Démocratie, un terme galvaudé

Dans son dernier livre Démocratie – Histoire politique d’un mot (Lux, 2013), le professeur Francis Dupuis-Déri démontre qu’il y a un décalage entre le sens originel du mot «démocratie» et le sens que lui ont donné les politiciens au cours des 150 dernières années dans le but de gagner les faveurs des électeurs. Le mot vient du grec demos (peuple) et kratos (pouvoir). Il désigne le gouvernement du peuple.
La démocratie est toujours présentée comme signifiant la souveraineté du peuple mais, avec les élections, c’est tout le contraire qui se passe : les dirigeants élus décident au nom du peuple tout en gardant les citoyens en dehors du processus de décision politique. Réagissant à cet état de choses, Proudhon disait que la démocratie est une usurpation du pouvoir du peuple par ses représentants.
Pour les Grecs anciens, la démocratie était un régime politique où le peuple participait directement aux processus de décision collective. Dans le régime électif actuel, une poignée de politiciens accaparent le pouvoir au nom du peuple. L’élection n’est donc pas gage de liberté, mais de soumission des électeurs à ceux qu’ils ont élu.
Francis Dupuis-Déri écrit que «les plus grands philosophes de l’Antiquité s’accordaient…pour associer le tirage au sort à la démocratie et l’élection à l’aristocratie» (p. 150). En effet, à Athènes, les postes officiels étaient presque tous attribués par tirage au sort. Aristocratie, un mot venant du grec, signifie le pouvoir aux meilleurs. Encore de nos jours, ceux qui se font élire sont les plus instruits, ceux qui ont le plus de notoriété, les plus riches ou ceux qui disposent d’argent pour gagner leurs élections. Une fois élus, ils se comportent comme une élite aristocratique, le premier ministre agissant comme un véritable monarque, surtout lorsque son parti est majoritaire.
Le livre de M. Dupuis-Déri m’inspire plusieurs commentaires. Il importe d’abord de noter que la démocratie participative est une forme de gouvernement qui correspond au sens premier de démocratie car, selon cette formule, les gens sont au cœur du processus de décision politique. Ce qui facilite le plus ce processus de décision est le fait que toutes les informations sont mises sur la table. Cette grande transparence est gage de bonne gouvernance. En second lieu, les dirigeants choisis démocratiquement par tirage au sort ont pour rôle principal de dégager des consensus au sein de la société et de faire en sorte que les décisions reflètent véritablement la volonté populaire. En démocratie participative, la souveraineté du peuple est ainsi assurée.

Une réflexion au sujet de « Démocratie, un terme galvaudé »

  1. Excellente réflexion, qui fait référence à la démocratie directe. Il s’agit d’un concept intéressant mais difficile techniquement à mettre en pratique. Mais quand bien même on réussirait à trouver une formule, reste à savoir si « le peuple » veut participer à toutes les décisions qui le concerne. L’expression « on a les gouvernements qu’on mérite » traduit un peu cette résignation du peuple, qui semble accepter la mécanique de désignation de nos gouvernants. Une bonne discussion à venir, très bientôt j’espère.

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