Comme vous pourrez le constater à nouveau, les déceptions littéraires sont encore au rendez-vous. Pour faire un clin d’œil à mon précédent billet, je peux affirmer que les titres ici-bas n’ont pas eu une grande résonnance sur le lecteur que je suis. Constatez-le par vous-même.
La gifle de Roxanne Bouchard (Coup de tête) : Qui donc recevra cette gifle tant attendue dans cette histoire ? Je vous le donne en mile : le lecteur. Un court texte à l’ambiance pseudo italienne qui frôle souvent le cliché et qui, disons-le, sent le fond de tiroir de la jeune auteure. Ce premier texte original de la toute nouvelle maison d’édition de Michel Vézina ne convainc pas tout à fait. Je ne comprends comment Danielle Laurin ait pu en faire l’éloge dans les pages du Devoir.
Antenora de Margaret Mazzantini (Robert Laffont) : après avoir vu le sublime et touchant film Écoute-moi, dont elle avait elle-même fait l’adaptation de son roman, je m’étais promis de lire sa prochaine publication en français. C’est chose faite et je ne sais plus si j’aurai envie de récidiver. L’histoire de cette grand-mère italienne n’est pas très passionnante ni très intéressante. N’eût été de la faible épaisseur du livre, je ne l’aurais jamais terminé. Décidément, l’Italie et moi ne faisons pas bon ménage en ce moment…
La maison d’Élisabeth d’Éric Rohmer (Gallimard) : plus de soixante ans après sa publication, Gallimard vient de rééditer le seul et unique roman d’Éric Rohmer. Après lecture, on comprend mieux pourquoi il ne s’est pas commis une autre fois et qu’il ait plutôt bifurqué vers le cinéma, qui lui sied nettement mieux. En lisant La maison d’Élisabeth, on reconnaît évidemment la signature de Rohmer, mais sans le support visuel ça devient vite confus et agaçant. J’aurai au moins satisfait ma curiosité.
Vous plaisantez Monsieur Tanner de Jean-Paul Dubois (De l’Oliver) : j’ai lu ce livre sur la bonne recommandation de mon agente immobilière. Si elle ne s’est pas trompée sur l’achat de ma propriété, elle s’est un peu gourée avec cette suggestion littéraire qui décrit les déboires immobiliers de Monsieur Tanner après avoir reçu en héritage une vielle maison. Je n’ai pas du tout reconnu ma nouvelle réalité et j’ai perdu du temps précieux que j’aurais pu consacrer au sablage de mes planchers. Il n’y a rien dans ce roman. Après quelques essais infructueux, il y a décidément incompatibilité entre Jean-Paul Dubois et moi.
Sept comme setteur de Patrick Senécal (Édition la Bagnole) : la première incursion de Patrick Senécal en littérature jeunesse, bien que pas si mal, n’est pas une réussite. D’abord le sujet. Le bonhomme sept heures a beaucoup été exploité dans la littérature jeunesse québécoise, donc on peut parler de manque d’originalité. Les thèmes abordés comme le père noël, les lapins de pâques et la fée des dents s’adressent normalement à un jeune public ne sachant à peu près pas lire. Certains personnages sont mal définis. Je pense à la petite fille qui semble avoir 8-9 ans dans sa façon d’agir alors qu’elle ne sait toujours pas conduire un vélo sur deux roues! Le ton, quant à lui, teinté d’horreur fait plutôt 10-12 ans. On se retrouve avec un roman au lectorat mal ciblé ou, si vous préférez, assis le cul entre deux chaises!
Nous autres ça compte pas de François Blais (L’instant même) : Iphigénie en haute-ville nous avait séduit par sa fraîcheur, son humour bon enfant légèrement teinté de cynisme et ses pieds de nez à la structure narrative. On retrouve tout ça dans Nous autres ça compte pas mais mais mais! Mais la magie cette fois-ci n’opère pas vraiment pour une simple et bonne raison : tout ce qui se trouvait dans le premier est multiplié à la puissance mille dans le second. Ça finit par irriter légèrement et on rit visiblement moins. Ce n’est pas mauvais mais abuser du cynisme et de la forme narrative c’est comme abuser du chocolat: ça finti par tomber sur le coeur. On espère quelque chose de différent pour le troisième rendez-vous.
10 réflexions au sujet de « Deception point #4 »
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Bon et bien moi qui était décidée à me lancer dans « Vous plaisantez Mr Tanner », ton avis m’a freinée dans mon élan !!
Un billet quelque peu ironique qui me plaît beaucoup… Je me permets une petite question : vous contraignez-vous à lire un ouvrage qui vous déplaît jusqu’au bout ?
Moi non plus je n’ai pas aimé le Blais. L’éditeur a mal jugé ce livre et s’est empressé de le publier en surfant sur le succès du premier. Quant au troisième, je vais passer mon tour… Pour ce qui est de La gifle, j’ai l’impression qu’il s’agit d’une commande et que l’éditeur n’a pas eu le choix de le publier pour cette raison-là.
Allo Eric,
Des trois premiers romans publiés par Coup de tête, la nouvelle maison d’édition de Michel Vezina, au printemps dernier, « La gifle » est le moins pire. Imagine.
J’étais un inconditionnel de Jean-Paul Dubois. Eh bien je tiédis avec la lecture de « Maria est morte » et tes considérations sur « Vous plaisantez M. Tanner ». Quel mélodrame que « Maria… » qui se situe en Asie et qui n’a aucune crédibilité dans les situations décrites. A oublier et à ne pas perdre un temps si précieux à essayer de saisir l’arrière- pensée de l’auteur lors de son écriture.
Patrick a raison à propos des 3 premiers romans publiés chez Coups de tête. Mais je trouve tout de même sympathique cette nouvelle maison, ainsi que le mandat qu’elle s’est donné. Je crois que petit à petit des écrivains intéressants auront le goût d’écrire et de publier des courts romans, car il y a désormais un éditeur qui recherche ce genre de manuscrit.
J’ai essayé de lire le premier roman de François Blais et j’ai abandonné en cours de route. Toute cette esbroufe littéraire m’avait passablement irritée. Le deuxième, je ne le lirai pas, mais j’en ai entendu parler. Il parait que la trame narrative est quelque peu pastichée de L’hiver de force de Réjean Ducharme. Est-ce exact, Éric ? Est-ce que cela vous a dérangé ?
Moi, J’ai adoré » nous autres ça compte pas » de François Blais. Ce sont ses descriptions du quoditien qui me jettent par terre. Habituellement, nous avons souvent les mêmes goûts, mais là on ne se rejoint pas. Bonne lecture
Florinette: il y a trop de bonnes chsoes à lire
Aelys: non, je suis capapble d’arrêter un roman en cours. Par contre, puisque je fais de la critique et des entrevues à la radio, je me fais un devoir de lire les livres en entier. Réjean: je lirai le troisième François Blais s’il se renouvelle.
Patrick: j’imagine très bien.
Denis: tout comme moi, tu es mûr pour découvrir de nouveaux auteurs.
Réjean: Les Allusifs le remplisse depuis plusieurs années et Leméac n’hésite jamais à publier de courts romans et plusieurs autres maisons d’éditions québécoises. Il faudra que « Coup de tête » se démarque davantage pour s’implanter dans le paysage littéraire québécois comme l’a si bien fait « Alto » et comme est en train de le faire « Héliotrope ».
Rosaline: il y a effectivement des clins d’oeil à Ducharme. François Blais ne cherche pas à s’en cacher; il assume très bien. C’est le côté excessif du roman qui m’a dérangé.
Nicole: je sais très bien que « Nous autres ça compte pas » trouvera son public. J’ai une collègue qui partage votre avis.
Éric, si Les Allusifs se sont donné pour mission de publier de courts romans, on s’aperçoit avec les années que lesdits courts romans n’ont de court que le fait qu’ils soient publiés dans un format plus petit, car certains textes ont l’air «comprimé» pour pouvoir rentrer dans ce format. De plus, cette maison québécoise ne publie que des étrangers ou des traductions, sauf Trudel et Beauchemin. Pas étonnant que son succès soit grand en France. Ce qui me semble singulier chez Coups de tête, c’est qu’ils sont ouverts à tous les genres, contrairement à Leméac (vous ne verrez jamais un roman fantastique chez Leméac). Quant à Alto, il est vrai que cette maison a trouvé son créneau assez vite. La seule chose que je lui reprocherais, c’est de sauter sur le nouveau petit auteur canadien anglais à la mode (traduction : Sophie Voillot).