Voici une opinion du lecteur que Le Soleil a décidé de ne pas publier.
Dans le beurre
S’il faut en juger par l’article de Daphnée Dion-Viens (Le Soleil, 18 octobre 2008, intitulé « Le premier dictionnaire québécois en ligne »), les responsables de ce futur dictionnaire appelé le Franqus(!) n’ont pas consulté de dictionnaires « conçus à Paris » depuis belle lurette. Hélas, tous les exemples qu’ils donnent sont faux, sauf « fumer comme une cheminée » qui a été sacrifié au nom des campagnes antitabac.
Quiconque consultera un Petit Larousse illustré des années 2000 y trouvera cégep, traversier, brunante, solliciteuse et même l’expression « se mettre les pieds dans les plats ». La féminisation des noms de métiers ou de professions a été réalisée progressivement au fil des ans. Non seulement des mots québécois ont été introduits, mais également d’innombrables sens propres aux Québécois. À ce propos, je préfère la définition du mot bleuet dans le Petit Larousse que celle qui est annoncée pour le Franqus (!) : « une baie comestible produite par des espèces indigènes de l’est de l’Amérique du Nord ». Combien d’espèces indigènes produisent des bleuets ?
Aucun dictionnaire n’est parfait et le français est une langue bien vivante. Les auteurs de dictionnaires ne se reposent jamais. Pour leur part, les Québécois sont de grands consommateurs de dictionnaires et sans doute qu’ils se délecteront dans le Franqus(!). Pour en faire la promotion, ses responsables devront toutefois corriger leur tir. Leur meilleur argument sera certes le recours au corpus littéraire québécois. Larousse a choisi le champ encyclopédique, c’est là qu’il est imbattable.
Sur le terrain littéraire, Franqus (!) fera face au Petit Robert. Bonne chance !
À titre d’éditeur, je cherche à réduire la distance entre « le français standard d’ici » et le français international et je préconise des outils communs. Au lendemain du Sommet de la francophonie, le mot d’ordre n’est-il pas de défendre LA langue française ?
Denis Vaugeois, éditeur
1er novembre 2008.