Entendu à Radio-Canada dimanche, au début de l’émission C’est fou, le commentaire de Serge Bouchard sur le symbole ajouté cette semaine sur le drapeau de Montréal : « C’est le grand pin blanc de la paix de Iroquois qui n’arrêtaient pas de s’entre-tuer » (http://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/c-est-fou).
Si Serge Bouchard le dit…
En fait, ils ne battaient peut-être pas tellement entre eux, mais ils ont fait la guerre intensément aux autres tribus et à leurs alliés Français, surtout les « Montréalistes ».
Quand Maisonneuve fonde Montréal, il n’y a pas d’Indiens à cet endroit, sur l’île et dans les proches environs. Champlain l’a noté en 1603 : ceux que Cartier a rencontrés en 1535 (des Iroquoiens, dit-on) ne sont plus là, pour des raisons qui nous sont encore inconnues.
Au XVIIe siècle, les Iroquois vivent dans ce qui est aujourd’hui le nord de l’État de New York, mais ils viennent faire la guerre aux Français, de Montréal et d’ailleurs, de façon plus ou moins continue, pendant plus de 50 ans. Les missionnaires jésuites en convertissent quelques-uns: dans les années 1660, ils viennent s’établir dans la région de Montréal et sont à l’origine (après plusieurs déménagements) des villages du Sault Saint-Louis (Kahnawake, autrefois nommé Caughnawaga), du Lac-des-Deux-Montagnes (Kanesatake, aussi connu sous le nom d’Oka) et de Saint-Régis (Akwesasne).
En 1701, c’est la grande paix de Montréal avec les Indiens du nord-est de l’Amérique, une initiative du gouverneur Louis Hector de Callière. La Ligue iroquoise s’engage à rester neutre dans l’éventualité d’une guerre opposant les Anglais aux Français… Or, on sait ce qui arrive pendant la guerre de la Conquête : une partie des Iroquois, surtout des Agniers (appelés aussi Mohawks), s’est rangée du côté britannique.
Quelques jours avant la capitulation de Montréal (8 septembre 1760), des représentants de neuf nations vivant dans la vallée du Saint-Laurent ─ et jusqu’alors alliées aux Français ─, s’étaient rendus au-devant de l’armée d’Amherst, en amont de Montréal, pour conclure une sorte de « paix séparée » et obtenir des garanties quant à leurs terres leur religion. (Trois jours avant la capitulation, les Hurons de Lorette ont fait de même en allant voir Murray « to submit to His Britannick Majesty, and make Peace », selon les termes du sauf-conduit auquel la Cour suprême a donné valeur de traité).
La présence du grand pin blanc de la paix sur le drapeau de Montréal ne manque pas d’ironie.