Piètre départ. Retour sur quelques films

Le Bannissement
(Film du Russe Andreï Zviaguintsev à qui on doit Le Retour, 2003).
Les paysages se succèdent, lentement, cadrage impeccable. À ce point qu’il écrase le jeu des acteurs. Un couple mystérieux et leurs deux enfants s’installent dans la maison paternelle, isolée en campagne. Le paradis terrestre ?
« Je suis enceinte. L’enfant n’est pas de toi », annonce-t-elle à son mari. Déjà, celui-ci est un homme fermé, énigmatique. Le pire est à craindre. Et tout se déroule à peu près comme prévu, en pire même. Alors qu’on croyait avoir tout compris, le mystère surgit. Celui de l’Annonciation, nouvelle manière ?
Des vagues indices se succèdent. En rafale. Qu’y a-t-il d’écrit au dos du test de grossesse ? Comment expliquer le comportement de l’époux ? De son frère ? Du fils ? De l’épouse ? Qui est Robert ? Quel est son rôle ? Plus rien n’est clair. Le spectateur se rend compte qu’il n’avait rien compris. À la sortie, il aura tout le temps pour reconstruire ce message qui se veut biblique.
Délibérément, le cinéaste nous prive de toute référence géographique. Où sommes-nous ? À quelle époque ? Cela n’a pas d’importance. Tout est intérieur et très profondément. Même les dialogues sont impossibles.
La clé est dans le casse-tête qui occupe les enfants. Une scène religieuse de Léonard de Vinci, je crois.. Peut-être L’Annonciation. Le film lui-même n’est-il pas un casse-tête ? Autant de spectateurs, autant de regards, de lectures.
Ce bannissement me conduit à celui, bien mérité de Paul Wolfowitz. La bêtise de ce faucon, ennemi du mal, des méchants, des impurs, l’aura conduit à la plus humiliante des déchéances. La réalité dépasse la fiction. Parfois la justice se fait attendre, mais …
Le Voyage en ballon rouge
du Taïwanais Hou Hsiao Hsien.
Film enfantin au sujet bien mince que Juliette Binoche tente de rescaper. Marionnettiste esseulée et débordée, elle est convaincante, mais cela ne suffit pas. Son fils de 7 ans ( sans doute Simon Iteanu) est magnifique, mais cela ne suffit pas non plus. Présenté en séance d’ouverture à Un certain regard en présence du réalisateur et de ses comédiens (dont Hippolyte Girardot), le film a été poliment applaudi.
Magnus
de l’Estonienne Kadri Kousaar.
Décidément, ce Festival 2007, 60e édition, démarrait péniblement. Magnus, c’est une caricature de la misère. Le « héros » est d’abord condamné à une mort prématurée. La médecine fait des progrès pour tout le monde. Son problème pulmonaire a été réglé malgré les cigarettes fumées en cachette assez tôt remplacées par toutes sortes de mélange. La fin est celle qu’on devine. Le père et la mère sont séparés, si jamais ils ont été unis. Ils sont grotesques et vivent d’expédients.
Il est difficile de faire plus laid, plus sordide. Pourtant Magnus est beau, il est presque intelligent. Si ses parents meurent, il ne les regrettera pas ; si lui-même meurt, personne non plus ne le pleurera. La réalisatrice a-t-elle voulu transmettre sa propre détresse ? Il semble bien que c’est tout ce qu’elle a réussi.
En guise de punition, j’imposerais le visionnement de Magnus aux 2 200 employés d’entretien de la STM entre les périodes réservées au maintien des services essentiels, celles où ils collectent leurs allocations de fonds de grèves.