Aucune phrase ne traduit mieux la notion traditionnelle de démocratie que «une personne, un vote». Même si ce principe est considéré par certains comme un dogme, ses racines ne sont pas très profondes. Les femmes n’ont obtenu le droit de vote aux élections québécoises qu’en 1940.
Malgré le caractère sacré que certains lui prêtent, le suffrage universel en tant que mode de sélection des dirigeants n’est pas à l’abri des critiques. M. Bai Tongdong, professeur de philosophie à l’Université Fudan de Shanghai, a soulevé plusieurs problèmes inhérents à une personne, un vote, dans un texte intitulé «A Confucian Improvement of Democracy» (janvier 2012 – on peut accéder au texte par Google).
Selon ce professeur, la croyance à la base du suffrage universel est celle du pouvoir du peuple. Il existe parallèlement une méfiance du peuple vis-à-vis des élites et des gouvernements. Cette attitude amène les électeurs à favoriser des individus qui leur ressemblent plutôt que des intellectuels ou des gens considérés comme des élites.
Une personne, un vote n’offre aucun mécanisme pour prendre en compte les intérêts des non-votants, en particulier ceux des générations futures et des étrangers. Le recours à l’emprunt et les coupures dans les budgets d’aide à l’étranger rencontrent ainsi peu d’opposition. De surcroît, les intérêts des groupes riches et actifs sont beaucoup mieux défendus que ceux des gens qui n’arrivent pas à se faire entendre et qui sont laissés pour compte.
Le professeur Tongdong ajoute que même lorsqu’il s’agit de défendre leurs propres intérêts, les électeurs ne sont pas suffisamment informés et clairvoyants pour imposer des choix avisés et cohérents. Étant donné que les gens sont conscients que le droit de vote ne leur donne qu’un pouvoir minime, ils sont souvent amenés à utiliser ce droit de façon irréfléchie, impulsive et frivole.
Si l’objectif visé est la bonne gouvernance, l’institution d’une personne, un vote est un moyen bien médiocre pour y parvenir.
La solution préconisée par le philosophe chinois, inspirée de Confucius, est d’instituer une deuxième chambre du parlement composée de personnes sages et compétentes choisies suite à des concours. Le gouvernement serait formé d’individus provenant de cette chambre haute et les élus pour leur part se verraient accorder un rôle de surveillance et des prérogatives de frein au pouvoir. Ce modèle offre des ressemblances avec celui de la démocratie participative que je préconise, mais il accorde plus de place à la méritocratie qu’à la démocratie.
2 réflexions au sujet de « Une personne, un vote »
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De tous temps, des philosophes ont argumenté que la méritocratie est supérieure à la démocratie. Le meilleur des mondes serait un système qui fusionne les deux. La démocratie participative telle que je la comprends, permettrait de réaliser cet idéal.
Dans les sociétés occidentales, depuis plus de trente ans, nous assistons à un recul important du pouvoir politique. La mondialisation de l’économie, la déliquescence des médias d’information et la montée en puissance du pouvoir financier ont laminé le pouvoir politique… Pour le meilleur ou pour le pire? Ce que j’ai pu observer des systèmes alternatifs n’est pas très encourageant !
Quand on observe que « Occupation Double est l’émission de télé la plus regardée chez les 2 à 11 ans » je ne suis pas certain que cela est un signe d’espoir.