinationale établie aux Pays-Bas. Deux ans plus tôt, la société WK avait acquis CCH Inc. (autrefois Commerce Clearing House Inc.) et elle a confié l’exploitation du logiciel à sa filiale CCH Canadienne qui a des bureaux à Brossard mais dont le site Internet (www.cch.ca/) mène à Wolters Kluwer CCH, tout comme, aux États-Unis, « CCH is a Wolters Kluwer business » (http://www.cch.com/about/).

Les autres logiciels sont :

  • Studio Tax, conçu par « un petit groupe de professionnels de l’informatique basé à Ottawa » (http://www.studiotax.com/fr/?page=6).
  • Taxtron, qui appartient à Softron Computers Inc., une entreprise établie à Mississauga, Ontario, et fière de se dire « 100 % Canadian Owned and Operated » (http://www.softrontax.com/company/).
  • Impôt5dollars, exploité par une petite entreprise qui était établie à Pointe-Claire mais ne semble plus en affaires à cet endroit et son site est actuellement inaccessible (www.5dollartax.ca).
  • Impôt Professionnel, un logiciel conçu à Québec par Les Logiciels Marichênes et distribué depuis 1985 (http://www.impotprofessionnel.com/).

Le site Internet de Softron Computers Inc. s’ouvre sur cette réflexion : « You would think that companies providing expert tax services to Canadians would be owned by Canadians; but two of the three major tax service companies are U.S. owned ».

Le concepteur de Taxtron peut se consoler : au Québec, les joueurs locaux ont presque tous abandonné la partie et le marché est presque entièrement occupé par des entreprises établies à l’extérieur qui multiplient les artifices pour donner à leurs clients l’impression qu’ils font affaires avec des entreprises qui sont au moins canadiennes. Ainsi, « CCH Canadienne » se définit comme « un fier membre du groupe Wolters Kluwer », comme s’il s’agissait d’une association volontaire.

Plusieurs facteurs se sont combinés pour aboutir à cette concentration. Si la conception d’un logiciel d’impôt constitue un défi, sa mise à jour et son accréditation annuelles sont encore plus exigeantes, surtout depuis que les déclarations peuvent être envoyées par Internet. Avant d’agréer un logiciel, le gouvernement fédéral a exigé qu’il puisse traiter les déclarations de revenus de six provinces; les entreprises étrangères ont pu s’acquitter aisément de cette exigence en choisissant six provinces anglophones alors que les entreprises québécoises ont eu le fardeau de rendre leur logiciel utilisable dans des marchés où ils n’avaient pas nécessairement d’intérêt, compte tenu des efforts qu’il fallait consentir pour donner un soutien technique dans les deux langues. Tout un prix à payer pour avoir le droit d’envoyer la déclaration de revenu fédérale des Québécois par Internet.