Un jeune garçon de neuf ans, fils unique d’une mère monoparentale (Angelina Jolie), disparaît soudainement. Cette journée-là, la mère lui avait promis une séance de cinéma. Au dernier moment, son employeur la réclame. Elle est responsable d’une équipe de téléphonistes. Nous sommes à Los Angeles en 1928. La reconstitution historique, à elle seule, vaut le détour, pour les décors bien sûr, mais aussi pour cette forme de procès que Clint Eatswood dresse du Los Angeles de l’époque. Au début, le spectateur se dit que l’enfant a pu fuguer en guise de protestation. Un patron bienveillant lui a même fait rater son tramway et elle est rentrée plus tard que d’habitude.
Pour la mère, l’hypothèse d’une fugue est écartée. Après des mois de molle recherche, la police lui remet un garçon qui se dit son fils. Elle proteste, reçoit des appuis du dentiste, de l’enseignante qui témoigne que le garçon n’est pas son fils et d’un pasteur qui dénonce publiquement la corruption de la police.
Comme le film est essentiellement l’histoire du combat que mènera cette femme, il me faut bien vous laisser sur cette entrée en matière. Trop acharnée au goût des policiers, elle sera internée. Autre épisode désolant pour ne pas dire terrifiant. Le policier qui suit l’affaire et qui ne veut rien comprendre décide de se débarrasser de la mère. »Quelque chose ne va pas avec vous. Vous êtes une femme indépendante. » Il n’a pas dit « trop indépendante ». Nous sommes décidément en 1928.
Selon Clint Eastwood, cette affaire aura un important retentissement à l’époque à la fois à cause de la ténacité de la mère mais aussi parce que cette disparition est liée à toute une série de meurtres d’enfants. Cette double histoire vraie avait été peu à peu oubliée; un employé du Los Angeles Times s’y est arrêté au moment de travaux de numérisation des archives du journal. Eastwood a pu récupérer les dossiers papiers et reconstituer cette affaire criminelle qui a plusieurs facettes.
Clint Eastwood a été président du jury du Festival de Cannes en 1994. L’échange, c’est le titre du présent film, est son 5e présenté en compétition officielle. L’un d’eux a valu à Forest Whitaker (Bird) le prix d’interprétation masculine. C’est tout! Eastwood ne s’en fait pas. Il a tout compris. Ces films visent un trop large public. Et il a le goût de continuer dans cette voie. « Je ne vois aucune raison d’arrêter. Pas question non plus de faire des remakes comme Alfred Hitchcock ou Howard Hawks. Je préfère affronter une nouvelle vague au lieu de surfer sur la même ».
Je ne m’en plaindrai pas. Son « Échange » d’une durée de 2 heures 21 minutes a été pour moi le plus court du Festival. Ah si j’étais membre du jury!