Tous les articles par Eric Simard

David contre Goliath #2

À trop vouloir vaincre on finit par périr, c’est bien connu. Depuis hier, nous en avons une belle démonstration là où je travaille et c’est directement en lien avec la sortie du dernier tome d’Harry Potter en anglais.
Le géant d’en face annonce fièrement un prix dérisoire dans la vitrine de son magasin: 24.97 (au lieu de 45.00). Nous, n’ayant pas les moyens de descendre aussi bas et refusant surtout d’embarquer dans cette surenchère ridicule du prix le moins élevé, affichons discrètement notre 34.95 à l’intérieur de la librairie, ce qui n’est pas si mal. Si Goliaht raffle toute la mise, les invendus retourneront simplement chez le distributeur.
Cependant, Goliath, trop sûr de lui, n’avait pas prévu la tournure que pouvait prendre le combat. Il manque rapidement de stock dès la première journée de vente. Les fans avides de connaître les aventures du célèbre sorcier n’ont qu’à traverser la rue pour se le procurer. Ils sont tellement heureux de le trouver qu’ils ne rechignent en rien sur le prix demandé. David continue de fournir à la demande et pourra le faire encore plusieurs jours sans se saigner à blanc.
Pendant ce temps, Goliath affiche toujours aussi fièrement son prix imbattable.

Petite ritournelle

Il n’est vraiment pas rare d’entendre des gens prononcer cette phrase pendant qu’ils font le tour de la librairie:
J’ai de la misère à entrer dans une librairie sans m’acheter de livres!
Ce n’est jamais fait discrètement, il va sans dire. Ces gens-là ont besoin d’être entendu et veulent surtout impressionner les personnes qui les accompagnent.
C’est à peu près tout ce qu’ils font. Jamais je ne les vois acheter un seul livre.

Un air d’été

Voici quatre suggestions de lecture toutes ensoleillées qui égaieront vos journées d’été ou vos passages moroses.
La fin de l’alphabet, C.S Richardson (Alto) : Ambroise Zéphyr n’a qu’un mois à vivre. Plus de temps à perdre donc. Il décide de faire un tour du monde en respectant l’ordre de l’alphabet pour choisir ses destinations. Voilà la base de cette histoire qui, malgré un sujet grave, est tout à fait réjouissante. C’est le ton très anglais qui donne cette saveur à ce roman orignal. On peut parler d’un tour de force de la part de ce romancier canadien. Surtout que c’est un premier roman. Une autre réussite signée Alto.
Une vie merveilleuse/Une épouse presque parfaite, Laurie Colwin (Livre de poche) : Je dois la découverte de cette auteure américaine à ma collègue Dominique. Il y a quelques années Une vie merveilleuse m’avait ravi. Dernièrement, Une épouse presque parfaite m’a enchanté. Dans le premier, on suit l’évolution de deux couples, tout simplement. Si nous ne sommes pas toujours d’accord avec leurs façons de se comporter, on ne veut plus les quitter à la toute fin. Dans Une épouse presque parfaite, on suit le parcours de Polly (très beau personnage), mère, épouse et fille parfaite. Trop. Survient un événement dans sa vie qui fait basculer cette perfection. La grande qualité de Laurie Colwin est sa façon de saisir l’essence de ce que nous sommes. En quelques mots, elle parvient à décrire une situation complète ou à créer un personnage à part entière. Encore une fois, tout est dans le ton qu’emploie l’auteure. Sous une apparence légère se camouffle toujours une certaine gravité. C’est d’une finesse et d’une efficacité étonnante. Les amateurs d’Anna Gavalda, par exemple, sauront apprécier l’univers de Laurie Colwin. À découvrir si vous ne la connaissez pas.
Le soleil de Carla, Camille Pouzol (Planète filles/Hachette) : les adolescentes qui aiment le roman réaliste adoreront se plonger dans ce roman dont l’action se passe principalement en Corse. Carla, qui vient tout juste d’avoir 17 ans, nous relate cette première année passée dans cette contrée lointaine, forcée de quitter Paris et de suivre sa mère suite à la séparation de ses parents. Amours, peines, joies, tracas et petits bonheurs sont au rendez-vous sous le chaud soleil de la Corse. Même si la trame est conventionnelle, Camille Pouzol évite les clichés. Son personnage de Carla est très senti. On s’attache à elle, elle nous touche et on y croit à cette histoire de renoncements et de découvertes.

Winkie

Heureusement que j’ai fait la rencontre (que je dois à Antoine d’ailleurs) d’un attachant petit ours en peluche car je commençais à être découragé par la littérature. Ce sont mes lectures pour ados qui me ravissent le plus depuis quelque temps. Ça fait des mois que mon cœur et mon esprit ne se sont pas délectés en lisant un livre de grand. Grâce à Winkie, c’est chose faite.
Winkie, vous l’aurez peut-être deviné, c’est lui l’ours en peluche. C’est son histoire, parfois tragique, parfois tendre, que Clifford Chase a décidé de nous raconter. Au début, on assiste au procès de Mary alias Winkie accusé(e) de terrorisme. Déjà, son identité cause problème, ce qui ne fera qu’aggraver sa situation. Pas net, cet ours. Ajoutez à cela la mauvaise foi du juge et l’incompétence de son avocat, un certain Monsieur Unwin, et vous entrez dans un univers complètement absurde, con et tout de même charmant.
Le récit alterne entre le présent (le procès) et les souvenirs de l’ours en peluche alors que, du fond de sa cellule, il se remémore le bon vieux temps. Sa vie était un long fleuve tranquille, dans un cadre familial douillet et aimant. Au nom de la liberté, il se retrouve au banc des accusés.
Au début de ma lecture, j’avais peur que le roman s’essouffle rapidement. Bien au contraire. La fin du procès est jubilatoire. Clifford Chase ne s’est pas contenté d’écrire une histoire absurde. Il a créé un univers touffu sérieusement construit dans lequel gravite cet ours en peluche peu banal. Il évite le piège de la blague pour de la blague. L’humour est plutôt subtil. Il opère lorsqu’on reprend soudainement conscience que c’est d’un toutou dont il est question. En plus, le roman est truffé de références à la littérature ou à des pans de l’histoire et la justice américaine en prend pour son rhume, ce qui ne gâche rien.
Bref, c’est réussi, c’est bon et je vous le recommande. J’espère que vous allez être tenté par l’expérience Winkie, idéale en cette période estivale. Vous serez peut-être nombreux à vouloir faire comme moi : adopter ce pauvre petit ours!
Winkie, Clifford Chase, 10/18 (grand format)

Ensemble, c’est tout

L’important n’est pas de savoir si le film est meilleur ou non que le livre. L.important est tout le plaisir qu’on peut ressentir en présence de ces très beaux personnages qu’a su créer Anna Gavalda. De les retrouver sur grand écran hier m’a fait beaucoup de bien comme lorsque l’on retrouve des amis que l’on n’a pas vus depuis longtemps. Je suis sorti du cinéma avec le sourire aux lèvres et le coeur plein de vie. C’est exactement le sentiment que j’avais éprouvé après la lecture du roman. C’est ça la force de cette oeuvre romanesque.
Audrey Tautou, que je n’affectionne pas particulièrement, m’a eu. Sa Camille espiègle et fragile est crédible et touchante. Guillaume Canet dans le rôle de Franck est tout simplement remarquable. C’est presque toujours lui qui fait jaillir l’émotion du film. Mais, malgré sa grande prestation, ma révélation à moi est celle de Laurent Stocker dans le rôle de Philibert. Même si physiquement il diffère de celui qu’on pouvait retrouver dans le livre, l’âme et l’esprit qu’il insuffle à son personnage est tout à fait juste. On s’attache rapidement à lui et à sa bouille irrésistible. Françoise Bertin parvient à rendre attendrissante sa Paulette un peu grincheuse aux allures de Marguerite Duras.
C’est un beau quatuor d’acteurs que le film nous offre. Ils sont naturels et la chimie qui se crée entre eux est communicative. C’est en plein ce que ça prenait pour en faire une bonne adaptation. Je me dis que Claude Berri doit y être pour quelque chose.
Petits bémols pour les placements publicitaires pas vraiment subtils (ça m’a rappelé ceux qu’on trouvait dans Les invasions barbares): Gros plan sur une canette de Pepsi que boit Franck et sur la boîte d’un système de son JVC acheté par Camille, réplique inoubliable de Franck « je dois aller chez Rent rapporter la voiture » et gros plan sur le roman de Nathalie Rheims « Le cercle de Meggido » que lit Camille. Comble de hasard, Nathalie Rheims est l’une des productrices!
Sinon, ne bouder pas votre plaisir: lisez ou allez voir Ensemble, c’est tout! C’est encore permis de se faire du bien ;-)

Collage littéraire

Le jour même où je mettais en ligne mon billet sur le premier anniversaire de mon carnet, Louise en profitait pour parler de Cher Émile de façon toute personnelle. À partir de mes mots, elle a composé un poème qui rend très bien l’univers de mon roman. Ce qu’elle ne sait pas de moi, c’est que je suis un grand amateur de collages, qu’ils soient de papier ou de mots. Son texte m’a beaucoup touché et m’a fait d’autant plus plaisir. Je le partage avec vous à mon tour:
UNE RIVIÈRE PERDUE DANS
UNE PETITE FORÊT ISOLÉE
DU RESTE DU MONDE
Dans les eaux boueuses de mon enfance.
Chape de plomb qui recouvrent mes épaules.
MOI-MOI-MOI
Ça sert à quoi le petit réconfort à la gomme ?
Ton silence vient d’ouvrir la voie de la vérité.
Mon îlot, mon refuge et mon phare
dans cette mer obscure du vide.
Merci d’être là—merci d’exister.
Dans un cul-de-sac
aux abords de mon existence
au coeur même de la lucidité.
Douter de l’immuable
Une issue ?
Prends soin de toi Émile.
Je t’embrasse XXX.
Peut-être que j’écris des mots
simplement pour écrire des mots
et que le reste
je m’en fiche !
Mon esprit machiavélique en serait capable.
***
(Ferré a dit ça aussi…dans SES mots)
Je remonterai prendre une bouffée d’air.
Comme un touriste fasciné par ce qu’il découvre.
Hier soir, j’ai porté le monde en moi, il était léger….

Merci encore Louise!
Je mets en lien trois autres excellents commentaires que Cher Émile a su susciter sur la blogopshère. Ceux de Virge, Carole et Jules.

Bilan

Ça fait déjà un an que mon carnet existe. Je ne sais pas pourquoi, mais dès que j’ai su que Septentrion offrait une plateforme de publication à ses auteurs, j’ai tout de suite eu envie d’en avoir une. Je dis que je ne sais pas pourquoi parce que je ne connaissais pratiquement rien à la blogosphère. Je savais seulement que c’était une façon personnelle de plus en plus populaire de rejoindre les gens. En plein la tribune que je cherchais depuis longtemps.
Avant même d’avoir mon code d’accès, j’avais décidé que je voulais en faire un espace voué uniquement à la culture. Mon but était de favoriser les échanges entre vous et moi. 84 billets plus tard, je n’ai toujours pas dérogé au mandat que je m’étais donné au départ et 456 commentaires plus tard, je peux dire que mon objectif a été atteint.
Ce qui me réjouit le plus est de savoir que mon carnet a su trouver un écho chez beaucoup de gens. Je vous avoue qu’au début, devant le peu de réactions que suscitaient mes billets, j’étais un peu déçu. Je comparais mon nombre de commentaires à celui de d’autres blogues et j’espérais en avoir autant. Quand je regarde la qualité des commentaires qu’on me soumet, ce désir-là n’existe plus. Je sais maintenant que vous êtes nombreux à ne pas laisser de trace de votre visite. C’est parfait comme ça. L’important est d’être lu et de peut-être semer un petit quelque chose au passage. L’achalandage ne se mesure pas uniquement aux commentaires laissés. Ça, on le comprend au fil du temps qui passe.
Loin d’être essoufflé, j’ai encore plein de choses à écrire sur la culture. J’ai même un carnet de notes dans lequel j’accumule des idées qui nourriront mes futurs billets. Je ne sais pas si je suis devenu accro de la blogosphère, mais de mon carnet, oui. J’ai trouvé mon rythme de croisière qui est celui d’écrire un billet à tous les 3 ou 4 jours. C’est intégré à ma routine. Je consacre en moyenne une heure à la rédaction de chacune de mes notes. J’ai appris à soupeser mes mots même lorsqu’ils vont vers la controverse pour éviter les débordements. Je pourrais facilement l’alimenter, cette controverse mais ce serait trop facile et je n’en ai pas toujours envie. Je préfère vous voir réagir parce que vous vous sentez interpellés par ce que j’écris. C’est ça le plus important.
Pour cet an deux qui commence, j’espère que je vais pouvoir continuer de compter sur votre fidélité. Quant à moi, je vais continuer de vous offrir ce que je vous offre depuis le début avec toute la rigueur qui me caractérise.
Merci d’être là!

Histoires sans fin #2

Pire que les déceptions, ce sont ces livres qu’on abandonne avant la fin. Quelques uns d’entre eux ont croisé ma route dernièrement. Brièvement, ma route.
Je voudrais tant que tu te souviennes, Dominique Mainard (Joelle Losfeld) : j’avais très envie de lire ce roman et de découvrir du même coup cette auteure. Le sujet un peu étrange, flirtant avec le conte, m’interpelait. Dès la première page, j’ai presque su que ce n’était pas pour moi. L’écriture de Dominique Mainard est irréprochable et très belle. Elle sait créer des ambiances fortes. Malgré tout ça, je ne suis pas parvenu à m’attacher à ses personnages et à son univers étrange. C’est du vent que je lisais. J’avais l’impression que tout ça ne mènerait à rien. Même si je ne l’ai pas terminé, je me dis que j’avais certainement raison de le croire.
Après Shanghai, Judith Brouste (Gallimard) : Jours de guerre, son précédent roman, avec sa drôle d’histoire d’amour entre une femme et un clochard, m’avait beaucoup touché. Je surveillais attentivement la prochaine parution de Judith Brouste. Arrive enfin cet Après Shanghai. Les premières pages m’ont donné l’impression que je renouais avec ce que j’avais aimé de l’autre. Impression de trop courte durée. Cette histoire pas très intéressante et ennuyante d’un médecin volontaire m’a vite lassé.
Chinoiseries, Claude Jasmin (vlb éditeur) : pourquoi lire le nouveau Claude Jasmin? Par désir de me replonger dans son écriture, retrouver l’auteur de l’excellent Pleure pas, Germaine, m’intéresser au nouveau matériel d’un auteur qui nous a donné de belles pages de notre littérature, ne pas bouder sans savoir en pensant que le meilleur est derrière lui. Et Chinoiseries avait l’air pas mal. Malgré toutes mes bonnes intentions, je n’ai pas réussi à le terminer. Ce roman, qui oscille entre la jeunesse et la vieillesse du personnage principal, bien qu’abordant des thèmes très riches, n’est jamais parvenu à me convaincre. L’écriture de Jasmin m’a paru faible et parfois un peu trop naïve et maladroite.
Les vivants et les morts, Gérard Mordillat (Livre de poche) : depuis sa sortie en grand format, ce roman de 900 pages m’attirait. Le format poche traînait sur ma pile depuis un an. J’attendais le bon moment. La semaine dernière, l’été frappant à notre porte, je me décidais à plonger dans ce roman fleuve où m’attendais, croyais-je, une belle chronique familiale touchante. C’est plutôt une chronique sociale un peu aride qui se cachait derrière ce magnifique titre. L’auteur dépeint très bien le milieu ouvrier français avec la dureté qu’il faut dans ce genre de contexte, mais ce n’est pas vraiment le genre de sujet qui me passionne.

De belles rencontres #2

Mon métier de libraire m’a encore permis de faire une autre belle rencontre en la personne de Monsieur Antoine Boussin, directeur commercial de chez Grasset. En fait, je le connaissais déjà un peu pour l’avoir vu à quelques reprises à la librairie ou au salon du livre, mais c’est la toute première fois que j’avais la chance de dîner en sa compagnie.
Je n’étais pas le seul chanceux car une quinzaine de libraires privilégiés ont été conviés au réputé restaurant Le Saint-Amour* pour la présentation de la rentrée automnale de la prestigieuse maison d’édition que Monsieur Boussin dirige depuis sept ans.
De la dizaine de titres présentés, deux ont particulièrement retenus mon attention : Un effondrement de Ghislaine Dunant et L’année de la pensée magique de Joan Didion. Le premier traite de la dépression et le second du deuil. Sujets légers comme je les aime.
Ce que l’on retiendra de cette rencontre, outre le fait d’avoir envie de lire tous ces livres, c’est le plaisir communicatif d’Antoine Boussin. Doté d’un charisme fou, il séduit tout le monde par sa passion débordante, sa verve colorée, son sens de l’humour subtil, son esprit vif, sa joie de vivre évidente et par son côté humain qui vient lier tout le reste. Bref, un homme de très agréable compagnie qu’on voudrait pouvoir côtoyer plus souvent.
Comme il aime de plus en plus le Québec, on peut espérer le voir au moins une fois par année. Avec mon inimitable imitation du chant de gorge, vous pouvez être certains qu’il reviendra peut-être plus tôt que prévu! Mes consœurs de chez Clément-Morin et de chez Vaugeois pourraient d’ailleurs vous le confirmer.
D’ici là, avec ses Donner, Labrune, Boyle, Châteaureynaud, Dantzig, Dupont-Monod, Didion, Dunant et Slouka, il y a de quoi occuper notre automne!
*l’élégance d’asperges et les pétoncles de la Gaspésie étaient un pur délice

Deception point #3

Les enchantements littéraires se font rares depuis quelques mois. Par contre, les déceptions continuent de croiser mon chemin.
J’en ai pour preuve ces quelques titres :
La traversée de l’été de Truman Capote (Grasset) : ce roman inédit de l’auteur, écrit alors qu’il n’avait que 19 ans, n’aurait jamais dû voir le jour. D’ailleurs, c’était le souhait de Truman Capote. Pour des questions mercantiles (j’imagine), on a fait fi de ses dernières volontés et on a publié ce roman mièvre et dépassé mettant en scène une jeune fille de bonne famille de 17 ans cherchant l’amour. Un titre qui vient entacher la bibliographie de ce grand romancier.
Le moindre des mondes de Sjon (Rivages) : une œuvre qui semble être le fruit d’un auteur islandais totalement inconnu. Pourtant, Sjon est le plus fidèle parolier de Björk, d’où mon intérêt pour ce court roman en prose. Hélas, je suis resté sur ma faim. Le moindre des mondes est une espèce da fable nordique très aride. Le texte m’a rappelé certaines légendes inuit. Vraiment pas ma tasse de thé.
La ville sans nom de Christiane Duchesne (Boréal) : premier tome de la trilogie Voyage au pays du Montnoir dans laquelle Christiane Duchesne se serait totalement investie, La ville sans nom ne remplit vraiment pas ses promesses. Je ne sais pas comment j’ai fait pour lire les 349 pages qu’il contient. Seule la grande qualité d’écriture de l’auteure sauve la mise. Pourtant, l’idée de départ a tout pour intéresser. Pierre Moulin passe à travers une pierre fendue et se retrouve dans une ville qu’il ne connaît pas. Où est-il? Que fait-il là? Qui est cet étrange personnage? Habituellement, dans la plupart des romans fantastiques flirtant avec cette idée, on répond à ces questionnements très rapidement. À la page 220, on n’a pas encore résolu ce mystère : « D’où venait-il vraiment, ce garçon hébergé par Julius? La question l’obsédait et l’empêchait de dormir ». Dois-je en rajouter davantage?
Le retour de Bernhard Schlink (Gallimard) : voici la déception des déceptions. Le dernier roman de Schlink était celui que j’attendais le plus ce printemps. Je garde un souvenir intense de son succès mondial Le liseur et un souvenir impérissable de son excellent recueil de nouvelles Amours en fuite. Dans Le retour, qui raconte le parcours d’un homme à la recherche de son père qu’il n’a pas connu, Schlink, à défaut de le captiver, finit par ennuyer et égarer le lecteur en digressions de toutes sortes. Jusqu’à la fin, après de longs moments de persévérance, on ne comprend toujours pas quel était le but de l’auteur. On dirait bien que son sujet a fini par lui échapper complètement. Vraiment dommage.