Il y a deux jours, Jules m’a écrit ceci :
je me demandais comment t’arrivais à délimiter ton temps pour écrire à travers tout ce que tu fais. Est-ce que tu t’imposes des séances d’écriture ou est-ce que tu considères l’écriture comme un passe-temps? Je me posais la question ce matin en roulant, parce que je me suis rappelé que tu m’as écrit sur mon blog que tu mettrais un an avant de sortir ton prochain bouquin.
Son questionnement est tellement pertinent que j’avais envie de faire profiter tout le monde de ma réponse.
De façon générale, j’ai évidemment très peu de temps à consacrer à l’écriture. Lorsque je ne suis pas en période intensive de création, j’y vais selon la pulsion du moment. Je peux être plusieurs semaines sans écrire comme je peux m’y mettre chaque jour. Par contre, quand je suis en période intense de travail sur un projet (comme c’est le cas présentement), je priorise l’écriture dans mes périodes de temps libre et je me fixe des objectifs. Les objectifs, même si je ne les atteins pas toujours, me servent de stimulants. La vie sociale en prend tout de même pour son rhume, mais si je veux finaliser des projets, c’est un choix que je dois faire.Discipline et persévérance sont peut-être mes plus belles qualités d’écrivain.
L’écriture pour moi n’est pas un passe-temps. C’est une nécessité. Pour mon équilibre, j’ai besoin de créer et c’est dans l’écriture que j’y trouve le plus de gratification. J’aime jouer avec la forme et évidemment avec les mots. Jusqu’à maintenant, j’ai toujours cherché à rejoindre le lecteur via une émotion brute qui vient le surprendre sans s’annoncer. C’est comme si j’essayais d’enlever la distance qu’il peut y avoir entre le lecteur et l’auteur. C’est par la concision que je peux y parvenir le mieux pour ne pas laisser de place à l’artifice. En dire le plus avec le moins de mots possibles définirait assez bien mon travail.
Évidemment, tout ça exige beaucoup de temps. Je suis comme la tortue dans la fable. J’en fais un petit peu ça et là en volant des instants de vie et ça finit par donner un livre au bout du compte
À la fin du mois, ça fera un an déjà que je travaille sur mon nouveau projet. Je me suis donné jusqu’au 31 pour terminer la première version. Je crois que j’y arriverai. Après, c’est le vrai travail d’écriture qui commencera. J’ai beaucoup de pain sur la planche. L’aurais-je terminé dans un an? Je ne sais pas, mais je vais essayer!
3 réflexions au sujet de « Écrire »
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Merci Éric d’avoir si bien répondu à mon excès de curiosité! J’approuve totalement ton affirmation: « j’ai toujours cherché à rejoindre le lecteur via une émotion brute qui vient le surprendre sans s’annoncer. » Comme tu m’as boulversée à la page 38 de « Cher Émile » (entre autre), tu m’as tout suite remise sur pied à la page 40 (la fin du chapitre)! J’ai été prise par surprise par cette fin et j’ai pouffé de rire devant la collection d’émotions que je venais de traverser en 2 pages! Tu m’as fait rougir toute seule dans mon salon… Mission accomplie! Sur ce, je ne peux que te souhaiter bon courage pour ton nouveau projet!
Eh bien, Éric, vous avez peut-être perdu momemtanément la voix, ce vendredi, mais je dois dire que votre plume m’enchante ! Je pense pouvoir affirmer que vous verrez mon museau traîner régulièrement sur votre blog !
J’aime beaucoup cette définition de l’écriture… Une nécessité, voilà, un besoin d’aller jusqu’au bout, de mettre les mots sur tout, la douleur comme le bonheur, l’amour comme la mort.
Orhan Pamuk disait, à mon avis très justement, lors de son discours de réception du Prix Nobel de Littérature 2006, « Pour moi, être écrivain, c’est appuyer sur les blessures secrètes que nous portons en nous, que nous savons que nous portons en nous – les découvrir patiemment, les connaître, les révéler au grand jour, et faire de ces blessures et de nos douleurs une partie de notre écriture et de notre identité. (…) J’écris parce que je n’arrive pas à être heureux, quoi que je fasse. J’écris pour être heureux. »
Voilà, c’est exactement ça…