Cinq choses que vous ne connaissez peut-être pas de moi

Une tag entre bloggeurs fait rage depuis plusieurs semaines. Faisant ma petite affaire dans l’ombre, je pensais y échapper. Eh, non! Carole m’a choisi et je dois donc vous dévoiler cinq choses que vous ne connaissez peut-être pas de moi.
Pour rester dans l’esprit culturel de mon carnet, je m’attarderai à mes habitudes de lecture :
1. Lorsque nous étions jeunes, mes sœurs, mon frère et moi sommes inventés un jeu littéraire. Nous lisions jusqu’à la barre. Je vous explique. Ayant chacun un livre, à tour de rôle nous en lisions un extrait à voix haute et nous arrêtions notre lecture dès que nous tombions sur une barre de dialogue. C’était souvent court et parfois très long (voire interminable), selon le roman que nous étions en train de lire. C’était tout de même une activité stimulante autour du livre.
2. L’idée du cordonnier mal chaussé n’est pas un mythe. Je suis libraire, mais mes livres ne sont pas du tout classés à la maison. Peut-être un peu par genre, et encore!
3. Chaque matin, je lis une heure, une heure et demie. Si je n’ai pas ce temps de lecture, je passe une mauvaise journée.
4. Je ne suis plus capable de lire un seul livre d’une traite. Au fil du temps, je suis devenu un lecteur ayant un trouble de comportement, une sorte d’hyperactif de la lecture. Je lis toujours 4 livres en même temps (2 adultes et 2 jeunesses). Je saute de l’un à l’autre en lisant environ une vingtaine de pages de chaque livre. Je suis parfois des semaines sans en finir un seul et certains matins, je peux en finir deux d’un seul coup.
5. C’est très enfantin, mais c’est en partie le hasard qui détermine mes choix de lecture. J’en ai trop à lire et choisir pourrait devenir une torture. Par exemple : si ce matin je termine la lecture d’un livre adulte et qu’il comptait 444 pages, je retiens le chiffre 4. Alors, je plonge dans ma pile adulte et je coupe chacun des livres au hasard et lorsque je tombe sur une pagination finissant pas 4, je le mets de côté. Une fois ce processus terminé, je choisis un titre dans tous ceux mis de côté. Je ne me passerais plus de ce petit jeu. Ce moment fait autant partie de mes plaisirs de lecture que le reste.
Vous connaissez maintenant mes drôles d’habitudes de lecture!
En principe, je devrais donner la tag à cinq autres bloggeurs, mais je me contenterai de trois puisque j’en connais peu. En espérant qu’ils accepteront, je demanderais à mes acolytes de Septentrion de se prêter au jeu : Sophie, Gilles et Ginette.
Je serais également curieux d’en savoir plus sur les lecteurs de ce carnet. Avez-vous des secrets ou de drôles d’habitudes à nous dévoiler?

Dans la boîte aux lettres

Aujorud’hui, dans ma boîte aux lettres:
- Un chèque annuel de la Commission du droit de prêt public pour la présence de Martel en tête et de Cher Émile dans les bibliothèques.
- Une lettre de refus de la part d’un éditeur pour me dire que Cher Émile n’a pas été retenu par le comité de lecture, un an et demi après leur avoir envoyé et plus d’un an après sa publication. Ce refus me rend vraiment triste! :-)

Jean le fouineux

Jean, c’est mon beau-frère, et le fouineux, un site Web. C’est le premier qui m’a fait découvrir le second. N’empêche que le second qualifie très bien le premier, et c’est tant mieux.
Car, pour le bénéfice de tous, il m’a fait parvenir l’adresse de ce nouveau site Web qui a vu le jour au début de ce mois de février : http://www.fouineux.com et qui en répertorie plusieurs autres, soit :
1) Des outils linguistiques : dictionnaires français, ouvrages de dépannage linguistique, dictionnaires de synonymes, ouvrages sur les conjugaisons, la traduction, encyclopédies et outils anglophones.
2) Des outils de recherche : de sites Web, d’images, de vidéos, de musiques, de recettes et d’«annonces classées».
3) Des localisateurs : répertoires de personnes, d’entreprises, d’urgences, de cinémas, urbains et cartes géographiques.
Tous ces thèmes sont regroupés sur la page d’accueil. Mais si vous cliquez sur chacun des hyperliens «Voir les autres outils de cette section», vous aurez accès à beaucoup d’autres sites, par exemple une banque de données sur la généalogie québécoise, le système électronique d’appels d’offres du Québec, des MP3 gratuits sur des leçons d’anglais, etc. Vous aurez même la possibilité de jouer au scrabble en ligne ou d’y suivre des cours d’une école de cinéma. Bien sûr, il y a du moins bon aussi, des annonces de toutes sortes et parfois de drôles de traductions, comme celle-ci d’Amazone : «Gratitude au-delià de $39» (pour : Gratuité au-delà de 39 $; ce qui, en plus, n’est même plus le cas).
Alors si vous êtes comme Jean (et moi) le moindrement fouineux, vous devriez prendre plaisir à explorer ce site.

Réveillez-vous, Monsieur!

Lorsqu’il est question d’humour en littérature, je ne suis pas toujours preneur. Par contre, quand l’humour est fin, intelligent et un peu absurde comme celui qu’on retrouve dans Réveillez-vous, Monsieur!, j’adhère haut la main.
Difficile de résumer l’histoire de ce roman, mais disons qu’on suit les pérégrinations d’Alan Blair, un jeune auteur (un peu en panne) de trente ans, célibataire luttant constamment contre son alcoolisme. Son valet prénommé Jeeves, qu’il a pu se payer après avoir gagné une cause très payante, le suit partout. Jeeves supporte ses nombreux états d’âme et, comme tout bon valet qui se respecte, ne répond que par des phrases brèves à la « Oui, Monsieur ».
L’action se passe en bonne partie aux environs de New York dans une fondation où les artistes sont (en principe) invités à y séjourner pour parfaire leur art. Souvent entraîné par d’autres, Alan Blair profite de son séjour d’une drôle de façon. Il a le don de se mettre les deux pieds dans les plats, mais en même temps il n’a pas le profil du parfait gaffeur. Disons que c’est un sympathique gentleman maladroit désinvolte.
Tout au long du roman, c’est comme si on était plongé dans la tête d’Alan Blair (et dieu sait qu’il s’en passe des choses à cet endroit!). Lorsqu’il ne s’auto-psychanalyse pas, il théorise sur la vie de façon assez originale. On a droit à des réflexions complètement absurdes, saugrenues, lucides, inusités, stupides, rafraîchissantes et surprenantes.
Bref, au pays de Jonathan Ames, on ne s’ennuie jamais. Réveillez-vous, Monsieur! m’a fait rire de bon cœur du début à la fin. Un vrai livre tonique pour lecteur un peu las de lectures exigeantes ou tout simplement en quête d’un excellent roman à lire.
(Merci Denis pour cette belle découverte!)
Réveillez-vous, Monsieur!, Jonathan Ames, Éditions Joelle Losfeld, 444 p. ($44.50)

Des chiffres et des lettres [2]

Disponibilité immédiate, facilité de consultation, possibilités infinies de recherche, copier-coller pour citation sans faute, le livre électronique ne manque pas d’intérêt. Mais quelle valeur faut-il donner à ce qui n’est pas réel ?
Lorsqu’on touche au domaine éducatif, il faudrait que ce soit gratuit. Ou du moins très bon marché. Après tout, ne s’agit-il pas de propager la science et d’élever le niveau de connaissances de notre société ? Une si noble mission ne devrait être entachée de viles considérations pécuniaires. D’autant plus que les budgets d’acquisition de livres ne sont pas faramineux.
Alors que nous propose-t-on ? Des peanuts. Et c’est là que l’éditeur se fâche. Ou se choque, c’est selon. Pourquoi l’auteur et l’éditeur devraient-ils en faire les frais ? Pourquoi consacrer d’énormes budgets pour concevoir des sites Internet, des télé-Universités, des collèges en ligne, sans penser au contenu qui constitue la chair autour de l’os ?
Comprenons-nous bien. Point d’actionnaires avides qui réclament du rendement. Les investisseurs ont déserté depuis longtemps le champ de l’édition générale. Simplement le sentiment de se faire plumer.
Des exemples ? Deux universités canadiennes de grande réputation (des noms, des noms !) mettent leurs ressources en commun pour créer une bibliothèque virtuelle. Je n’ose penser aux nombreuses réunions, aux déplacements, aux rencontres qui ont précédé la création d’un magnifique portail Internet. Arrive alors le moment de contacter les détenteurs de droits que sont les éditeurs pour meubler les tablettes virtuelles. Nous recevons une longue liste (plus d’une centaine !) de titres puisés dans notre catalogue qui feraient bonne figure dans ce projet. À combien pensez-vous qu’ils évaluaient leur acquisition ? Zéro. Insulte suprême : ils veulent numériser des livres que nous possédons sous forme informatique.
Un autre exemple ? Un collège donnant des cours à distance désire utiliser quelques chapitres d’un de nos livres dans le cadre d’un cours. Pas moins de 40 % de l’ouvrage, d’une nouveauté qui plus est. Ils veulent connaître notre tarification. Si le cours était donné en personne, chaque étudiant aurait à se procurer une copie de l’ouvrage. Par commodité, le collège veut fournir la matière en ligne. Nous offrons la version électronique à 75 % du prix de détail. Le collège propose plutôt de payer 0.10 $ la page, soit ce qu’ils sont habitués de payer pour de la photocopie.
Car il faut bien le dire, la photocopie est maintenant un droit acquis. Les redevances versées sont perçues comme une licence pour copier à tout va. Copibec essaie tant bien que mal de compenser le phénomène. Mieux vaut des miettes que rien du tout.
Dans ce contexte, l’arrivée du livre électronique pourrait changer la donne. Le besoin se fait sentir, mais seuls les éditeurs détiennent les précieux documents. Des protections existent pour freiner la copie illégale. Encore faut-il qu’ils soient en position de force et solidaires pour faire valoir leur point de vue.
So so so, solidarité !
[prochain billet : la vente du livre électronique au grand public]

Sonde ton coeur, Laurie Rivers

Après un silence de cinq ans, le nouveau Bourguignon était l’un des titres les plus attendus de l’hiver. Si Un peu de fatigue explorait avec brio la crise de la quarantaine, dans Sonde ton cœur, Laurie Rivers, dont toute l’action du roman se passe aux États-Unis en mettant en scène uniquement des Américains, l’auteur a voulu explorer une autre facette de son écriture en nous amenant dans un univers complètement différent de ce qu’il nous avait offert jusqu’à maintenant. Pour un auteur, ce genre de pari est un peu risqué, mais en même temps, ça démontre une volonté d’aller plus loin dans une démarche d’écriture. C’est probablement l’aspect le plus intéressant de ce roman, car selon moi, malgré toutes ses bonnes intentions, il n’a pas réussi son pari.
J’ai eu du mal à m’attacher et à comprendre les véritables motivations de cette enseignante (Laurie Rivers) qui décide d’aider et de prendre en main une jeune étudiante obèse (Alice). On a l’impression que ça arrive de nulle part. C’est précipité et mal amené. Même si tout se révèle à la fin, je n’avais pas plus envie de les connaître, ses motivations. Je n’ai ressenti aucune forme d’émotion pendant ma lecture. Si, une certaine lassitude et un détachement par rapport à ce que les personnages pouvaient vivre.
Sonde ton cœur, Laurie Rivers est un roman correct, sans plus. Son principal problème est son manque de profondeur. C’est comme si Stéphane Bourguignon s’était trop concentré sur la forme au détriment du contenu. On ne sent aucun investissement de sa part dans ses personnages, tous sans exception. Il n’a pas pris le temps de définir leur psychologie, leurs contours et de bien les camper dans un cadre précis, ce que nous retrouvons habituellement dans la bonne littérature américaine.
Bourguignon parle beaucoup mieux de son projet que ce qu’il nous donne à lire. Ce que j’ai lu n’est pas ce qu’il présente. Oui, en forçant, en adaptant mon regard par rapport à ce que j’ai pu l’entendre dire en entrevue. Ce n’est pas normal. Une œuvre devrait parler d’elle-même sans avoir besoin de l’auteur pour la décoder.
Ce roman « à l’américaine » n’était peut-être pas une si bonne idée finalement!

Des chiffres et des lettres [1]

Il est commun de dire que la plupart des auteurs ne tirent qu’un faible revenu sur la vente d’un livre. Rappelons rapidement le partage du prix de détail lors d’une vente en librairie : 40 % au libraire, 15 % au distributeur, 10 % à l’auteur et donc 35 % à l’éditeur.
Réglons tout de suite les questions ou préjugés sur cette répartition. Les libraires vivotent, le distributeur est solidaire de l’éditeur et espère ne pas avoir trop d’invendus donc de retours. L’éditeur doit, sur un premier tirage, payer toute la production, dont l’imprimeur qui ramasse 20 % du prix de détail, ne laissant qu’un maigre 15 % pour le reste.
Bref, personne ne fait beaucoup d’argent. Mais personne n’est malheureux non-plus !
Après cette longue introduction, rentrons dans le vif du sujet : Internet. Le nouveau Far West, où tout est permis. Où tout est gratuit. Où devrait l’être. Où ce qui ne le devrait pas l’est tout de même.
La plupart des éditeurs observent encore ce médium sans oser y plonger. Certains y voient un nouvel Eldorado : l’accès à un marché mondial devant générer d’intéressants revenus. D’autres n’y voient que le pillage de leur fonds par des individus sans scrupule.
Par contre tous font face aux mêmes demandes : celles des collèges et universités qui développent leurs activités en ligne. Que ce soit pour créer une bibliothèque virtuelle ou pour dispenser des cours à distance, ces institutions demandent de plus en plus d’avoir accès aux documents numériques plutôt qu’aux bons vieux livres en papier. Mais quelle valeur faut-il donner au virtuel ?
Reprenons le prix de détail. Celui-ci est fixé par l’éditeur qui sait pouvoir travailler avec une marge de 35 %. Évidemment, dans le cas d’une vente numérique, exit les intermédiaires : plus de libraire, plus de distributeur et plus d’imprimeur. Quelques factures qui, normalement, devraient avoir été amorties par les ventes régulières. Vœux pieux.
La plupart des contrats d’édition prévoient le partage à parts égales des droits dérivés d’un livre, donc en principe des ventes numériques. 50 % pour l’éditeur, 50 % pour l’auteur. De part et d’autre, on se frotte les mains. Sauf que…
[à suivre]

Travail garanti ou argent remis?

Est-ce une politique que les travailleurs autonomes, notamment en correction et révision linguistique, doivent adopter, à votre avis? Est-ce la vôtre?
Pour ma part, j’en ai subi les contrecoups une fois; il m’en a alors coûté 423 $, soit ce qu’aurait dû me rapporter le contrat de révision d’un texte qui n’était pas parfait. Plutôt dispendieux quand on commence dans le métier, n’est-ce pas? Comme c’était pour le compte d’un «gros client», j’ai accepté d’être «punie» de la sorte, dans l’espoir de le conserver. Je n’avais pas vraiment le choix, puisque je débutais et qu’il me fallait avant tout «sauver ma peau». Mais aujourd’hui, je me permets de considérer la situation sous un autre angle :
D’abord, y a-t-il quelqu’un qui puisse garantir la perfection de son travail, peu importe son métier? (Sûrement pas mon nettoyeur, en tout cas) Y en a-t-il qui peuvent assurer qu’ils ne feront jamais d’erreurs de toute leur carrière? Et en connaissez-vous qui sont convaincus de n’en avoir jamais fait? Ou qui sont certains de tout connaître, ce qui pourrait les empêcher de fauter (mais pas nécessairement non plus)? Si vous n’êtes pas la personne qui m’a gratifiée, il y a plusieurs années, du salaire dont j’ai fait état, vous avez sans doute répondu non à toutes ces questions, ou du moins à plusieurs.
Ensuite, bien que ce ne fût pas mon cas, essayez d’imaginer qu’une faute ait été laissée dans un ouvrage qui vous aurait demandé plusieurs mois de travail à temps plein… Le seul ouvrage, donc, sur lequel vous eussiez compter pour vivre durant cette période… Avec quoi paieriez-vous votre loyer (ou votre hypothèque) si, conformément à cette politique, vous ne deviez pas être rémunéré?
Imaginez maintenant ce qu’il pourrait vous en coûter si l’on vous demandait d’assumer une nouvelle édition d’un ouvrage à très grand tirage (ex. : un dictionnaire, le Code civil).
C’est le genre d’arguments que j’ai servis à un autre client il y a quelque temps. Parce que j’ai encore fait une faute, me direz-vous? Eh bien oui, ça peut encore m’arriver. Malgré tout, je me considère parmi les bons réviseurs. J’ai d’ailleurs suggéré à ce dernier client de «me laisser tomber» et de confier ses prochains contrats à quelqu’un d’autre. Mais je pouvais dès lors lui assurer que cet autre, un jour, ferait une erreur à son tour. Je me permis d’ajouter que s’il décidait de poursuivre avec moi, je ne pouvais même pas lui garantir de ne plus jamais faire d’erreurs. Certes, j’accroîtrais ma vigilance et je ne souhaitais pas que cette situation se reproduise. Mais, malgré cela, je ne pouvais savoir si une telle calamité ne m’arriverait pas de nouveau dans une semaine, un mois, un an ou trois. Ce pourrait alors tomber sur un autre client ou, malheureusement, encore sur lui (une calamité, vous dis-je). Car, avec les années, s’il y a une chose dont je suis assurée, c’est que je ne peux être parfaite tout le temps. C’est du moins ce qu’il m’a fallu accepter après bien des insomnies et des brûlures d’estomac.
Je travaille toujours pour ces deux clients. Le dernier m’a dit avoir apprécié le fait que je lui dise la vérité; d’abord, que j’étais bien fautive et que j’en étais sincèrement désolée. Je crois aussi qu’il a compris que je fais tout ce que je peux pour que mon travail soit le plus parfait possible, et cela, le plus souvent possible. Avec, comme résultat, une performance plus qu’acceptable, dans l’ensemble. Pour le reste – qui constitue plutôt l’exception que la règle –, il vaut mieux accepter que je ne suis qu’un être humain. Et vous?

Maxime-Olivier Moutier

Je ne pensais jamais écrire un billet sur cet auteur. Je pensais encore moins le faire de façon aussi positive. Pire, je ne pensais jamais relire un roman de Maxime-Olivier Moutier. Ses Lettres à mademoiselle Brochu sentaient la redite. Je l’avais lâché en plein milieu sans jamais le finir. Je trouvais qu’il était allé jusqu’au bout de son style incisif, nerveux, baveux et narcissique qui m’avait au préalable beaucoup interpelé dans son lucide recueil de nouvelles Risible et noir et touché dans son vibrant roman Marie-Hélène au mois de mars.
Grâce au Prix des libraires du Québec, j’ai lu le dernier Moutier qui marquait son retour à la vie littéraire après cinq ans d’absence. Et quel retour! En lisant Les trois modes de conservation des viandes on découvre un auteur d’une grande maturité en pleine possession de ses moyens. C’est la vie qui veut ça et c’est tant mieux. Cette maturité est palpable au détour de chaque phrase et c’est ce qui insuffle une telle force à ce roman inespéré. Le regard qu’il pose sur lui et sur les autres n’est plus le même qu’avant. Si son propos est toujours un peu provoquant, son écriture est maintenant plus nuancée, plus posée, plus réfléchie et beaucoup plus sentie. Ça se sent du début à la fin. Comme quoi un long temps d’arrêt peut parfois s’avérer salutaire pour un auteur.
Les trois modes de conservation des viandes m’a tant plus parce que j’ai aimé sa vision humaine, aimante et réaliste du couple et de la vie de famille. Son point de vue sur la paternité, en plus de m’apparaître assez juste, est à la fois percutant et touchant.
Au sujet du rôle des parents, il écrit ceci : « grâce au progrès, au siècle et à sa science, les enfants, ça n’entrave plus les désirs et le choix des adultes. Plus maintenant ».
Et de l’amour : « Car quand bien même je parlerais la langue des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien ».
C’est ça le nouveau Moutier et on a hâte au prochain.