La rue Sainte-Anne vers 1807

 

Cette gravure de George Heriot nous permet de voir une perspective tout à fait inédite de Québec. L’artiste se trouvait en bordure de la rue Sainte-Anne, adossé à la redoute Royale (aujourd’hui Morrin Centre), sur le terrain qui allait être occupé à partir de 1810 par l’église presbytérienne St. Andrew. Le terrain semble être transformé en chantier de construction. Peut-être s’affaire-t-on à construire justement la future église écossaise. De l’autre côté de la rue, derrière le mur de pierre, se trouve l’ancienne propriété des Jésuites. L’espace aujourd’hui occupé par l’ancienne Académie commerciale était alors un terrain boisé. À l’arrière-plan, on aperçoit le collège des Jésuites, transformé en caserne militaire, de même que leur chapelle qui était utilisée, quant à elle, en dépôt de munition. Elle sera démolie en 1807. Encore plus en arrière, on devine la cathédrale catholique Notre-Dame. Au loin se profilent la côte de Beaupré, l’île d’Orléans et la Pointe-de-Lévy. Cette gravure est conservée à Bibliothèque et Archives Canada et elle est intitulée «Scène près de la Grande Batterie [sur la rue des Remparts]». Il s’agit évidemment d’une erreur.

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Iconographie : La rue Sainte-Anne avec vue sur le collège des Jésuites vers 1807, aquarelle de George Heriot, Bibliothèque et Archives Canada, négatif no C-151100.

Source de l’article: Page Facebook de la Société historique de Québec.

L’ancienne rue du Parloir

 

Aux petites heures du 29 novembre 1841, il y a 175 ans, le bureau de poste de Québec était détruit par un incendie. Les pertes sont importantes puisque le courrier et les archives sont alors détruits. Ce bureau était situé sur la rue du Parloir. Pourtant, on n’a jamais vu de bureau de poste situé sur la rue du Parloir actuelle. Elle a toujours été occupée par le monastère des Ursulines et par des résidences privées. En fait, il y a eu une époque où la ville de Québec avait deux rues du Parloir. Celle qui accueillait le bureau de poste amorçait sa course sur la rue des Remparts, au sommet de la côte de la Montagne. Située derrière la cathédrale catholique, il s’agissait d’une rue sans issue, se butant au Séminaire de Québec. À la suite de l’incendie, le bureau de poste sera temporairement logé dans l’édifice du parlement de la côte de la Montagne avant d’être relocalisé, en 1845, dans l’édifice du Chien-d’Or. Il se trouve toujours aujourd’hui sur le même terrain. Quant à la rue du Parloir, elle disparaîtra. En effet, en 1843, Mgr Signay achetait le terrain vacant où se trouvait le bureau de poste incendié pour y construire le nouveau palais épiscopal. De nos jours, il est toujours occupé par l’archevêque et c’est son stationnement qui occupe l’ancienne rue du Parloir.

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Iconographie : Localisation de l’ancienne rue du Parloir, extrait de la carte «Plan of the City of Quebec» d’Alfred Hawkins, 1840, BAnQ, G,3454,Q4,1840,H38 CAR.

Source de l’article: Page Facebook de la Société historique de Québec.

Le blockhaus avancé de la citadelle temporaire

 

Parmi tous les marquages au sol qu’on retrouve à Québec, il en existe un sur les plaines d’Abraham. Il est situé au sud-ouest de la citadelle, en bordure de la falaise et en contrebas de l’avenue Cap-aux-Diamants. Il rappelle la présence à cet endroit d’un ancien blockhaus britannique construit en 1782 à la suite de l’invasion américaine de 1775. On craignait que les Américains tentent une nouvelle invasion. La citadelle n’existait pas encore. On construit donc une série d’ouvrages de défense pour occuper les «hauteurs d’Abraham» comme on désignait alors l’endroit le plus élevé de Québec. De plus, depuis cet ouvrage, on avait une vue imprenable sur le fleuve et la rive sud. Il s’agissait d’un petit bâtiment de deux étages en bois avec des fondations de maçonnerie. Il était constitué de deux corps de logis : un plus petit pour les officiers et un second pour les soldats. Le deuxième étage était plus grand que le rez-de-chaussée, de sorte qu’il faisait saillie sur celui-ci. Par des ouvertures pratiquées dans le plancher en saillie, les soldats auraient pu faire feu sur des assaillants qui se seraient aventurés jusqu’au pied du bâtiment. Des hommes y seront logés jusqu’à l’époque de la Guerre de 1812-1814 alors qu’il est détruit par un incendie, vraisemblablement accidentel. Entre 2006 et 2009, des fouilles archéologiques y ont été menées. Outre les vestiges du blockhaus proprement dit, on a découvert beaucoup de boutons d’uniforme militaire et des restes alimentaires tels des os de bœuf, d’agneau, de porc, de poulet, de poisson et de crustacé. Un beau rappel historique à aller voir.
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Photographie : Marquage au sol du blockhaus avancé de la citadelle temporaire, J.F. Caron.Source de l’article: Page Facebook de la Société historique de Québec.

Nos auteurs au Salon du livre de Montréal 2016

 

 

Nos auteurs et notre équipe sont revenus du Salon du livre de Montréal encouragés par toutes ces merveilleuses rencontres. Merci à tous les lecteurs qui se sont déplacés !

 

Jean-Pierre Charest et Jean Cloutier

Les Bateaux-phares du Saint-Laurent

En aval de Québec, 1830-1963

SLM CHAREST CLOUTIER

Raymonde Beaudoin

La Vie dans les camps de bûcherons au temps de la pitoune

Deuxième édition

SLM BEAUDOIN

Robert Aird et Marc-André Robert

L’Imaginaire comique dans le cinéma québécois

1952-2014

SLM AIRD ROBERT

Ginette Chenard

Le Sud des États-Unis

SLM CHENARD

Yvon Codère

Contes et mystères de la forêt , nouvelle édition

Échos des Premières Nations

SLM CODÈRE

Martin Fournier

Les Aventures de Radisson, tome 3

L’année des surhommes

SLM FOURNIER

Yvon Desloges

Sous les cieux de Québec

Météo et climat, 1534-1831

SLM DESLOGES

Joseph Gagné

Inconquis

Deux retraites françaises vers la Louisiane après 1760

SLM GAGNÉ

Benoît Grenier

Nouveaux regards en histoire seigneuriale au Québec 

SLM GRENIER

Julie Guyot

Les Insoumis de l’Empire

Le refus de la domination coloniale au Bas-Canada et en Irlande

SLM GUYOT

Jocelyn Saint-Pierre

La Tribune de la presse à Québec après 1960

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Jean-Charles Panneton

Le Gouvernement Lévesque, tome 1

De la genèse du PQ au 15 novembre 1976

SLM PANNETON

Nicolas Bertrand

Une école à la dérive

Essai sur le système d’éducation au Nunavik

nicolas_bertrand (Marie-Christine Poutré)

Éric Poirier

La Charte de la langue française

Ce qu’il reste de la loi 101 quarante ans après son adoption

eric_poirier (Édith Poudrier)

Élisabeth Vallet, Frédérick Gagnon et Ginette Chenard en animation avec Guillaume Lamy

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Salon du livre de Montréal 2016

Plusieurs de nos auteurs seront présents au Salon du livre de Montréal cette année. Ils se feront un plaisir de signer vos exemplaires ou simplement d’échanger avec vous! Voici l’horaire des auteurs du Septentrion (stand 400):

Jeudi 17 novembre

17h-18h : Julie Guyot (Les Insoumis de l’Empire)L97828944887371

18h-19h : Yvon Desloges (Sous les cieux de Québec)

18h30-19h30 : Éric Poirier (La Charte de la langue française)

19h-20h : Jocelyn Saint-Pierre (La Tribune de la presse à Québec depuis 1960)

19h30-20h30 : Jean-Charles Panneton (Le Gouvernement Lévesque, tome 1)

 

Vendredi 18 novembre

13h-14h : Yvon Codère (Contes et mystères de la forêt)

14h-15h : Joseph Gagné (Inconquis)

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14h30-15h30 : Ginette Chenard (Le Sud des États-Unis)

15h-16h : Nicolas Bertrand (Une école à la dérive)

15h30-16h30 : Martin Fournier (Les Aventures de Radisson, tome 3)

18h-19h : Jean-Charles Panneton (Le Gouvernement Lévesque, tome 1)

18h30-19h30 : Jocelyn Saint-Pierre  (La Tribune de la presse à Québec depuis 1960)

19h-20h : Jean Cloutier et Jean-Pierre Charest (Les Bateaux-phares du Saint-Laurent)

19h30-20h30 : Nicolas Bertrand (Une école à la dérive)

 

 Samedi 19 novembre

10h30-11h30 : Yvon Codère (Contes et mystères de la forêt)

12h30-13h30 : Joseph Gagné (Inconquis)

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13h-14h : Benoît Grenier (Nouveaux regards en histoire seigneuriale au Québec)

13h30-14h30 : Martin Fournier (Les Aventures de Radisson, tome 3)

14h30-15h30 : Jean Cloutier et Jean-Pierre Charest  (Les Bateaux-phares du Saint-Laurent)

15h-16h : Jocelyn Saint-Pierre  (La Tribune de la presse à Québec depuis 1960)

15h30-16h30 : Marc-André Robert et Robert Aird  (L’Imaginaire comique dans le cinéma 

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16h-17h : Ginette Chenard (Le Sud des États-Unis)

16h30-17h30 : Julie Guyot (Les Insoumis de l’Empire)

18h30-19h30 : Yvon Desloges (Sous les cieux de Québec)

19h-20h : Jean Cloutier et Jean-Pierre Charest  (Les Bateaux-phares du Saint-Laurent)

19h30-20h30 : Jean-Charles Panneton (Le Gouvernement Lévesque, tome 1)

 

Dimanche 20 novembre

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10h30-11h30 : Nicolas Bertrand (Une école à la dérive)

14h-15h : Yvon Desloges (Sous les cieux de Québec)

14h30-15h30 : Yvon Codère (Contes et mystères de la forêt)

15h-16h : Marc-André Robert et Robert Aird (L’Imaginaire comique dans le cinéma québécois)

15h30-16h30 : Joseph Gagné (Inconquis)

16h-17h : Raymonde Beaudoin (La Vie dans les camps de bûcherons au temps de la pitoune)

16h15-17h à l’Agora: Animation Comprendre les États-Unis avec Élisabeth Vallet (Comprendre les élections américaines), Ginette Chenard (Le Sud des États-Unis) et Frédérick Gagnon (Les États-Unis d’Amérique)

18h-19h : Raymonde Beaudoin (La Vie dans les camps de bûcherons au temps de la pitoune)

Le troisième lien

 

Depuis quelques mois, il a beaucoup été question dans l’actualité d’un troisième lien entre les deux rives de la capitale. Chacun a son plan. Pourtant l’idée n’est pas nouvelle. En effet, en 1968, la firme d’ingénieurs-conseils Jobin & Vandry proposait un plan autoroutier absolument démentiel pour une ville de moins d’un demi-million d’habitants et qui ne s’accroissait à peu près pas. Heureusement, seul l’autoroute Dufferin-Montmorency a été réalisée. On proposait alors l’autoroute de la Falaise qui aurait longé le versant nord sur Saint-Vallier, Arago et Charest, de l’ancien cinéma Odéon jusqu’à l’autoroute Duplessis. Le tunnel Dufferin aurait traversé la haute-ville, sous la terre, jusqu’au boulevard Champlain. L’autoroute Saint-Charles aurait traversé Limoilou, d’est en ouest, entre les autoroutes de la Capitale et de la Falaise. L’autoroute Laurentienne aurait continué sa course à travers Saint-Sauveur pour se déverser en haute-ville sur les avenues De Salaberry et Turnbull, et ce, grâce à des bretelles comme on en retrouve aujourd’hui sur Dufferin-Montmorency. Enfin, un pont, le fameux troisième lien, aurait rejoint l’autoroute Jean-Lesage (aut. 20) depuis la pointe à Carcy dans le vieux port. Et c’est sans compter plusieurs artères de la haute-ville qui auraient été transformées en grands boulevards urbains. Heureusement, ce cauchemar est demeuré un rêve.

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Pour les détails, voir :
http://www.quebecurbain.qc.ca/…/le-reseau-demesure-dautoro…/

Source de l’article: Page Facebook de la Société historique de Québec.

Iconographie : Représentation partielle du rêve des ingénieurs Jobin et Vandry.

Château Frontenac, 1911

 

On dit du Château Frontenac que c’est l’hôtel le plus photographié au monde. C’était probablement aussi le cas à ses débuts. Toutefois, à cette époque comme aujourd’hui, on nous le présente généralement depuis la rive sud, le fleuve Saint-Laurent ou la terrasse Dufferin. Ce qui donne toute sa valeur à cette photographie, c’est qu’elle est prise depuis la rue Saint-Louis, en bordure de la place d’Armes. La rue des Carrières apparaît à l’arrière-plan. On comprend que la tour centrale et l’aile Saint-Louis, qui borde aujourd’hui la rue éponyme, n’ont pas encore été construites. Le cliché a été réalisé le 13 octobre 1911.

Ce matin-là, le prince Arthur, duc de Connaught et troisième fils de la reine Victoria, débarque à Québec pour prendre son poste de gouverneur général du Canada. À la suite de son assermentation au parlement, il se rend au Château Frontenac où un déjeuner est servi en son honneur. Ces agapes expliquent la présence de la banderole au-dessus de l’entrée de l’hôtel et sur laquelle on lit «Welcome to his Royal Highness».

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Texte : Jean-François Caron

Source de l’article: Page Facebook de la Société historique de Québec

Photographie : Le Château Frontenac en 1911, photographe inconnu, collection, J.F. Caron.

La saucisse Lafleur

 

Tous les comptoirs de boucherie des épiceries du Québec offrent la saucisse Lafleur. Tout le monde la connaît, mais moins de gens savent que cette charcuterie est née dans le quartier Limoilou à Québec.

C’est en 1912 qu’Alphonse Lafleur ouvre une boucherie sur la 5e Rue du quartier Limoilou. Rapidement, il développe des spécialités de saucisses et de charcuteries. Face au succès de sa petite entreprise, il agrandit sa boucherie en acquérant les lots voisins de son commerce. Sa réputation s’étend désormais à toute la ville de Québec. Il achète des camions et se lance dans le commerce en gros. À la suite de son décès survenu en 1934, ses fils Raymond et Gérard prennent la relève et relance l’entreprise sur des bases industrielles. En 1972, la boucherie de Limoilou fusionne avec la compagnie J.N. Brochu de Saint-Henri-de-Lévis. Malgré une nouvelle fusion avec le groupe Olymel en 2005, la bonne saucisse créée par Alphonse Lafleur est toujours en vente.

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Photographie : La boucherie Lafleur de la 5e Rue de Limoilou vers 1930, Archives du groupe Olymel.

Source de l’article : Page Facebook de la Société historique de Québec
Source d’information : Réjean Lemoine, «Limoilou, un quartier effervescent», Les Éditions GID, 2014, p. 104.

 

Pont de Québec, 11 septembre 1916

 

Le 11 septembre 1916 s’annonce un jour de fête à Québec puisque, ce jour-là, on va procéder à l’installation de la travée centrale du pont de Québec. Construite dans l’anse deSillery, cette travée réunit les deux bras cantilever et représente la fin de la construction du pont. Plus de 100 000 personnes sont au rendez-vous à Québec pour ne rien manquer de cette opération que l’on réalise pour la première fois dans l’histoire. Les curieux sont massés sur les deux rives et plusieurs ont même pris place dans des embarcations pour être aux premières loges. À 8h50, les quatre crics hydrauliques commencent à actionner les huit suspentes et la travée commence son ascension. Soudain, on entend un craquement épouvantable et on voit cette section se tordre, se ployer, puis s’engouffrer avec fracas dans les profondeurs du fleuve. La tragédie, la deuxième qui se déroule sur le pont, fait plusieurs victimes: 13 morts et 14 blessés. La catastrophe sera attribuée à un défaut dans le moulage d’un support cruciforme de la travée centrale.

Source de l’article : Facebook de la Société historique de Québec

Pour en savoir plus : Le Pont de Québec de Michel L’Hébreux

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Photographie sur carton, don de Charles-Eugène Béland, collection Jacques Boutet

Tiré du Calendrier des vues anciennes de Québec – Septembre 2016

 

Conclusion. Les aventures de Radisson – Supplément numérique

 

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Couverture Radisson T3CONCLUSION

Contexte historique de L’année des surhommes

L’implantation permanente des Français dans la vallée du Saint-Laurent – Champlain fonde Québec en 1608 – repose sur la traite des fourrures, plus précisément sur le commerce des fourrures de castor. Les artisans européens fabriquaient avec cette fourrure un feutre de grande qualité qui servait à la confection de chapeaux portés par les riches aristocrates et les bourgeois. Cette activité était très lucrative.

Comme le commerce des fourrures nécessitait la participation des Amérindiens, qui chassaient le castor et apprêtaient les peaux, Champlain a cru bon de nouer dès 1609 une alliance privilégiée avec les Hurons, qui mettaient à profit le réseau de partenaires commerciaux qu’ils avaient constitué depuis des décennies, bien avant l’arrivée des Européens, pour acquérir et apporter beaucoup de fourrures aux Français. Dans les années 1630, cette alliance a été renforcée. À cette époque, les Hurons fournissaient environ la moitié des fourrures de castor que les Français de la colonie expédiaient en Europe. Les Hurons étaient aussi une nation sédentaire qui pratiquait l’agriculture et, de ce fait, était jugée plus proche des Français que les nations autochtones nomades de chasseurs-cueilleurs.

En 1639, les missionnaires jésuites établissent une mission permanente au pays des Hurons. Leur objectif est de les convertir au catholicisme et, si possible, d’en faire presque des Français. Cette mission religieuse se double bien sûr d’un volet commercial axé sur la traite des fourrures. Mais le projet tourne mal. La transformation que veulent imposer les jésuites est trop radicale et plusieurs Hurons s’y opposent. Les Français apportent aussi, sans le savoir, des maladies bénignes pour les Européens, mais mortelles pour les Amérindiens qui n’ont pas développé les anticorps qui les protégeraient de ces maladies jusque-là inconnues en Amérique. Enfin, les Français, qui sont en minorité parmi les Hurons, hésitent à leur fournir des armes à feu, afin de conser- ver leur suprématie dans un milieu sous tension. Au bout de dix ans, en 1649, la communauté huronne est diminuée par les maladies et profondément divisée sur la présence des Français parmi eux.

En 1639, les missionnaires jésuites établissent une mission permanente au pays des Hurons. Leur objectif est de les convertir au catholicisme et, si possible, d’en faire presque des Français. Cette mission religieuse se double bien sûr d’un volet commercial axé sur la traite des fourrures. Mais le projet tourne mal. La transformation que veulent imposer les jésuites est trop radicale et plusieurs Hurons s’y opposent. Les Français apportent aussi, sans le savoir, des maladies bénignes pour les Européens, mais mortelles pour les Amérindiens qui n’ont pas développé les anticorps qui les protégeraient de ces maladies jusque-là inconnues en Amérique. Enfin, les Français, qui sont en minorité parmi les Hurons, hésitent à leur fournir des armes à feu, afin de conserver leur suprématie dans un milieu sous tension. Au bout de dix ans, en 1649, la communauté huronne est diminuée par les maladies et profondément divi- sée sur la présence des Français parmi eux.

C’est à ce moment que leurs ennemis de longue date, les Iroquois, profitent de leur accès privilégié aux marchandises européennes que leur fournissent les Hollandais établis près de leur pays, dans les villes actuelles de New York et d’Albany, pour attaquer les Hurons affaiblis. Notamment grâce aux centaines d’armes à feu qu’ils ont acquises, les Iroquois remportent une victoire totale. En deux offensives successives, en 1649 et 1650, ils anéantissent le pays des Hurons. Les partisans des Français sont massacrés, ou prennent la fuite dans toutes les directions, et les Hurons qui s’étaient opposés aux Français sont adoptés par les Iroquois. Après 1650, le rôle des centaines de survivants hurons, dispersés entre Québec et des affluents du Mississippi, à l’ouest du lac Supérieur, sera parfois précieux (notamment lors des négociations de la Grande Paix de Montréal, en 1701), mais jamais comparable à l’influence que cette puissante nation exerçait avant 1650.

Le vide créé par la défaite et la dispersion des Hurons aura un impact majeur. Forts de leur grande victoire, les Iroquois feront la chasse aux Français et aux alliés autochtones des Hurons et des Français, qui se déplacent en majorité vers l’ouest, dans des régions fort éloignées du pays des Iroquois. Les Français ignorent tout de ces régions. La traite des fourrures s’effondre alors et les quelque 2 000 habitants de la jeune Nouvelle-France plongent dans une crise qui ne se résorbera complètement qu’en 1667, lorsque Français et Iroquois feront la paix.

Même si d’autres sources d’approvisionnement en fourrures existent dans les années 1650, la situation est si critique qu’une partie des Français de la colonie craignent purement et simplement de devoir abandonner la Nouvelle-France. C’est dans ce contexte que Radisson et Des Groseilliers jouent un rôle crucial. Des Groseilliers est le premier à raccompagner dans les Grands Lacs un groupe d’Amérindiens venus s’approvisionner dans la colonie en 1654, afin de lutter à armes égales contre les Iroquois. Lors de ce voyage de deux ans, Des Groseilliers explore le lac Michigan et une petite partie du lac Supérieur. Il ramène en 1656 une abondante cargaison de fourrures qui sauve la Nouvelle-France de la ruine.

En 1659, la trêve entre Français et Iroquois qui avait facilité le premier voyage de Des Groseilliers est terminée. Les Iroquois ont repris les hostilités. Le second voyage de Des Groseilliers, cette fois accompagné de Radisson, est donc beaucoup plus périlleux. Ces deux beaux-frères (Des Groseilliers est marié à l’une des sœurs de Radisson) raccompagnent encore une fois un groupe d’Amé- rindiens venus s’approvisionner dans la colonie en marchandises françaises. Cette fois, les deux beaux-frères explorent ensemble une grande partie du lac Supérieur. Ils se rendent même plus à l’ouest, jusqu’au pays des Sioux, et ils participent à un grand rassemblement autochtone qui a pour objectif principal de réorganiser le réseau de partenaires autochtones qui pratiquent la traite des fourrures. La majorité des Premières Nations que Radisson et Des Groseilliers rencontrent lors de ce voyage n’ont jamais eu de contacts avec des hommes blancs.

Au-delà du succès commercial que remportent Radisson et Des Groseilliers en 1660, en ramenant une quantité record de fourrures qui sauve de nouveau la colonie de la ruine, ce périple marque une étape importante dans l’évolution des relations entre les Français et leurs alliés des Premières Nations.

Champlain, en son temps, avait bien évalué le rôle que le petit nombre de Français de la Nouvelle- France pouvaient jouer auprès des partenaires autochtones avec lesquels ils transigeaient. Il leur a offert d’agir en arbitre, en conseiller, en promoteur de la paix, tout en s’engageant à combattre à leurs côtés si c’était nécessaire. Il leur promettait surtout de les approvisionner en marchandises françaises.

Par la suite, les jésuites et les autorités de la colonie ont modifié cette forme de partenariat relativement équilibrée, qui respectait la culture et la gouvernance autochtones. Les missionnaires ont tenté d’imposer une transformation profonde des communautés autochtones. En 1650, après l’échec de la mission jésuite en Huronie, puis de nouveau en 1657, après le nouvel échec de la mission que les jésuites ont brièvement établie au pays des Iroquois, à la faveur de la trêve entre ces deux nations (voir le tome 2 des Aventures de Radisson), Des Groseilliers et Radisson avaient assez d’expérience et connaisaient suffisamment les Premières Nations pour savoir qu’il fallait revenir à la relation d’alliance plus équilibrée du temps de Champlain.

Comme le raconte Radisson dans son récit de voyage au lac Supérieur, les deux beaux-frères ont proposé aux Amérindiens une alliance plus réaliste, moins envahissante, qui deviendra la politique officielle de la Nouvelle-France à l’égard des Premières Nations à compter de 1701 (à la faveur de la Grande Paix de Montréal), et ce, jusqu’à la fin du Régime français. Cette politique consistait à favoriser la paix entre les nations amérindiennes en jouant un rôle d’arbitre entre elles, afin de régler leurs conflits à l’amiable, dans la mesure du possible. Si cela était nécessaire, les Français s’engageaient aussi à combattre aux côtés de leurs alliés. Enfin, au cœur de l’alliance, les Français s’engageaient à répondre aux besoins de leurs alliés amérindiens en marchan- dises européennes, comme le ferait un bon père de famille. En échange, les Premières Nations alliées aux Français s’engageaient à les approvisionner en fourrures, à les accueillir parmi elles et à combattre à leurs côtés au besoin.

Lors du voyage de 1659-1660, Radisson et Des Groseilliers se sont retrouvés au milieu de milliers d’Amérindiens de nations différentes, dont plusieurs leur étaient inconnues et potentiellement hostiles, dans un territoire inexploré fort éloigné de la Nouvelle-France. À leur manière, ils ont pris l’initiative de proposer un renouvellement de l’alliance franco-amérindienne sur une base plus équitable et plus satisfaisante aux yeux des Amérindiens. Ils savaient que plusieurs d’entre eux étaient déçus des résultats de l’alliance avec les Français, à cause de l’effondrement de la nation huronne et du rapport de force qui favorisait désormais les Iroquois. C’est pourquoi le voyage de 1659-1660, et la redéfinition de l’alliance franco-amérindienne que proposaient Radisson et Des Groseilliers, est un tournant dans l’histoire de la Nouvelle-France. L’alliance franco-amérindienne s’en trouvera renforcée et son maintien à long terme, favorisé.

Dans les décennies suivantes, plusieurs autres personnages historiques vont alimenter le partenariat entre les Français et les Premières Nations. Un partenariat qui, bien qu’imparfait, s’avérera plus durable et plus équilibré que partout ailleurs dans les deux Amériques. Le rôle historique de Radisson et Des Groseilliers n’en demeure pas moins crucial, car il intervient à une période critique, et qu’il a l’avantage d’être bien documenté, grâce aux écrits de Radisson qui éclairent un pan généralement obscur de notre histoire.

Le rôle de ces deux aventuriers ne se limite donc pas à un important apport économique. Ils ont aussi apporté une contribution diplomatique significative en revalorisant l’image des Français auprès des Premières Nations, en consolidant l’alliance qui existait et en étendant l’influence française à de nouvelles nations et à de nouveaux territoires. Ils ont utilisé au maximum leur aura d’êtres extraordinaires venus d’un autre monde auprès des nations qui n’avaient jamais rencontré d’hommes blancs, tout en faisant preuve de qualités très appréciées des Amérindiens, comme l’endurance, le courage, l’éloquence, le talent de chasseur, celui de guerrier, et la capacité à s’exprimer dans leurs langues et de se conformer à plusieurs de leurs coutumes.

C’est ainsi que, par leur audace, leur clairvoyance, leur force physique et la force de leur caractère, Radisson et Des Groseilliers ont servi les intérêts de la Nouvelle-France et des Premières Nations qui s’étaient alliées aux Français. Leurs exploits témoignent de la réalité spécifique de la petite colo- nie française établie sur les rives du Saint-Laurent, au 17e siècle, dont l’existence dépendait du main- tien d’étroites relations avec les Amérindiens.

L’année des surhommes, et plus généralement les trois tomes des Aventures de Radisson sont des romans qui respectent fidèlement les faits historiques et les grands enjeux des années 1650-1660, tant en Nouvelle-France que dans les territoires habités par les Premières Nations qui étaient en contact avec les Français. J’espère ainsi mieux faire connaître, comprendre et surtout aimer un volet méconnu de notre histoire.

Martin Fournier, Historien, Ph. D.