Sans doute à cause du vingtième anniversaire de la Charte de la langue française cette année, les médias semblent se préoccuper davantage de l’usage du français ces temps-ci. En tout cas, ils en parlent.
Pour raconter ce qui suit, je dois cependant jouer à «l’homme (la femme) qui a vu l’homme qui a vu l’ours», puisque je ne l’ai pas entendu de mes propres oreilles. Mais, comme le disent les médias eux-mêmes, je l’ai appris de source bien informée, et je n’ai aucune raison de douter de la bonne foi de cette source.
Donc, il semblerait qu’au FM 93, à une émission du retour à la maison la semaine dernière, il était question des jeunes qui ne font pas un très bon usage de la langue de Molière. Un prof de chimie du collégial aurait alors téléphoné pour exprimer son opinion sur la question. Et voici, en «langage oral», comment il aurait amorcé son intervention :
«Moé j’leu donne dés dewoirs…».
Bon, je veux bien croire que ce sont des devoirs de chimie, et non de français. N’empêche que ce prof ne semble pas avoir lui-même beaucoup d’atomes crochus avec Molière.
La tournée d’automne #2
Voici cette deuxième tournée toute féminine. De bonnes lectures dans l’ensemble mais toujours pas de sensation extrême à l’horizon.
L’année de la pensée magique de Joan Didion (Grasset) : Alors que, comme à l’habitude depuis de nombreuses années, elle soupe tranquillement avec son mari, ce dernier a une attaque cardiaque. Malgré les secours, il meurt. Pour elle, c’est comme si la vie s’arrêtait. Pendant un an, elle scrute presqu’à la loupe tout ce qui entoure la mort de son mari. Pendant un an, elle aurait voulu rattraper le temps afin que tout redevienne comme avant (d’où le titre). Un habile exercice de deuil littéraire qui ne tombe jamais dans le pathos et qui réussit néanmoins à rejoindre profondément le lecteur.
À ciel ouvert de Nelly Arcan (Seuil) : J’aurais tellement aimé pouvoir défendre ce troisième roman de cette romancière controversée qu’on ne cesse de juger par l’image négative qu’elle impose maladroitement. J’avais été subjugué par le talent et le souffle littéraire qu’on retrouvait dans Putain et Folle. De ce souffle, il ne reste à peu près plus rien dans À ciel ouvert. Voilà une grande déception pour l’amateur que je suis. Nelly Arcan nous sert gauchement du réchauffé en abordant le thème qui l’obsède, celui de l’image de la femme à travers le regard des hommes, le sexe et la chirurgie esthétique. Elle troque le je pour le il et, à mon avis, c’est là que tout tombe à plat. Ce il détaché, non intériorisé, qui traque le parcours de Rose et Julie, devient vite détestable pour le lecteur qui n’a pas envie de suivre ces deux gourdes superficielles qui se battent pour le même homme aussi peu charmant qu’elles. Nelly Arcan ne semble avoir aucune empathie pour ces deux personnages, aussi détestables puissent-elles être. Nous non plus. Souhaitons qu’elle passe à autre chose pour le quatrième acte.
La sœur de Judith de Lise Tremblay (Boréal) : Depuis La héronnière (le meilleur livre de l’auteure à ce jour), l’écriture de Lise Tremblay est devenue plus concrète, plus sentie et le lecteur ne peut que s’en réjouir. On la retrouve cette écriture dans La sœur de Judith, mais encore plus dépouillée, ce qui sert très bien la narratrice de douze ans. Douze ans, la fin d’une certaine innocence sociale (et personnelle par le fait même). Avec toute la vulnérabilité qui va avec, Lise Tremblay illustre très bien ce passage à travers le regard de cette jeune fille de Chicoutimi qui rêve d’un ailleurs meilleur qu’elle projette dans la sœur de Judith. C’est tout le Québec des années soixante qui est évoqué sous la plume de la romancière. C’est l’aspect le plus réussi de ce roman et c’est pour cette raison qu’il faut le lire.
Le retour à l’île aux cerises de Louise Turcot (Boréal inter) : j’ai un faible pour cette série jeunesse qui a du mal à trouver son public. De livre en livre, Louise Turcot nous montre l’évolution de Lulu, une jeune fille vivant seule avec sa mère à la fin des années cinquante. À l’instar de Lise Tremblay pour les années soixante, Louise Turcot réussit très bien à évoquer ces années d’après-guerre aux abords de Montréal. C’est encore plus vrai dans ce troisième volet alors que le cœur de Lulu (qui a maintenant douze ans) balance entre Gary et Luc. Elle découvre également le spectre de la seconde guerre mondiale et certains tourments de la vie. L’écriture de Louise Turcot est à son image : simple, fluide, chaleureuse et douce. Si vous l’aimez, vous aimerez les allées et venues de la petite Lulu à l’Île aux cerises. Le vrai public de cette série est définitivement celui de la comédienne.
Un effondrement de Ghislaine Dunant (Grasset) : L’exercice de Ghislaine Dunant peut s’apparenter à celui de Joan Didion. Plutôt que d’en être un de deuil, l’auteure a ressenti le besoin de revenir sur la dépression qu’elle a vécu il y a une trentaine d’années. Elle s’attarde principalement à cette période de « gel » où l’esprit de la personne dépressive est complètement détaché du corps qui l’abrite. Le début en fait, qu’elle nomme très justement l’effondrement. C’est surtout l’aspect médical et clinique de la chose qui ressort ici. Quiconque a côtoyé la dépression de près ne peut être insensible à ce livre. Pour avoir accompagnée quelqu’un pendant plus de deux ans, je n’ai pu rester insensible à plusieurs phrases tellement elles avaient une résonnance par rapport à ce que j’avais pu voir ou ressentir. Par contre, je ne peux pas dire que le récit de Ghislaine Dunant m’a complètement satisfait. Il n’est peut-être pas suffisamment porté par l’écriture ou l’émotion.
Causerie avec Jean-François Palomino et Denis Vaugeois
Ce dimanche 18 novembre à 14h, Jean-François Palomino et Denis Vaugeois s’entretiendront sur leur ouvrage La Mesure d’un continent, à la librairie Olivieri. Ils répondront ensuite aux questions du public et signeront le livre.
Places limitées, réservation obligatoire 739-3639. Si vous désirez manger au bistro, il est préférable de réserver au 739-3303.
Librairie Olivieri : 5219 Côte-des-Neiges Montréal | Métro Côte-des-Neiges
Un complément indispensable à votre visite au salon du livre de Montréal !
La prochaine dictée
Si vous souhaitez participer à la prochaine Dictée des Amériques, vous pourrez vous inscrire à l’épreuve éliminatoire dans l’un des journaux suivants du 17 novembre prochain: La Presse, Le Soleil, La Tribune, La Voix de l’Est, Le Nouvelliste, Le Droit, Le Quotidien. Votre bulletin de participation doit être posté avant le 2 décembre à l’adresse qui y est indiquée. Vous pourrez également le faire en ligne à: www.dicteedesameriques.com.
Le test de la demi-finale régionale aura lieu le 19 janvier dans 30 villes du Québec. Pour toutes les informations sur ce concours: http://www.dicteedesameriques.com/document/reference/reglement_integral_2008.pdf. Bonne chance!
Un accueil à la mesure du continent
La Mesure d’un continent reçoit un excellent accueil, tant du public que des médias. Voici un petit tour des commentaires et réactions suscités par cet ouvrage.
Tout d’abord, sur les ondes de la Première Chaîne de Radio-Canada.
Joël Le Bigot découvre l’Atlas en compagnie de Michel Vézina, André Champagne et Denis Vaugeois.
Denis Vaugeois développe le contenu dans l’émission de Pierre Maisonneuve, en compagnie de Serge Bouchard (montage).
Catherine Lachaussée présente l’Atlas à Gilles Payer sur les ondes de Québec.
Didier Fessou du quotidien Le Soleil semble avoir apprécié sa lecture.
Ce livre est spectaculaire ! Mieux que toute autre source historique, la cartographie rend compte de l’avancement de la connaissance de l’Amérique du Nord, de la mobilité des frontières, des enjeux économiques, politiques ou militaires auxquels ont été confrontés les principaux maîtres du continent.
C’est tout ça et bien d’autres choses que donne à voir ce très, très bel ouvrage.
Tandis que Michel Vézina livrait dans sa chronique d’Ici Montréal un texte plus intime et très touchant.
La mesure du continent posé sur mes genoux, je rêve comme lorsque j’avais trois ou quatre décennies de moins. Les cartes m’emportent et me font errer, non seulement sur les routes qu’elles tracent, mais aussi sur une certaine vision qu’on avait du monde, il n’y a pourtant pas si longtemps.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Claude Trudel commente La mesure d’un continent sur son blogue.
Jacques Lacoursière reçoit le prix Gérard-Morisset 2007
La plus haute reconnaissance accordée par le gouvernement du Québec dans le domaine du patrimoine, le prix Gérard-Morisset, revient cette année à l’historien Jacques Lacoursière. Que ce soit par ses publications aux tirages impressionnants ou par ses collaborations à des séries radiophoniques et télévisuelles comme animateur ou recherchiste, Jacques Lacoursière n’a de cesse de mettre en pratique la devise du Québec, Je me souviens, en expliquant l’histoire à ses concitoyennes et concitoyens.
Né à Shawinigan en 1932, Jacques Lacoursière fréquente à l’adolescence les grands auteurs et se voit plus tard romancier. Il doit cependant prendre la relève de son père imprimeur dans l’entreprise familiale, mais se rend compte qu’il n’est pas fait pour ce travail. A la faveur d’un retour aux études en 1960 à l’Ecole normale Maurice-L.-Duplessis, à Trois-Rivières, il découvre l’histoire grâce à un professeur inspirant, Denis Vaugeois.
Très tôt, Lacoursière participe à l’aventure du journal Boréal Express, qui est lancé en 1962 et prendra fin en 1973. Il découvre par cette expérience formatrice l’importance de «raconter l’histoire», de l’«humaniser». Dans cette optique, il considère les dates, la chronologie comme un simple cadre. C’est ainsi qu’à compter de 1968, Canada-Québec, synthèse historique, écrit en collaboration avec Denis Vaugeois et Jean Provencher, présente aux élèves de quatrième secondaire des personnages, des faits, de l’action…
En 1968, Lacoursière qui a été professeur d’histoire du Canada et archiviste à Trois-Rivières, entre au Service général des moyens d’enseignement au ministère de l’Education et, dans le cadre de ses fonctions, devient l’artisan d’une importante série radiophonique : En montant la rivière. En 1979, devenu entre-temps «consultant en histoire», il entreprend avec Hélène-Andrée Bizier un projet ambitieux et audacieux : la rédaction d’une série de fascicules coiffés du titre Nos racines, dont la publication s’étendra jusqu’en 1982.
De 1994 à 2004, Lacoursière anime l’émission de radio J’ai souvenir encore. Il travaille également comme recherchiste, rédacteur, coscénariste et animateur de la télésérie Epopée en Amérique : une histoire populaire du Québec, lauréate de trois prix Gémeaux en 1997. Puis, à partir de la matière amassée pour Nos racines, Lacoursière élabore son grand oeuvre : Histoire populaire du Québec, qui est publié en quatre tomes entre 1995 et 1997.
M. Lacoursière a mis ses talents de vulgarisateur à contribution en collaborant à des revues, à des sociétés d’histoire, à des sociétés de généalogie et à des musées. En tant qu’historien invité, il a aussi accordé de nombreuses entrevues tant à la radio qu’à la télévision et donné plusieurs conférences. Ses talents remarquables lui ont valu entre autres le prix Pierre-Berton, qui lui a été remis par la Société d’histoire nationale du Canada en 1996, et la Médaille de l’Académie des lettres du Québec, qui lui a été décernée en 2002.
Lacoursière a été fait chevalier de l’Ordre national du Québec en 2002; membre de l’ordre national du Mérite de la République française en 2003; membre de l’Ordre du Canada et membre de l’Académie des Grands Québécois en 2006. Il est le lauréat 2007 du Prix Adagio du Salon du livre de Trois-Rivières. Cette même année, le Prix des Bouquinistes du Saint-Laurent vient couronner l’ensemble de son oeuvre.
Le prix Gérard-Morisset qui est attribué aujourd’hui à Jacques Lacoursière reconnaît de belle façon le rôle de cet historien qui a permis à ses concitoyennes et concitoyens de faire meilleure connaissance avec leur passé et qui a su communiquer sa passion pour le patrimoine et sa transmission.
Toute l’équipe du Septentrion tient à féliciter chaleureusement Jacques Lacoursière pour l’obtention du prix Gérard-Morisset, plus que mérité ! Profitons-en pour annoncer que le tome 5 de sa série Histoire populaire du Québec est actuellement en production et que la publication est prévue pour le printemps 2008.
Nicolas Landry récipiendaire du Prix Champlain
Nicolas Landry vient de recevoir le Prix Champlain pour son livre Éléments d’histoire des pêches : La Péninsule acadienne 1890-1950.
Le Prix Champlain est remis chaque année par le Conseil de la vie française en Amérique. Les membres du comité de sélection ont surtout souligné la variété des sources utilisées par M. Landry et la richesse de son analyse.
Soulignons également, que le professeur Landry vient d’être nommé pour un mandat de trois ans à titre de membre du jury de la Société historique du Canada pour le prix John A. MacDonald. Le jury est composé de cinq autres membres de partout au Canada et ce prix est attribué chaque année à l’ouvrage ayant été jugé comme apportant la contribution la plus significative à la compréhension du passé canadien.
Fréquentez-vous Wikipédia?
Cette encyclopédie en ligne, qui totalise quelque sept millions d’articles (en français: 501 000), est devenue l’un des sites les plus consultés au monde. Êtes-vous de ceux et celles qui y puisez de l’information? Si oui, peut-être devriez-vous faire comme ce jeune lycéen qui y «emprunte» des paragraphes pour les insérer dans ses devoirs en «priant pour qu’il ne s’y trouve pas trop d’erreurs».
Car, sachez que, comme tout le monde peut intervenir sur le contenu, il s’y trouve de nombreuses erreurs, et celles-ci peuvent rester des semaines en ligne avant d’être démasquées (si toutefois elles le sont).
Pour plus d’information sur la question, vous pouvez lire le document La révolution Wikipédia: les encyclopédies vont-elles mourir? (Pierre Gourdain et autres, éd. Mille et une nuits), dont l’introduction est présentée en ligne à l’adresse suivante: http://medias.lemonde.fr/mmpub/edt/doc/20070709/933519_intro_wikipedia.pdf. Vous en saurez davantage sur les dessous du fonctionnement de Wikipédia et l’on vous y apprendra même à devenir wiki-intelligent.
Marcel J. Rheault à la Pointe-à-Callière
Dans le cadre de son exposition 1837-1838, Rébellions, Patriotes vs Loyaux, le Musée d’archéologie et d’histoire de Montréal, Pointe-à-Callière, a reçu, le 3 novembre dernier, la visite de Marcel J. Rheault, auteur de Médecins et patriotes, 1837 – 1838.
Dans son ouvrage, l’auteur fait ressortir que les médecins du Bas- Canada, tant francophones qu’anglophones, ont joué un rôle capital lors des rébellions de 1837 –1838. Côtoyant à la fois le peuple et le pouvoir en place, ils étaient à même de constater et de subir les décisions injustes des autorités coloniales.
Soulignons que le docteur Rheault s’est mérité le prix Percy -W.-Foy 2007 décerné par la Société historique de Montréal. Cette reconnaissance souligne l’excellence de la recherche en histoire de l’un de ses membres.
Monsieur Rheault est docteur en médecine de l’Université de Montréal et maître ès sciences de l’Université de Seattle. Il est également détenteur d’une maîtrise en histoire de l’Université de Montréal.
Vers à soi
Il y a de ces disques qui ne se laissent pas apprivoiser facilement. Vers à soi, la dernière création de Jorane, est l’une de celle-là. Après la première écoute, je savais que j’étais en train d’écouter un disque à la réalisation impeccable et aux richesses indéniables. Par contre, j’étais incapable de dire si j’aimais ça. Drôle de sentiment ambigu.
Ma première écoute était à peine terminée que j’appuyais à nouveau sur play. Certaines sonorités et certaines modulations m’intimaient l’ordre de les réentendre. D’une écoute à l’autre, je traînais toujours ce sentiment d’incertitude, mais toujours je reconnaissais la qualité de ce disque. À l’heure où je vous écris, je ne sais plus combien de fois je l’ai écouté et je ne m’en lasse pas. Il m’habite complètement ce Vers à soi.
Ce disque de Jorane s’inscrit d’une manière cohérente dans sa démarche d’artiste par rapport à ce qu’elle nous avait offert avant. Elle explore d’autres avenues très inspirantes et en réempruntent d’autres qu’elle avait délaissées momentanément. Le violoncelle reprend la place qu’on souhaitait et d’autres instruments aux accents asiatiques et indiens sont maintenant de la partie. Et elle chante ses propres textes, en français seulement, pour notre plus grand plaisir. Elle les déconstruit à sa façon.
C’est singulier, nuancé, aérien, décalé, incarné, hypnotisant, obsédant. C’est tout, sauf banal. C’est du Jorane à n’en pas douter et c’est peut-être son meilleur disque jusqu’à maintenant. Je dis peut-être car ça aussi c’est une chose difficile à affirmer. Mais on s’en fout. Quand c’est bon, c’est bon, un point c’est tout!