Je ne pensais jamais écrire un billet sur cet auteur. Je pensais encore moins le faire de façon aussi positive. Pire, je ne pensais jamais relire un roman de Maxime-Olivier Moutier. Ses Lettres à mademoiselle Brochu sentaient la redite. Je l’avais lâché en plein milieu sans jamais le finir. Je trouvais qu’il était allé jusqu’au bout de son style incisif, nerveux, baveux et narcissique qui m’avait au préalable beaucoup interpelé dans son lucide recueil de nouvelles Risible et noir et touché dans son vibrant roman Marie-Hélène au mois de mars.
Grâce au Prix des libraires du Québec, j’ai lu le dernier Moutier qui marquait son retour à la vie littéraire après cinq ans d’absence. Et quel retour! En lisant Les trois modes de conservation des viandes on découvre un auteur d’une grande maturité en pleine possession de ses moyens. C’est la vie qui veut ça et c’est tant mieux. Cette maturité est palpable au détour de chaque phrase et c’est ce qui insuffle une telle force à ce roman inespéré. Le regard qu’il pose sur lui et sur les autres n’est plus le même qu’avant. Si son propos est toujours un peu provoquant, son écriture est maintenant plus nuancée, plus posée, plus réfléchie et beaucoup plus sentie. Ça se sent du début à la fin. Comme quoi un long temps d’arrêt peut parfois s’avérer salutaire pour un auteur.
Les trois modes de conservation des viandes m’a tant plus parce que j’ai aimé sa vision humaine, aimante et réaliste du couple et de la vie de famille. Son point de vue sur la paternité, en plus de m’apparaître assez juste, est à la fois percutant et touchant.
Au sujet du rôle des parents, il écrit ceci : « grâce au progrès, au siècle et à sa science, les enfants, ça n’entrave plus les désirs et le choix des adultes. Plus maintenant ».
Et de l’amour : « Car quand bien même je parlerais la langue des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien ».
C’est ça le nouveau Moutier et on a hâte au prochain.
8 réflexions au sujet de « Maxime-Olivier Moutier »
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Ah, Éric, de grâce, parlez-nous d’autre chose que de Moutier !
Dommage qu’il ne soit pas finaliste au prix des libraires. Il aurait pu remplacer l’insignifiant Mitsuba.
Vous encensez le dernier Moutier mais semblez avoir été déçu par le nouveau Bourguignon (on attend impatiemment votre texte là-dessus), vous vous évanouissez au cinéma et déblatérez vs Radio-Canada. Décidément, dur début d’année pour vous…
« Car quand bien même je parlerais la langue des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien ».
Je ne veux pas te décevoir Éric mais c’est de Saint-Paul cette citation.
Bonjour Éric,
bon papier. À part un léger dérapage vers la fin où il nous parle de sa libido rampante, ce livre m’a également énormément plu. Le genre de truc que tout jeune père, ou qui s’apprête à le devenir, devrait lire.
Bonnes lectures
Serge: j’espère que vous avez lu « Les trois modes de conservation des viandes » pour dire ça!
Josée: il a eu sa chance pour le Prix mais il ne s’est malheureusement pas classé!
Carole: il écrit vachement bien Saint-Paul
Patrick: je n’ai pas trouvé qu’il dérapait à la fin. Ça donne plutôt de la force à son roman.
Éric,
La prochaine fois que tu viens à Montréal pour promouvoir le Prix des libraires, fais-toi payer l’hôtel, dans chaque chambre il y a un Nouveau Testament qui traîne (ben à moins qu’ils leurs soient arrivés la même chose qu’aux crucifix) dans un des tiroirs. Vois 1 Corinthiens 13, tu vas découvrir tout un poète hé hé ;o)
Eric,
je trouvais juste que ce passage libidineux détonnait par rapport au reste du roman.