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Sur les traces des Français d’Amérique

Ne manquez pas le second numéro de GEO-Histoire, un hors-série consacré à l’Amérique française. Du Québec à la Louisiane, le magazine dresse un bon portrait de l’histoire coloniale française et part à la recherche de ceux qui l’habitent encore et qui perpétuent son souvenir.
La revue est divisée en quatre chapitres. Les colons du Saint-Laurent, dans lequel on retrouve entre autres Raymonde Litalien qui revient sur la fondation du premier empire colonial français. Vers les « Pays d’en haut », un invitant voyage dans la région des Grands Lacs, dans lequel Gilles Havard explique comment le commerce des peaux de castors a engendré une société métisse. La conquête du Midwest nous amène sur les traces de Cavelier de La Salle le long du majestueux Mississippi jusqu’à Saint-Louis, cette ville française au coeur du continent américain. La Louisiane version française constitue la dernière étape du voyage de même qu’elle fut la dernière étape de la colonisation française en Amérique. Son bayou fut un terminus pour de nombreux déportés acadiens.
Comme à l’habitude, ce numéro est magnifiquement illustré de cartes anciennes et modernes, de dessins et tableaux ainsi que de très belle photographies actuelles. Un numéro incontournable pour les amateurs d’histoire.
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Il faut qu’on parle de Kevin

Ça fait plus d’une semaine que j’ai terminé la lecture de ce livre et je suis encore sous le choc. Mes réactions ne sont qu’émotives lorsque je viens pour en parler. Je cherche mes mots. Aucun ne semble adéquat. C’est rare qu’une lecture me fait cet effet. Je me souviendrai toujours de la confession sans concession d’Éva, cette mère d’un jeune adolescent responsable d’une tuerie à son école. Elle prend à témoin son ex, le père de Kevin, en lui adressant des lettres dans lesquelles elle cherche à comprendre le geste de leur fils. La tuerie est le prétexte idéal pour parler de nos sociétés modernes sclérosées, de notre quête existentielle (ou la perte de cette quête).
C’est un direct en pleine gueule que nous envoie Lionel Shriver à travers cette histoire déchirante. Elle ose dire tout ce que l’on ne doit pas dire à une époque en pleine négation de la nature humaine profonde.
En dire plus serait inutile. Il faut qu’on parle de Kevin est un roman exceptionnel, un coup de massue littéraire. Quand j’ai refermé le livre après l’avoir terminé, sonné et ému, je me suis dit que c’était pour faire des rencontres littéraires comme celle-là que j’aimais autant la lecture.
Est-ce nécessaire d’ajouter que c’est le meilleur roman que j’ai lu depuis des années?

Hadassa

Jusqu’à maintenant, la plus belle surprise de la rentrée littéraire se nomme Hadassa (Leméac). Écrit par Myriam Beaudoin, une jeune et talentueuse auteure, ce roman nous fait pénétrer dans l’univers des juifs hassidiques de Montréal. Le roman débute alors qu’une enseignante catholique doit donner son premier cours de français à de jeunes filles juives de 11-12 ans. C’est, en quelque sorte, le choc des cultures. Elle s’attache particulièrement à l’une d’entre elles prénommée Hadassa. Et là, on entre dans un univers ahurissant. On est projeté dans un tout autre monde alors qu’il est tout près de nous.
Le plus remarquable dans le travail d’écriture de Myriam Beaudoin est qu’elle semble mettre tout son talent uniquement au profit de son écriture. Elle ne cherche jamais à épater la galerie. Au contraire, tout est d’une simplicité, d’une sincérité et d’un respect étonnant. C’est ce qui fait toute la force de ce roman. Dès les premières lignes, elle installe une ambiance forte qui nous rend captif du début à la fin. De par sa singularité, Myriam Beaudoin se distingue et apporte une voix nouvelle au paysage littéraire québécois.
Je vous laisse sur cet extrait:
« On m’offrit alors un budget de cinq cents dollars, une minuscule pièce, sombre et froide, attenante au gymnase, et on exigea que chaque nouveau titre passe au comité de censure. Habituées depuis la maternelle, les filles ne chercheraient pas à savoir pourquoi, dans les nouveaux livres, un trait de feutre noir couvrait les jambes et les bras nus, les cochons et les églises, ni pourquoi plusieurs fois par page, des mots étaient rayés et remplacés par des termes manuscrits. »
Pour en savoir plus sur l’auteure: http://myriambeaudoin.com/