Babel

Quand on connaît le travail d’Alejandro Gonzalez Inarritu (Amours chiennes et 21 grammes), on ne peut résister à l’envie d’aller voir ce qu’il a de nouveau à nous proposer. Je ne pouvais pas rater la sortie du film Babel. Évidemment, j’y allais en ayant beaucoup d’attentes. Elles ont toutes été déclassées: Babel n’est rien de moins qu’un film brillant qui ébloui et qui nous rive à notre siège du début à la fin.
La base du scénario, signé Guillermo Arriaga une fois de plus, tourne autour de l’idée du mouvement qui finit par avoir des incidences sur la vie de beaucoup de gens. Dans Babel, une balle tirée presque au hasard a des répercussions dramatiques dans la vie d’une famille américaine, marocaine, japonaise et mexicaine. Comme cette idée du mouvement nous avait été servie dans Amours chiennes, je craignais une certaine répétition. Eh, bien non. Non parce que le film ne repose pas uniquement sur cet aspect. Le mouvement sert à illustrer le fossé entre les cultures pour mieux en démontrer toutes les richesses propres à chacune. La caméra d’Inarritu parvient avec beaucoup de force à faire ressortir toute l’humanité qui s’en dégage en scrutant les gestes du quotidien de ces gens unis par le mouvement. On passe d’un univers à l’autre toujours un peu secoué par ce que nous venons de voir, de vivre. C’est d’une subtilité et d’une véracité à faire frémir.
Là où Inarritu impressionnne le plus, c’est que le Japon (digne de Wong Kar Wai) et le Maroc qu’il filme sont aussi authentiques que l’est sa terre natale, le Mexique. Un tour de force hallucinant que peu de cinéastes peuvent réussir.
Bref, c’est du grand art.

12 réflexions au sujet de « Babel »

  1. Ok, bon, de la volonté. Il faut savoir prendre le temps de faire les choses que l’on veut faire, temps que je néglige de prendre souvent.

  2. Un chef d’oeuvre, en effet, qui possède le rare mérite de ne décevoir aucune attente (attentes qui, dans mon cas, étaient plus que nombreuses, car depuis l’émoi qu’avait provoqué dans ma jeune existence le fabuleux « Amores perros », je vouais une admiration féroce et éperdue à Inarritu).
    Dans Babel, l’actrice qui joue le rôle principal du volet mexicain est particulièrement touchante, hallucinante de transparence et de vérité, et le volet japonais réussit à faire éprouver, de manière carrément troublante, le profond malaise existentiel de la jeune femme… Je partage complètement ton avis, Éric : Babel est un film admirable à tous points de vue.
    P.S. Sinon, cher Anonymous, le commentaire d’Éric sur la volonté me semble d’une absolue pertinence…

  3. Oui, c’est un grand film qui nous fait voir que la misère humaine est universelle qu’elle soit physique ou morale. J’ai beaucoup aimé et si je m’étais fié à la critique : j’aurais hésité puisque l’on disait que l’intrigue n’était pas facile à suivre vu les sauts d’un pays et d’une situation à l’autre. Dans un autre ordre d’idée j’ai débuté la biographie de Truman Capote ; on a découvert dans ses objets personnels cette coupure de journal ce texte de Marco Polo : « Encore n’ai-je écrit que la moitié des choses que je vis… » Sur ce bon-week-end.

  4. On me le conseille depuis sa sortie à l’Excentris. Ta belle et convaincante critique aura eu raison de toute ma procrastination… Merci!
    Soit dit en passant, Wong Kar Wai est Chinois et non Japonais. Mais bon, aucune importance.

  5. Pour faire sérieux, disons que ce film m’a tout simplement renversée. Des mots qui entrent par la noirceur, des images qui en ressortent toutes en lueurs; des mots qui plongent dans les profondeurs, des images qui flottent autour de nos épaules en douleurs…
    Inarritu/Arriaga: encore une autre fois, être venus à notre rencontre, récidivistes de l’exploit, simplement avoir été LÀ.

  6. C’est étrange, j’ai aussi vu Babel il y a une semaine ou deux (oui, en Allemagne, les films américains sortent un peu plus tard), et je suis loin d’être aussi convaincu que toi, Éric, et que tes lecteurs.
    J’avais bien aimé Amores Perros, j’en attendais beaucoup de Babel.
    Quoi que le jeu des acteurs soit souvent bouleversant, quoi que la caméra soit belle, quoi qu’il y ait de beaux moments, des scènes fortes, j’ai trouvé qu’il manquait encore quelque chose, une certaine unité. Les histoires sont certes reliées par le coup de feu, mais parfois d’une manière trop ténue (en quoi le coup de feu a-t-il une véritable influence sur l’histoire de l’adolescente muette en manque d’acceptation? – la plus belle des quatre histoires à mon avis), et l’unité que devrait apporter le titre est aussi faible (Babel, c’est l’histoire de l’ambition humaine punie par Dieu par la discorde et la non-compréhension de son prochain – il y avait bien cette non compréhension, mais tout était trop sous jacent, à mon humble avis).
    Le film était bon, mais j’ignore s’il figurerait en première place de mon palmarès…

  7. Je suis assez d’accord avec les propos de Simon. Je n’ai pas beaucoup été touchée par ce film, sauf peut-être par la nounou mexicaine. Mais je crois que le film aurait dû être plus resserré. Le début est long, le mariage mexicain aussi, ainsi que les ados japonais à la discothèque. Le film aurait dû s’appeler Les aléas d’un coup de feu ou Les tribulations d’un fusil…Personnellement, mon film préféré en 2006 a été The Departed. Quelle est cette nouvelle tendance de crier au chef-d’oeuvre à tout venant ? Combien de fois l’ai-je entendu cette année ? Et qu’est-ce qu’un chef-d’oeuvre ? La question est lancée…

  8. Quoique moins enthousiaste qu’Éric, j’ai également beaucoup aimé ce film, et j’y repense encore plusieurs jours plus tard. Tous les acteurs sont absolument brillants et criant de vérité, particulièrement l’adolescente japonaise et les deux enfants marocains, sans oublier la nounou mexicaine (désolé, je suis nul pour me rappeler des noms de comédiens…) Même les têtes connus (Brad Pitt, Cate Blanchett, Gael Bernal machinchouette) ne font pas d’ombrage aux autres comédiens, ce qui démontre le talent de metteur en scène de Innaritu et le travail qu’il a effectué avec ses comédiens.
    Cependant, Babel n’est pas parmi mes films préférés de l’année 2006. Ce titre revient plutôt, dans le désordre, à United 93, The Departed, Children of Men, et Casino Royale (petit plaisir de vieil ado un brin attardé) et dans un tout autre régistre, Borat!

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